Saviez-vous que le Québec a la réputation d'être l'un des endroits les plus contaminés par la pollution lumineuse au monde?
Des observations satellites indiquent que Montréal qui a une population de 1,9 million (2010) envoie autant de lumière vers le ciel que New York qui a une population de 8,2 million(2010)… tirez-en vos propres conclusions. Vive le pays de l'électricité à faibles coûts!
De plus, selon l'IDA (International Dark Sky Association) :
-
On estime que 22 000 GW-h (1 Gigawatt = 1 000 x 1 million de Watt !!!) sont perdus a éclairer le ciel aux États-Unis chaque année. À 0.10$ par kW-h, ceci réprésente un gaspillage de 2.2$ milliards par année. Si on inclue l'éclairage éblouissant horizontal (qui ne sert strictement à rien et qui dérange en plus!), ça frôle les 3$ milliards par année!
-
Le Québec quant à lui gaspille 1 000 GW-h annuellement...ce qui représente une dépense inutile d'environ 100M$ par année.
-
Selon les évaluations, aux États-Unis on a besoin de 3 412 BTU d'énergie pour générer 1 kWh d'électricité. Une tonne de charbon donne 20.1 million de BTU et un baril de pétrole quant à lui donne 5.8 millions de BTU. Donc, 3.6 millions de tonnes de charbon, ou 12.9 millions de barils de pétrole, sont gaspillés à éclairer le ciel aux États-Unis chaque année! Ce gaspillage représente environs 458.1 millions de gallons d'essence. (En litres, ceci représente 1.73 milliards de litres d'essence). Et vive les GES (Gaz à effet de serre)!
En réalité, plusieurs sources différentes d'énergie sont utilisées aux États-Unis (nucléaires, hydroélectricité, etc.) mais ces chiffres sont présentés pour fins de comparaison.
Heureusement, depuis quelques années maintenant, des mesures sont prises un peu partout au Québec pour tenter de protéger le ciel nocturne. Le comité de la pollution lumineuse du club d'astronomie de Dorval veut également faire partie de cette démarche afin de tenter de laisser un avenir plus propre aux futures générations. Notre défi sera de motiver la municipalité de Dorval pour qu'elle puisse elle aussi emboîter le pas dans cette direction. La ville de Dorval pourrait sortir gagnante en s'impliquant dans ce processus. Nous parlons ici d'une économie d'énergie considérable et du même coup d'une amélioration de l'environnement pour les contribuables ainsi que pour toutes les espèces vivantes qui se retrouvent sur le territoire de la cité de Dorval, sans compter les bienfaits d'avoir un ciel dans toute sa majesté naturelle.
Pourquoi éclaire-t-on autant?
Aujourd'hui, hommes et femmes vivent et travaillent la nuit comme le jour, et il est devenu indispensable d'éclairer les villes. Puisque le coût relativement faible de l'énergie n'a jamais véritablement favorisé la définition et l'instauration de bonnes pratiques d'éclairage, on assiste à une surenchère lumineuse qui va bien au-delà des simples besoins de voir et d'être vu.
Faute d'une réflexion réelle sur les raisons qui poussent à éclairer au point où il n'y a presque plus de limite entre le jour et la nuit, on justifie l'usage abusif de lumière en invoquant la satisfaction du besoin de sécurité, la promotion commerciale ou encore la mise en valeur du patrimoine architectural et naturel.
Il existe aujourd'hui un vaste choix de luminaires. Certains contribuent énormément à la surenchère lumineuse alors que d'autres sont conçus pour minimiser la consommation d'énergie. Pourquoi ne pas changer nos habitudes et bénéficier pleinement des avantages des nouvelles technologies pour réduire simultanément la pollution lumineuse et le gaspillage d'énergie? Il est possible de faire de la promotion commerciale et de la publicité en utilisant de bons luminaires et en éclairant sobrement.
Il est temps d'apprivoiser à nouveau la nuit et d'apprendre à s'y sentir en sécurité sans éclairer au-delà des besoins réels. Changeons nos habitudes en profitant des principes qui obéissent à un principe d'économie de lumière, d'énergie et d'argent!
Et alors! On aime ça la lumière!
Comme tous les gestes que nous posons de façon excessive et irréfléchie, à long terme ils causent inévitablement des problèmes. Dans le cas de la pollution lumineuse, nous commençons seulement à évaluer la portée de ces problèmes.
Gaspillage d'énergies
Au Québec, zone géographique réputée pour générer le plus de lumière par habitant au monde, les économies qui pourraient résulter d'une meilleure gestion de l'éclairage sont estimées à plus de 1 000 GW-h annuellement, ce qui représente l'énergie consommée par environ 30 000 maisons chauffées à l'électricité. Tout ce gaspillage coûte quelques 100 million de dollars par an!
En 1997, à la demande d'un regroupement d'astronomes, des observations spécifiques destinées à l'étude de la pollution lumineuse ont été réalisées par les satellites météorologiques militaires DMSP de la US Air Force, donnant lieu au premier Atlas de la pollution lumineuse. Ces images ont permis d'analyser la luminosité du fond du ciel. La carte ci-dessus dresse un portrait de la situation dans l'est de l'Amérique du Nord. Les différentes couleurs représentent les degrés de pollution lumineuse selon l'échelle de Bortle dont la légende se trouve dans le tableau ci-dessous.
(Cinzano, Falchi & Elvidge 2001; Isobe, Hamamura & Elvidge)
La nuit est essentielle à la vie
De tout temps, les êtres vivants ont su tirer parti des bienfaits offerts tant par les environnements diurnes que nocturnes. Il n'est donc pas surprenant que la pollution lumineuse, qui se traduit littéralement par la disparition de la nuit, puisse avoir des incidences néfastes sur la santé humaine ainsi que sur la faune et la flore.
Les conséquences de l'éclairage permanent sur les êtres vivants sont encore peu connues, mais un consensus ressort des études réalisées à ce jour : la nuit est essentielle à la vie.
Quelques incidences sur la santé humaine
- Le sommeil demande la plus grande noirceur possible, car la mélatonine, hormone favorisant la réponse du système immunitaire, n'est sécrétée qu'en l'absence de lumière. Une réduction de la production de mélatonine a pu être associée à l'initiation et à la croissance de certains types de cancers qui affectent davantage les travailleurs de nuit. L'IDA a publié un article donnant davantage de détails à ce sujet.
- La mélatonine a aussi pour fonction de gérer les rythmes biologiques. C'est pour cette raison qu'une diminution de sa production provoque des troubles du sommeil.
- La lumière artificielle contribue à affaiblir la capacité d'adaptation de l'œil humain à la noirceur. Ceci a été remarqué chez les citadins, qui ressentent une certaine insécurité lorsqu'ils se promènent dans l'obscurité des campagnes.
Quelques incidences sur la faune et la flore
L'incidence de l'éclairage abusif sur la faune et la flore est encore peu connue. Biologistes et écologistes ont néanmoins fait consensus sur les points suivants :
- L'éclairage artificiel trouble les rythmes biologiques en déréglant les processus hormonaux qui contrôlent l'horloge interne des plantes et des animaux ;
- Des espèces dites lucifuges, qui sont généralement des espèces nocturnes et/ou vivant sous la terre, sous les écorces, etc., fuient la lumière même durant la nuit ;
- La lumière excessive des grandes agglomérations et des littoraux très éclairés perturbe le sens de l'orientation des oiseaux migrateurs. Ceux-ci se tuent par millions sur des superstructures telles que les ponts, les immeubles, etc.
- La plupart des animaux aux mœurs nocturnes sont perturbés par l'éclairage artificiel, au point parfois de disparaître de leur habitat naturel lorsqu'il est éclairé.
- Plusieurs insectes, attirés par la lumière, sont directement tués par les ampoules non protégées ou sont mangés par des prédateurs qui les trouvent ainsi plus facilement. Ceci engendre un déséquilibre dans la chaîne alimentaire.
Pour de plus amples renseignements, le livre "Ecology of the Night" est une revue de littérature des recherches effectuées sur le sujet, dont on peut lire le résumé dans la publication "Ecological Light Pollution" parue dans la revue de l' "Ecological Society of America"
La lumière affecterait la chimie de l'atmosphère
Plusieurs études récentes tendent à démontrer que la lumière artificielle a un impact néfaste sur la chimie même de l'air, ce qui nous affecterait évidemment tous directement de par l'air que nous respirons à chaque instant!
En résumé
En citoyen responsable, on doit faire notre part. La meilleure façon de comprendre les impacts de nos actions aux quotidiens est certainement de rester à l'affut des dernières nouvelles afin de pouvoir se former une opinion éclairée et ainsi influencer positivement notre entourage.
Il est important d'agir afin de protéger notre environnement et notre ciel!
Notez que ce texte a été examiné par le Dr. René Racine, Université de Montréal, en novembre 2011.