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Les petits corps du système solaire


Sommaire
Les Astéroïdes
Les astéroïdes géocroiseurs
Quelques astéroïdes menaçants au cours du siècle
Les comètes
Les objets de Kuiper
Evaluation du risque
Prévenir le risque
Qui fait quoi ?


Notre Système Solaire est apparu il y a environ 4,600 milliards d'années. Il s'est formé à partir d'un nuage de gaz et de poussières qui s'est effondré sur lui-même, probablement sous l'influence d'une onde de choc consécutive à l'explosion - super nova - d'une étoile en fin de vie. 98% de la matière du nuage se sont concentrés pour donner le soleil alors que un peu moins de 2% ont construit les 9 planètes et leurs satellites. Le reste s'est aggloméré en une multitude de petits corps, les astéroïdes, les comètes et les objets de Kuiper.

Schéma


Les Astéroïdes

Ils ont été formés dans les régions internes du système solaire et gravitent dans l'espace compris entre Mars et Jupiter, la ceinture d'astéroïdes qui s'étend sur une bande de 2 à 3,5 UA (unité astronomique égale à la distance Terre/Soleil soit près de 150 millions de km).
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Les planétoïdes résiduels qui les constituaient (corps parents) ont été détruits à la suite de fréquentes collisions et les fragments se sont en partie ré-agglomérés. Il existe probablement plusieurs centaines de milliers d'astéroïdes fils regroupés majoritairement dans la ceinture principale. 80000 seulement sont connus (fichier du Minor Planet Center, 2003) et 3000 ont été observés avec précision.

Quelques exemples :
  • Ceres, le plus gros, 1000 km de diamètre environ, découvert le 1er janvier 1801 par Guiseppe Piazzi depuis l'observatoire de Palerme;
  • Eros 433, photographié en 1975, taille : 7 x 12 x 30 km;
  • Toutatis, astéroïde double découvert par une équipe française (dont Alain Maury) à l'observatoire de la Côte d'Azur ; il s'approche de la Terre tous les quatre ans à quelques millions de km ; mesure 6,5 km dans sa plus grande dimension;
  • Gaspra, survolé et photographié par la sonde Galileo le 29 octobre 1991 ; taille : 19 x 12 x 11 km;
  • Ida, survolé et photographié par Galileo le 28 août 1993 ; taille : 56 x 30 km, possède un minuscule satellite, Dactyle de 2 km de diamètre qui gravite à une centaine de kilomètres de l'astéroïde.
  • Mathilde 253, supposé de nature chondritique carbonnée, il a été survolé et photographié par la sonde NEAR, le 27 juin 1997. Il mesure 66 x 48 x 46 km;
  • AnneFrank, survolé et photographié le 2 novembre 2002 par la sonde Stardust.

Astéroïde Ida
Ida
Astéroïde Eros
Eros

Ces astéroïdes présentent des surfaces criblées d'impacts et des formes martyrisées par les collisions et modelées lors de chocs géants destructeurs. A la suite de ces collisions, des fragments partent sur des trajectoires elliptiques qui peuvent recouper l'orbite de la Terre.

Les astéroïdes géocroiseurs.

L'exploration du Système solaire avec le programme Apollo dans les années 1960-1970 apporte un bouleversement énorme dans la connaissance des planètes. Elle démontre que le cratère d'impact est la structure géologique la plus fréquente du Système solaire et que les impacts ont constitué un phénomène majeur à son origine. C'est à partir de l'étude des cratères lunaires et de leur datation que l'on sait que les planètes ont subi un bombardement intensif de petits corps il y à 4,5 milliards d'années, suivi d'une décroissance très rapide des collisions. Il fut établi que le système Terre-Lune a subi un bombardement incessant de comètes et d'astéroïdes depuis 3 milliards d'années. Cette constatation va déclencher, à partir de 1973, le développement de programmes d'observations pour rechercher et répertorier les astéroïdes dont l'orbite est susceptible de recouper celle de la Terre, les astéroïdes géocroiseurs. Les découvertes vont ainsi se multiplier. On peut classer aujourd'hui les géocroiseurs, en fonction de leurs propriétés orbitales, en trois catégories : A la fin de 2003, 2300 objets ont été reconnus géocroiseurs, dont 547 qualifiés P.H.O. (Potentially Hazardous Objects ou objets potentiellement dangereux). Les P.H.O. sont des astéroïdes de 100 m à 2 km de diamètre dont l'orbite passe à moins de 7,5 millions de kilomètres de la Terre. Il a aussi été mis en évidence que des groupes d'astéroïdes présentent des propriétés spectrales et orbitales similaires, formant ainsi de véritables «  familles ». Celles-ci seraient les témoins de collisions entre gros objets dans la ceinture principale d'astéroïdes. Aujourd'hui, on connaît une vingtaine de ces familles. La simulation par ordinateur de collision majeure entre gros astéroïdes permet de reconstituer le processus de formation de telles familles et d'appréhender les propriétés physiques des corps les plus gros qui les constituent. Le processus semblerait se dérouler en deux temps :
Simulation de ré accumulation ( © Patrick MICHEL )
1
2
3
Simulation de ré accumulation ( © Patrick MICHEL )
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Simulation de ré accumulation ( © Patrick MICHEL )

Différents indices suggèrent que plusieurs astéroïdes, de quelques centaines mètres et même beaucoup plus, ne soient que des « tas de cailloux » agglomérés et liés par la gravitation. Ce type de structure pourrait expliquer la faible densité de quelques astéroïdes, tel (253) Mathilde observé et survolé par la sonde NEAR en 1998. Sa densité observée est de 1,35, ce qui suggère que ce corps comporterait des vides dans sa structure interne.

Astéroïde 253 Mathilde
Astéroïde 253 Mathilde


Quelques astéroïdes menaçants au cours du siècle :

Désignation Date du passage au plus près Distance
à la Terre
en millions
de km
4179 Toutatis, long. 6,5 km
2000 UG 11
1999 AQ 10
1999 MN
1998 HH 49
1999 AN 10, diam. 1 km
2001 WN 5
1997 XF 11, diam. 2 km
2000 QK 130
2002 NY 40
2001 WN 5
2001 AD 2
1999 DB 7
1988 TA
2002 CY 9
4660 Nereus, diam. 3,2 km
1999 RQ 36, diam. 2,2 km
2001 QQ 142
2340 Hathor, diam. 2,6 km
2002 LV
1999 JU 3
2002 CU 11
2340 Hathor
1999 VP 11
2000 WO 107
1998 SC 15, diam. 3,2 km
1997 XF 11
29 septembre 2004
9 novembre 2008
18 février 2009 
2 juin 2010
17 octobre 2023
7 août 2027
25 juin 2028
26 octobre 2028
15 mars 2036
11 février 2038
26 juin 2039
3 avril 2046
28 février 2048
1 octobre 2053
25 janvier 2055
14 février 2060
22 septembre 2060
13 décembre 2062
21 octobre 2069
3 août 2076
6 décembre 2076 
31 août 2080
21 octobre 2086
22 octobre 2086
30 novembre 2093
8 avril 2095
27 octobre 2095
1,554
1,365
1,775
1,144
1,178
0,398
0,655
0,934
1,736
1,132
0,223
1,688
1,185
1,545
1,529
1,202
0,832
1,661
0,990
1,072
1,571
0,641
0,896
0,904
1,182
1,596
1,719


Les comètes

Principalement composées de glace et de poussières, elles sont nées dans les zones externes du Système solaire qui présente une abondance de composés légers et de gaz. Elles sont contenues dans d'immenses réservoirs, la ceinture de Kuiper, au-delà de Neptune et située à 30 à 100 UA du soleil, qui contiendrait environ 100 millions de comètes d'un diamètre supérieur à 10 km (comètes à courte période); le nuage de Oort, qui forme un cocon presque sphérique autour du Système solaire et centré sur le soleil à une distance de 20000 à 100000 UA ; Le nuage de Oort renfermerait au moins 1000 milliards (10¹²) de comètes (comètes à longue période).
Leurs orbites passent dans la région où gravitent les grandes planètes gazeuses, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune. Leur taille est de l'ordre de quelques kilomètres à plusieurs dizaines de kilomètres. Certaines pourraient même atteindre 1000 km ! Lorsqu'elles approchent du soleil, elles s'échauffent et s'entourent d'une auréole de gaz et de poussières. Les poussières éjectées forment une queue diffuse caractéristique qui s'allonge dans l'espace sur des millions de kilomètres.

Quelques exemples :
  • comète de Halley, redécouverte par Edmund Halley en 1682. Elle revient tous les 76 ans et son dernier passage a été celui de 1986 au cours duquel elle a été photographiée par la sonde européenne Giotto. Elle repassera en juillet 2061 ;
  • comète Hyakutake, découverte le 30 janvier 1996 et bien visible à l'½il nu une partie du mois de mars 1996 ;
  • comète Hale Bopp, découverte par deux astronomes amateurs américains le 23 juillet 1995. Elle a fait le bonheur de millions de personnes grâce au magnifique spectacle nocturne qu'elle a offert en déployant son panache lumineux de février à avril 1997 ;
  • comète Wild 2, elle fait l'objet de la première mission spatiale exclusivement réservée à l'étude d'une comète, la mission Stardust (poussières d'étoiles) de la NASA. Lancée le 7 février 1999 , Stardust s'est approchée le 2 janvier 2004 à 500 km du noyau de cette nouvelle venue dans le système solaire interne. La sonde a photographié la comète tout en effectuant des analyses chimiques des gaz et des particules et en a récupéré des échantillons en traversant la queue sur 240 km. Les échantillons seront ramenés sur Terre où ils arriveront en 2006.


Les objets de Kuiper.

Ce sont de petits corps en orbite autour du Soleil situés au-delà de Neptune. C'est en 1992 que David Jewitt et Jane Luu ont découvert le premier de ces objets que l'on appelle « transneptuniens (TNOs) ». Leur existence avait été prédite par l'astronome Gérard Kuiper (1950).Ils représentent les corps les plus primitifs, reliquat de la formation du Système Solaire et suscitent un grand intérêt dans diverses communautés de planétologues. Leur recherche et leur étude nécessitent l'utilisation de caméras CCD à grand format et de très grands télescopes.
Depuis 1992, plus de 400 TNOs ont été découverts et le nombre total d'objets de Kuiper d'un diamètre supérieur à 5 km est évalué à 800 000 000.

Schéma du système solaire externe projeté sur l'écliptique
© Michel FESTOU,obs. Midi-Pyrénées

Certains de ces objets sont piégés dans une zone de résonance 3 : 2 avec Neptune et leurs caractéristiques dynamiques sont proches de celles de Pluton, d'où leur nom de « Plutinos » . Ils représentent plus de 10% des TNOs détectés.
D'autres ont des orbites situées entre celle de Jupiter et de Neptune et ont été nommés « Les Centaures ». Une vingtaine sont connus et leur taille est comprise entre 10 et 400 km. 2060 Chiron, découvert en 1977, est considéré comme le premier Centaure de la liste. En termes dynamiques, les Centaures sont aux objets de Kuiper ce que les Géocroiseurs sont pour la ceinture principale d'astéroïdes. Leur étude dynamique suggère qu'ils seraient l'étape intermédiaire entre la ceinture de Kuiper et les comètes à courte période. Leur nombre est évalué autour de 10 000 000.

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Evaluation du risque

La recherche a démontré que les géocroiseurs sont des astéroïdes de 2éme génération issus de collisions destructives de corps dit « parent » dans la Ceinture d'astéroïdes. Ils ont une durée de vie limitée à quelques millions d'années seulement avant qu'ils ne se précipitent, pour le plus grand nombre, sur le Soleil, qu'ils soient éjectés du Système solaire ou, pour une minorité, qu'ils se fracassent sur une planète interne. La logique voudrait donc que le nombre de géocroiseurs diminue continuellement et, parallèlement, la menace qu'ils représentent. Or, il n'en est rien ! En effet, le cycle collision-production-disparition recommence, renouvelant les générations de géocroiseurs, maintenant ainsi la stabilité de leur population. L'épée de Damoclès reste toujours suspendue au-dessus de notre tête. Exemples :
Le 14 juin 2003, l'astéroïde 2002 MN est passé à 120000 km de la Terre et n'a été détecté que 3 jours après ! Le 27 septembre de la même année, 2003 SQ 222, petit astéroïde de 3 à 6 mètres, a frôlé notre planète à 88000 km mais n'a été vu que le lendemain de son passage ! Je voudrais rappeler, pour comparaison, que la distance Terre-Lune est, en moyenne, de 384402 kilomètres ( mesure avec un rayon laser faite le 4 octobre 1998).
Mais il faut savoir que la fréquence des impacts est en rapport avec la taille des astéroïdes : elle diminue sensiblement quand la taille de ceux-ci augmente. On peut alors pronostiquer le risque et le résumer dans le tableau suivant :

Fréquence Taille
5 m à 10 m
10 à 50 m
50 à 100 m
150 m à 1 km
1 km
5 km
5 à 10 km
Environ 8 fois par an
1 fois par siècle
1 fois tous les 1000 à 10000 ans
1 fois tous les 10000 à 200000 ans
tous les 300000 ans
1 fois tous les 10 à 30 millions d'années
1 fois tous les 100 millions d'années

Les scientifiques ont établi une échelle de risque, inspirée de l'échelle de Richter pour les séismes, l'échelle de Turin. Une valeur est attribuée aux géocroiseurs en fonction de leur taille, de leur vitesse et de leur orbite. L'échelle de Turin va de 0 (risque quasi nul) à 10 (risque maximal, catastrophe globale).

Prévenir le risque

Il n'existe aucune technologie suffisamment fiable pour se défendre contre un risque d'impact aujourd'hui. Cependant, on peut imaginer une parade qui consisterait à intercepter le bolide à une distance la plus lointaine possible de la Terre. Deux solutions sont envisageables : soit le pulvériser en s'assurant que les fragments éviteront la Terre, soit le dévier de sa trajectoire. Mais, dans les deux cas, cela suppose que l'on dispose d'un délai suffisant et d'une connaissance parfaite des propriétés physiques du corps menaçant afin de mettre en ½uvre les moyens appropriés.
A partir de la détection d'un géocroiseur reconnu de risque 8 à 10, il faut disposer d'un délai d'intervention qui peut aller de quelques mois à quelques années, voire à plusieurs décennies.
La détection rapide de tous les astéroïdes potentiellement dangereux doit donc devenir un objectif important pour les années à venir. Il nécessite d'en faire l'inventaire le plus complet possible, puis de les surveiller afin de s'assurer qu'aucune menace réelle n'existe à cours et à moyen terme. Il faut, enfin, bien connaître la nature de ces objets, agrégats ou corps massif, pour agir avec le maximum d'efficacité.
Ces deux objectifs sont essentiels en matière de prévention.
Au niveau mondial, des équipes scientifiques pluridisciplinaires conjuguent leurs efforts et leurs travaux pour relever ce défi.

Qui fait quoi ?

L'Union astronomique internationale a formé en 1991 un groupe de travail pour évaluer le risque que constituent les impacts de météorites. Puis, en 1996, a été créée la fondation Spaceguard chargée de coordonner au niveau international les travaux effectués dans ce domaine.

Aux U.S.A., la Nasa, depuis 1999, s'est montrée soucieuse de prévenir la menace d'un bolide dévastateur et finance des programmes de recherche. L'U.S. Air Force finance en partie les programmes LINEAR (Nouveau Mexique), NEAT (Hawaï) et Spacewatch (Arizona) concernant les objets de 1 km et plus de diamètre. Dans un rapport de septembre 2002, la Nasa souhaite que la recherche s'oriente aussi sur les astéroïdes de 100 à 500 m. Ils représentent en effet le risque majeur de collision avec la Terre avec une probabilité de 20% sur une période de 100 ans (1 fois tous les 500 ans) et des effets catastrophiques. Il faudrait trouver 90% de ces astéroïdes au cours des 10 prochaines années. L'agence propose un budget de 5 à 6 milliards de dollars pour les 25 ans à venir et souhaite que d'autres pays participent au financement de la recherche.

En Europe, la résolution 1080 du 20 mars 1996 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe prend en considération le risque lié aux impacts « Le volume considérable d'informations qu'on a rassemblé ces dernières années sur les collisions d'astéroïdes et de comètes indique que celles-ci peuvent provoquer des catastrophes écologiques à grande échelle et à long terme entraînant parfois la disparition totale d'espèces.[...]Bien que, d'un point de vue statistique, le risque de collisions majeures soit faible à court terme, leurs conséquences éventuelles sont si énormes qu'il faut encourager tous les efforts visant à minimiser le risque. L'Assemblée invite les gouvernements des Etats membres, [...] et l'Agence spatiale européenne, à favoriser la mise en place et le développement de cette fondation de veille spatiale [...] et de contribuer à l'élaboration d'une stratégie mondiale à long terme de réaction en cas de possibilité de collision. ».

L'Agence spatiale européenne (ESA) a financé plusieurs études de missions (EUNEOS, Earthguard, Remote Observation of NEOs from Space, SIMONE, ISHTAR, Don Quijote) ; Don Quijote concerne l'étude de la structure interne d'un astéroïde et l'expérimentation d'une technique de détournement sans arme nucléaire. Ces projets ont fait l'objet d'appel d'offre.

En France, des équipes scientifiques pluridisciplinaires mènent des activités de recherche sur les géocroiseurs et les risques d'impact avec la Terre. Ces activités sont regroupées dans trois domaines : les observations, les analyses et les expériences de laboratoires, et la modélisation théorique. L'ensemble des compétences a été regroupé dans un projet de recherche dans le cadre du nouvel appel d'offre A.C.I. risques naturels.


Claude MARCHAT, exposé du 4 juin 2005, A.D.A.E/S

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