Les Rencontres du Ciel et de l'Espace le 13 novembre 2010

Elles sont rares les occasions de réunir à grande échelle les professionnels du ciel (matériel et chercheurs) et les passionnés d'astronomie. Tous les 2 ans les rencontres de Ciel et Espace relèvent ce défi par un événement unique en Europe par sa qualité, sa diversité, son cadre et son ampleur.

Ces rencontrent permettent de faire le tour de l'actualité du ciel avec ceux qui chaque jour, scientifiques et industriels construisent une histoire qui nous fait rêver.

Prés de 150 conférences et ateliers ainsi qu'un salon du loisir astronomique très fourni se dérouleront durant ces 4 jours pour la plus grande satisfaction des amateurs débutants et initiés.

Le club d'astronomie ADAES ne pouvant pas passer au travers de ces rencontres passionnantes était présent comme en 2008.

La galerie commerciale de 1000 m² propose des stands de nombreux exposants avec des télescopes et des lunettes rivalisant en diamètres et en innovations, fruits des techniques de plus en plus poussées des observatoires professionnels. Revers de la médaille, il est très difficile de pouvoir se renseigner auprès des conseillers, submergés par une foule curieuse et envahissante. Les RCE sont-elles victimes de leur succès ?

Il faut se rendre à l'évidence : les Rencontres de Ciel et Espace sont devenues une des plaques tournantes et un enjeu capital pour le commerce du matériel d'astronomie ; comme dans tous les secteurs de l'économie mondiale la guerre fait rage entre tous les constructeurs et distributeurs d'optique et autres matériels en relation avec le ciel. Ce n'est donc pas un hasard de croiser dans les allées les représentants de marques majeures comme David Nagler (Televue), Roland Christen (Astrophysics), Markus Ludes (APM Télescopes), Rui Tripa et Steve Chambers (Atik) ainsi que plusieurs Ingénieurs de chez Takahashi très occupés à photographier les stands de concurrents. Les plus grandes pointures du monde amateur sont également présentes, en particulier Thierry Legault, Christian Arsidi, Laurent Laveder, Christian Buil et autres Nicolas Outters.

Des professionnels du voyage côtoient les étalages des libraires, le stand de l'Observatoire de Paris ou bien une exposition de photos amateurs d'une rare beauté.

Si les hommes depuis leur origine scrutent le ciel au-dessus de leurs têtes pour tenter de comprendre et d'expliquer leur univers, d'autres fouillent sous leurs pieds à la recherche de météorites, preuve que parfois le ciel nous tombe sur la tête; au grès du hasard il nous gratifie de rencontres violentes, parfois meurtrières mais aussi pleines d'enseignements. Une très belle collection est présentée avec en particulier un superbe spécimen découvert dans les entrailles du Météor Crater en Arizona.

Une grande braderie, véritable caverne d'Ali Baba est aussi organisée dimanche matin. Les chineurs avertis ont l'occasion de fouiner la bonne affaire, les vendeurs vantent les qualités des produits proposés, on échange, on discute...

Dans 7 salles différentes et de façon simultanée se succèdent des ateliers et des conférences, animés pour certains par des amateurs, pour d'autres par des professionnels. De nombreux sujets sont abordés avec en particulier l'astrophotographie de plus en plus prisée par les amateurs. En effet les nouveaux matériels, la précision du suivi accrue par l'autoguidage, la qualité des logiciels de traitement permettent maintenant d'obtenir une beauté d'images inégalée.

Les nouveaux instruments permettent aussi de faire de la spectroscopie de précision ; cette discipline est maintenant en vogue dans le milieu amateur ainsi que dans les lycées et collèges. L'analyse de la lumière des astres autrefois réservée à une élite est maintenant à la portée de tous.

Il faut souligner enfin que la pollution lumineuse, un des fléaux des temps modernes était au centre de nombreux débats, pas moins 10 tables rondes et conférences lui étaient consacrées. De ce côté là ça bouge, une réelle prise de conscience se développe, les amoureux du ciel ne s'en plaindront pas.

Deux salles de grande capacité étaient réservées aux conférences animées par les professionnels de l'astronomie.

C'est à Hubert Reeves, honneur oblige, d'ouvrir les 7ème rencontres du Ciel et de l'Espace par une conférence sur les l'origine des rayons cosmologique devant une salle bondée. Comme à son habitude c'est simple, c'est clair, ça coule de source !

Un peu plus tard une autre star montera sur scène, l'intarissable André Brahic. Monté sur pile, un débit intense, des formules chargées d'humour, il nous parle avec enthousiasme de son amour de toujours, la planétologie. Pour cette fois ce seront les planètes géantes, en particulier Saturne et la mission Cassini.

On citera également la passionnante conférence de Daniel Prieur qui dirige le centre d'océanographie et de biologie marine du CNRS à Roscoff On pensait jusqu'à ces dernières années que la biosphère s'étendait sur la terre ferme et sur quelques dizaines de mètres en dessous du niveau des mers, or il n'en est rien. C'est en effet à plusieurs kilomètres sous la surface de la mer, en l'absence totale de rayons solaire, sous des pressions gigantesques et par des températures très basses qu'une vie très active se multiplie et nous est révélée. Le conférencier fait aussitôt le parallèle avec une possible vie ailleurs, loin de chez nous, dans des conditions extrêmes. La pensée du monde scientifique évolue très vite et de façon palpable, les certitudes de vie ailleurs s'affirment malgré l'absence de preuves.

Nous ne passerons pas en revue toutes les conférences, certaines d'ailleurs avaient un intérêt limité, mais une dernière a retenu notre attention car l'intervenant, Yves Sirois nous a entraînés avec brio dans un monde complexe pour les non initiés: celui des particules élémentaires.

Ce physicien du CRNS, responsable de projet au LHC nous guide tout d'abord dans le labyrinthe de ce souterrain de 27 km de circonférence sous la frontière franco-suisse et nous présente les enjeux des défis à relever par le LHC. Le monde scientifique nourrit de très gros espoirs pour découvrir grâce aux très hautes énergies, la nature intime de la matière, son comportement aux premiers instants de l'univers et enfin définir la consistance de la matière noire. Ce projet ambitieux est innovant mais comme le rappelle Yves Sirois, on n'a pas inventé l'ampoule en améliorant la bougie ni le web en améliorant les livres.

Un débat animé par Alain Cirou sur le thème de la cohabitation des sciences et des sciences fictions permettait aux intervenants de se projeter sur les perspectives de l'année 2050 faites d'espoirs et de craintes. Nous passons en effet de l'ère de l'artisanat scientifique à l'industrialisation des projets avec pour conséquences des coûts exponentiels des missions du futur. La mutualisation mondiale de ces projets semble inévitable pour réunir les fonds nécessaires, mais l'homme sera-t-il assez sage pour faire passer l'intérêt collectif avant l'intérêt particulier ?

Ces rencontres ont permis à chacun de satisfaire sa curiosité; chacun bien sûr a dû faire le tri dans les dédales de toutes ces expositions et animations proposées, parfois les choix n'étaient pas simples.

Les plus pessimistes diront qu'il y avait trop de monde, les plus optimistes trouveront un réconfort de voir cette foule partager une même passion, mais tous conviendront qu'un tel rassemblement restera indispensable au monde de l'astronomie. Nous attendrons avec impatiente les RCE de 2012.

Alors le rendez-vous est pris.

André Bordes

Photos : André Bordes, Sylvain Greffier, Daniel Magarian