Télescope Dobson 500




D = 500 mm
F = 2000 mm
F/D = 4
Magnitude limite théorique = 15,6
Pouvoir séparateur théorique = 0,24"
Poids total = 77,7 kg

La fièvre du diamètre... toujours plus gros, toujours plus de lumière... voilà la maladie dont j'ai été atteint après 6 ans d'observation au T300. Les symptômes m'ont infesté progessivement, besoin de voir plus de détails, besoin de voir plus d'objets. Pour me soigner, le seul traitement possible passait par un changement d'instrument avec augmentation conséquente du diamètre. Je me suis donc mis en tête de trouver un successeur à ce 300, devenu trop petit pour satisfaire ma gourmandise.
Mes contraintes d'observateur nomade m'ont conduit à choisir un 500, diamètre maximal encore à "taille humaine" si je souhaitais rester à F/4. Ainsi, après m'être posé beaucoup de questions, je récupèrerai en 2011 un télescope Dobson de 500 mm de la marque SkyVision.
J'opterai pour un modèle "Classique" fabriqué en aluminium, bois et carbone, car le bois est un matériau très absorbant au niveau des vibrations et se révèle être un atout en termes de stabilité. Je choisirai également une version motorisée avec suivi et Goto afin de profiter au maximum de cet instrument de longue focale.


• Sur le plan mécanique :

- la cage secondaire : c'est une cage double anneau, profonde, faite en aluminium. Elle pèse 6,0 kg (sans oculaire ni chercheur). Les 2 anneaux sont solidarisés par 7 tubes courts en carbone, et une tablette en alu qui sert de support au porte-oculaire (toujours un magnifique Feather Touch 2" dont je ne peux plus me passer). L'araignée à 4 branches porte le support du secondaire, qui est une superbe pièce usinée permettant la collimation du secondaire sur 2 axes en toute simplicité avec 2 molettes, comme sur mon ancien 300. Le miroir secondaire est protégé en dehors des observations par une petite housse en tissu. Enfin, la cage porte un petit QuickFinder et contient un baflage interne en PVC que je complèterai par une découpe de mousse pour un contraste optimal.
- le tube serrurier, composé de 8 tubes en carbone reliés en accordéon, se fixe avec des attaches-rapides. Il pèse 3,7 kg.
- la caisse primaire, en bois traité, renferme le miroir, son barillet à 18 points (avec 6 triangles de flottaison), collimatable par le haut, et 2 ventilateurs aspirants avec effet Coandă, fonctionnant sur batterie 12 V. Elle pèse 43 kg avec le primaire. Elle se referme par un couvercle cylindrique en bois permettant de protéger le primaire en dehors des observations.
- les tourillons : largement aérés, ils sont en bois recouvert d'une couche de carbone. Leur mouvement se fait par friction, téflon / FRP. Le tourillon de droite porte l'encodeur en altitude du Sky Commander. Celui de gauche reçoit la motorisation par un système de câble. Ils sont démontables mais finalement, ce n'est pas ce qui prend le plus de place.
- le rocker est également en bois traité. Il pèse 25 kg. Il contient toute l'électronique de la motorisation. Les mouvements azimuthaux se font comme pour les tourillons par glissement téflon / FRP. L'entrainement horizontal est permis par un galet métallique qui vient appuyer sur la tranche de la base circulaire.
D'un bout à l'autre du scope, la finition est impeccable.

Au niveau motorisation, le suivi et le Goto sont assurés par deux systèmes jumelés, le ServoCAT et le Sky Commander.
En début d'observation, la démarche d'initialisation est relativement simple. Dans le Sky Commander, on entre la date et on valide un alignement sur 2 étoiles, telescope débrayé. Puis on embraye la motorisation, en actionnant les 2 manettes rouges, et on allume le ServoCAT dans lequel on aura au préalable entré la latitude du lieu d'observation par une interface PC. Le télescope suit et est prêt à pointer tout object de la base du Sky Commander.
J'ai choisi ce système pour deux raisons. D'abord parce qu'il m'évitait de recourir à une table équatoriale, avec les tracas d'installation et de surélévation du scope qui vont avec. Ensuite, parce qu'il permettait de débrayer la motorisation à tout moment par simple action sur les manettes rouges pour des mouvements totalement libres, et pouvoir récupérer immédiatement les suivi et Goto en rembrayant les manettes, sans devoir refaire l'alignement initial.
En termes de précision, le résultat est bien adapté à du visuel. L'objet pointé est presque à chaque fois dans le champ de l'Ethos 21, exception faite pour les planètes dont la précision du pointage est beaucoup plus approximative, malgré une date bien réglée. Quel pied d'observer les planètes à 400X les mains dans le dos pendant de longues minutes... aller se prendre un petit chocolat chaud et 2 madeleines et retrouver la planète là où on la laissée. En revanche, on constate des dérives et des oscillations qui obligent à recentrer de temps en temps. Donc c'est une solution largement insuffisante pour la photographie, et ceci indépendamment de la rotation de champ.
Sinon le système est totalement silencieux à vitesse sidérale, sans aucune vibration, je déplore juste un peu de lenteur dans les mouvements les plus rapides. Se faire attendre, c'est se faire désirer dit-on... en tous cas j'y réfléchissais à 2 fois avant de pointer un objet de l'autre côté du ciel.
En mode débrayé, le scope est très agréable à utiliser, souple, fluide, stable, c'est un vrai régal. Pour un équilibre parfait il faut jongler avec quelques contrepoids (des haltères en mousse de chez Décathlon) à fixer sur la caisse primaire suivant la configuration sur le porte-oculaire. Avec l'habitude, je savais quel poids prendre pour tel oculaire, c'était presque réflexe. Cependant, lorsque la motorisation est enclenchée, l'embrayage empêche ce déséquilibre, mais je continuais à changer de contrepoids en fonction des oculaires pour éviter de faire forcer la mécanique.
Ensuite au niveau montage/démontage, ce télescope est vraiment bien pensé pour minimiser l'encombrement et les galères d'installation : le serrurier en accordéon, les attaches-rapides, la cage qui vient se ranger dans la caisse primaire, la brouette qui se fixe à même la fourche, toute l'électronique camouflée sous la caisse primaire... Le télescope se monte, se démonte et se transporte sans problème par une personne seule. Malgré tout, un 500, ça reste un 500, et chaque soirée d'observation se transforme vite en une expédition indigeste sans une sacrée dose de motivation.
En effet, le bestiau pèse près de 80 kg, et mesure en mode "rangé" 68 cm de large pour 73 cm de long et 75 cm de haut. Si on rajoute 15 cm de large de chaque côté en plus pour la brouette, la largeur passe à 98 cm. On ne passe plus les portes standard, on ne monte pas les escaliers. Et une fois dans la voiture, il ne reste de la place que sur la banquette passager. Le chargement en véhicule ne se conçoit qu'avec un hayon, et pour pouvoir me débrouiller seul je m'étais fabriqué 2 rails de chargement avec des planches longues renforcées.
Donc une soirée d'observation, ça voulait dire, enlever les sièges arrières du Teepee (Peugeot Partner), mettre les planches longues, charger le scope (fragiles du dos s'abstenir), se rendre sur le site d'observation, remettre les planches, descendre le scope en gardant son sang froid (cardiaques s'abstenir), installer et caler le rocker à l'horizontale, mettre le serrurier, monter la cage par dessus, pendant que les ventilateurs tournent à plein régime pour gagner de précieuses minutes, installer les baffles, dégrossir la collimation au laser, installer le chercheur, fignoler la collimation sur la polaire, régler le chercheur, allumer le Sky Commander, pointer 2 étoiles, et allumer le ServoCAT... Ouf, on est prêt à observer ! Et quand on a fini, il faut tout recommencer dans l'autre sens pour le retour. Ça se mérite !
On est donc très loin du 300 que je sortais vite fait, pour mater Jupiter 5 minutes avant d'aller dormir. C'est une autre philosophie, et elle aura raison de ma patience et de ma motivation après quelques années.

• Sur le plan optique :

Le miroir primaire est en pyrex, parabolique, de 20" de diamètre (510 mm de diamètre mécanique et 504 mm de diamètre optique, avec le double chanfrein). Il fait 48 mm d'épaisseur et pèse à lui seul 19,7 kg ! Il a été poli en 2011 et aluminisé haute réflectivité dans la foulée par Translux. C'est une magnifique réalisation et son bulletin de contrôle indique Lambda / 20,1 (PV) et Lambda / 72,6 (RMS).
Le miroir secondaire (de 100 mm de petit axe) est également en pyrex et vient de chez Antares Optics, Lambda / 30 (PV), traité haute réflectivité. L'obstruction centrale résultante est de 20 %.

En monoculaire, j'utilisais les oculaires suivants :
- Éthos 21 mm : 110X pour 54' de champ avec le Paracorr visuel
- Éthos 13 mm : 177X, avec le Paracorr
- Éthos 8 mm : 250X
- Pentax XW 5 mm : 400X
- Pentax XW 3,5 mm : 571X
- Lanthanum 2,5 mm : 800X

En bino, j'avais cette configration :
- Tête bino Télévue (Bino Vue), montée avec Powermate 2X ou 4X
- Panoptic 24 : 167X pour 23' de champ avec la PM2X, et 358X avec la PM4X
- Délos 17,3 mm : 231X (PM2X), et 497X (PM4X)
- Délos 14 mm : 286X (PM2X), et 614X (PM4X)

Les images délivrées par ce télescope étaient superbes. Un beau contraste, des étoiles bien piquées et bien rondes au star test lorsque tout était bien en température. Des aigrettes assez discrètes. On sentait bien le gain qu'apportait ce diamètre par rapport au 300. C'était un plaisir de redécouvrir les planètes et le ciel profond avec.
Les premiers temps, j'observais avec la jupe de protection pour abriter le primaire de la buée et avoir un contraste maximal. Mais j'ai rapidement laissé tomber parce que la présence de la jupe entraînait une déformation du star test pendant de longues minutes du fait d'un écoulement d'air chaud le long du haut de la jupe au lieu de s'échapper à l'extérieur du tube. Les plages défocalisées se retrouvaient écrasées à un pôle, en forme de D. Et finalement, après comparaison, le gain en contraste ou en protection de la buée n'était pas évident.
J'ai remarqué que les ventilateurs en marche entraînaient aussi une légère dégradation de l'image en faisant apparaître une petite turbulence rapide. Il valait mieux tout couper pour les observations à fort grossissement. En revanche, on ne détectait aucune vibration liée à la motorisation, juste quelques imperfections de suivi comme mentionné plus haut.
En planétaire, les détails que j'ai pu observer les quelques rares soirs de turbulence faible était hallucinants, indessinables, indescriptibles de richesse. Jupiter fourmillait et quelques détails d'albédo étaient même visibles sur Ganymède à partir de 500X.
En ciel profond, bon nombre de détails photographiques devenaient accessibles en visuel, des bras galactiques, des bandes d'absorption. On atteignait des étoiles de mag 15,5 environ, suivant les conditions de transparence et de turbulence. J'ai pu voir bon nombre d'objets encore jamais vus, des tonnes de galaxies faibles, ou encore Sirius B. Quant aux objets que je connaissais déjà bien, ils étaient plus généreux, plus détaillés et plus lumineux. Y a pas de secret, le diamètre est là...

J'aurais aussi découvert avec ce dobson le plaisir de l'observation binoculaire. Jusque là j'avais toujours été un peu réfractaire aux têtes bino. Mes quelques expériences dans les instruments des copains furent souvent décevantes : perte de lumière, grossissements élevés, dégradation des images avec des étoiles plus baveuses, des ombres volantes, voire même dans quelques cas impossibilité de fusionner les 2 images (probablement à cause de mon faible écart inter-pupillaire). Mais le jour où j'ai testé la bino de Télévue, j'ai vite retourné ma veste. Les images fusionnent sans effort, les étoiles restent fines. Et quel confort ! Notamment en planétaire où les détails les plus difficiles, qui n'apparaissent avec certitude en monoculaire qu'après quelques secondes de flottement, sont ici visibles d'emblée. De plus, par un phénomène surprenant, l'image observée en bino semble plus agrandie que son équivalent en monoculaire. C'est vraiment déroutant au début, et lors de mes premières observations en planétaire il a fallu que je contrôle le grossissement théorique sur un champ d'étoiles pour me convaincre qu'il n'y avait pas d'erreur. Observer à 200X en bino donne l'impression d'avoir le même grossissement qu'en mono à 300 ou 400X. Et les petites variations de grossissement sont ressenties de façon bien plus conséquentes qu'en mono. Du coup, ce n'est pas la même philosophie pour choisir ses oculaires. On n'a pas besoin d'une gamme de grossissements aussi étendue et les focales proches semblent moins redondantes. Quant à la Powermate 4X, elle n'a quasiment jamais servi...
J'ai également été très supris en ce qui concerne la perte de lumière. La luminosité est divisée par 2 ? Mais ce n'est pas du tout l'impression que ça donne ! Certes l'image est plus sombre, mais le fond de ciel, lui aussi, est plus sombre et par contraste le résultat est quasiment le même. Et la perte de lumière occasionnée, que j'estimais à environ une demi-magnitude est compensée par un meilleur confort d'observation et une meilleure analyse du signal. J'ai passé beaucoup de temps à faire d'innombrables tests et ma conclusion est qu'il n'y a pas une seule étoile, ou un seul détail à la limite de la détection en mono que je ne détectais pas en bino. Parfois c'était visible en bino et pas en mono, ou parfois l'inverse, au gré des variations de turbulence. Moralité, après quelques mois d'utilisation, je n'observais plus qu'en binoculaire, sauf pour mettre l'Ethos 21, car malheureusement il y a toujours cette fichue Powermate qui vient doubler la focale.

Mes meilleurs souvenirs d'observation : M51 au zénith à la montagne, M42 et Jupiter à la bino, mais la liste mériterait d'être bien plus longue car, en altitude, quand les conditions étaient bonnes, tout ce qu'on pointait était génial.
Alors, pourquoi l'ai-je vendu après 3 ans d'utilisation ? Eh bien, je dois me résoudre à une évidence, j'ai eu les yeux plus gros que le ventre... À ma décharge, et pour ça j'en veux encore un peu à SkyVision, le cahier des charges initial n'a pas été respecté. En effet, ce 500 était annoncé à 61 kg avec les optiques, il en fera presque 78... Quant à la hauteur du porte-oculaire au zénith, SkyVision indiquait 1,80 m... et ça sera 1,94 m ! Les explications qui me seront données sont que la motorisation que j'ai demandée a obligé à renforcer et surélever le scope. Mon souci, c'est que j'avais calculé ce dobson pour qu'il arrive aux limites de mes capacités physiques. Mais là, avec près de 20 kg de plus à trimbaler et 14 cm supplémentaires en hauteur, ce qui signifie pour moi qui mesure 1,76 m, l'utilisation systématique d'un escabeau pour tout objet situé au dessus de 50° d'altitude, j'ai dépassé mes capacités humaines. Il fallait environ une heure pour rendre le télescope opérationnel et presque autant pour tout reranger dans le garage. Et ceci a progressivement usé ma motivation. Petit à petit, j'ai réduit la fréquence de mes observations, pour n'observer que les rares nuits où toutes les conditions étaient réunies et sûres. J'ai regretté le temps où je sortais le 300 une fois par semaine, pour un oui ou pour un non, avec toutes les bonnes suprises qui sont venues avec. J'ai donc jugé raisonnable de revenir à un instrument moins encombrant et plus facilement transportable. Tant pis pour les photons en moins, l'essentiel est de s'amuser !


Au total, ce 500 sera et restera le plus gros diamètre que je possèderai et m'aura donné un plaisir visuel proportionnel en ciel profond et planétaire. Grand diamètre, belles optiques, tête bino, motorisation, c'était le grand luxe et j'ai vraiment pris mon pied à traverser de nombreuses nuits en sa compagnie. Mais après avoir regardé une ribambelle d'objets dans le T1000 de David en haute montagne, on finit par tout relativiser... Jusqu'au jour où les désagréments liés aux contraintes physiques finissent par dépasser le plaisir d'observer. Et là j'ai préféré tourner la page. Mais ce fut une belle aventure !



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