L’autoguidage d’un télescope Meade LX90


Etude théorique


L’autoguidage consiste à :

L’ensemble de ces trois étapes constitue la boucle de rétroaction (feed-back).
Il s’agit ici d’étudier, sur le plan théorique, les différents éléments qui conditionnent l’efficacité de cette procédure.

On s’intéressera dans un premier temps à la nature, aux causes et aux caractéristiques de la dérive, à la correction d’erreur périodique sans rétroaction et à ses limitations, puis aux conditions d’efficacité de la rétroaction, enfin à la vitesse de rétroaction et à ses facteurs limitants.

1 – Nature et caractéristiques de la dérive.

La dérive de l’image de l’étoile guide dans le plan du capteur par rapport à sa position de consigne est projetée sur les deux axes astronomiques.

2 - La correction sans rétroaction : PEC

La correction sans rétroaction (en « boucle ouverte ») est couramment appelée PEC pour periodic error correction. Son principe est simple : on procède à un guidage pendant la durée d’un cycle (9 min 20 sec dans le cas du LX90), au cours duquel on enregistre (par mise en mémoire dans la raquette de l’Autostar pour le LX90) les corrections qui ont été apportées en chacun des 150 points du cycle (division arbitrairement choisie par le constructeur, faisant que chaque intervalle dure 3,73 sec. L’erreur étant périodique, il « suffit » de « rejouer la partition » ainsi enregistrée au cours des cycles suivants. La monture est ainsi guidée « en aveugle » par ce « play-back », sans vérification de l’effectivité de ce guidage. (voir article sur la PEC).

Ce procédé permet de corriger une part importante des erreurs de suivi (une erreur de 72 arcsec sur 9 min laisse peu de temps pour une pose CCD sans filé perceptible) et autorise des poses jusqu’aux environs de 60 secondes à F/D = 3, avec moins de 20 % de perte (poses filées inexploitables).

Mais il n’est guère possible de faire mieux du fait des limitations du procédé :
Ces limitations des possibilités de la PEC montrent donc l’intérêt d’opérer un guidage actif pendant toute la durée des poses CCD, ou, mieux encore, un autoguidage.

3 – Les conditions d’efficacité de la rétroaction

S’agissant d’une erreur périodique, on l’assimilera, en première approximation, à une sinusoïde. L’efficacité de la correction sera maximale si le temps de réaction est tel que la dérive constatée est immédiatement corrigée. On peut modéliser cette situation idéale sous la forme de la soustraction à la « sinusoïde d’erreur » d’une « sinusoïde de correction » affectée d’un déphasage nul (courbe 3) :



Cette situation idéale n’est évidemment jamais atteinte, compte tenu des temps de réaction divers de la chaîne de rétroaction (voir plus loin).

Il existe donc un déphasage et on peut modéliser la situation réelle sous la forme de la soustraction de deux sinusoïdes plus ou moins décalées (courbe 4) :



Dans le cas extrême, les deux courbes sont en opposition de phase et la « correction » multiplie en fait l’erreur par deux !

L’objectif est simple : l’erreur, après correction, ne doit pas être discernable sur une prise de vue CCD (égale à moins d’un pixel). La traduction de cette condition en secondes d’arc dépend évidemment de la taille des pixels et de la focale utilisée.

Prenons par exemple la caméra Sbig ST-402 ME, dont les pixels mesurent 9 microns, placée sur le LX90 équipé d’un réducteur ramenant sa focale à 620mm. L’angle couvert par 1 pixel est alors de 3 arcsec. On utilisera cette valeur.

Dans l’approximation consistant à considérer les courbes comme des sinusoïdes, si A est l’amplitude de l’erreur non corrigée et a l’amplitude de l’erreur après correction, le rapport des erreurs a/A est de la forme a/A = sin(ωt) – sin(ωt + φ), où ω = 2π/T (T étant la période de l’erreur, exprimée en secondes) et où φ = ωΔt (Δt étant le temps total de rétroaction, exprimé également en seconde). Ce rapport va donc dépendre à la fois de A et de T.

L’erreur maximale admissible étant de 3 arcsec, cela donne :
On trouve (avec le solveur Excel qui évite les calculs trigonométriques…)

Il est clair que ce calcul est approximatif, les courbes d’erreurs de basse fréquence et, plus encore, de moyenne fréquence, n’étant que très approximativement sinusoïdales (comparer l’allure des courbes 1, 2 et 3).

Nous allons voir maintenant s’il est envisageable d’obtenir ce résultat compte tenu de l’ordre de grandeur des différents éléments composant le temps de rétroaction.

4 – Les composantes du temps de rétroaction

Il peut se décomposer de la manière suivante :

1) Acquisition de l’image de l’étoile guide : temps de pose
2) Acquisition de l’image de l’étoile guide : temps de chargement
3) Analyse de la position de l’étoile guide et de son éventuel déplacement, calcul de la correction à apporter, envoi de l’ordre à la raquette de commande
4) Réaction mécanique de la monture à l’ordre reçu

Le temps de pose : on aura évidemment intérêt à guider sur l’étoile la plus forte du champ, de manière à le minimiser. Dans la plupart des cas, ce temps de pose sera compris entre un centième de seconde et une seconde.

Le temps de chargement dépend des caractéristiques de la caméra guide, de la taille de la fenêtre de guidage, du type de liaison avec l’ordinateur (série, USB1, USB2…) et de la fréquence d’horloge de celui-ci. Expérimentalement, j’ai déterminé un temps de l’ordre d’un dixième de seconde avec la caméra MX5 en mode guidage (fenêtre réduite), avec liaison USB1 et processeur de 120 MHz.

L’analyse de la position et l’envoi de l’ordre de correction sont quasi instantanés, même avec un ordinateur de musée !

La réaction de la monture à l’ordre reçue est l’élément, sinon le plus lent, du moins le plus délicat à apprécier. On va le voir plus en détail.

Il y a là deux configurations possibles : soit l’ordre de correction passe par la voie du port parallèle s’il s’agit d’une monture LX200 ou d’un LX90 équipé d’un module APM909 et d’une interface ad hoc et est exécuté directement par la monture, soit il passe par la voie du port série sur un LX90 non équipé APM, via un câble #505 et est exécuté, non pas directement par la monture, mais par l’intermédiaire de l’Autostar.

N’étant pas équipé de l’APM, c’est cette seconde solution qui est la mienne.

Elle est, hélas, plus lente que la première, non seulement parce que la transmission série est moins rapide que la transmission parallèle, mais surtout parce que l’exécution de l’ordre est tributaire des possibilités de la raquette de commande. Or, sur l’Autostar, la vitesse de guidage est égale à la vitesse sidérale, ce qui signifie que si Vs est la vitesse sidérale, la monture « tourne » à la vitesse Vs +/- Vs quand on appuie sur le bouton ouest ou est de l’Autostar, ou quand le logiciel d’autoguidage lui donne l’ordre équivalent. En clair, quand le logiciel envoie un ordre de correction pour une dérive de l’étoile vers l’est (monture trop rapide) il arrête pendant un instant le suivi (Vs-Vs) et quand il envoie l’ordre inverse, il la fait aller pendant un instant deux fois plus vite (Vs+Vs).

Les questions qui se posent alors sont les suivantes :
On voit là que la réponse à la question du temps de réaction de la monture à l’ordre reçu est loin d’être simple.

Des premiers essais que j’ai réalisés, on peut dire en tout cas que le temps de réaction de la monture n’excède pas ½ à 1 sec.

Sachant par ailleurs que les composantes 2 et 3 du temps de rétroaction sont négligeables, c’est la somme des composantes 1 et 4 qui va être déterminante. On peut évaluer qu’elle est comprise dans une fourchette qui va de ½ seconde (temps de pose très court et réaction mécanique la plus favorable) à 2 ou 3 secondes (guidage sur une étoile faible demandant une pose plus longue et hypothèse la plus défavorable pour la réaction mécanique).

Dans tous les cas, l’erreur de basse fréquence devrait, en théorie, être corrigée de manière très satisfaisante (pour un temps de 3 sec, a/A = 0,033, ce qui donne une dérive de 2,4 arcsec soit 0,8 pixel).

C’est une tout autre affaire pour l’erreur de moyenne fréquence. Dans le cas le plus défavorable (3 sec), le temps maximal permettant d’éviter toute dérive visible (0,5 sec) est largement dépassé. La calcul donne alors un coefficient a/A de 1,17, c’est-à-dire que l’erreur est amplifiée de 17 %, passant de 15 arcsec à 17,6 arcsec, ou encore de 5 à 5,9 pixels pour notre montage optique !

Il n’est pas évident du tout, compte tenu de ce qui précède, qu’un temps de rétroaction global inférieur à 0,5 sec puisse être obtenu. Dans ce cas, ce sera non pas l’erreur périodique de basse fréquence, liée au contact roue dentée / vis tangente, qui sera pénalisante, mais celle de moyenne fréquence et, pourtant, d’amplitude presque 5 fois moindre, qui pénalisera, voire ruinera les performances du système !

Voilà pour la théorie, reste maintenant à voir ce que tout cela donne dans la pratique…