L'Astrophotographie
    sans Télescope
Il est parfaitement possible de faire de nombreuses photographies astronomiques avec votre appareil muni d'un objectif courant de 50 mm de focale, en l'orientant directement vers le ciel. Il est toutefois nécessaire :
- qu'il possède la pose B
- qu'il soit possible de lui fixer un déclencheur souple
- qu'il ait de préférence une ouverture supérieure ou égale à 2.8
Lorsque ces conditions sont réunies, de nombreux clichés du ciel sont réalisables.
Bien entendu, dans certains cas, on obtiendra des clichés mieux cadrés et équilibrés si l'on a recours à un objectif grand-angulaire, notamment pour la photographie des constellations ou de la lumière zodiacale. En revanche, un doubleur de focale associé à un objectif de 50 mm, ou mieux encore, un téléobjectif de 135 mm ou de 200 mm permettra d'obtenir d'avantage de détails à l'occasion d'une éclipse ou de la conjonction très rapprochée d'une planète avec la Lune.
Nous nous sommes surtout efforcés de réunir, dans cette première partie, les sujets qui peuvent être photographiés sans instrument astronomique. Elle s'adresse donc à vous, amis photographe, curieux d'aborder un merveilleux domaine : le ciel.
Les sujets sont classés sans ordre de référence, de difficultés ou d'intérêt scientifique ; tous sont également intéressants et réalisable. Notons que le côté esthétique de certains sujets est tout à fait remarquable.
 
 
 
 

La photographie des conjonctions et des rassemblements planétaires
 

OBJET. Photographier la conjonction d'une planète avec la Lune, le rapprochement d'une planète avec la Lune, de la Lune ou d'une planète avec une étoile brillante ou encore le rassemblement de plusieurs planètes dans la même région du ciel (photo 11). Consultez une revue d'astronomie pour connaître les dates de ces phénomènes (1).
Ces clichés n'ont pas d'intérêt scientifique. Par contre, ils ont un caractère esthétique certain et une grande valeur pédagogique puisqu'ils aident à comprendre les mouvements célestes. A ce point de vue, il est intéressant de prendre un cliché la veille, le jour même et le lendemain d'une conjonction pour mieux faire ressortir les mouvements célestes.

MATÉRIEL.  Appareil photo avec un objectif de 50 mm de focale ou plus et déclencheur souple ;  éventuellement : support ou trépied de grande stabilité et carnet pour noter : date, heure, film, temps de pose, etc.

FILMS. Opérer de préférence en couleur (Kodachrome 64 ou Ektachrome  100 ASA).

PRISE DE VUE. Caler l'appareil au niveau du sol ou sur une surface dure (dallage, mur, pilier) ou installer l'appareil sur un support rigide, un trépied.
Ouvrir le diaphragme au maximum (ex. 2,8). Régler la distance sur l'infini. Régler l'obturateur sur la pose 1, 2 ou 3 s ou sur la pose B.
Cadrer si possible la Lune ou l'objet le plus brillant au point de recoupement du tiers droit ou gauche avec le tiers haut ou bas du viseur. Essayer de composer avec le paysage ou l'horizon encore éclairé par les lueurs du crépuscule pour obtenir un image agréable du point de vue esthétique. La qualité du premier plan est capitale. De très beaux clichés peuvent être obtenus dans la nature, notamment à la montagne (sapins, cimes enneigées) ou à la mer.
Poser environ 2 s en prenant le premier cliché environ 45 mn après le coucher du soleil et en répétant 2 autres clichés à 1/4 d'heure d'intervalle.
Le matin, commencer le premier cliché avec les premières lueurs de l'aurore.
Les conjonctions ou rapprochements observables au cours de la nuit, peuvent être photographiés avec des temps de pose analogues : les lumières d'une ville pas trop rapprochée ou des constructions éclairées peuvent servie de premier plan.
Une pose supérieur à 3 s se traduirait sur le cliché par un allongement trop important des images.

Photo de Thierry Lambert     T.Lambert
 

Photographie de la rotation apparente de la voûte céleste
 

OBJET. Par suite de la rotation terrestre, un appareil fixe dont l'obturateur reste ouvert par nuit pure, n'enregistre pas les étoiles sous forme de points, mais comme des traînées plus ou moins longues selon la durée de la pose. Ces trajectoires prouvent le mouvement apparent de la sphère céleste.

MATÉRIEL. Appareil photo avec objectif de 20 à 55 mm de focale, déclencheur souple.

FILMS. Rapides, Tmax 400 (kodak), ou en couleur, Ektachrome  100 ASA ou Fuji HG 400.

PRISE DE VUE. Orientez l'appareil successivement vers les quatre points cardinaux et vers le zénith dans le but de comparer entre eux les 5 clichés agrandis, pour mieux comprendre le mouvement du ciel. Poser 15, 30 minutes ou une heure au maximum, en l'absence de clair de Lune et en réglant le diaphragme à pleine ouverture. Au-delà d'une heure, le voile finirait par enlever tout contraste. Les arcs enregistrés ont 15° pour une pose d'une heure et sont d'autant plus longs que les étoiles photographiées sont plus loin du pôle céleste.

PRÉCAUTIONS. Mettez l'appareil à la température ambiante au moins 1/4 d'heure avant de commencer la pose. Le dépôt de rose sur l'objectif peut être une cause d'insuccès. On peut essayer d'y remédier en enfilant sur l'objectif un gros cylindre en papier buvard. Vérifier que le cylindre ne limite pas le champ photographié et qu'il est suffisamment rigide pour ne pas se replier inopinément sur l'objectif. Placer l'appareil sur un trépied ou un support très stable, ou encore au sol, sur un morceau de plastique blanc (repérable dans l'obscurité). Caler l'appareil avec des objets durs (briques, cailloux). Viser sur l'obturateur, réglé sur la pose B, un déclencheur à blocage. Opérer loin des lumières parasites, mêmes faibles, et en dehors des périodes de Lune. Les clichés les plus spectaculaires s'obtiennent avec un appareil de grand format : 9X12 ou 13X18 (pour un même angle de prise de vue et un même rapport f/D, le diamètre linéaire de l'objectif est plus grand mais la magnitude limite plus faible). La pose peut être de plusieurs heures sur un film lent. Les plus beaux clichés sont ceux pris en visant le pôle céleste.
 

 
Photo de Thierry Lambert           T.Lambert
Lever ou coucher d'une ou plusieurs planètes brillantes au voisinage de la Lune en laissant filer les astres pendant la pose
 

MATÉRIEL. Appareil photo avec objectif de 50 mm de focale, déclencheur souple.

FILMS. Utilisez de préférence un film en couleur (Ektachrome  100 ASA) . On obtient de meilleurs résultats avec le Kodak 64 (plus fin) ou fuji Provia 50, vu la grande brillance des planètes et de la Lune.

PRISE DE VUE. Commencer la pose un peu avant la disparition du crépuscule afin de matérialiser l'horizon. Le matin, arrêter la pose peu après l'apparition des premières lueurs de l'aurore. Le temps d'exposition s'échelonne donc entre 1 h et 2 h.
Installer l'appareil sur un pilier ou sur un pied très stable et maintenir l'obturateur ouvert (pose B) à l'aide d'un déclencheur à blocage. Ce genre de cliché ne peut se faire que pendant la période proche de la N.L., c'est à dire entre 2 et 4 jours avant ou après la N.L.. En dehors de cette période, l'éclat de la Lune devient trop intense et voile le film. Diaphragmer à 4,5 ou même 6,3 si la Lune est à son 4e ou 25e jour et surtout si la pose doit se prolonger plus d'une heure. Commencer ou arrêter la pose lorsque les astres visés sont à l'horizon. Au lieu de laisser "filer" les astres en formant ainsi des traînées sur le film, vous pourrez faire plusieurs poses sur le même cliché (1/4 ou une 1/2 seconde toutes les 5 minutes). Cette technique est surtout praticable avec les anciens appareils 6X6 ou 6X9 ; les 24X36 modernes permettant rarement de réarmer sans provoquer l'avance du film. Vous pouvez ainsi obtenir de très beaux clichés si vous réussissez à mettre en valeur le premier plan où l'horizon se silhouette devant les premières ou les dernières lueurs du crépuscule. Il faut seulement savoir apprécier à quel moment il convient de commencer (le soir) ou terminer (le matin) pour éviter une surexposition du film.
 
 

Constellations
 

Une meilleure connaissance des constellations peut être acquise avec le concours de la photographie lorsque l'on commence l'apprentissage du ciel. Sur un cliché contenant plusieurs constellations, il est intéressant et instructif de relier certaines étoiles entre elles (avec de l'encre blanche) afin de reconstituer la forme familière des constellations telle qu'on la trouve sur les cartes célestes, pour les reconnaître ensuite dans le ciel. Encore faut-il prendre la précaution de noter, en prenant chaque cliché, la région du ciel visée, si l'on ne veut pas perdre trop de temps au repérage des constellations sur l'agrandissement.

Image des constellations de la Lyre et du Cygne
Arnaud Leroy
 
 

MATÉRIEL. Appareil photo avec objectif de 20 à 50 mm et déclencheur souple à blocage.
Avec un appareil fixe, et des poses de 30 secondes sur film rapide (Ilford HP 5), on peut enregistrer entre 50 et 500 étoiles, suivant la région du ciel visée, soit 3 ou 4 fois plus que l'on peut en voir à l'oeil nu.

PRISE DE VUES. Comme l'a suggéré A. Poncet, il est facile, en une soirée, de photographier toute la voûte céleste visible à cette époque. Pour cela, il faut fabriquer une tête panoramique (en contre-plaqué de 10 ou 12 mm) comprenant un disque horizontal divisé en 24 parties de 15° et un secteur vertical portant 6 divisions de 15°. Le cadran horizontal aura les division 0, 1, 2...23, marquées dans le sens de rotation des aiguilles 'une montre. Le secteur vertical aura la division 0 à l'horizontale et la division 5 à la verticale. L'appareil étant monté horizontalement, sur cette tâte panoramique, fixée à un bon trépied photo, le cadran horizontal calé sur la division 0, et le cadran vertical sur la division 1, on mettra le cadran horizontal bien d'aplomb (à l'aide d'un petit niveau) et on ancrera fortement les pieds dans le sol. L'appareil ainsi disposé, sans toucher le réglage vertical (division 1), on fera 8 poses sur le cadran horizontal aux divisions 0-3-6-9-12-15-18-21. On placera ensuite le secteur vertical sur la division 3 (inclinaison 45°) et on exécutera 6 poses sur les divisions 0-4-8-12-16-20. On placera enfin le secteur vertical sur la division 5 et on exécutera 4 pose sur les divisions 0-6-12-18 du cadran horizontal. On aura ainsi photographié, en 18 poses, toute la voûte céleste avec un recouvrement de près de 50 % de clichés. Il reste même deux ou trois vues sur un film de 20 poses, si l'on a effectué une fausse manoeuvre.

    Cette méthode "azimutale" peut être exécutée en une heure ou deux : elle pourra être renouvelée 4 fois dans l'année pour obtenir les clichés de la totalité du ciel visible au cours de l'année.
 
 

Photographie du mince croissant lunaire
 

On utilisera la même technique que précédemment. Des observateurs habiles parviennent à observer le très mince croissant lunaire 24 h ou même 18 h avant ou après la N.L. ! Le recours aux jumelles est alors indispensable. Dans ces conditions, le croissant lunaire est très raccourci et sa photographie constitue un exploit. Si l'occasion se présente, utilisez un téléobjectif de 135 à 400 mm de vocale et un film en couleur. du fait que l'observation se fait toujours dans les lueurs de l'aurore ou du crépuscule, il est possible de mesurer l'intensité lumineuse avec un posemètre. Il est bon, toutefois, d'adopter différents temps de pose dont quelques-uns en sous-exposant pour augmenter le contraste et faire ressortir le croissant lunaire.
 
 

La photographie des météores
 

Voilà un domaine apparemment assez ingrat mais où la patience se trouve parfois largement récompensée.

CONDITIONS. Choisir une époque favorable c'est-à-dire au moment de l'apparition des essaims détoiles filantes, mentionnés sur le tableau page 74. La première quinzaine d'août est recommandée à ceux qui veulent s'entraîner pendant les vacances.

MATÉRIEL. Appareil photo muni d'un objectif de 50 mm de focale, ouvert à 2,8, 2 ou même 1,2. Les Aéro-Ektar, vendus comme surplus aux U.S.A., sont tout indiqués. Ces objectifs, ouverts à 2,5, existent en 72 et 120 mm de diamètre. La largeur du film à utiliser est de 120 mm.

FILMS. Charger l'appareil avec un film rapide : Ilford HP5 ou XP, Fuji HG 400, Kodak royal gold 400.

PRISE DE VUE. Choisir un endroit assez dégagé et éloigné des lumières artificielles. Fixer l'appareil sur un trépied suffisamment stable pour qu'il soit insensible aux effets du vent. Sinon il est préférable d'installer l'appareil directement sur le sol. Un fond de sable convient parfaitement. Interposer un morceau de plastique blanc entre le sol et l'appareil pour le protéger. La couleur blanche constitue un moyen de repère facile dans l'obscurité. Quelle que soit la position du radiant (1), orienter l'objectif vers le zénith, les chances d'enregistrer des météores restent les mêmes. Appuyer sur le déclencheur, puis bloquer celui-ci. Noter l'heure exacte du début de la prise de vue. Poser 5, 10 ou 20 minutes. Réduire le temps d'exposition d'il y a clair de Lune : il est à peu près impossible d'opérer au moment de la Pleine Lune.
On enregistrera des traînées détoiles dont la longueur sera fonction de la durée de la pose. Recommencer et prendre ainsi une bonne série de clichés si l'on a assez de patience.
en règle générale, les faibles météores n'impressionnent pas le film, un éclat au moins comparable à celui de Jupiter est nécessaire. Mais si l'on estime qu'un brillant météore passe dans le champ de l'appareil on doit interrompre immédiatement la pose et noter l'heure. Pour peu qu'un autre observateur fasse le même geste dans un rayon d'une centaine de km, on pourra en tirer des renseignements utiles.
Tirer un positif agrandi. Déterminer sur une carte géographique la distance séparant les deux points de prise de vue. On pourra, par trigonométrie, rechercher à quelle altitude le météore a été photographié. On peut multiplier les chances en opérant en groupes organisés et concertés au préalable, répartis dans un rayon de 50 à 150 km. Plusieurs appareils orientés dans des directions différentes augmentent les chances de succès.
Signalons que l'étude attentive de la traînée laissée par un météore sur le film révèle parfois des détails intéressants : irrégularité de trace, renflements, dédoublement, etc.
 
 
 

La photographie des aurores polaires
 
 

L'apparition d'une aurore polaire est assez rare en France, surtout dans le Sud du pays. Néanmoins, en période d'intense activité solaire on observe, de temps à autre, des lueurs aurorales qui se manifestent par une clarté analogue à celle de la fin du crépuscule mais qui sont visibles dans la direction du pôle magnétique (N.N.O.). Ces phénomènes sont observables surtout par ciel clair et loin des lumières artificielles. Ces lueurs, souvent à peine perceptibles, peuvent apparaître à n'importe quelle heure de la nuit et durer 1/4 d'heure ou plusieurs heures, parfois en se répétant plusieurs nuits de suite.
La présence d'une lueur aurorale, même faible, est à surveiller car elle peut être le prélude à une véritable aurore polaire, avec renforcement de la teinte jaune verdâtre caractéristique et formation de draperies rouge, parfois striées de faisceaux blancs semblables à des projecteurs se déplaçant très lentement.

MATÉRIEL. Appareil photo avec objectif de 55 mm de focale et aussi lumineux que possible : f/D = 2, 1,4 ou mieux 1,2.

FILMS. Très rapides, en noir et blanc ou en couleur : Fuji HG 400 ou 800, , ektachrome 400 ASA, Kodak royal gold 1000 ASA.

PRISE DE VUE. Placer l'appareil sur un pied très stable. Poser le moins longtemps possible : 5 à 20 s, en tenant compte de l'intensité lumineuse apparente du phénomène et de son déplacement continuel. Si l'aurore prend une ampleur exceptionnelle, utiliser un grand angulaire du genre fish-eye (f/D = 2,8) couvrant 160° ; mêmes films et mêmes temps de pose que ci-dessus.

Photo de Thierry Lambert / Arnaud Leroy / Guillaume Dubos     T.Lambert/G.Dubos
 

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