LE CANON EOS 350D AVEC FILTRE HUTECH TYPE I

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Filtre anti-IR d'origine

Malgré leur bonne sensibilité, les APN sont handicapés en astronomie par le filtre anti-IR placé devant leur capteur. Ce dernier ne se contente pas de bloquer l'infra-rouge : il ne transmet que faiblement les longueurs d'ondes visibles dans l'orange et surtout dans le rouge. La principale raie d'émission des nébuleuses ionisées, située à 656.3nm, est sacrifiée. Le fitre IR d'origine du Canon 350D n'échappe pas à la règle, comme le démontre la courbe de mesure spectrale ci-dessous, réalisée par Christian Buil (www.astrosurf.com/buil).

 

 Filtre anti-IR modifié    .

Pour remédier à ce handicap, les amateurs retirent parfois tout bonnement le filtre anti-IR d'origine. Cependant, le boîtier devient alors inutilisable en photographie classique. Même en astronomie, il n'est par exemple plus possible d'immortaliser une conjonction mettant en scène un paysage. Par ailleurs, les réfracteurs, mal corrigés dans l'infra-rouge, donnent alors des images empâtées. La société Hutech commercialise des boîtiers modifiés, dont filtre anti-IR transmet parfaitement le rouge jusqu'à 700nm. L'EOS 350D utilisé est équipé d'un filtre anti-IR type I, dont la courbe de transmission est présentée ci-dessous.

 

La comparaison avec la courbe du filtre anti-IR d'origine montre une augmentation de transmission d'un facteur 5 environ à la longueur d'onde de la raie H-alpha (6562,8 A). Notons que Hutech propose également un filtre de type II, mieux équilibré pour les photographies en lumière du jour, mais qui doit être monté différemment à l'intérieur du boîtier.


Quelques résultats sur le ciel

 

- Nébuleuses diffuses :

Les nébuleuses ionisées émettent très majoritairement à la longueur d'onde de 656.3nm, dans le rouge. Ces vastes étendues d'hydrogène comptent parmi les plus belles figures du ciel. Alors qu'elles sont fortement atténuées par le filtre anti-IR d'origine, on peut s'attendre, grâce au filtre modifié, à un gain en sensibilité très significatif.

L'image ci-dessus est une mosaïque de deux clichés de la région Lagune - Trifide au foyer d'une lunette EDT 105mm à F/4.5. Le temps de pose total n'est que de 18 minutes à 800 ISO. Malgré cela, les extensions faibles de M 8 ressortent bien, ainsi que les faibles nébulosités vers NGC 6559, à l'est du cliché. La réponse dans le rouge est donc, comme on pouvait s'y attendre, excellente. De plus, la transmission dans le bleu n'est pas en reste, avec des extensions autour de M 20 également bien présentes.

Un point important par rapport au film (surtout après passage au scanner) est la grande dynamique : le centre de M 8 demeure relativement détaillé, alors qu'il est très rapidement saturé en argentique.

 

- Nébuleuses planétaires :

Ces objets émettent souvent à de multiples longueurs d'onde, ce qui les rend intéressants pour un test de rendu des couleurs.

La première cible du 350D avec filtre modifié type I a été la nébuleuse de l'Oeil de Chat, NGC 6543, dans le Dragon. Cette minuscule nébuleuse peut être enregistrée avec des temps de pose courts, compatibles avec le ciel urbain sous lequel a été effectuée l'image. Le télescope utilisé est un Celestron 14 sur monture Astrophysics SMD 900. Le rapport F/D a été ramené à 7 grâce à un réducteur de focale Celestron. La sensibilité du 350D a été réglé à 400 ISO. 13 poses non guidées de 15s chacune ont été combinées avec le logiciel Iris. Le format jpeg choisi n'est pas le meilleur pour la fiabilité du rendu des couleurs, mais permet tout de même une première estimation.

 

- Comparaison avec une image CCD trichrome :

Afin d'évaluer la réponse globale du capteur, nous avons comparé l'image de NGC 6543 à un cliché de référence, obtenu par trichromie à l'observatoire de Kitt Peak avec un télescope RCOS de 20''. Le rapport signal/bruit (16 minutes de pose pour la luminance au RCOS 20'' contre 3 minutes de pose couleur au C14) et la résolution (environ 0,32'' par pixel pour la ST10 au foyer du RC 20'' F/8.4 contre 0,58'' par pixel pour le 350D au foyer du C14 à F/7) est largement à l'avantage du télescope professionnel. Seul le rendu des couleurs nous intéresse ici, considérant que l'image de Kitt Peak délivre le rendu idéal.

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On constate une nouvelle fois que le 350D modifié restitue parfaitement la couleur rouge. En revanche, les zones vert émeraude (oxygène ionisé OIII) sur le cliché professionnel apparaissent dans notre cas plutôt bleu turquoise. Ce rendu différent n'est pas considéré comme un gros défaut, puisque les raies OIII sont situées en réalité à la frontière du bleu et du vert. On pourrait faire le parallèle avec la perception visuelle de la couleur des nébuleuses planétaires, qui, selon les observateurs ou les conditions atmosphériques, est décrite tantôt vert émeraude, tantôt bleu turquoise ! Une accentuation du vert dans le cliché peut facilement être envisagée. Cependant, dans ce cas, les faibles étoiles du champ, qui doivent rester neutres, présentent alors elles-mêmes une dominante colorée.

 

- Voie lactée :

Cette vue à grand champ de la Voie lactée dans le Cygne résulte de la combinaison (avec Iris) de 5 poses de 2 minutes à 800 ISO avec un objectif Canon 50mm à f/4.5, sous un ciel d'une très bonne transparence. Notons que malgré une température de 13°C, le dark était quasiment exempt de pixels chauds.

A cause de la compression, la finesse d'image est très dégradée par rapport à l'original. Les nuages d'hydrogène ionisé, comme les nébulosités autour de gamma Cygni, la nébuleuse America ou encore le Pélican ressortent bien. Par ailleurs, la Voie lactée est bien fournie et présente des nuances de jaune et de bleu.

 

- Lune :

Le capteur de 8 millions de pixels offre une très grande définition sur un champ assez étendu, ce qui en fait un outil idéal pour photographier la Lune en entier. L'image ci-dessous a été réalisée avec une prise de vue unique, avec une lunette de 105mm d'ouverture et une barlow Ultima Celestron. Le temps de pose est de 1/60s à 200 ISO. Bien entendu, compte-tenu des impératifs de mise en page, l'image est nettement réduite par rapport au fichier d'origine (hauteur du capteur 3456 pixels contre 800 pixels sur l'image présentée), ce qui entraîne une perte de détails. Pour une image à pleine échelle, selectionnez le lien ci-après : lune entier (1,4 Mo).

Notons qu'en mode AWB (balance des couleurs automatique), la surface de notre satellite présente une forte dominante rouge-magenta. Celle-ci peut être corrigée ultérieurement par un simple équilibrage des couleurs. Le mode "Custom WB" du 350D corrige également partiellement cette dominante (mode utilisé ici). Enfin, notre satellite ne présentant pas de couleur prononcée, les images lunaires sont généralement présentées en noir et blanc, ce qui élimine d'office toute problème de rendu des couleurs !

 

- Etoiles brillantes :

Un défaut du filtre Hutech type I est la formation autour des étoiles brillantes d'un halo diffus plus prononcé qu'avec le filtre d'origine. Ce phénomène n'est cependant visible que sur des étoiles lumineuses et avec des temps de pose assez longs. Sur cette pose unique de 4 minutes à 800 ISO sur l'amas des Pléiades, il n'apparaît distinctement qu'autour de l'étoile Alcyone, de magnitude 2,9.

 

- Paysages :

En laissant passer le rouge lointain, le filtre Hutech type I délivre un ton chaud prononcé en photographie de paysages. L'effet sur des scènes d'aurores ou de crépuscule peut être assez bénéfique. Dans ce cas, comme sur cette image de lever du jour dans les Pyrénées, aucune correction chromatique n'est indispensable malgré l'utilisation du mode AWB.

 

Rendu des couleurs en lumière du jour

Le filtre IR d'origine des boîtiers numériques coupe le rouge lointain pour un meilleur rendu des couleurs en lumière du jour. Le filtre Hutech entraîne nécessairement un déséquilibre chromatique, que l'on peut atténuer très simplement par la fonction " Custom White Balance " du 350D : on photographie un objet blanc que le logiciel utilise comme référence pour corriger la dominante du cliché.

Comparaison du 350D en mode AWB (à gauche) et en mode custom WB (au centre) avec à droite un compact Kodak CX 6330. Si la dominante magenta du cliché en mode AWB est bien éliminée en mode Custon WB, il demeure un ton légèrement chaud par rapport au rendu du photoscope, utilisé comme référence (tons neutres).

 

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