ISIS
Innovative Spectrographic Integrated Software
Christian Buil
Extraction optimale des spectres
Optimal spectra
extraction
Ce document montre comment utiliser ISIS pour extraire des spectres d'objets faibles pour maximiser le rapport signal à bruit. Il est impératif d'avoir installé la version 3.2.0 de ISIS et au dessus pour exploiter les possibiiltés décrites dans cette note. A titre de support nous allons traiter une séquence de trois spectres bruts de l'étoile V841 Oph. Il s'agit d'une très vieille nova : Nova Oph 1848. L'objet est assez faible, de magnitude 14 environ. C'est l'une des plus ancienne nova observée. Les trois spectres ont été acquis successivement avec le spectrographe LISA sur le télescope de 60 centimètre de l'observatoire du Pic du Midi le 21 aout 2011. Le temps de pose individuel est de 600 secondes. Le spectrographe été équipé d'une fente de 35 microns donnant un pouvoir de résolution de R = 750 environ. La distance focale du télescope a été légèrement augmentée avec une lentille de Barlow pour faire passer le rapport F/D de 3,5 à 5,8 (optimal pour le spectrographe LISA). La caméra CCD est une Atik314L+ (pixels de 6.45 microns). La figure à droite montre des extraits des images 2D des trois spectres.
Ce document montre comment utiliser ISIS pour extraire des spectres d'objets faibles pour maximiser le rapport signal à bruit. Il est impératif d'avoir installé la version 3.2.0 de ISIS et au-dessus pour exploiter les possibilités décrites dans cette note. A titre de support, nous allons traiter une séquence de trois spectres bruts de l'étoile V841 Oph. Il s'agit d'une très vieille nova : Nova Oph 1848. L'objet est assez faible, de magnitude 14 environ. C'est l'une des plus anciennes nova galactique observées dans l’histoire. Les trois spectres ont été acquis successivement avec le spectrographe LISA sur le télescope de 60 centimètres de l'observatoire du Pic du Midi le 21 aout 2011. Le temps de pose individuel est de 600 secondes. Le spectrographe été équipé d'une fente de 35 microns donnant un pouvoir de résolution de R = 750 environ. La distance focale du télescope a été légèrement augmentée avec une lentille de Barlow pour faire passer le rapport F/D de 3,5 à 5,8 (optimal pour le spectrographe LISA). La caméra CCD est une Atik314L+ (pixels de 6.45 microns). Les conditions d’acquisition ne sont pas idéales à cause de la présence d’un vent sensible faisant vibrer le télescope. La figure à
droite montre des extraits des images 2D des trois spectres. |
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La première opération à réaliser pour bien travailler : repérer suivant l'axe horizontal un segment relativement intense du spectre et relativement centré dans l'image. Par exemple ici, délimité par les coordonnées X = 500 et X = 900. C'est un choix assez abitraire (toujours un peu le même en général). Entrez ces valeurs comme bornes de calculs dans l'onglet "Général". Il est important de comprendre l'usage qui est fait de ces bornes. Elles ne servent à ISIS qu'à évaluer la position verticale des spectres afin de superposer leur trace avec grande précision. Ce besoin existe pour produire une image composite de qualité à deux dimensions de niveau 0b (retrait du fond de ciel, correction des distorsions, registration verticale, somme des images individuelles). Il existe aussi pour produire un profil vertical caractéristique des spectres qui entre en ligne de compte lors de l'extraction optimale des spectres. Ce calcul fait par ISIS vous permet d'être relativement tolérant quant à la position de guidage de l'étoile le long de la fente quand vous passez d'une image élémentaire à la suivante. ISIS sait donc rattraper par calcul une erreur de guidage de ce type.
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La copie d'écran à droite montre l'onglet "Général", prêt au calcul du spectre de V841 Oph. On suppose ici que l'étalonnage spectral et la réponse spectrale ont déjà été évalués (via l'onglet "LISA" par exemple) - voir la procédure ici. La coordonnée verticale du spectre dans la première image de la séquence est notée à Y = 628 (vers le centre de l'image, remarque important si le spectre est significativement "tilté"). Un relevé grossier avec le pointeur de souris est suffisant, mais il faut penser à actualiser cette valeur à chaque nouvel objet (rien de dit que vous positionnez toujours l'étoile au même endroit suivant l'axe long de la fente en allant d'un objet au suivant). Vous devez absolument avoir le réflexe de vérification de la coordonnée verticale de la trace – c’est pour cela que la zone d’entrée de ce paramètre est en rouge dans l’interface (la tolérance est cependant d'une dizaine de pixels en plus ou en moins). La réponse spectrale instrumentale a été calculée à partir d'une observation de l'étoile Alpha Del (d'où le nom dans le champ « Réponse »). A titre de démonstration, noter que pour ce premier test, nous ne faisons pas de binning optimisé. Le binning consiste à additionner suivant l'axe vertical les pixels de l'image 2D qui contiennent une information significativement de l'astre observé. A partir de ce moment, le spectre se présente sous la forme d'une courbe. C'est une opération tout à fait cruciale dans la phase de traitement. En spectrographie d’objets faibles, la qualité finale du spectre dépend fortement des paramètres utilisés lors du binning. C'est une opération aussi désignée comme l'extraction du profil spectral. Si on ne
coche pas l'option "Binning optimal", ISIS se contente d'additionner arithmétiquement
la valeur des pixels sur une certaine hauteur spécifiée de part et d'autre de
la trace du spectre. |
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Avant le traitement proprement dit de la séquence de spectres, il reste une opération très importante à faire : définir la hauteur de binning que doit utiliser ISIS pour l'extraction du profil spectral, ainsi que définir les zones de calcul du fond de ciel. En première analyse, la trace du spectre apparait étroite. On peut donc choisir une hauteur de binning relativement étroite, de 8 pixels par exemple (soit dans les faits +/- 4 pixels de part et d'autre de la trace du spectre - ISIS fait le calcul : Borne inf = Y0 - Hauteur/2 et Borne sup = Y0 + Hauteur/2, avec ici Hauteur = 8). Cette valeur de la hauteur de la zone de binning est à entrer dans l'onglet "Réglage" (voir la copie d'écran à droite). A priori cette petite valeur de binning parait une bonne idée : plus elle est réduite, moins on risque d'introduire dans le profil spectral des artéfacts provenant du fond de ciel (rayon cosmique, pixels chauds mal corrigés). Nous en
profitons pour définir aussi les zones de calcul du fond de ciel de part et
d'autre de la trace. Ici, la largeur de ces zones fait 30 pixels (40 - 10 =
30), ce qui est un bon choix en général. Il faut faire attention aux bornes
Ysup1 et Yinf1. Nous les positionnons à 10 pixels du centre de la trace du
spectre, une valeur généreuse à ce stade par rapport à la largeur du spectre
(le fond de ciel calculé ne doit pas être en effet pollué par la lumière de
l'astre étudié). |
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Nous pouvons maintenant lancer le calcul. Le graphe à droite montre le résultat. La raie Halpha est bien visible en émission à 6563 A, ainsi que la raie Hbeta, mais avec une structure complexe. On est
surpris par la brutale chute du signal pour des longueurs d'onde plus courte
que 4200 A. Ce n'est pas physique sur ces étoiles chaudes, qui présentent un
continuum plutôt uniforme, et même plutôt intense dans le bleu (ces résidus de
nova sont des objets chauds). |
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Nous avons un sérieux problème dans le traitement. Pour tirer les choses au clair, le meilleur réflexe à avoir est d'examiner l'image 2D générée par ISIS en additionnant les 3 images élémentaires acquises, après retrait du ciel, correction géométrique, division par le flat-field et recentrage des 3 traces. C'est donc une image 2D de qualité, avec un rapport signal sur bruit maximal compte tenu des informations disponibles. ISIS produit systématiquement cette image composite lors de tous les traitements. Il ne faut jamais oublier d'y jeter un œil en cas de difficulté avec un traitement. L'image a pour nom _OBJET.FIT et elle se situe dans le répertoire de travail. Dans notre cas c'est l'image _V841 Oph.fit. Vous pouvez la visualiser depuis l'onglet "Affichage image" (voir à droite). Il apparait
que le spectre s'élargit dans la partie bleue en raison des aberrations
optiques du spectrographe (chromatisme). La zone de binning de 8 pixels n'est
pas suffisamment large pour inclure tout le signal stellaire. Il en résulte une
chute du signal dans cette partie. C'est donc une erreur radiométrique
(mauvaise mesure du bleu par rapport au rouge). |
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Il nous faut donc agrandir la zone de binning. Les graphes à droite montrent le résultat avec respectivement 12, 18 et 24 pixels de hauteur pour la fenêtre de binning. A partir d'une hauteur de 18 pixels, la forme du profil spectral se stabilise. L'erreur radiométrique s'annule. Le choix de la largeur de binning est donc critique. Il vaut toujours mieux qu’elle soit trop grande que trop petite. Mais simultanément, au fur et à mesure que le nombre de pixels pris dans le binning augmente, le bruit s'accroit dans le spectre. La présence de pixels aux valeurs déviantes dans le fond de ciel se fait par ailleurs sentir dans le profil (traits rouges dans les graphes à droite). Le bruit provient du fond de ciel : dans cette partie, lors de la sommation colonne que représente le binning, nous n'accumulons pas de signal stellaire alors que le bruit du fond de ciel continu à s'ajouter (quadratiquement).
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La solution pour accroitre le rapport signal à bruit avec une zone de binning large (pour conserver la radiométrie) et simultanément, lutter contre les rayons cosmiques et les points chauds, consiste à activer le mode "Binning optimal" (dans l'onglet "Général" depuis la version 3.2.0 de ISIS). Vous avez alors aussi accès au paramétrage d'un coefficient de réjection qui fixe la force de retrait des rayons cosmiques. Une valeur proche de 50 est en général suffisante. Le traitement s'apparente à un filtrage du type sigma-clippping. Le filtrage est d'autant plus efficace que le coefficient est de petite valeur. Le filtre est totalement désactivé dès que le coefficient atteint la valeur de 1000 ou au dessus. L'algorithme d'extraction optimale est celui décrit par K. Hornes (Horne K., 1986, PASP, 98, 609), assez universellement utilisé dans les logiciels de réduction des données spectrales professionnelles, mais en apportant une modification en ce qui concerne la rejection des rayons cosmiques. Le rapport signal sur bruit dans le spectre affiché à droite, optimalement extrait, est d'environ 39 (mesurée dans une zone sans raies), alors que ce même rapport signal sur bruit est de 32 seulement avec une addition simple. L'écart se creuse lorsque l'objet est encore plus faible, avec un rapport signal sur bruit inférieur à 20 pour fixer les idées (domaine de détection limite). C'est donc ici que l'extraction optimale est particulièrement efficace. On notera par ailleurs que l'algorithme de ISIS à bien gommé les rayons cosmiques et pixels chauds.
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Spectre de V841 Oph
avec un binning de 24 pixels de large avec extraction optimale. |
Il est possible de parfaire le rapport signal à bruit dans le bleu en adoptant le juste nécessaire en ce qui concerne la hauteur du binning pour ne pas dégrader la radiométrie. Nous avons vu qu'une largeur de 18 pixels était satisfaisante. On montre à droite le paramétrage optimal (pour notre exemple) et le résultat obtenu. En dehors de la partie bleue du spectre, le gain est marginal (rapport signal sur bruit de 40). Cette insensibilité à la largeur de la zone de binning dans le cas général est une propriété de l'extraction optimale.
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Sur des spectres intenses, disons avec un rapport signal à bruit de 100 ou plus, le binning optimal n'apporte pas de gain supplémentaire par rapport à une addition simple. En revanche,
la fonction de suppression de rayons cosmiques peu demeurer intéressante. Il
faut cependant alors bien choisir le coefficient de réjection. Une valeur
faible (20 par exemple) peut accroitre l'efficacité de la réjection, mais aussi
lisser légèrement le spectre. A l'inverse, pour éliminer totalement l'effet de
réjection, utiliser un coefficient fort, 1000 par exemple. Vous pouvez parfaitement combiner les méthodes d'extraction et de filtrage (voir à droite).
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Pour finir, répondons à la question : comment évaluer le rapport signal à bruit dans un profil spectral ? Charger le profil spectral depuis l'onglet "Affichage profil". Lancer la commande "FWHM". Faire ensuite un premier double click au début d'une zone relativement plate du continuum. Refaire un double click à l'autre extrémité de cette zone plate. ISIS retourne alors le rapport signal à bruit approximatif dans le boite de dialogue (dans l'exemple à droite, le rapport signal à bruit est mesurée à 41).
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