Stage de spectrographie - Session 4 (2/2)

L'ETALONNAGE DES DONNEES SPECTRALES


Raymond - VisualSpec utilise un format de fichier particulier je suppose ?

Aude - Oui, tout à fait. Ce sont des fichiers qui se terminent par l'extension SPC. Vous pouvez aussi sauvegarder un profil spectral sous la forme d'un simple fichier texte à deux colonnes via la commande Exportation du menu Ficher, ce qui est bien pratique pour transférer des résultats vers d'autres logiciels d'analyse. La première colonne contient la longueur d'onde et la seconde l'intensité associée dans le spectre. L'extension est alors DAT. Voici l'extrait d'un tel fichier :

4522.012         1.52903780634256
4524.823         1.53356415959389
4527.635         1.54709102630911
4530.446         1.53086784649633
4533.257         1.55579166979944
4536.068         1.58777767795282
4538.879         1.58520260931212
4541.690         1.59650836430929
4544.502         1.57467965271896
4547.313         1.53314992572009
4550.124         1.54050967760805
4552.935         1.54751270392522
4555.746         1.57237815417628

A ce stade je vous recommande de normaliser le profil spectral pour une certaine longueur d'onde. VisualSpec va multiplier tous les points du spectre par un coefficient de manière à ce que l'intensité à cette longueur d'onde soit égale à 1. Vous pouvez fixer la longueur d'onde de normalisation dans la boite de dialogue Préférences... que vous appelez depuis le menu Options. C'est en fait un petit intervalle de longueur d'onde à l'intérieur duquel le logiciel va déterminer l'intensité moyenne qui sera alors normalisée à l'unité. La région 6620 angstroms est un bon choix car elle est exempte de raies majeures dans les étoiles de type spectral O, B et A :

 

La normalisation proprement dite à lieu en cliquant sur le bouton suivant de la barre d'outils :

Christian - Pourquoi cette normalisation ?

Aude - Après le binning, le niveau dans le profil spectral correspond à la somme de l'intensité de pixels individuels distribués sur l'axe transverse à la dispersion spectrale. Ce niveau peut être un grand nombre qu'il n'est pas agréable à manipuler. Pour un point du spectre pris individuellement il n'a pas non plus de signification, à moins de vouloir faire un étalonnage absolu. Il est de règle de normaliser un point du spectre situé dans le continuum à la valeur 1, l'intensité relative entre les différents points du spectre étant conservée bien sur.

Christian - Et l'étalonnage absolue ?

Aude - Tu veux tout savoir mon petit Christian (air complice). Au lieu que les intensités dans les spectres soient de simples valeurs relatives, on les transforme parfois en unités physiques. Souvent en astronomie on utilise une unité de puissance que l'on appelle erg. C'est généralement l'éclairement hors atmosphère qui est déterminé, ce qui donne une unité finale en erg/cm2/s/Å. Pour cela on observe quelques étoiles de référence dont on connaît très bien le flux absolu qu'elles nous envoient en dehors de l'atmosphère. L'étoile Vega fait partie de ces références. Je n'entre pas plus dans les détails, mais ce n'est pas très complexe à faire. Rapportez-vous à la page web suivante pour avoir une marche à suivre : http://astrosurf.com/buil/us/spectro8/spaude01.htm.

Nous allons à présent calculer la réponse spectrale de l'instrument en faisant le rapport entre le spectre observé de Alpha Gémeaux et le spectre théorique d'une étoile A1V. Depuis le menu Outils ouvrez la boite de dialogue Bibliothèque de spectres. Sélectionnez le type spectral disponible correspond au plus près à notre étoile. Ici nous choisissions le type A2V :

 

Faite un glisser/déposer de l'item du type spectral dans le profil spectral de l'étoile, et vous avez à présent dans le même graphe le spectre observé de Alpha Gémeaux et son spectre théorique : 

 

Lancez dans le menu Opérations la commande Division et diviser vos deux profils, ... dans le bon ordre. Voici le résultat :

 

Il ne vous reste plus qu'à lisser cette courbe pour en retirer les aspérités. L'opération est interactive à partir de la commande Continuum du menu Radiométrie :

 

Sauvegardez le résultat, sous le nom REPONSE par exemple.

On charge à présent l'image spectrale 45677_2 et on affiche le profil spectral :

Alain - Je suppose que tu va réaliser l'étalonnage spectral ?

Aude - Exactement. C'est vraiment la première opération à faire.

Alain - J'ai beau regarder le spectre, je n'arrive à identifier que les raies de l'hydrogène il me semble. Il va falloir se limiter à une loi de dispersion linéaire ?

Aude - Il y a une difficulté potentielle en effet. Pour résoudre le problème, nous allons supposer que la loi de dispersion calculée pour Alpha Gémeaux s'applique à HD45677.

Christian - L'équation de la dispersion est donc une constante du spectrographe.

Aude - Si l'étoile est toujours placée au même endroit par rapport au CCD, alors oui, on peut considérer que la loi de dispersion déterminée expérimentalement tout à l'heure est constante. Ceci est vrai dans un spectrographe à basse résolution, mais il faut être plus prudent avec un instrument fortement dispersif, utilisé par exemple pour des mesures de haute précision de vitesses radiales. Il est nécessaire alors que chaque spectre soit accompagné d'un étalonnage qui lui est propre, en utilisant des lampes à spectre d'émission du thorium, de l'argon, etc.

Voici comment nous allons procéder avec l'étoile HD45677. Appelez la boite de dialogue Etalonnage non-linéaire, Sélectionnez la raie H-alpha avec la souris et entrez sa longueur d'onde. Remplir les champs des termes X2 et X avec les valeurs du polynôme calculé précédemment, puis cliquez sur le bouton Appliquer :

 

Le spectre de HD45677 est alors étalonné spectralement automatiquement. Nous nous sommes servis d'une seule raie, la raie H-alpha, mais cela aurait pu être aussi la raie H-beta. La loi de dispersion est cependant non-linéaire et garantie un étalonnage à un angstroms près pratiquement.

Raymond - Mais s'il n'y a aucune raies identifiables dans le spectre ?

Aude - C'est une situation plutôt rare. Mais cela arrive parfois sur des étoiles particulières ou très faibles. Il faut alors utiliser une particularité de notre spectrographe qui permet d'observer l'ordre zéro par basculement du réseau à diffraction. Si les positions angulaires du réseau sont stables, il est possible, en analysant la position de l'objet dans l'image d'ordre zéro, d'étalonner en longueur d'onde son spectre. Il existe en effet une relation directe entre la position du spectre suivant l'axe des lignes du CCD et la position de l'objet suivant cet axe dans l'image d'ordre zéro. Je vous montre dans les images qui suivent le dispositif mécanique qui fixe les deux positions stables du réseau. Ce n'est qu'un exemple, d'autres solutions mécaniques sont possibles bien sur :

  

Il nous reste plus qu'à diviser le profil spectral de HD45677 par la réponse instrumentale que nos avons calculé tout à l'heure. Une fois fait, vous normalisez le continuum pour la longueur d'onde de 6620 angstroms, vous sauvegardez le résultat et c'est fini, vous avez un spectre entièrement étalonné :

 

Christan - J'archive ce spectre et c'est terminé !

Aude - Non, la vraie exploitation à des fins scientifiques commence seulement. C'est le plus intéressant ! Vous pouvez par exemple relever l'intensité de la raies H-alpha par rapport au continuum et suivre cette évolution en fonction du temps. Il est possible de mesurer aussi la largeur équivalente des raies, qui est un paramètre physique important ou encore, relever le rougissement du spectre.

Comme c'est souvent le cas, souvenez vous qu'une observation isolée est rarement intéressante. Il faudra suivre un même objet dans le temps ou comparer vos observations avec celles d'autres collègues professionnels ou amateurs. Mes chers stagiaires, c'est une raison de plus qui me fait espérer vous compter comme des acteurs actifs dans le domaine de la spectrographie astronomique.

Voila, je vous libère et bonnes observations !

Alain - Je vais méditer tout ceci. C'est bien un Eldorado, tu avais raison Aude.

Raymond - Je m'y mets à la construction d'un spectro, ce n'est vraiment pas l'air sorcier en fin de compte. Tu as bien démystifié la chose.

Christian -  Je viens de m'apercevoir lors de ce stage que j'aime la spectrographie et tout ce qui tourne autour. Je ne regrette vraiment pas d'être venu !!!

Aude - A vous de jouer...


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