Vers plus de rendement quantique pour l’imagerie couleur

 

Par C.CAVADORE

Le but de cet article est de mettre à jour les mécanismes mis en jeu dans un CCD lors de l’accumulation des photons et de l’optimisation du rendement du CCD par son amincissement. Je n’entrerai pas dans les détails les plus subtils de la technologie du CCD, il y a là matière à écrire des livres dont on trouvera les références à la fin de cet article. Je me limiterais à décrire la conversion des photons en photoélectrons à l’intérieur du CCD dans son essentiel. Une partie concernera une application sur l’utilisation d’un CCD aminci et de filtres de couleurs pour la réalisation des images trichromes.

Depuis qu’il été inventé dans les années 70, le CCD se décline sous la forme de plusieurs catégories de capteurs, optimisé pour chaque application : vidéo, astronomie, imagerie médicale, contrôle non destructif... Il a bénéficié, depuis presque 30 ans d’améliorations significatives, plus grande surface, plus grande dynamique, plus proche du détecteur parfait. Il est devenu indispensable pour l’imagerie astronomique. Dans cet article, je ne parlerai que des CCD utilisés dans ce domaine et non de CCD couleurs pour la vidéo grand public.

Tout d’abord, la technologie micro-électronique utilisée pour fabriquer ou fondre un CCD est propre au CCD et diverge de celle mise en oeuvre pour réaliser, en autres, les processeurs numériques comme les Pentium. La technologie utilisée pour la fabrication du CCD a été spécialement mis en oeuvre et optimisée pour le CCD capteur de lumière, c’est une filière technologique spécifique. Pour donner une idée de la différence de ces deux technologies, la règle de dessin minimum d’un CCD est de 5µm alors que celle des processeurs numériques actuels atteint 0.3µm et continue de diminuer encore. De plus, comme on ne fabrique pas autant de CCD que de microprocesseurs numériques (Pentium), on comprend pourquoi le CCD est bien plus cher. Le CCD est fabriqué en plusieurs étapes à partir d’une tranche de silicium  cristallin pur (wafer). Le résultat ressemble beaucoup à la figure donnée ici, d’un pixel d’un CCD vu par la coupe.

Les dimensions données dans ce schéma (figure 1) sont indicatives et dépendent du fondeur du CCD. Du haut vers le bas, on a tout d’abord une couche dite de passivation en Si3N4  (Nitrure de silicium) ou en SiO2, puis l’on rencontre les grilles qui créent les puits de potentiel et le transfert du CCD en polysilicium (silicium à l’état amorphe fortement dopé pour être conducteur), une couche d’isolation en SiO2 très fine (80Å), du silicium dopé n (pour un CCD à canal enterré dit Buried CCD) et enfin le substrat en silicium dopé p relié a la masse. Les différents dopages du silicium permettent d’obtenir des propriétés électriques bien définies et de rendre ainsi le silicium conducteur bien que ne l’étant pas à l’état naturel (d’ou appellation de semi-conducteur). Ce dopage consiste à introduire des atomes (bore ou arsenic), 1015 à18  atomes par cm3 dans le réseau cristallin du silicium.

Fig. 2

 

La lumière, lorsqu’elle entre dans le CCD (figure 2), subit le même trajet que la description ci dessus, de haut vers le bas. Elle traverse la zone passivée et les grilles (polarisées à -8V pour un CCD MPP). Les photons, lorsqu’ils arrivent dans la zone active (ou dite dépeuplée), interagissent avec le silicium par l’effet photoélectrique. Un photo-électron et un trou (« électron positif ») se forment ; le trou est attiré vers le substrat relié à la masse du CCD. L’électron est attiré et vient se stocker dans le puits de potentiel indiqué dans le schéma. Cet électron va rejoindre tous les autres électrons crées lors de l’exposition du CCD à la lumière. A la fin de l’exposition, les photo-charges (électrons) sont transférées vers la sortie du CCD pour être converties en tension, puis en un nombre numérique vers l’ordinateur... Mais c’est une autre histoire...

Revenons au début, à nos photons... Le rendement quantique du CCD (QE) se défini par le rapport entre le nombre de photons entrants et le nombre d ‘électrons générés. Le capteur idéal est celui qui transforme tous les photons en électrons ; il a un rendement quantique égal a 1 ou 100%. Hélas, ce rendement n’est jamais égal à 1 (cas idéal), et dépend de la longueur d’onde ou couleur des photons incidents. Plus ce rendement est proche de 1 et plus le CCD est sensible. Voici pour exemple la courbe du rendement quantique d’un capteur bien connu, le KAF0400 (figure 4). 

Fig. 4

 

Il est facile de remarquer que le spectre visible (0.3-0.6µm) n’est pas la partie du spectre la plus sensible du CCD. C’est pire si l’on regarde les longueurs d’ondes bleues où le rendement est presque digne de la photographie (<10%). Le maximum est atteint à 0.65µm où l’on a 40% de rendement (c’est déjà pas si mal !). Les CCD antiblooming ont un rendement encore plus bas. Une partie de la zone sensible du pixel sert de gouttière afin d’évacuer les électrons lorsque le pixel est saturé. Pour les autres pixels, non saturés, cette gouttière n’est pas sensible à la lumière d’où une perte de rendement.

On peut se demander pourquoi ce rendement n’est pas plus élevé sur toute la bande 0.3-1.1 µm ?

Il est clair que le passage des photons de la première couche superficielle de passivation n’est pas un gros problème en soit. Cette zone ressemble beaucoup à du quartz, la perte est faible. Le point critique vient de leur passage à travers les grilles de polysilicium qui jouent le rôle d’un filtre. Celui-ci absorbe une grosse partie des photons bleus. Les couches à traverser sont minces, inférieures à la longueur d’onde de la lumière incidente, les photons interfèrent dans celles ci (polysilicium - couche SiO2 de 80Å).

Ces interférences destructives ou additives provoquent des variations du rendement quantique en fonction de la longueur d’onde. La figure 5 illustre la transmission des grilles en polysilicium. La courbe est tourmentée, la partie visible du spectre est déjà assez atténuée. De plus, la moindre variation d’épaisseur de ces couches provoquent un décalage des sommets de la courbe. Ceci est illustré avec la courbe en pointillées où j’ai fait varier l’épaisseur du polysilicium que de 5% par rapport à la courbe rouge. On pourrait s’attendre à obtenir un QE reproduisant fidèlement ces variations. Comme toutes les grilles des pixels du CCD ont une distribution d’épaisseur centrée sur une valeur moyenne avec un écart type non nul, les variations sont globalement atténué par un effet de moyenne sur le rendement quantique final. Observez pour vous en convaincre les variations de la courbe de rendement quantique du CCD KAF0400 . Enfin, cela conforte l’idée qu’un Flat-Field doit bien compenser les variations de rendement quantique d’un pixel à l’autre où l’épaisseur des grilles varient...

 

Fig. 5

Mais reste cette forte absorption du bleu, totale en dessous de 0.4µm. Quelles solutions a apporter à ce problème ? Enlever les grilles ? Non, le CCD ne marcherait plus (d’ailleurs, cela ne serait plus un CCD mais une galette de silicium !). 

Il en existe plusieurs. La première est de mettre un colorant par dessus la couche de passivation, qui par fluorescence, re-émet les photons bleus vers des photons plus rouges. Je ne compte pas développer en détail ce procédé. Son inconvénient majeur est son instabilité dans le temps. Les CCD ainsi traités sont « UV coating ». Je parlerai que de la méthode la plus utilisée dans le monde de l’astronomie professionnelle : Il s’agit de l’amincissement et de l’éclairer par l’arrière.

L’idée principale est de faire passer les photons par l’arrière du CCD afin d’éviter les grilles et autres interfaces absorbantes. Cependant, la zone de silicium à traverser est trop importante pour que les photo-charges puissent atteindre le puits de potentiel. Imaginez 700µm en moyenne, le bout du monde ! Il faut alors amincir le CCD à 10µm en partant de l’arrière. Cette opération est très délicate à réaliser. On doit choisir préalablement un CCD qui fonctionne. Avant la découpe des CCD disposés en mosaïque sur le wafer en fin de fabrication, il n’est pas rare d’en trouver une bonne moitié ne fonctionnant pas d’office. C’est une question de rendement de la technologie du fondeur. Une fois le premier tri effectué par élimination des CCD défectueux, on attaque chimiquement à l’acide fort (fluorhydrique) la face arrière du CCD jusqu’à atteindre ces fameux 10 µm, avec une précision de planéité suffisante. Dans cette opération, il peut y avoir de la casse. Le CCD qui marchait initialement très bien se retrouve alors au rebut. Ensuite, la face arrière du silicium mise à nue subit une implantation ionique ou dopage P pour éviter des instabilités du rendement quantique. Enfin, comme l’indice de réfraction du silicium est élevé par rapport au vide, une grosse partie de la lumière serait perdue par réflexion (50%). Un traitement antireflet à l’Al2O3 ou TiO2 permet d’améliorer grandement ce point (figure 6). Je fais une parenthèse pour signaler que les CCD pour l’astronomie dignes de ce noms sont de type MPP-Multi pinned phase, ce qui permet d’avoir des courants d’obscurité très faibles (de l’ordre de 10pA/cm²) : cette propriété reste quasiment conservée pour des CCD amincis.

 

Fig. 6

 

Une fois ces opérations réalisées avec succès, il ne «reste» qu’à conditionner la fine membrane d’un centimètre carré ou plus et de 10 µm d’épaisseur (1/10 l’épaisseur d’un cheveu) dans un  boîtier (packaging) en céramique. Ce point peut paraître anodin, mais il a torturé l’esprit de plus d’un ingénieur. Il eu un temps où l’on installait cette fine membrane sur un cadre, mais cela avait tendance à la faire gondoler. Cette non planéité est très gênante pour former un plan image surtout quand le rapport F/D est faible. On reconnaît ce montage lorsqu’on regarde le soleil à travers ce CCD, l’astre du jour devient rouge. La membrane est parfois collée sur un support  « dur », mais gare aux contraintes de dilatation des matériaux (surtout lorsqu’on refroidi le CCD). Les technologies récentes utilisent des procédés d’hybridation entre la membrane du CCD et son support : l’interface ou pads du CCD (points où s’installent les fils d’or sur le bord du CCD pour le relier électriquement à son boîtier et ensuite vers l’extérieur) est relié par des microbilles de métal (petites bosses visibles sur le pourtour du CCD). Parfois, ces montages provoquent la perte, sans importance, de quelques lignes en haut et en bas du capteur. Le refroidissement de ce type CCD est plus facile car la masse inertielle à refroidir est extrêmement réduite par rapport a un CCD épais, je l’ai expérimenté sur notre caméra.

La terminologie pour designer ce type de CCD est de les qualifier de CCD backside (éclairés par l’arrière) à l’opposé des CCD classiques ou épais dits frontside (éclairés par l’avant). Malheureusement le prix d’un tel composant est typiquement 5 fois plus cher que la version du même CCD non aminci à grade équivalent. Un tel prix ne destinerait ces CCD que vers un usage professionnel ? Il existe maintenant des cameras complètes avec un CCD SITe 512x512 aminci pour amateurs, vendues aux USA pour environ $9950 par Apogee. Cela reste cher, mais abordable pour un club.

Quelles améliorations attendre d’un tel CCD par rapport à sa version frontside ?

Voici les courbes de rendement quantiques du même CCD, version frontside Thomson TH7895M et TH7395N version backside (notez l’imagination de Thomson le 8 devient un 3 comme si on avait aminci le 8 et le M devient N aussi !)

 

Fig. 7

 

Il parait clair que tous ces efforts n’ont pas été vains (Figure 7). Par exemple, nous avons 40% de rendement maximum dans le rouge à 0.65µm avec le CCD épais, ce 40% se retrouve à 0.4µm pour le CCD aminci. La partie visible du spectre, surtout le bleu retrouvent un rendement très important. Le rayonnement ultraviolet, entre 0.2 et 0.3µm, est dorénavant accessible. De plus, le maximum de rendement du CCD aminci est de 70%, situé vers le rouge-orange (0.57µm). Des CCD encore plus optimisés atteignent 90%, il en existe chez SITe et Loral.  Ces détecteurs sont presque parfaits ! L'aspect visuel d’un CCD aminci est totalement noir, signe que toute la lumière visible y est complètement absorbée. A l’opposé, les CCD épais sont plutôt gris, avec de belles irisations arc en ciel venant du réseau de grilles de polysilicium. Plus quantitativement, le nombre de photons total, susceptibles d’êtres capté par un CCD dans la bande 0,2-1,1µm  est proportionnel au nombre :. Le rapport entre deux nombres pour chaque type de CCD donne une idée de l’écart de sensibilité moyenne sur toute la bande. Ici (TH7395N/TH7895M), le rapport est de 2, donc globalement 2 fois plus sensible. Si l’on regarde plus isolément dans le bleu (0.2-0.4µm) le rapport est de 35 ! C’est surtout, ce dernier chiffre qui est intéressant : le temps de pose est réduit d’un ordre de grandeur dans le bleu. La réalisation d’images couleurs dans ce domaine ne sera plus fait de longues poses du CCD épais. Il est bien connu qu’en imagerie du ciel profond, il vaut mieux poser le plus court possible pour minimiser les défauts du télescope et la patience de l’observateur !

 

J'ai eu la chance de récupérer des échantillons de tests de CCD aminci TH7395N de chez Thomson. Ils ont quelques défauts, comme un pixel très chaud qui pollue toute une colonne même lorsqu’il est refroidi a -40°C. Je devais remplacer l’ancien TH7895M d’une Alpha500, par la version du même CCD aminci. Cependant, ce CCD n’est pas compatible broche à broche avec son cousin germain. L’espacement entre les deux rangées de pattes est plus grand qu’un 1/10e d’inches. J’ai du refaire une carte CCD et modifier le chronogramme des horloges verticales qui ont besoin d’êtres cadencées un peu plus lentement.

La nouvelle caméra équipée de son nouveau CCD a été reinstallée au foyer primaire du T400 à F/D=4.7 de l’observatoire des Pises. Les premiers essais se sont avérés concluant. Cependant un tel CCD possède ses inconvénients : d’étranges moirures apparaissent sur les images (180s de pose) et sont de plus en plus visibles lors de poses plus longues. Ce sont des franges et leur existence est l’un des redoutables inconvénients de ce type de CCD. La lumière infrarouge pénètre si bien dans ce CCD très fin qu’elle le traverse, se réfléchi sur la face avant du CCD et revient en créant des franges d’interférences. Les variations d’épaisseurs du CCD les accentuent encore plus. Le phénomène s’apparente bien aux anneaux de Newton observés entre deux lames de verre. Ces franges sont bien visibles sur l’image brute de Ngc3642 de 180s de pose, (Figure 8).

 

Fig. 8

 

La lumière naturelle du fond de ciel nocturne n’est pas totalement continue : il existe des raies d’émissions monochromatiques. Dans le vert, il y a une raie interdite intense de l’oxygène atomique située vers 550 nm. Le ciel émet aussi dans les bandes Rouge et Infrarouge à cause du radical OH de l’atmosphère. Avec la pollution urbaine, rien ne s’arrange : le doublet de raies de sodium est prépondérant. La présence de ces raies quasi monochromatiques, expliquent la forte intensité du phénomène de franges dans le CCD aminci. Malheureusement, les Flats du matin ou du soir ne peuvent pas corriger l’effet de franges. La lumière crépusculaire pour réaliser ces Flats est radicalement différente de celle émise dans la nuit après le crépuscule astronomique. Elle composée d’une lumière polychromatique et ne peut pas montrer de telles franges. Seule la réalisation d’un « Flat de nuit » peut les corriger.

Pour isoler ce nouveau biais du CCD (en plus du sacro-saint triplet d’images Flat, Noir et Offset), nous avons réalisé des poses de 5 minutes d’une partie du ciel où les étoiles brillantes sont rares, dans le même secteur que le fameux Hubble Deep-Field, vers le pôle galactique sous la Grande Ourse, en prenant soin de décaler après chaque poses, le télescope de quelques minutes d’arc. Nous avons réalisé 13 poses et avons extrait les franges d’interférences en réalisant une pile médiane combinée à des piles moyennes à l’aide du logiciel PisesAtlas-Prism97. Préalablement, les 13 poses ont été débarrassées de leur flat, noir et offset afin d’obtenir que la composante fond de ciel avec ses franges d’interférences. Voici le résultat, impressionnant, non (figure 9) ?

 

Fig. 9

 

Il est clair que ce biais est de type additif, il est tout comme le « noir » du CCD dépendant de la pose et pire encore peut être des conditions météorologiques lors de l’observation. Aux Pises, nous n’avons pas constaté d’évolutions gênantes de cette carte d’interférences de notre CCD. Néanmoins, je ne peux pas l’affirmer ici en toute certitude : nous n’avons pas encore le recul nécessaire pour rendre définitive cette opinion. La caméra n’a fonctionné que depuis une dizaine de nuits depuis janvier97. La classique formule de prétraitement en supposant que chaque composante de référence (noir, offset, flat) est pure:

 

 

 

devient

 

 

 

Image_Brute 

: celle issue du télescope

Offset

: carte d’offset du CCD

Noir 

: carte du noir du CCD sans offset

Flat

: carte du flat sans noir, ni offset, si ceux ci ne sont pas négligeables, <Flat> est sa valeur moyenne

r

: coefficient d’optimisation du noir pour que celui-ci soit le plus adapté à l’image que l’on doit prétraiter

Franges

: Image des franges, à moyenne nulle, sans Flat, ni Offset, ni Noir et ni étoiles !

a

: coefficient de normalisation pour adapter le temps de pose de l’image à l’amplitude des franges

 

Les images pretraitées ainsi (l’image réalisée du champ Hubble Deep Field) ne montrent pratiquement plus de franges residuelles.

Il existe une solution pour se débarrasser des franges directement lors de l’acquisition des images : c’est l’emploi du filtre Schott KG3 dont voici la caractéristique (Figure 10):

 

Figure 10

 



Fig. 11

 

Les deux images brutes de la figure 11 ont été réalisées à quelques minutes d’intervalle, le champ n’est pas le même, le temps de pose est identique (180s), le télescope n’était pas en mode guidage (étoiles étirées). Celle de droite est sans le filtre et celle de gauche réalisée avec l’interposition d’un KG3 avec la mise au point recalibrée. Remarquez aussi la colonne défectueuse de notre CCD.

L’atténuation est presque complète et ne montre que de vagues résidus lorsque l’on composite ce type d’images. C’est plutôt satisfaisant ! Mais doit on en rester la ? Il m’a semblé nécessaire de quantifier la perte de « sensibilité » sur toute la bande avec l’expression :

 

 

QE(l) est le rendement du TH7395N et TKG3(l) la transmission du filtre miroir chaud KG3. d est le domaine de réponse spectrale du CCD (0.2-1.1µm)

 

On obtient 0,57. Ce qui veut dire que l’on perd 40% de l’énergie dans la bande de réponse du CCD. Il faut garder à l’esprit que la bande visible du CCD aminci (la plus importante finalement) en est nullement affectée (le filtre parait visuellement transparent et incolore). On ne retiendra cette configuration que pour de l’imagerie dans le visible. Elle peut être utile si l’on ne possède pas l’image de référence des franges d’interférences de la figure 9. C’est à exclure complètement pour l’imagerie infrarouge.

 

Performance des CCD amincis pour l’imagerie couleur

L’application idéale pour ce type de capteur, outre le gain d’un facteur 2 sur le temps de pose en imagerie non filtrée, est la réalisation de trichromies.

Bien que la bande ultraviolette soit accessible au CCD aminci et reste interdite pour leur homologues épais, je ne développerai pas explicitement d’application dans ce domaine. Elle se restreint à des optiques équipées uniquement de miroirs ou de lentilles en quartz, y compris le hublot de la caméra et la fenêtre du CCD, le tout situé en haute altitude (plus de 2500m).

Tout d’abord, je vais indiquer ici la transmission des combinaisons de filtres SCHOTT nécessaires pour réaliser des images CCD couleurs (Figure 12). Les combinaisons sont :

 

Bleu

BG39+BG25

Vert

BG18+GG495

Rouge

OG570+KG3

Rouge2

RG630+KG3

Infra rouge

RG830

 

Ces associations de filtres se rapprochent beaucoup de celles utilisées dans les mesures photométriques de Johnson et Morgan. J’ai modifié une combinaison de filtres Rouge (Rouge2) pour une meilleure séparation des bandes verte et rouge. Nous ne l’avons pas encore testée, car nous ne possédons pas de filtre RG630, mais elle devrait à priori être meilleure. On peut aussi combler la bande 0.75-0.8µm (proche IR) avec un filtre RG9. Les filtres B V R permettent d’obtenir le triplet d’images, composantes de base de l’imagerie couleur. On peut étendre la trichromie vers l’infra-rouge avec le triplet de filtres V R et I.

 

Fig. 12

A partir de toutes ces données (rendement quantique, transmission des filtres), il est aisé d’en déduire le temps de pose pour chaque combinaison de filtres et chaque capteur. Le but étant d’obtenir la même quantité de signal (eg ADU) sur toutes les images composantes de la trichromie. Je suppose que la scène de l’image est une source rayonnant de manière homogène dans tout le spectre et une optique (télescopes) identiques pour toute la série de tableaux. Enfin, j’ai calculé comme si la taille des pixels entre les CCD était similaire. L’objectif est de réaliser des images trichromes les plus équilibrées possibles les unes par rapport aux autres (rapport signal à bruit identique). Nous avons pris comme référence 1. Le temps de pose par rapport au filtre Rouge pour chaque capteur est donné dans le tableau suivant :

 

Capteur

KAF0400

TH7895M

TH7395N

Bleu

4.8

6.4

1.58

Vert

1.45

1.61

1.24

Rouge

1

1

1

Rouge2

1.6

1.6

1.70

Infra rouge

1.21

1.6

1.70

 

Par exemple, si je pose 1s dans le rouge avec le KAF0400, je serais oblige de poser 4.8-5s avec le filtre Bleu pour avoir la même quantité de signal. Par contre, l’effet du CCD aminci est clair : celui d’offrir la possibilité d’acquérir des images trichromes avec des temps de poses pratiquement dans un rapport 1:1:1 pour les trois filtres. Dans cette dernière remarque, je prends comme filtre de référence le Rouge2 à la place du Rouge.

Pour finir, allons plus loin dans la comparaison et établissons un tableau qui compare les CCD de manière absolue entre eux avec le critère suivant: avoir le même signal avec des filtres et télescopes identiques avec cette fois ci des CCD différents.

 

 

 

 

Capteur

KAF0400

TH7895M

TH7395N

Bleu

5.8

7

1

Vert

2.5

2.5

1

Rouge

1.94

1.74

1

Rouge2

1.82

1.64

1

Infra rouge

1.35

1.61

1

 

Exemple : je pose 1 sec avec le filtre bleu associé au TH7395N aminci, je devrais poser 6 sec ou 6 fois plus avec un KAF0400 associé au même filtre pour avoir le même signal. Pour une pose courte, il n’est pas grave de poser 6 fois plus, mais quand il s’agit de 5 minutes et que l’on doit poser 30 minutes pour avoir le même signal, il y a là de quoi douter de l’efficacité légendaire du CCD.

Le dernier tableau donne le temps de pose pour obtenir une quantité de signal identique pour tous les CCD et tous les filtres avec comme référence, un capteur TH7395N associé à un filtre rouge.

 

Capteur

KAF0400

TH7895M

TH7395N

Bleu

9.31

12.4

1.58

Vert

2.8

2.9

1.24

Rouge

1.9

1.74

1

Rouge2

3.1

2.9

1.7

Infra rouge

2.35

2.9

1.7

 

Les informations sur les filtres SCHOTT se trouvent ici.

 

 

Autres filtres

Ici sont notés quelques autres filtres bien utiles, comme des filtres interferentiels et comment se les procurer chez Edmund Scientific

 

Raie
Filtre possible, tous 10 nm bande passante
Longueur d'onde centrale
[OII]
-
372.6
HeII
467NM
50.8MM SQ
Xe emission line NT43-165
$145.00
468.6
[OIII]
500NM
50.8MM SQ
He emission line
NT43-169
$149.30
500.7
HeI
589NM
50.8MM SQ
Na He emission lines
NT43-181
$149.30
587.6
[OI]
632NM
50.8MM SQ
HeNe laser line
NT43-185
$149.30
630.0
H alpha
50.8MM SQ
NT43-190
$149.30
656.3
[SII]
671NM
50.8MM SQ
Li emission line
NT43-191
$149.30
672.4
[SIII]
-
953.2
H beta
24.15MM DIA
HB emission line
NT46-040
$77.20
486.3

 

Toutes les informations sur les filtres interferentiels d'Edmund Scientific se trouvent ici

 

Autres filtres de couleur

Il est aussi possible d'utiliser des filtres couleurs de chez Edmund Scientific pour de l'imagerie couleur.

Un test tres interessant pourra etre trouvé ici (C.Buil)

 

Soit le jeu additif ou soustractif pourra etre utilisé :

FILTER DICHROIC SET 50MM DIA Additive Set of Red, Green, Blue 50mm Dia. NT52-547 $72.10

FILTER DICHROIC SET 50MM DIA Subtractive Set of Cyan, Magenta, Yellow 50mm Dia. NT52-550 $72.10

 

 

 

 

Conclusion

Il est légitime que l’astronomie CCD amateur se captive pour l’utilisation de CCD avec de plus en plus de pixels. En effet, les capteurs 512x512 sont considérés maintenant comme de petits capteurs, les 1000x1000 dans la catégorie moyenne... Un autre aspect du CCD a été abordé ici : son rendement vis à vis de la faible lumière venue du ciel. Les CCD amincis offrent une amélioration très importante de sensibilité en dépit de son prix élevé. Ceci s’explique par la faible demande et donc une fabrication quasi artisanale. Pour nous, ce CCD est une nouvelle révolution, pour peut que l’on prétraite soigneusement les images : temps de pose 2 fois plus courts, imagerie couleur encore plus rapide (7 fois plus dans le bleu). Il ne reste plus qu’a parier que l’on trouvera ce type de capteur plus fréquemment dans le domaine de l’astronomie CCD amateur.

 

Références

- « Astronomie CCD » par C.Buil édité par la Société d’Astronomie Populaire

- « Filtres optiques en verre », édité par la Société SCHOTT

- « Solid State Imaging With CCD » par Albert J.P Theuwissen édité par KLUWER ACADEMIC PUBLISHERS

- « Imaging Devices using the CCD concept », IEEE, Vol 63, n°1 janvier 1975

- « Scientific CCD » by James R.Janesick, T.Elliott, S.Collins Optical Engineering Aout 87, Vol 26 n°8

- Datasheets de THOMSON et KODAK

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