Un télescope de voyage de 200mm f/4.6

Ce télescope a été conçu autour du miroir primaire dont je disposais et que j'utilise dans mon 200mm équatorial. J'ai voulu à partir de ce miroir concevoir un instrument ultra léger qui puisse être transporté facilement. J'envisage 2 usages pour cet instrument. La première idée est de l'emmener en avion pour aller observer dans l'hémisphère Sud. Mais plus proche de chez nous, l'idée est de pouvoir l'emporter en montagne dans un sac à dos pour profiter d'un ciel d'altitude et d'un coin de nature préservé pour passer la nuit.

L'objectif a été de réduire au maximum l'encombrement et le poids du télescope, parfois au détriment de la simplicité de montage. Cela veut dire que ce n'est pas un télescope idéal quand on veut l'utiliser régulièrement le soir ou le week-end. C'est plus un télescope pour les vacances où on peut prendre tout le temps pour le monter pendant que le soleil se couche.

Bref, voici donc en 2 photos le résultat. D'abord, le télescope rangé dans un parallélépipède de 25x25x16 cm (les jumelles 7x50 donnent l'échelle) pour une masse totale juste en dessous des 6 kg. Seuls 4 tubes en alu ne rentrent pas dans la boite et doivent être transportés à part. Ensuite le télescope tout monté et prêt à être utilisé.

Conception

Quand on souhaite construire une télescope très compact, il faut impérativement penser au télescope dans son ensemble en sachant exactement comment les différents morceaux vont pouvoir s'imbriquer les uns dans les autres pour occuper un volume minimum. Le point de départ est le miroir primaire. Le primaire dont je dispose fait 205 mm de diamètre pour une focale de 920mm. Son épaisseur est de 28 mm (ce qui donne une masse de 2 kg soit 1/3 du télescope complet). Le plus souvent pour un télescope démontable, la cage secondaire circulaire (ou parfois un simple anneau) se loge dans la boite qui contient le primaire. Dans mon cas, si j'avais voulu faire une cage secondaire circulaire j'aurais du prévoir un diamètre intérieur de 230mm minimum pour ne pas avoir de vignettage. Cela entraîne donc un diamètre extérieur de 250mm environ et donc autant pour la largeur interne de la boite du primaire. Et finalement j'aboutissais à 290mm extérieur pour les côtés de la fourche.

Pour réduire l'encombrement au minimum, j'ai opté pour une simple plaque de support du porte oculaire et une araignée à 2 branches pour tenir le secondaire. Cela m'a permis de faire une boite primaire de 210mm de largeur intérieure (pour un miroir de 205 mm). Reste ensuite à choisir la hauteur de la boite pour que tous les éléments : porte-oculaire et araignée, chercheur, boulons, contrepoids, tourillons d'altitude... rentrent dedans.

Partie haute

La principale difficulté a été de faire une partie haute qui rentre dans une boite de 21cm de côté et qui soit la moins épaisse possible. Il fallait aussi réduire aussi le poids au maximum. Le miroir secondaire fait 46mm de petit axe. Le porte-oculaire est fait à partir d'un objectif d'appareil photo (un zoom 35-70 de qualité médiocre). J'ai simplement enlevé les lentilles et j'ai collé à l'intérieur un tube PVC de 32mm intérieur avec un peu de feutrine pour accueillir les oculaires. Le chercheur est celui qui était livré avec la lunette astromaster Pro 357. Il est de petit diamètre (20 ou 25mm) mais l'image est de bonne qualité. C'est un peu juste pour un 200 mais c'est léger et compact et en plus je l'avais sous la main, alors je n'allais pas m'en priver quand même !

L'araignée est la copie conforme de celle du bino de 150. Le principe fonctionne bien : on serre les deux vis de maintien juste ce qu'il faut et ensuite on tourne le secondaire à la main pour l'orienter.

Boite du miroir primaire

La boite du primaire est construite en contreplaqué de 10mm. Les découpes pour la jonction des planches dans les angles ont été faites à la scie sauteuse et ajustées à la râpe. Puis l'ensemble a été collé et vissé. Ce type de montage demande un peu plus de temps qu'un assemblage plus simple mais c'est d'une solidité remarquable. En assemblant simplement les éléments sans colle ni vis, la boite tenait déjà toute montée !

Les vis de collimation sont enlevées à chaque démontage. Cela demande plus de temps car il faut recollimater à chaque fois, mais cela permet de faire reposer le miroir à plat ce qui lui offre une meilleure protection en cas de choc. un rondelle en bois est collée à l'araldite sur la tête des vis, cela permet de les tourner à la main et comme le tube est assez court on peut collimater tout en regardant à l'oculaire ce qui facilite bien la chose.

Contrepoids déporté

Sur un télescope de petit diamètre comme ce 200, il est difficile d'alléger suffisamment la partie haute pour qu'elle soit contrebalancée par la boîte primaire tout en gardant un axe de rotation bas. Le problème est que le poids des oculaires et du porte oculaire est le même que sur un gros télescope. Il faut donc se résoudre à utiliser un contrepoids.

Le premier avantage d'un contrepoids déporté par rapport à un contrepoids placé sous la boite du primaire c'est qu'on a une plus grande liberté pour choisir sa position. Ainsi il est possible de l'éloigner au maximum du centre de gravité et donc de réduire sa masse pour une efficacité équivalente. Pour cela il faut quand même que le télescope soit surélevé par rapport au sol. Pour ce T200, le contrepoids déporté pèse 500g, et il est tenu par des tubes en alu de section carrée de 10mm de côté et 1 mm d'épaisseur. Il y a tout de même un petit contrepoids en plomb de 150g intégré à côté du miroir (qui sera peut être supprimé si j'ajoute un peu de poids au contrepoids déporté. Le deuxième avantage est qu'on peut lui consacrer plus de place et donc utiliser des objets moins denses. Je réfléchis à la possibilité de pouvoir, à la place du plomb et de la fonte, utiliser quelque chose que je pourrais trouver facilement sur le lieu d'observation (cailloux, sable, ou récipient plein d'eau). C'est quand même dommage de chercher à minimiser le poids du télescope pour se retrouver avec 500 g de fonte dans le sac à dos ! L'autre solution est d'utiliser des objets qu'on doit emporter avec soi mais qui ne servent à rien pendant l'observation : lampe, piles de rechange, petit déjeuner du lendemain matin (solution déjà testée avec succès sur le télescope binoculaire pendant le transit de Vénus. Le repas de midi a été utilisé pour compenser le poids des filtres solaires !).

Fourche

Rien de bien original ici. On notera qu'après une tentative (qui a lamentablement échoué) pour faire un mouvement d'altitude un peu spécial, j'ai du rattraper le coup comme j'ai pu. La fourche n'est pas symétrique, ce n'est pas très joli mais ça ne gêne pas le fonctionnement de l'instrument.

Rangement

Une fois rangé le télescope est très compact (25x25x16 cm soit 10 litres) et il occupe finalement une petite partie d'un grand sac à dos (typiquement 60 à 70 litres), ce qui laisse de la place pour le reste des affaires (sac de couchage, nourriture, eau, etc...). Les 4 tubes alu qui ne tiennent pas dans la boîte sont suffisamment courts pour entrer dans le sac. Pour le transport en avion, il doit passer sans problème en bagage cabine. Mais au cas où cela ne serait pas le cas, je l'ai prévu suffisamment robuste pour pouvoir voyager en soute à condition d'être protégé par des vêtements par exemple. Pour cela le miroir ne repose pas sur les vis de collimation pendant le transport mais sur une épaisseur de carton plume (une couche de polystyrène comprise entre 2 couches de carton). Sous le miroir, le carton plume fait 3mm d'épaisseur, du côté de la face optique j'ai prévu 5mm. Des petites cales viennent aussi se placer sur les côtés pour que le miroir ne bouge pas dans la caisse.

Voyons plus en détail comment les éléments s'imbriquent pour le rangement. Tout d'abord, voici la boîte miroir avec seulement le primaire. Sous le miroir on aperçoit en blanc le carton plume qui protège la face arrière (3 trous sont prévus pour le passage des vis de collimation). Pour le rangement une autre épaisseur de carton plume vient se placer devant (entre le miroir et les cales de retenue). On aperçoit aussi le petit contrepoids de 150g en plomb.

La plaque d'azimuth (ground board) surélevée sert de rangement pour la parie haute et toutes les petites pièces du télescope. Les pieds sont enlevés pour le rangement. On remarque des ouvertures pour faire passer d'un côté le porte-oculaire et de l'autre l'extrémité du secondaire. Tout est calculé très juste ! Un peu trop même, car j'ai du enlevé 2mm de bois dans l'épaisseur de la boîte primaire (photo ci-dessus) pour que tout rentre. Bien sûr tout doit être rangé dans l'ordre. Les boulons et écrous divers sont regroupés dans des sacs plastiques pour éviter qu'ils se balladent partout (et surtout qu'ils n'aillent pas rayer le secondaire. Celui-ci est un peu isolé du reste par un cloison, mais je compte rajouter de la mousse autour du miroir pour éviter tout problème.

On range dans la boîte : la partie haute, le chercheur, le contrepoids, une des 2 tiges support du contrepoids, les tourillons d'altitude, les boulons, les pieds, les vis de collimation et une clef de 10mm qui sert au montage et au réglage du secondaire. Lorsque tout est dans la boîte, la fourche sert de couvercle à l'ensemble et la fermeture se fait par 2 boulons de 6mm (vissables avec une pièce de monnaie).

Conclusion

L'objectif de réaliser un T200 léger et compact est rempli. Maintenant reste à voir comment il se comporte à l'usage. La première lumière a eu lieu à l'observatoire de la Garandie par un temps venté. Sur terrain mou (herbeux), c'est catastrophique ! Le télescope vibre sans arrêt et il est impossible d'observer à plus de 80x. Sur sol dur, c'est beaucoup mieux. Même si la stabilité n'est pas à la hauteur de la version équatoriale, l'instrument est agréable à utiliser jusqu'à 80x environ. Jusqu'à 150x les vibrations sont parfois un peu gênantes mais on s'en sort bien. Au delà ça devient plus pénible. Bref c'est ok pour le ciel profond mais pour le planétaire ça laisse à désirer. J'espère que sans vent ça se passera mieux.

Quoi qu'il en soit la construction en elle même a été un exercice d'optimisation plutôt amusant. Quand au prix de revient, il est très faible cr je disposais déjà des miroirs et que le reste est essentiellement de la récupération ou des matériaux de construction que j'avais en stock (j'ai dépensé moins de 10 euros pour cette construction). Je suis quand même impatient d'emmener la bête en montagne. Premier sommet prévu : le Puy de Sancy, point culminant du massif central, puis un sommet des Alpes avant pourquoi pas un voyage dans les Andes ?

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