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LE MONTAGE OPTIQUE
J'ai souhaité construire un coronographe après avoir vu des images magnifiques dans celui construit par Serge BERTORELLO et suivi ses conseils dans son excellent article didactique décrivant la construction de ce coronographe.
Je disposais d'une lunette de 60mm F/D 13 qui ne servait pas et ce recyclage en coronographe permettait d'éviter qu'elle prenne la poussière.
Le coronographe est un appareil inventé en 1930 par un ingénieur français, Bernard Lyot, qui permet de produire des éclipses artificielles et ainsi de voir les protubérances, des flammes de plusieurs milliers de kilomètres de hauteur qui naissant à la surface du Soleil et évoluent sur plusieurs heures et plusieurs jours, et la couronne qui est l'atmosphère du Soleil, plus chaude que le disque du Soleil mais moins lumineuse.
Le montage optique est simple :
- d'une part, l'objectif de la lunette fournit une image du disque du Soleil sur un écran opaque, appelé cône et supporté par une lentille, qui va occulter le disque du Soleil, l'image obtenue au foyer étant projetée grâce à cette lentille vers l'oculaire qui permettra d'observer l'éclipse artificielle.
- d'autre part, la lumière du Soleil diffusée par l'atmosphère terrestre et diffractée par les bords de l'objectif de la lunette sera éliminée grâce à une lentille qui va projeter l'image de l'objectif sur un diaphragme, qui est une pièce ronde percée d'un trou légèrement plus petit que l'image de l'objectif.
Un filtre interférentiel ne laissant passer que la radiation la plus intense du Soleil permet d'augmenter le contraste des protubérances, de filtrer la lumière du Soleil et d'assombrir le fond du ciel.
Le corps du coronographe est un tube en PVC de 50mm de diamètre et 12 cm de longueur. Il est donc petit, facilement transportable.
A l'intérieur se trouvent :
- 2 lentilles plan-convexe
de 25 mm de diamètre et 46 mm de distance focale.
- 1 filtre interférentiel
H alpha de 1 nm de bande passante centré sur la longueur d'onde
de 656.3 nm
- le diaphragme
- le support du cône
et le cône
IMAGE DU CORONOGRAPHE (en gris) ET DU RENVOI COUDE (oculaire)
CORONOGRAPHE
RENVOI COUDE
L'oculaire doit avoir une
grande distance focale pour pouvoir observer le soleil entièrement
Pour cela, j'utilise un
oculaire de 30mm de distance focale
Le soleil ayant un diamètre
de 30' en moyenne, un oculaire donnant un champ de 2° permet
de centrer facilement l'astre du jour.
Champ apparent de l'oculaire
: 50°
Focale de la lunette : 809
mm
Grossissement nécessaire
: 50 / 2 = 25 fois
Focale de l'oculaire : 809
/ 25 = 32 mm
DETAIL DE L'INTERIEUR DU CORONOGRAPHE
L'intérieur du coronographe
est constitué de 4 pièces usinées en aluminium.
La lentille 1 est tenue
par une vis se trouvant sur le tube en PVC tandis que les autres pièces
sont insérées dans la fente du tube en PVC, ce qui permet
de faire les réglages.
SUPPORT DE LA LUNETTE
Il permet de fixer le coronographe
sur le porte-oculaire à crémaillère. Il se visse d'un
côté sur le porte-oculaire et est fixé par des vis
de l'autre.
LENTILLE 1 + CONE
Le rôle de la lentille 1 est de projeter l'image de l'objectif sur le diaphragme et de tenir le cône. Elle est tenue dans une pièce en aluminium.
C'est une lentille plan-convexe de 25 mm de diamètre, 46 mm de distance focale et 5 mm d'épaisseur .
- La pièce en aluminium mesure 40 mm de diamètre extérieur, soit le diamètre intérieur du tube en PVC, et 25 mm de diamètre intérieur avec une portée pour que la surface plane de la lentille affleure celle de la pièce. La lentille ne tombe pas grâce aux deux vis se maintien sous lesquelles se trouvent des joints o-ring pour éviter le contact du métal sur le verre.
- Le support du cône
est une vis de 4mm dont la tête est collée sur la lentille
avec de la colle double-tube. Ce mode de fixation permet d'éviter
de percer la lentille et ne chauffe pas contrairement à ce que l'on
pourrait penser, en effet, le cône en aluminium renvoie la lumière
du soleil et donc sa chaleur.
Après quelques heures
d'observations, le cône est à peine chaud.
Une vis de 3mm de diamètre
aurait été préférable avec une focale de 809
mm car le diamètre du soleil est à peine inférieur
de 0.5 mm au diamètre du plus petit des cônes, ce qui très
juste.
Un écrou vissé
dans la vis permet d'éloigner la base du cône de la lentille
et ce de façon calibrée, la distance étant de 10 mm
: celle-ci ne doit pas être trop faible pour ne pas que les pousières
se trouvant sur la lentille soient vues sur le cône ( où se
trouve aussi le foyer ! ).
- Les cônes doivent être usinés au 1/100ème de millimètre : pour cela il est nécessaire de connaître la distance focale de la lunette au millimètre près et le diamètre du Soleil précisément. Il convient de rajouter environ 20'' à 25'' pour que le centrage du cône soit aisé. La distance focale de ma lunette est de 809 mm.
Leur longueur est de 20 mm.
Des rainures sont pratiquées sur le cône pour indiquer son numéro ; exemple : 4 rainures indiquent le cône numéro 4.
Le diamètre du Soleil variant au cours de l'année, j'utilise 5 cônes :
Période
Diamètre
apparent
N° du
cône
Dimension du cône
du Soleil en
min.arc
d = tan(diamètre+25'') x 809
6 novembre au 4
mars
32,25
1
7,67
4 mars au 3
avril
31,99
2
7,63
3 avril au 4
mai
31,72
3
7,56
4 mai au 18
juin
31,48
4
7,50
18 juin au 22
juillet
31,18
5
7,43
22 juillet au 6
septembre
31,74
4
7,50
6 septembre au 1
octobre
31,96
3
7,56
1 octobre au 6
novembre
32,28
2
7,63
Les cônes s'enlèvent
avec une pièce de bois et non avec le doigt pour éviter de
mettre des matières grasses.
Le cône enlevé
de son support
LE DIAPHRAGME
Ces deux éléments sont assemblés sur la même pièce. D'un côté se trouve le diaphragme (ci-dessus) et de l'autre le filtre H alpha (ci-dessous).
La position du diaphragme
doit être déterminée de façon précise.
On utilise pour celà la formule de Descartes à partir du
centre de la lentille 1,
( le rôle de la lentille
1 est de projeter l'image de l'objectif sur le diaphragme et de tenir le
cône ).
Soit 1 / OF' = 1 / OA' - 1 / OA
Nous connaissons la distance
entre l'objectif et la lentille 1 ( OA ) : 809 mm + 10 mm + (5 mm / 2)
= - 821.5 mm
( En effet, la lumière
se déplaçant arbitrairement dans un sens, il faut tenir compte
du fait que l'objet et la distance focale image ne sont pas du même
côté de la lentille)
Nous connaissons la distance
focale de la lentille 1 ( OF' ) : 46 mm
La position de l'image de
l'objectif sera donc : 1 / OA' = 1 / 46 + ( -1 / 821.5) =>
OA' = 48,73 mm.
OA' étant positif,
l'image se forme après la lentille 1 ( par rapport à l'objectif
).
La dimension du diaphragme étant OA' / OA x D (diamètre de l'objectif) = 3.56 mm
Pour éliminer la diffusion de l'atmosphère terrestre et la diffraction des bords de l'objectif sur les bords du diaphragme, on retiendra une valeur de 3 mm.
Le diaphragme mesure donc
3 mm de diamètre intérieur et le trou est conique.
LE FILTRE H ALPHA
Le filtre H alpha de 25mm de diamètre est maintenu par deux vis qui l'empêche de tomber. Sa bande passante est de 1 nm centré sur 656,3nm. Il a été acheté chez MELLES GRIOT.
Le diaphragme est placé avant le filtre par rapport à la lentille 1.
LENTILLE 2
Son rôle est de projeter l'image du cône vers l'oculaire. Elle est maintenue de la même façon que la lentille 1 et son support est fabriqué de la même façon.
Nous avons vu plus haut que la lentille 1 projette l'objectif sur le diaphragme, car l'objectif est un 'objet' au sens des lois de l'optique.
Mais la lentille 1 a un autre 'objet' : c'est le cône : en effet, celui-ci étant situé entre le foyer objet de la lentille 1 et le centre de cette lentille, son image sera donc virtuelle, la lentille 1 agissant comme une loupe.
Nous connaissons la distance
focale de la lentille 1 ( OF' ) : 46 mm
Nous connaissons la distance
de l'objet, le cône ( OA ), fixé à - 10 - 5 / 2 = -12,5
mm comme indiqué plus haut.
Nous utilisons toujours la loi de Descartes : 1 / OF' = 1 / OA' - 1 / OA
La position de l'image du
cône ' vu ' par la lentille 1 sera : 1 / OA' = 1 / 46 + ( - 1 / 12,5
) -> OA' = - 17,2 mm
OA' étant négatif,
l'image se trouve en avant de la lentille 1 ( par rapport à l'objectif
) à 17,2 mm et est donc virtuelle.
C'est cette image qui servira d'objet pour la lentille 2 et sera donc projeté vers l'oculaire.
J'ai fixé la position de la lentille 2 à 75 mm de la lentille 1 pour des raisons de commodité de réalisation pratique.
Nous connaissons la distance
focale de la lentille 2 ( OF' ) : 46 mm
Nous connaissons la position
de l'image du cône qui est l'objet de la lentille 2 ( OA ) donc -17.2
- 75 = - 92,2 mm
Nous utilisons toujours la loi de Descartes : 1 / OF' = 1 / OA' - 1 / OA
L'image du Soleil éclipsé
tant attendu se trouve donc à 1 / OA' = 1 / 46 + ( - 1 / 92,2 )
-> OA' = 91,8 mm
OA' étant positif,
l'image se forme après la lentille 2 ( par rapport à l'objectif
).
C'est là qu'il faut placer le foyer objet de l'oculaire.
Le Soleil est vu dans l'oculaire avec un rapport de grandissement de - ( - 91,8 / 92,2 ) = 0.98 fois
Mais la lentille 1 joue le rôle de loupe et le rapport de grandissement final est : 17,2 / 12,5 = 1,37 fois
C'est une pièce de diamètre 31.75 mm qui permet d'y glisser le renvoi coudé.
REMARQUE : l'utilisation d'une binoculaire est possible mais il faut allonger la longueur focale de la dernière lentille pour tenir compte de l'allongement du trajet optique.
LA MONTURE
Du fait de la précision de suivi demandé ( le cône doit rester concentrique sur le soleil, le moindre écart voit apparaître le soleil et un excès de lumière qui peut être éblouissant ), la monture à fourche m'a semblé la plus stable. Des essais avec une monture allemande type eq4 donne trop de porte à faux.
Du fait de la longueur du tube, il faut mettre une pièce pour guider le tube du coronographe de façon qu'il translate de façon rectiligne.
Le corps principal est équipé d'un miroir de 120 mm ouvert à 6 pour observer le Soleil en lumière blanche.
L'UTILISATION DU CORONOGRAPHE
Pour pointer le soleil, un système de deux anneaux dont l'ombre se projette sur une surface permet de centrer le soleil dans l'oculaire lorsque l'image des deux anneaux se confond en un seul.
On affine le centrage en placant un filtre solaire pleine ouverture à l'entrée de la lunette .
La monture du coronographe
L'arrière de la monture
Le système de pointage
: les deux anneaux doivent produire
un même cercle pour
mettre le Soleil au centre du champ
QUELQUES IMAGES
Après de longues heures passées dans l'atelier, voici la première photographie obtenue avec ce coronographe.
La photographie est obtenue avec un OM1, 1/250sec sur du TP 2415. La transparence était très bonne et un vent léger caressait la lunette. Le grandissement du tirage est de 22 fois.
Par chance, ce jour-là, une grande protubérance était visible
Protubérance le 31
juillet 2000 dans les Alpes
Autre région du Soleil
appartenant à la même photographie.
Protubérance photographiée en montage afocal avec un APN compact tenu à la main derrière l'oculaire
J'ai utilisé plusieurs sources bibliographiques pour connaître les détails de la construction du coronographe :
- Serge Bertorello ( Membre
de l'A.M.AS. ) : revue Eclipse n°15 http://serge.bertorello.free.fr
- André et Sylvain
Rondi : revue Pulsar n°736 http://www.astrosurf.com/rondi/
- Le 'Guide de l'Observateur'
Tome 1