A
propos des travaux d'Halton Arp
Les
redshifts dans les amas de galaxies (IV)
Dans
un autre article, Arp[12]
utilise le catalogue révisé de Shapley Ames (RSA), le catalogue
standard pour identifier les galaxies brillantes des amas. Il liste
17 candidats, mais la réduit pour finir par ne considérer que 8
finalistes, trouvant de nouveau que les compagnons ont un redshift
moyen de 174 km/s, supérieur à celui de la galaxie parente s'il
s'agit d'une galaxie spirale, ou 112 km/s si la galaxie parente est
elliptique. Je ne comprends pas comment il sélectionna ses finalistes
parmi les candidats. Tout ceci est bien arbitraire.
Aujourd'hui,
les objets recensés par Arp dans le catalogue RSA ont fait l'objet
d'un catalogue
séparé. Des catalogues de redshifts extragalactiques plus étendus et plus
complets ont également été compilés, et plutôt que de passer la plus
grande partie de son temps à essayer d'imaginer ce que Arp a fait,
Latham a décidé d'analyser les amas de deux d'entre eux,
auxquels il collabora[13].
Le Southern Sky Redshift Survey
(SSRS2) est raisonnablement complet jusqu'à
la magnitude voisine de 15, ou jusqu'à 10000 km/s. Ce catalogue fut
analysé avec un algorithme bien défini qui identifia chaque amas
en associant à la fois les galaxies telles qu'elles apparaissaient
sur le ciel et leur redshift.
Dans les faits, l'algorithme identifia
les amas lorsque l'augmentation de leur densité spatiale atteignit
un facteur 20 ou supérieur[14].
Pour chacun des 87 amas identifiés dans cet article, Latham a pris
la galaxie dominante comme étant celle présentant le plus grand
diamètre (la plupart du temps pour la plupart de ces galaxies, ni
la magnitude ni le type morphologie ne sont disponibles). Il calcula
ensuite la différence entre le redshift de la galaxie dominante et
tous ces compagnons, amas par amas. La différence moyenne pour les
87 amas est de -2 km/s avec une rms de 228. Cette
différence est remarquablement proche de zéro, d'autant plus si
l'on considère que l'incertitude statistique de cette valeur aurait
conduit à une erreur normale de 25 km/s.
Latham a été surpris de constater que les redshifts moyens
des compagnons se retrouvaient si près de zéro pour une autre
raison. L'algorithme de recherche considère que les intrus sont
pris en compte lorsque la limite du catalogue est atteinte, ce qui
se produit lorsqu'il a une sérieuse incomplétude. J'attendais dit
Latham plus d'intrus au premier plan qu'à l'arrière-plan, et dès
lors un biais envers les redshifts élevés.
Le second échantillon analysé fut un ensemble de 156
galaxies binaires identifiées par l'astronome Ed Turner[15]
de l'université d'Harvard dans les années 1975. Latham utilisa le
catalogue de Zwicky pour identifier les couples de galaxies endéans
certaines limites, et toutes les galaxies similaires dans un cercle
cinq fois plus grand. Les redshifts de toutes ces galaxies furent
prudemment mesurés il y a quelques années. Fondé sur une analyse
méticuleuse des plaques photographiques du mont Palomar, la moitié
de ses couples ont été éliminés pour de plus amples analyses,
parce qu'ils semblaient être les membres les plus brillants d'un
groupe ou d'un amas. Dans cette expérience Latham a essayé
d'obtenir un échantillon "clean", exempt de couples de
galaxies isolés.
Il resta finalement 71 couples de galaxies. Pour définir la
galaxie dominante il prit la plus brillante. 35 parmi les différents
redshifts étaient négatifs, et 36 positifs.
Aucune de ces analyses ne corrobore l'argument de Arp considérant
que les compagnons des galaxies dominantes présentent un redshift
excessif. D'un autre côté, aucune de ces analyses n'est semblable
à l'exemple de M31, dans lequel la plupart des membres étaient
beaucoup plus pâles que la galaxie dominante.
M81 et ses compagnons
|
Nom |
Mag. abs. |
Longitude galactique |
Latitude galactique |
Theta |
cZ |
cZ rel. |
NGC
4326
IC 2574
NGC 3077
M82
M81
NGC 2976
NGC 2366
NGC
2403 |
-18.41
-
-17.2
-18.6
-20.75
-17.51
-16.73
-19.47 |
127.4
140.3
141.9
141.4
142.1
143.9
146.4
150.6 |
+47.4
+43.6
+41.7
+40.9
+40.1
+40.9
+28.5
+29.2 |
12.5
3.1
0.8
0.6
0.0
1.4
13.1
13.8 |
-7
+38
+7
+247
-36
+13
+98
+131 |
+29
+74
+43
+283
0
+49
+134
+167 |
Ici il est plus difficile de déterminer quelles sont les
galaxies qui doivent être incluent dans l'amas de la Grande Ourse
car de bonnes mesures de distances n'ont été obtenues que pour M81
et NGC 2403, dans lesquels on a observé des étoiles Céphéides.
En fait, la distance de M81 fut calculée à partir de 2 Céphéides.
Les autres membres ont été choisi en fonction de leur proximité
de M81 sur le ciel et de leur redshift relativement faible. Il y a
beaucoup d'autres galaxies visuellement proches de M81 mais elles présentent
de beaucoup plus grands redshifts, vraisemblablement en raison de
leur éloignement, et elles ne sont donc pas physiquement associées
à M81.
Les redshifts indiqués ont été extraits du catalogue révisé
Shapley Ames. Les effets de projections ont été négligés car ils
ne devraient pas être supérieurs à quelques km/s. Les plus grands
écarts angulaires sont inférieurs à 15°, et cos 15 = 0.966,
aussi l'erreur devrait être inférieure à 3 ou 4% de la différence
des redshifts.
|
Arp 280. Document IPAC traité par l'auteur. |
Arp et Sulentic ont utilisé leurs propres redshifts. Pour
NGC 4236 ils ont trouvé un redshift héliocentrique de +2, le
catalogue RSA indique -7; pour M81 -40 contre -36; pour M82 +240
contre +247; pour NGC 2976 +40 contre +13; pour NGC 3077 +10 contre
+7; pour NGC 2976 +40 contre +13; pour NGC 2366 +102 contre +98;
pour NGC 2403 +132 contre +131. Nous n'avons aucune raison de
suspecter les mesures de redshifts de Arp, et Latham a simplement
pris le catalogue standard de référence pour éviter toute
controverse.
Le meilleur moyen de se rendre compte des conséquences de
ces différentes valeurs est de représenter les galaxies reprises
dans le tableau ci-dessus dans les trois dimensions et de comparer
leurs positions et leurs vitesses avec les valeurs qu'indique Arp en
page 110 de son livre. Bien que tous les membres présentent un
redshift comparé à M81, une analyse détaillée de ses données
semble confirmer que Arp les a ajuster pour satisfaire son modèle.
Latham conclut que la prétention de Arp de vouloir
quantifier les redshifts est un non-sens s'il applique son analyse
aux membres du Groupe Local, dans lequel il a fait quelques erreurs.
Gardons toutefois notre esprit ouvert et jetons un coup d'oeil sur les couples de galaxies.
Il est difficile de faire une bonne analyse du texte repris
en page 100 du livre de Arp sans jeter un coup d'oeil sur le travail
auquel il fait allusion. Le problème est que Arp est très réticent
à donner ses références, et que dès lors il peut s'avérer
impossible de trouver les articles qu'il avait à l'esprit.
Si Arp prétend réellement que les étoiles sont intrinsèquement
plus faibles dans les galaxies à grands redshifts, alors il reste
très peu de place pour entamer une discussion, car nous n'aurons
aucun moyen de déterminer la distance de ces galaxies; tous les
indicateurs de distances seront biaisés !
Il est temps à présent de se pencher sur les redshifts des
galaxies situées au sein des amas compacts.
Les
quartettes et autres amas compacts
Historiquement, dans les années 1960 Goeffrey et Margaret
Burbidge, alors à l'Observatoire McDonald du Texas découvrirent
que le cinquième membre du Quintette de Stephan, dont le redshift
n'avait pas encore été mesuré, se déplaçait beaucoup plus
lentement que ses quatre compagnons : +1073 km/s contre +7014,
+6916, +5916 et +6935 km/s. Ces valeurs sont corrigées de la
rotation galactique. "Nous devons donc conclure écrivent les
Burbidge, soit que NGC 7320 est une galaxie du premier plan, soit
que cette galaxie présente une vitesse d'approche relative vis-à-vis
des autres galaxies de plus de 5000 km/s"[16].
Les Burbidge tentèrent ensuite d'estimer la probabilité de
trouver accidentellement une galaxie proche juste devant un groupe
de quatre galaxies éloignées. Utilisant le résultat d'Holmberg
concernant la répartition de 60000 galaxies plus brillantes que la
magnitude 15.7 sur toute la voûte céleste, ils estimèrent que
dans un espace de 2 minutes d'arc autour du Quintette de Stephan,
cette chance se produisait 1 fois sur 167. Tenant compte de
l'extinction galactique, ils prétendaient que la chance de trouver
un tel alignement se produisait 1 fois sur 1000. Peu de temps après
cet épisode l'astronome Gaposhkin, écoeurée par l'attitude des
scientifiques conservateurs fit remarquer à Latham, "Les
femmes et les chiens n'étaient pas autorisés à Palomar".
Mais Latham nous rappelle que l'histoire ne s'arrête pas là.
Les Burbidge ont négligé de tenir compte du nombre de quartettes
aussi brillants que le Quintette de Stephan sur toute la voûte céleste.
S'il existe 1000 configurations de ce type, nous devrions nous
attendre à ce qu'au moins l'un de ces quartettes soit aligné avec la
cinquième galaxie du champ. Il n'est donc pas suffisant de dire
quelle est la chance de rencontrer un simple alignement, encore
faut-il analyser le nombre de quartettes candidats pour un tel alignement,
et déterminer combien de quintettes parmi ceux observés contiennent une galaxie
dont le redshift est anormal.
|
|
A
gauche, le Quintette de Stephan situé près de
h Pegasis à ~30' de NGC 7331. Cet amas contenu dans une
région de 3.5' de diamètre contient NGC 7319, NGC
7318A, NGC 7318B, NGC7320 et NGC 7317. Il brille entre les
magnitudes 11.9 et 13.5. A droite, le Sextet de Seyfert
dans Hercule situé près de 44-p Serpens Caput, sous la Couronne
Boréale. Cet amas très compact qui ne dépasse 2' de
diamètre est composé de NGC 6027 et NGC 6027A-E. Il brille entre les magnitudes 11.7 et 13.7. Ce
sont deux sujets extrêmement difficiles à photographier. Documents
STSci/Subaru/R.Gendler
et NOAO. |
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Pour sa thèse de recherche de
l'Université de Yale, Jim Rose[17]
a analysé les amas compacts à partir des plaques du Palomar
Observatory Sky Survey (POSS) jusqu'à la magnitude 17.5,
dans un espace équivalent à 10% de la surface du ciel
contenant par ailleurs le Quintette de Stephan, le Sextet de Seyfert (Hickson
79) et l'amas Vorontsov-Velyaminov VV 172. 26 candidats ont été sélectionnés
parmi lesquels il devrait probablement se trouver 6 quartettes
compacts. Extrapolant ces valeurs sur l'entièreté du ciel, Rose
obtint un total de 430 à 550 quartettes compacts et prédit qu'il
devrait exister 1.5 à 2.0 quintettes formés accidentellement par
l'alignement d'une galaxie du champ. Il conclut : "Ce chiffre
s'accorde parfaitement bien avec le fait que les quintettes présentant
un redshift anormal ont tous été trouvés suite au relevé
minutieux de la zone couverte par les plaques du POSS (environ 67%
de la voûte céleste)", et qu'aucune nouvelle physique n'est nécessaire
pour expliquer les redshifts anormaux.
Dernier
chapitre
Les
redshifts dans les amas compacts
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