Les combinaisons spatiales
Evolution des combinaisons spatiales (II)
Depuis
les premiers vols spatiaux, les combinaisons spatiales ont
naturellement évoluées en fonction des progrès technologiques
réalisés dans la fabrication des matériaux, l'électronique et
les fibres mais également en fonction des missions assignées aux
astronautes et notre connaissance de l'espace.
On
pourrait caricaturer l'évolution de la combinaison des
astronautes en comparant un teeshirt avec un anorak. Le premier
n'est constitué que d'une seule épaisseur de matière et nous
protège fort peu des agressions de l'environnement. Il ne dispose
généralement d'aucun accessoire. A l'inverse, l'anorak est
composé de plusieurs couches de matières naturelles ou
synthétiques isolantes, imperméables et
parfois très résistantes. Il dispose de multiples poches et d'un
capuchon. Il est tellement pratique et efficace que son
propriétaire peut affronter sans hésiter les rigueurs d'un
climat polaire.
Dans
un autre contexte, la combinaison spatiale a suivi exactement la
même évolution en s'adaptant graduellement aux contraintes de
l'espace. Mais cela ne s'est pas fait sans problèmes.
Les
chercheurs ont puisé leurs idées dans tous les métiers où les
hommes devaient affronter des conditions extrêmes : pilotes de
guerre, vols stratosphériques, plongeurs autonomes,
scaphandriers, volcanologues, etc.
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Ci-dessus
à gauche, la combinaison ou plutpot le scanphandre
fabriqué en 1935 par B.F. Goodrich pour
l'aviateur Wiley Post. La combinaison est en caoutchouc et est
collée à des joints métalliques. C'est l'ancêtre de la combinaison
spatiale. Cet ensemble fut porté jusqu'à 15000 mètres d'altitude ou
50000'. A sa droite, la combinaison MX-117 conçue par B.F. Goodrich
et proposée à l'USAF en 1939. Elle fut testée durant 4 ans. A droite du
centre, deux photos de la combinaison semi-rigide Mark 1 inventée par
Allyn Hazard pour Grumman (qui construisit par la suite les modules
lunaires d'Apollo) photographié dans le désert de Mojave
et qui fera la couverture du magazine Life
le 27 avril 1962. La NASA refusa son développement.
Ci-dessous à gauche, une combinaison semi-rigide mise
au point par Republic Aviation et testée en 1966 mais qui
n'eut aucun avenir. A sa droite, la combinaison spatiale
rigide proposée dans les années 1960 par Litton Industries
(rachetée par Northrop Grumman en 2001). La NASA la refusa
car elle était peu pratique. A droite du centre, la combinaison
spatiale A7-LB (ou A7LB), plus souple que la A7-L et équipée d'un système de
refroidissement liquide qui permet aux astronautes de s'asseoir
dans la jeep lunaire. A droite, la version opérationnelle de la
combinaison A7-LB ou Cernan portée par Bill Ayrey. Elle servit de combinaison de secours à l'équipage
d'Apollo 17. Documents Goodrich, Grumman,
Jean-Christophe Carbonel et NASA. |
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Le
premier problème qui se pose à l'astronaute au départ d'un vol
spatial est bien sûr les effets du manque d'air et de la chute de
pression. Il doit donc s'équiper d'une combinaison pressurisée.
Mais laquelle ? Doit-il porter un "caisson"
pressurisé ou un simple collant muni d'un casque hermétique
suffit ?
Il
existe globalement trois modèles de combinaisons pressurisées :
-
la combinaison partiellement rigide fabriquée en matière
synthétique et en métal. Elle ressemble à un scaphandre et est
conçue pour maintenir un volume constant. C'est une version
dérivée des scaphandres rigides utilisés en eaux profondes. Peu
flexible, elle est difficile à utiliser car elle utilise des
roulements plutôt que des soufflets aux jointures qui se mettent
parfois dans des positions inhabituelles qui demandent un
ajustement en cours de travail.
-
la combinaison mixte qui dispose d'un torse supérieur et d'un
casque rigides, c'est l'exemple de la combinaison EMU, sur laquelle nous
reviendrons en détail page suivante.
-
la combinaison collante MCP (Mechanical Counterpressure suit) qui
utilise un bas de corps élastique qui compresse le corps. Seuls
la tête et généralement le torse sont contenus dans une atmosphère
pressurisée. Cette solution élimite le recours à un système à volume
constant et réduit le risque de dépressurisation. Son
inconvénient est d'être très difficile à enfiler car elle est
juste-au-corps, dense et épaisse et ne garantit pas que la
pression est constante en tout point du corps, ce qui peut être
source de gène ou de problèmes en cours de vol. L'utilisant de
la MCP empêche également d'utiliser le sous-vêtement de
refroidissement LCVG. L'astronaute ne peut donc compter que sur sa
propre sueur pour rester au frais. Les versions les plus récentes
de MCP font appel à des polymères à mémoire de forme.
Les premiers projets
de combinaisons pressurisées capables d'affronter les conditions
du vide remontent à 1936 et ressemblaient à s'y méprendre aux tenues
imperméables que portaient les scaphandriers, les fameux
"pieds lourds". C'était une solution semi-rigide.
Parmi
les tous premiers prototypes, citons la combinaison
pressurisée MX-117 présentée ci-dessus conçue en 1939
par la société américaine Goodrich qui était déjà en
compétition avec Dave Clark. Elle sera testée par l'USAF
jusqu'en 1943.
Faute
de disposer de retour d'expérience, cette combinaison
était peu adaptée aux conditions de l'espace et
convenait probablement mieux à des scaphandriers. Il y
avait notamment le problème de l'isolement thermique, des
micrométéoroïdes et la ventilation qui poseront des
problèmes aux concepteurs durant plus de 20 ans. Mais
cette combinaison contenait déjà quelques idées
intéressantes que l'on retrouvera par la suite dans les
combinaisons Apollo (A7L) et l'EMU, notamment le torse
supérieur rigide, les articulations, la division au niveau des bras
et des cuisses, les gants et les bottes séparées.
Comme
la plupart des combinaisons spatiales, elle est cependant
difficile à enfiler et nécessitait beaucoup de contorsions
si bien qu'elle rappelait... les contorsions de la
chenille cornue du Sphinx de la tomate (Manduca
quinquemaculata) qui lui vaudra le surnom de
"Tomato hornworm suit" !
Au
niveau des "blueprints", les concepts sur plan qui ne
virent jamais le jour, citons la combinaison de Grumman, un avioneur
réputé qui participa à l'élaboration du module lunaire (LEM).
Sa combinaison présentée ci-dessus (avec le chiffre 3) fit
les délices des illustrateurs de romans de science-fiction
dans les années 1960 mais elle était irréaliste sur le plan
pratique. Elle était totalement pressurisée, l'astronaute
résidant dans une sorte de cabine rigide allant jusqu'aux hanches
dans laquelle il pouvait difficilement faire le moindre geste avec précision.
A
la même époque, la société Republic Aviation fabriqua
un modèle assez similaire que l'on voit plus haut à gauche qui sera même
présenté dans le magazine "Life". Ce "tonneau sur
pattes" était tout aussi rigide que le modèle de Grumman et
tous deux étaient pratiquement inutilisables voire dangereux en
cas d'accident dans le vide vu leur encombrement.
Ceci
dit, dans les années 1950 ainsi que le montre la couverture du
magazine "Collier's" du 28 février 1953 et celle
de "Life" du 6 janvier 1958, la NACA (National
Advisory Committee for Aeronautics qui deviendra la NASA
en 1958) testait déjà les combinaisons de vol stratosphériques
dans les conditions de l'espace, notamment son comportement et
le bien être du pilote sous les effets de la chaleur. Le modèle
de 1957 s'avéra toutefois trop fin et donc trop peu hermétique
pour assurer le confort de l'astronaute. Elle fut donc améliorée
et notamment complétée par des tissus protecteurs.
Les
combinaisons semi-rigides ne seront jamais acceptées par la jeune
administration de la NASA qui devait avant tout trouver une
combinaison adaptée aux vols spatiaux, fonctionnelles dans les
capsules spatiales comme dans le vide, pas trop encombrantes et
flexibles. Finalement la solution de Goodrich s'approchait le plus
de la réalité et retiendra l'attention de ses concurrents.
En
1961, avec son idée de déposer des hommes sur la Lune, le président J.F.
Kennedy força son pays à imaginer de nouvelles technologies pour
effectuer ce grand bon en avant.
Du
vol stratosphérique au vol suborbital
Ainsi
que nous venons juste de l'évoquer, les premières combinaisons de vol prémices
des combinaisons spatiales furent utilisées par les pilotes d'essais sur avions
jets et stratosphériques, notamment par Neil Armstrong lorsqu'il
était pilote de X-15 pour le compte de la NACA puis de la NASA sur la base
d'Edwards, et par les pilotes sur avions furtifs U-2 à partir de
1956 et SR-71 qui lui succéda en 1962.
Passé
quelque 3000 m d'altitude, la chute de pression atmosphérique se
fait sentir. Au-delà de 5500 m (18000'), l'air devient deux fois
moins dense et à partir de 11000 m (40000') la quantité
d'oxygène est si faible que le masque à oxygène n'est plus
utilisable. Au-delà de 19000 m (63000') le corps ne peut plus
conserver ses fluides corporels à l'état liquide qui se mettent
à bouillir. Le pilote a donc rapidement besoin d'oxygène et
d'une combinaison adéquate s'il veut survivre en haute altitude.
Le
pilote doit porter une combinaison pressurisée pour compenser la
faible pression, les effets des changements d'accélération et
maintenir ses fluides corporels à l'état liquide. Voler dans ces
conditions n'est pas sans danger et n'est certainement plus une
partie de plaisir comme à basse ou moyenne altitude. C'est bien
la raison pour laquelle ces expériences sont réservées à des
pilotes d'essais, une élite aux nerfs d'acier et spécialement
préparée à ce métier. Heureusement, avec le temps et
l'expérience, la plupart des risques d'accidents du passé liés
à la dépressurisation peuvent aujourd'hui être évités grâce
au port d'une combinaison pressurisée vraiment très élaborée.
Pression
des combinaisons spatiales
La
combinaison spatiale pressurisée ajoute une contrainte lors des EVA.
Comme un plongeur qui remonte des profondeurs doit
effectuer des paliers pour éviter la formation de bulles d'azote
dans son sang, avant une EVA, la pression de la combinaison de
l'astronaute doit d'abord être réduite. Actuellement, chez les
Américains la phase de dépressurisation jusqu'à 0.276 bar s'effectue
dans un sas spécial et dure 2 heures. Les Russes dépressurisent leurs
combinaisons spatiales à 0.4 bar et cela dure 1 heure.
A
l'époque de la navette spatiale, juste avant les EVA, la navette
était dépressurisée jusqu'à 0.70 bar pour évacuer en douceur l'azote
contenu dans le sang des astronautes. Après avoir revêtu sa combinaison,
l'astronaute restait encore entre 40 et 75 minutes dans le sas de sortie
(airlock) pour respirer de l'oxygène pur afin d'éliminer tout trace d'azote.
Ce
n'est que lorsque cette procédure est terminée que l'astronaute peut sortir
dans l'espace. Lors du retour dans la station pressurisée, la
repressurisation de la combinaison à pression normale est plus
rapide.
Effets
mécaniques d'une combinaison pressurisée
Si
vous avez déjà porté un vêtement plus ou moins hermétique
et juste-au-corps ou un anorak serrés aux extrémités, vous avez
sans doute constaté que si vous insufflez de l'air à
l'intérieur, non seulement le vêtement va gonfler mais à forte
pression il rendra vos mouvements plus difficiles. C'est très
apparent en mer si vous remplissez d'air votre combinaison de
plongée ou une combinaison étanche : Bibendom prend son bain
mais il peut difficilement se déplacer !
Le
même problème se pose avec la combinaison des astronautes mais
il est amplifié dans le vide car en l'absence de compensation
extérieure, la combinaison à volume constant se comporte comme une
enveloppe rigide; impossible de la plier quelle que soit la position
de celui qui la porte. Si elle est pressurisée à 1 atm, l'astronaute
aura l'impression de ressembler à Bibendom ou aux costumes de jeu
de sumo japonais. C'est peut être marrant vu de l'extérieur,
mais impossible à gérer pour son propriétaire. Son encombrement
peut même devenir un facteur de risque après une sortie
extravéhiculaire.
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Caricature
américaine sous-titrée "les expériences les
plus stupides de la navette spatiale". Les effets de la
pressurisation de la combinaison de vol ont marqué les esprits.
Si aujourd'hui ce gonflement exagéré est maîtrisé grâce à l'utilisation
de nouvelles matières, c'est un risque à ne pas négliger lors des
retours d'EVA. |
Vous
avez peut-être connu ce problème en hiver : habillé d'une
doudoune d'une bonne dizaine de centimètres d'épaisseur, comment
allez-vous passer par une porte étroite ? Soit vous la retirer
soit vous essayez de la comprimer, ce qui reste assez difficile
avec une matière très aérée.
C'est
la même chose dans l'espace, à la seule exception que les
astronautes n'ont pas d'alternative. Lors de la première EVA du
cosmonaute Alexeï Leonov au cours de la mission Voskhod 2 en 1965,
sa combinaison était devenue tellement volumineuse qu'elle ne passait
plus par le sas d'entrée. De sa propre initiative et sans l'aval
du contrôle au sol qui n'avait pas connaissance de la situation
à cet instant, il décida de dégonfler partiellement
sa combinaison grâce à une valve de sécurité pour libérer de
l'oxygène afin de pouvoir rentrer dans la cabine ! Cette situation critique
lui fit perdre 6 kg ! Après cette dangereuse expérience, le ministère
russe des constructions mécaniques (MOM) chargé du programme spatial
soviétique et la NASA décidèrent de réduire la pression des combinaisons
et de faire passer les astronautes par des sas adaptés à leur nouvelle
corpulence...
Pour
modifier le volume d'un système à pression constante, il faut
appliquer un difficile travail mécanique car la pression est une
force et, de ce fait, elle offre une très forte résistance. Faites
l'expérience avec une chambre à air ou une bouée très gonflée et vous
constaterez qu'à forte pression, il n'est plus possible
d'enfoncer ou de plier l'enveloppe.
Si
un astronaute est confronté à cette situation, chaque fois qu'il
voudra faire un geste au cours d'une EVA, tourner le torse, plier le bras, les
genoux ou même le poignet, il devra appliquer une force constante
qui va rapidement le fatiguer, le faire transpirer et épuiser sa
réserve d'oxygène. Comment éviter ou réduire ce problème ?
La
combinaison de vol ou spatiale est constituée de plusieurs
couches de matière. Certaines sont imperméables, d'autres
enserrent la couche inférieure ou servent de protection
thermique, mécanique, etc.
La combinaison de vol pressurisée est généralement souple et fabriquée
en tissu, recouvert de matière isolante, du Néoprène enduit de
caoutchouc ou du Nylon et munie d'un laçage. C'est en fait une
chambre à air, une vessie (bladder) comme l'appelle les Anglo-saxons
que l'on peut gonfler. A l'origine, elle était uniquement utilisée dans
les cockpits des avions de chasse non pressurisés et dans les cabines
des gros porteurs militaires si la pressurisation venait à défaillir.
L'enveloppe
pressurisée contenant de l'oxygène sous pression est enrobée
d'une couche hermétique en caoutchouc. Elle est enveloppée dans
une couche de maintien qui préserve sa forme et évite qu'elle
ne se transforme en ballon sous la pression interne. La couche
caoutchoutée pouvant se dilater, elle offre par nature une
surface supérieure à celle de la couche de contrainte. C'est
donc cette dernière qui supporte toutes les contraintes
générées par la pression du vêtement.
Chez
les Américains, cette couche de contrainte est conçue de telle
sorte que lorsque l'astronaute plie un membre, des petites
alvéoles appelées "gores" prises en sandwich dans le
tissu s'ouvrent vers l'extérieur des articulations, permettant de
libérer le gaz et donc un peu de volume qui est aussitôt
compensé.
Effets
de l'accélération et de la poussée
Rappelons
que selon la seconde loi de la dynamique de Newton,
la force d'accélération (a ou g) correspond à la poussée (F)
du lanceur divisée par sa masse (m) :
F = m a
g =
F/m
Au
décollage, une fusée lunaire de 3000 tonnes pèse 2000 tonnes.
Les astronautes subissent une accélération de 1.5 g. Du fait de
la consommation de propergols, la masse du lanceur diminue de 10
tonnes par seconde. Au bout de quelques minutes d'ascension, les
astronautes peuvent subir entre 3 et ~4 g. Lors du décollage de
la fusée Saturn V, les astronautes subissaient entre 1 et 5 g.
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A
gauche, les pilotes de la NASA Milton O. Thompson, William H. "Bill" Dana et John B. "Jack" McKay
équipés de leur combinaison pressurisée photographiés devant l'avion-fusée X-15 #2 en 1966.
Au centre, les trois pilotes et membres d'équipage de SR-71 en combinaison pressurisée avec de gauche
à droite, Rogers Smith, Bob Meyer, Marta Bohn-Meyer et Steve Ishmae. Cette combinaison jaune
fabriquée par David Clark (S1031C, S1032, S1033, etc) fut emprunté aux pilotes de U-2 et suite à un défaut dans le lot
des nouvelles combinaisons prévues pour la navette saptiale, en 1981 John Young et Robert Crippen portèrent
la même combinaison. A droite, le pilote de recherche de la NASA, Tom Ryan, pilotant l'avion ER-2 Earth Resources
de la NASA lors d'une mission à haute altitude au-dessus du Nouveau-Mexique pour vérifier l'altimètre laser MABEL
(Multiple Altimeter Beam Experimental Lidar) en avril 2011. Documents NASA. |
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Une
personne moyenne peut résister sans problème à des
accélérations de 8-9 g mais l'effet dépend de la direction de
cette force d'accélération. Dans le cas le plus désagréable
d'une accélération de haut en bas comme on peut en subir lors du
décollage d'une fusée, lorsqu'un avion à réaction fait une
chandelle ou lorsqu'un petit avion fait de la voltige,
l'accélération à tendance à vider le cerveau de son sang. Le
champ visuel du pilote se réduit et s'assombrit avec une perte
des couleurs. C'est le blackout ou "voile noir". Si
l'accélération se poursuit, le pilote peut perdre conscience. On
peut compenser cet effet avec un pantalon ou une combinaison
anti-g dont les vessies gonflables vont maintenir le corps sous
pression. A g élevés cette pression mécanique sur le corps fait
très mal et les pilotes sortent généralement très éprouvés
de ce genre de figure de style, notamment lors des entraînements
au combat aérien (dog fight). En revanche, si l'astronaute
est couché sur le dos comme lors du lancement des navettes
spatiales, il supportera beaucoup mieux l'effet de
l'accérélation.
La
combinaison pressurisée s'active lorsque la force d'accélération
dépasse quelques g (au-delà d'environ 4 g selon les individus) ou
en état de très faible pression ambiante. Elle sert fortement
le bas de l'abdomen, les cuisses et les jambes du pilote pour
éviter qu'il n'attrape le voile noir tout
en restant conscient ou un voile noir avec perte de
conscience, ce qu'on appelle un "G-LOC" et qui peut lui
être fatal.
Le
pilote conscient peut dans une certaine mesure remédier à cet état
en bloquant sa respiration et en contractant tous ses muscles.
Mais non seulement il devrait parfois le faire durant plusieurs minutes
consécutives ou de façon répétées au risque d'attraper des crampes voire d'autres
malaises plus graves, mais passé un certain seuil de pression ou
d'accélération, généralement au-dessus de 5 g selon son expérience
et sa résistance, il peut perdre rapidement le contrôle de la
situation et s'évanouir jusqu'à ce que la gravité normale soit
rétablie. Si les pilotes chevronnés résistent assez bien jusqu'à 7 g,
au-delà tous doivent véritablement faire des efforts pour ne pas
s'évanouir. A partir de 9 g la majorité des pilotes tombent inconscients
en quelques secondes. C'est pour garantir leur survie dans ces conditions
extrêmes que les constructeurs ont développé les combinaisons pressurisées.
La
combinaison pressurisée évite au sang de s'accumuler dans le bas
du corps, phénomène qui provoque justement ce
voile noir tant redouté et que pourraient connaître les
astronautes au retour d'un environnement privé de pesanteur vers
celui de la gravité terrestre, soit une différence de pression
de 1 bar/cm2 et d'accélération de 9.81 m/s2.
Le choc est plus violent que des montagnes russes ou qu'une course
en dragster !
A
voir : Space suit
testing, NASA, 14 déc 1966
où
quand Jim Leblanc manqua de mourir par décompression
Effet
des "g" sur des pilotes de l'USAF à l'entraînement
Une
compilation du webzine Popular Mechanics
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La "combinaison de vol à pression partielle" imaginée par von Braun
en 1958 pour un voyage vers la Lune dans une fusée dont la cabine
était pressurisée. Elle est directement dérivée des
combinaisons de vol des pilotes de jets stratosphériques (le U-2
à partir de 1956 et le X-15 à partir de 1958). Dessin de Fred
Freeman publié dans "This Week
magazine" le 5 octobre 1958 (cf. magazine de l'AIAA,
july-august 2013). Ci-dessous la version monochrome publiée dans
le livre "Les
premiers hommes sur la Lune" chez Albin Michel en
1961. Collections John
Sisson et T.Lombry. |
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A
ce moment là, de l'oxygène est insufflée dans la combinaison
qui commence à gonfler. La pression est maintenue à environ 1
bar. En même temps, le pilote est alimenté en oxygène par un
tuyau extérieur qui aboutit dans son casque. Au besoin il peut
bander ses muscles pour aider son organisme à résister à
l'accélération.
Les
combinaisons de vol classiques contiennent un tissu rigide placé
au-dessus du Néoprène qui maintient la forme de la combinaison
et force la pression du gaz vers l'intérieur, sur le
pilote. Un laçage permet de renforcer (ou d'alléger) cette
pression.
Pour
les premières missions spatiales, cette combinaison pressurisée
a simplement été recouverte d'une couche de Mylar pour protéger
le pilote contre les rayons cosmiques et la chaleur. Ni le casque du pilote ni
aucun autre accessoire n'a été modifié durant les premiers vols
surorbitaux.
La
combinaison de vol M-22
Tous
les pilotes vous diront qu'une combinaison pressurisée est inconfortable.
Elle l'est encore plus lors des vols spatiaux car de nos jours elle contient un système de
refroidissement à eau (LCVG) qui augmente encore son poids et qui mal
contrôlé (ce fut le cas au début) a tendance à se refroidir.
Depuis
l'époque héroïque du X-15 et du SR-71, les combinaisons spatiales ont fortement
évolué. Elles sont devenues plus fonctionnelles, mais en
contrepartie est sont devenues beaucoup plus complexes, beaucoup
plus lourdes et elles reviennent à un prix exorbitant. On y
reviendra.
A
l'époque des premiers vols spatiaux, les combinaisons spatiales
ressemblaient à des salopettes d'une seule pièce et étaient confectionnées
sur mesure pour chaque astronaute. Mais elles étaient beaucoup
moins complexes qu'aujourd'hui.
Il y avait deux bonnes raisons à
cela. D'une part la durée des vols suborbitaux était limitée à
quelques heures maximum et d'autre part il n'était pas encore
question que l'astronaute quitte sa cabine et se balade dans
l'espace. Sa cabine comme sa combinaison pouvaient juste subir une dépressurisation,
période durant laquelle le pilote pouvait s'alimenter en oxygène.
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A
gauche, Alan B. Shepard équipé de sa combinaison de
vol pressurisée M-22 se préparant pour le
premier vol suborbital américain le 5 mai 1961 à
bord de la fusée Mercury-Redstone (mission MR-3).
Sa capsule Freedom 7 (au centre gauche) atteignit
l'altitude de 186.6 km. Le vol dura 15 minutes. Au
cours du vol, en voyant pour la première fois la Terre
sous cet angle inhabituel (droite), il s'exclama
"What a beautiful sight" (quelle
magnifique vue) que le "Time"
repris en couverture de son magazine une semaine
plus tard. Après que sa capsule ait plongé dans
l'océan Atlantique, Shepard déclara "Everything
is A-OK!", confirmant que la conquête de
l'espace par l'homme pouvait commencer. Alan Shepard
sera également commandant de bord de la mission Apollo
14 en 1971 et séjourna 33 heures sur la Lune,
récoltant 42 kg d'échantillons lunaires. Juste
avant de partir, il tappa deux balles de golf (avec
un fer N°7 précise la NASA) qui, raconta Shepard,
"parcoururent des miles et des miles et des
miles." Héro de la nation, mais homme malgré
tout, Shepard mourut d'une leucémie en 1998 à
l'âge de 74 ans. Documents NIX,
NASA, NASA
Observatorium et TIME. |
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Ainsi,
la combinaison M-22 qu'utilisa Alan Shepard pour effectuer le premier vol
suborbital américain en 1961 était en fait adaptée des combinaisons
pressurisées utilisées par les pilotes de jets de l'US Navy
volant à haute altitude (Shepard était lui-même pilote d'essai
et Contre-amiral de la Navy). Sa combinaison ne comportait que deux
couches de protection en tissu et une fois pressurisée le pilote
pouvait difficilement bouger ses bras ou ses jambes. Même son
casque était une version light, plus léger et beaucoup plus
simple que le casque que porte aujourd'hui les astronautes. Mais
pour l'heure cela n'avait pas beaucoup d'importance car son vol
suborbital ne dura que 15 minutes, un bond minuscule mais qui
convainquit la NASA que l'homme pouvait conquérir l'espace et
pourquoi pas un jour la Lune.
Prochain chapitre
Les
combinaisons spatiales Dave Clark
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