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La Bible face à la critique historique

La Torah parmi d'autres livres sacrés. Doc 123RF.

Identification des auteurs du Pentateuque (I)

Depuis que les Hébreux ont fuit l'Égypte et que les Israélites ont conquis le pays de Canaan, nous avons cité de nombreux livres bibliques dont la Torah (le Pentateuque comprenant la Genèse, l'Exode, le Lévitique, les Nombres et le Deutéronome), les livres des Prophètes (Isaïe, Jérémie, Ezéchiel, Daniel, etc.) et les autres Écrits également appelés les livres Historiques par les chrétiens (livres des Rois, des Chroniques, les Psaumes, de Josué, des Juges, de Ruth, de Samuel, d'Esdras, de Néhémie, des Maccabées, etc.) que les juifs rassemblent sous le nom de Tanakh, autrement appelé la bible hébraïque. Si l'auteur est parfois nommé (mais n'est pas nécessairement le rédacteur), ce n'est pas le cas des livres des Rois et du Deutéronome.

Si nous avons démontré que Moïse est un personnage légendaire et n'a pas donc pas écrit un seul mot de la Torah, de façon générale qui rédiga les différents livres du Tanakh et à quelle époque ?

Reconstruire le puzzle biblique

Depuis près de mille ans, il faut bien avouer que la paternité de la bible hébraïque a mis les spécialistes au défit, en particulier les érudits juifs dès l'époque médiévale (Abraham ibn Ezra et Juda de Ratisbonne au XIe siècle qui ont glosé certains passages douteux) puis les exégètes allemands à partir du XVIe siècle et dans une moindre mesures leurs collègues américains qui ont seulement pris le problème en charge à partir du milieu du XXe siècle.

Le sujet est longtemps resté méconnu du public car il n'était discuté qu'en huit-clos au sein de séminaires et de clubs réservés aux spécialistes membres du clergé ou civils qui n'ont pas souhaité vulgariser les résultats de leurs travaux très théoriques. Car à l'inverse de l'archéologie, les exégètes (les spécialistes critiquant des textes) et en particulier les biblistes ne comptent pas dans leurs rangs des inventeurs ayant découvert d'extraordinaires objets antiques susceptibles de faire la une des médias. Leur travail de recherche est long et fastidieux car ils doivent rassembler les petites pièces éparses d'un immense puzzle narratif composé au cours des siècles. A l'inverse des grandes découvertes archéologiques comme les fameux Rouleaux de la mer Morte, un exégète peut analyser la bible hébraïque sur les plans textuel et linguistique toute sa vie sans disposer de nouveaux éléments matériels à verser à son dossier. Et de fait an cours des cinquante dernières années, peu d'éléments nouveaux ont été découverts. Heureusement, en contrepartie, au cours des dernières décennies de nombreux biblistes ont étudié le sujet et grâce à cet effort collectif nous disposons à présent d'un puzzle presque complet permettant de dresser une image plus fidèle des rédacteurs de la Bible hébraïque susceptible d'intéresser le grand public.

Mais comme nous l'avons expliqué à propos de la Genèse et la recherche de l'autenticité des récits bibliques, très peu de résultats scientifiques ont été publiés en français. Par conséquent, le sujet de la paternité de la bible hébraïque demeure passablement inconnu du public francophone (mais également du public en général faute de grandes découvertes comme il peut y en avoir en archéologie). Mais par chance, le bibliste Thomas Römer du Collège de France compte parmi les rares vulgarisateurs ayant publié un certain nombre d'articles, de cours et de livres en français. Nous allons donc exploiter cette manne d'informations de première main dans cet article (et dans quelques autres de ce dossier) tout en gardant un esprit ouvert sur les avis parfois critiques formulés par ses collègues.

La Réforme pour oser critiquer la Bible

Si on ne considère que l'époque contemporaine, pendant près de deux siècles (la période 1780-1980) les exégètes ont prétendu pouvoir identifier les "sources" littéraires indépendantes ayant rédigé, collectionné ou compilé les rouleaux du Tanakh, les "documents" ayant servi de caneva ainsi que les processus rédactionnels, en particulier pour le Pentateuque, le coeur théologique du judaïsme. Voyons en résumé l'histoire de cette démarche et les résultats obtenus. Nous discuterons ensuite des récents développements et ce qu'il faut en retenir.

Marthin Luther, père du protestantisme, dans son étude lisant la Bible depuis son pupitre. Portrait réalisé en 1882 par F.W.Wehle. Doc LOC.

Au XVIe siècle, face aux abus de l'Église romaine, au cours de la Réforme protestante (1517), Martin Luther proposa aux Européens de revenir aux principes originaux du christianisme et de réfléchir à une nouvelle façon de concevoir la religion dans la société. Jusqu'alors on pensait encore que le Pentateuque fut rédigé par Moïse. Mais sous l'impulsion de la Réforme, l'auteur du Deutéronome fut remis en question par le théologien protestant allemand Andreas Bodenstein dit Andreas von Karlstadt (1486-1541) puis par le prêtre catholique et juriste néerlandais - né près de Bruxelles alors dépendant des Pays-Bas bourgignons - Andreas Masius (1514-1573) qui tous deux évoquèrent pour la première fois une rédaction tardive par le scribe Esdras.

Les Catholiques pouvant difficilement critiquer les Saintes Écritures sans risquer l'excommunication ou une mort violente et les protestants comme les juifs devant y mettre des gants, ce sont finalement les philosophes qui ont croisé le glaive avec les défenseurs de la Foi. Le philosophe anglican et empiriste Thomas Hobbes (1588-1679) très remonté contre le rôle politique du pouvoir ecclésiastique fut le premier à oser contester ouvertement que le Pentateuque fut rédigé par Moïse. Il fut suivi par le philosophe néerlandais - né aux Provinces-Unies - et de confession juive Baruch Spinoza (1632-1677). Dès 1656, Spinoza fut frappé d'un herem, l'équivalent juif d'une excommunication, pour une raison inconnue (probablement un commentaire ou une attitude sacrilège) et déclara plus tard que la loi juive n'était pas d'origine divine, ce qui lui valut d'être inscrit sur les listes de l'Inquisition et d'être exclu de la communauté juive mais dont il ne partageait plus les croyances.

Il faut toutefois signaler un dernier baroud d'honneur de la part du chanoine français Joseph-Guillaume Clémence (1717-1792) qui vient en contre-pied de cette démarche. En effet, ce théologien catholique fut un pourfendeur des auteurs hérétiques et notamment de Voltaire. Il écrivit plusieurs livres réfutant les critiques anti-religieuses[1]. Ces ouvrages sont intéressants car ils décrivent les arguments utilisés par un serviteur de l'Église s'évertuant à démonter pièce par pièce les thèses de ses adversaires. C'est probablement le dernier auteur catholique à oser affronter le courant de plus en plus fort des opposants à la thèse de l'authenticité de la Bible.

A partir de cette époque, le divorce entre les protestants et l'Église catholique fut consommé et se manifesta à travers un plaidoyer historico-critique de l'exégèse biblique où les théologiens allemands de l'école de l'Histoire des religions (Religionsgeschichtliche) excellèrent.

L'invention de l'hypothèse documentaire

En 1780, le théologien protestant allemand Johann Eichhorn (1752-1827) reprit diverses critiques et analyses textuelles de la Bible dont les "Conjectures" (1753) du médecin et exégète français Jean Astruc (1684-1766). Sur base de ces travaux, Eichhorn reconnut que chaque auteur que l'on appelle une "source documentaire" (à ne pas confondre avec un rédacteur qui est un éditeur qui compile ces mêmes sources) utilisait des noms théophores (relatifs à Dieu) spécifiques et un style narratif particulier qui permettait de l'identifier. Eichhorn formula "l'hypothèse documentaire" selon laquelle le livre de la Genèse était le résultat de la combinaison de deux "sources" identifiées, la source yahwiste (ou jahviste, J) qui cite Yahvé ou le nomme par le tétragramme YHWH et la source elohiste (E) qui utilise le nom divin Elohim.

Vers 1810, le théologien et bibliste protestant allemand Wilhelm de Wette (1780-1849) identifia une troisième source, la Deutéronomique (D) dans le Deutéronome. Cet auteur ou rédacteur n'est pas un religieux mais un laïque qui insiste plus sur l'éthique que sur la Loi (mais étant juif rigoriste, il insiste aussi sur son respect).

Portrait des exégètes de la période contemporaine (XVIIIe-XIXe siècles). De gauche à droite, un portrait de Johann Eichhorn réalisé en 1779 par le peintre Anton Graff (huile sur toile de 74x64.5 cm) et conservé à l'Université de Jena; un portrait de Wilhelm de Wette dans son étude; un portrait gravé de Hermann Hupfeld. Document Foto Marburg; un portrait gravé de Hermann Hupfeld et un portrait d'Abraham Kuenen réalisé en 1862. Il s'agit d'une gravure sur acier de 18.9x12.8 cm conservée au Rijksmuseem.

Puis, en 1853 le bibliste et orientaliste protestant allemand Hermann Hupfeld (1796-1866) publia un essai intitulé "Die Quellen der Genesis von neuem untersucht" (Les sources de la Genèse à nouveau examinées) dans lequel il déclare que le Pentateuque fut élaboré à partir de quatre sources documentaires qu'on désigne aujourd'hui par des sigles dont "E", "J" et "P" qui rédigèrent le noyau des livres de la Genèse, de l'Exode, du Lévitique et des Nombres, tandis que la quatrième source "D" rédigea le Deutéronome.

Notons que c'est le théologien protestant néerlandais Abraham Kuenen (1828-1891) qui fut le premier en 1869 à proposer que l'unité narrative "du Livre des Origines [..] est un prêtre"[2] et à introduire le sigle "P" pour définir la source sacerdotale.

Comme le précise John Barton[3] à propos du Pentateuque, c'est à cette époque que la source "E" fut divisée en deux sources, elohiste (E) et prête (P). Dans certains chapitres comme la Genèse 6-8, l'alternance entre les textes des sources "J" qui parle de Yahvé et "P" qui parle de Dieu est très évident.

Entre-temps, le théologien et historien allemand Edouard Reuss (1804-1891), professeur d'Ancien Testament à l'Ecole Théologique de Strasbourg et auteur prolixe très proche de l'école "historico-critique" de C.Baur publia en 1863 une Histoire du canon de l'Église puis une critique de l'Ancien Testament en 1881 basée sur sa connaissance du hébreu combinée à l'exégèse et une analyse historique dont profiront ses successeurs.

Ensuite, il faut signaler les travaux du philosophe, philologue (l'étude du langage), exégète, historien et écrivain catholique français Ernest Renan (1823-1892) qui fut le premier francophone à sortir la critique de la Bible du cercle fermé des théologiens et la remettre dans la sphère laïque. Il profita d'un régime politique favorable où le pouvoir religieux n'était pas encore séparé du pouvoir politique car à partir 1905, les universités catholiques ne proposèrent plus d'études bibliques (contrairement aux pays protestants).

Ernest Renan dans les années 1870 photographié par Samuel-Adam Salomon.

A une époque où l'archéologie biblique n'existait pratiquement pas, comme le faisait l'école allemande, Renan démontra en s'appuyant sur la critique textuelle (cherchant les répétitions, les contradictions, les styles littéraires, etc.) que les différents textes bibliques étaient liés à certains contextes historiques et parvint ainsi à faire correspondre certains récits à des faits historiques. Sur base de ses découvertes, il fit le travail inverse, démontrant que plusieurs textes anciens furent combinés pour former le Pentateuque.

Après sa critique de l'Ancien Testament, il en fit autant avec le Nouveau Testament mais sa leçon inaugurale au Collège de France en 1862 ainsi que sa critique de la "La Vie de Jésus" (1863) lui vaudront d'être temporairment suspendu du Collège de France pour ses propos antisémites et sacrilèges[4].

Malheureusement Renan n'a publié ses livres qu'en français et ne fut principalement connu que des anciens de la Sorbonne et du Collège de France. Son travail resta donc en grande partie méconnu en dehors des clubs d'érudits français.

Tout en identifiant les sources documentaires par diachronie, les spécialistes tentèrent non seulement d'affiner l'identification des rédacteurs ou des documents mais également de les situer dans le temps et de les dater, ce qui s'avéra bien plus difficile en raison du manque de preuves et d'une méthode rigoureuse et commune de travail.

Le théologien protestant allemand Karl Graf (1815-1869) constata que les sources "J" et "E" étaient antérieures à la source "P" car leurs récits foisonnent de références archaïques (adoration de dieux guerriers païens, culte de de la fertilité, etc.) tandis que le prêtre insiste sur le respect de la Loi, une notion tardive.

Graf constata également que ni le Deutéronome dans lequel pourtant la source "D" insiste sur l'éthique religieuse et le sens des prophéties, ni aucun autre livre du Tanakh n'évoquent la Loi juive et notamment les nombreux commandements (selon la tradition rabbinique il y en a 613 commandements) enseignés dans la Torah. Il en déduisit que les documents sacerdotaux (à connotation religieuse) furent élaborés après l'Exil à Babylone, c'est-à-dire seulement vers le VIe siècle avant notre ère soit environ 5 siècles plus tard que le prétend la Torah.

Julius Wellhausen photographié vers 1900.

Ces différentes théories furent approfondies par le théologien protestant allemand Julius Wellhausen (1844-1918) qui les reprit littéralement à son compte à partir de 1878. Son oeuvre fut surtout connue après la publication en anglais de son livre "Prolegomena zur Geschichte Israels" (Prolegomena to the History of Israel, cf.  le Projet Gutenberg pour la version numérique) en 1883 et d'autres analyses jusqu'au début du XXe siècle mais toujours en allemand, ce qui limita leur diffusion.

En recherchant des analogies thématiques (géographiques, rituelles, religieuses, financières, etc.) ou linguistiques dans le Pentateuque et les autres Livres, comme ses prédécesseurs, Wellhausen accepta l'idée des 4 sources proposées par Hupfeld et reconnut comme Graf que le texte du prêtre (P) était tardif.

Selon Wellhausen, le "jéhowiste" qu'il associa à la source "JE" se compose de deux sources principales, "J" et "E", chacune portant les signes de trois éditions successives réalisées à peu près à la même époque. Il date la source "JE" du VIIIe siècle avant notre ère mais il estime "pour la période antérieure aux années 850-750 avant notre ère ne pas avoir de données statistiques [...] La littérature était abondance jusqu'à cette période"[5].

Wellhausen estima également que les sources "JE" et "P" sont présentes non seulement dans l'ensemble du Pentateuque mais également dans le livre de Josué car le récit de la Conquête (cf. Jéricho) et le relevé cadastral du pays font partie intégrante du projet d'historiographie (d'écriture de l'histoire) des auteurs; il proposa donc d'appeler l'ensemble l'Hexateuque, un nom qui survivra jusqu'aux travaux de Martin Noth (voir page suivante).

Finalement, Wellhausen analysa ce qui le passionnait le plus, l'évolution culturelle des institutions (la manière dont le culte, les sacrifices, les traditions, le sacerdoce et la dîme sont décrits au cours du temps). En suivant leur évolution à travers les propos des sources "JE", "D" et "P", il parvint à identifier trois périodes de rédaction : l'époque dynastique (davidique) reflétée par la source "JE" au IXe ou VIIIe siècle avant notre ère, l'époque des réformes de Josias vers 622 avant notre ère représentée par la source "D" écrivant depuis Jérusalem, et la période postexilique de la source "P" après 400 avant notre ère. Il nota que la source "P" considère que la centralisation du culte est déjà installée et que l'auteur la transpose à une époque antérieure, dans le désert, où il évoque le Tabernacle plutôt que le Temple. Il constata également cette évolution avec la dîme décrite par la source "P" qui n'est d'abord qu'une taxe royale avant l'Exil (1 Samuel 8:15) pour devenir une redevance payable aux prêtres du Temple (Nombres 18:24).

C'est également Wellhausen qui mit en évidence que la Loi juive n'est pas à l'origine de la création de l'Israël antique mais à l'origine du judaïsme à l'époque postexilique : "Dans le judaïsme post-exil, le Mosaism qui, jusque-là, n'avait été que latent, émerge soudainement partout."[6]. La source "P" est donc contemporaine de la création du judaïsme avec un respect strict de la loi sacerdotale, ce qu'on appelle une théocratie ou de préférence une hiérocratie, un pouvoir fondé sur la contrainte psychique imposée par les règles religieuses.

A travers ce schéma, la théorie de Wellhausen expliquait également l'Histoire religieuse du peuple d'Israël, les concepts primitifs de Yahvé et Elohim et d'un monde juif exclusif se transformant graduellement dans le Deutéronome en une vision prophétique, monothéiste et nationaliste réglementée par un source sacerdotale garante des traditions.

Wellhausen défendit si bien sa théorie qu'il fut considéré comme un "maître" en la matière au point que la plupart des exégètes souscrivirent à ses conclusions (il faut aussi avouer que Wellhausen avait pas mal de faux amis et que le mot maître est aussi à prendre péjorativement).

Comme l'a écrit le bibliste Richard Friedman de l'Université de Géorgie, l'exégète Julius Wellhausen (1844-1918) avait tellement d'influence que même 90 ans après sa disparition, les spécialistes craignaient encore les foudres de ses émules : "A ce jour, si vous n’êtes pas d’accord, c'est avec Wellhausen que vous n’êtes pas d’accord. Si vous voulez imposer un nouveau modèle, il vous faut comparer ses mérites avec ceux du modèle de Wellhausen"[7].

Mais malgré son "aura" et la pertinence de ses commentaires, déjà de son temps l'hypothèse de Wellhausen fut attaquée par quelques exégètes. C'est l'occasion pour nous d'examiner cette pléthore de variations sur le même thème et des théories alternatives apparues au XXe siècle.

Deuxième partie

Une pléthore de théories

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[1] Lire Joseph-Guillaume Clémence, "Réfutation de la Bible enfin expliquée de Voltaire", 1776, écrit avec l'aval de son évêque, dans lequel il souhaite démontrer la véracité des textes bibliques et "renforcer les preuves de l'authenticité du Pentateuque par les témoignages des auteurs sacrés postérieurs à Moyse" (Préface, p.VI); "L'Authenticité des Livres, tant de l'Ancien que du Nouveau Testament", 1782.

[2] Abraham Kuenen, "Religion of Israël", 1869 (traduit en anglais en 1875), Vol. II, p157.

[3] John Barton, "The Oxford Bible Commentary", Oxford University Press, 2010, p19.

[4] Ernest Renan fut promu professeur de la chaire de hébreu au Collège de France réputé pour son esprit libéral. Lors de sa leçon inaugurale le 22 février 1862 intitulée "De la part des peuples sémitiques dans l’histoire de la civilisation", contrairement à ce qu'on s'attendait, Renan ne put s'empêcher d'exprimer publiquement son opinion, voyant en Jésus un "homme incomparable" et non un Dieu, ce qui fit scandale parmi le corps professoral et dans certains milieux catholiques. Dans la foulée, il publia une critique de "La Vie de Jésus" en 1863 qui lui valut d'être supendu du Collège de France pour des propos qu'on jugea sacrilèges mais qu'on peut aujourd'hui considérer comme anti-sémite et racistes dès lors que Renan dénigra la culture sémite et mis en avant le "génie indo-européen". Même le pape Pie IX le qualifia de "blasphémateur européen". Renan n'en reste pas moins un intellectuel, un homme de science et un écrivain de premier plan qui finit par réintégrer sa chaire en 1870, être nommé administrateur du Collège de France en 1883 et qui reçut la Légion d'honneur en 1888. Comme quoi les institutions ne sont pas rancunières et peuvent reconnaître leurs erreurs.

[5] Julius Wellhausen, "Grundisse zum Alten Testament", 1965, p40.

[6] Julius Wellhausen, “Prolegomena zur Geschichte Israels", 1883, p.V (ou Prolegomena to the History of Israel), voir aussi la version numérisée du Projet Gutenberg.

[7] Richard Friedman, "Qui a écrit la Bible ?", Exergue, 1998/2012.


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