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Devenez chasseur de comètes

Compositage d'images de la comète Neowise photographiée le 21 juillet 2020 au soir au-dessus de Dizin, en Iran, par Reyhaneh Valipour avec un APN Nikon D7100 équipé d'un objectif Samyang de 16 mm f/2.0.

Écrit en collaboration avec Michel Festou du CNRS (1945-2005)

Le balayage du ciel (III)

La monture équatoriale paraît la plus commode pour l'observateur qui s'apprête à rester jusqu'à deux heure du matin l'oeil rivé à l'oculaire, souvent dans le froid. Le balayage du ciel "à la Meier" permet certainement d'éviter de passer deux fois au même endroit et de consigner plus aisément quelles ont été les zones surveillées.

La monture (alt-)azimutale est aussi intéressante pour les balayage horizontaux et verticaux à condition que les freins auto-bloquants soient débrayables et les axes mobiles sans requérir d'alimentation car bien souvent les petits télescopes "à la GoTo" sont inopérables sans alimentation.

Une étude très poussée d'Edgard Everhart a montré que les comètes devenaient "découvrables" dans trois cas sur quatre, le matin, au-dessus de l'horizon. Ce qui ne veut pas dire que c'est effectivement le cas dans la pratique, c'est seulement le résultat d'une analyse statistique sur les probabilités de découverte. Les comètes sont en fait découvertes bien souvent à de plus fortes élongations solaires, ce qui prouve qu'il y a de la place pour de nouveaux chasseurs !

Comment balayer le ciel ? Loin du Soleil on peut utiliser la méthode Meier. Bortle s'intéresse surtout à la région proche du Soleil : repérez le point de l'horizon où le Soleil s'est couché ou le point où il va se lever. Dirigez votre instrument à 45° de ce point (au nord et au sud), quelques degrés au-dessus de l'horizon. Ensuite il est possible de balayer horizontalement ou verticalement. Le rythme optimal est de 0.5° par seconde (le diamètre de la Lune) ce qu'un oculaire offrant un champ de 50° et de faible puissance embrasse facilement dans un petit télescope. Mais les deux balayages sont loin d'être équivalents : tout comme les observations du soir et du matin ne sont pas semblables.

Le soir, le Soleil descend sous l'horizon. Si vous faites un balayage vertical, des zones potentiellement favorables disparaîtront avant que vous ne les ayez examinées. Si vous faites un balayage horizontal, vous observerez relativement bas sur l'horizon des zones que vous auriez pu voir à une hauteur plus grande en les examinant plus tôt. Le matin ces effets sont inversés et il est préférable de commencer assez haut sur l'horizon (environ 45°) et de descendre progressivement.

Michel Festou propose une autre méthode qui tient compte du fait que l'élément essentiel est l'angle entre le Soleil et la comète.

Comme illustré à gauche, plus on regarde près du Soleil, plus le nombre de candidats est faible, plus l'éclat possible est grand et plus l'objet est bas sur l'horizon. Si on s'éloigne du Soleil le nombre d'objets décelables augmente, leur éclat moyen diminue, mais leur hauteur sur l'horizon augmente. L'essentiel est donc de localiser la trajectoire apparente du Soleil : les points de même élongation solaire se trouvent approximativement sur des droites perpendiculaires à cette direction. C'est le long de ces lignes perpendiculaires qu'il faut balayer ! Le soir on commencera par les angles de 20 à 25° du Soleil et on progressera ensuite en s'écartant du Soleil d'une valeur équivalente à celle du champ (les recoupements sont inutiles).

Mais attention à la dissymétrie suivante : le soir tourné vers l'ouest, vous voyez le Soleil se diriger du sud au nord. Le matin vers l'est, le Soleil se dirige du nord vers le sud. Les zones sud le soir et nord le matin sont moins hautes sur l'horizon : des observateurs plus au sud que vous sont plus à même de les examiner avec succès. Donc le soir examinez surtout le nord, en partant de la ligne décrite par le Soleil. Le matin examinez le sud de cette ligne, en vous dirigeant vers elle et en commençant par des distances de l'ordre de 50 et 60° du Soleil. Puis diminuez la valeur de cet angle de la valeur du champ. 

La "méthode Meier" semble être prometteuse vu le peu de temps que Meier a consacré à ses recherches de comètes. Ikeya passa 335 heures avant de découvrir 1963 L ! Alcock eut besoin de balayer le ciel 600 heures avant de donner son nom à 1950 IV et Don Machholtz capitalisa 1700 heures avant de découvrir 1978 L. Alors bon courage, la persévérance est vraiment indispensable au succès en ce domaine.

Le fait du hasard

En complément des propos de Michel Festou, ajoutons que certaines découvertes sont fortuites, et c'est heureux pour les amateurs occasionnels qui connaissent un peu le ciel mais qui ne peuvent pas toujours réunir tous les éléments nécessaires pour observer dans de bonnes conditions, je pense en particulier au facteur météo.

Citons en particulier la découverte étonnante faite par le Canadien Vance A. Petriew qui illustre merveilleusement la méthode qu'un amateur occasionnel devrait suivre pour découvrir une comète.

Aspect simulé de l'observation de Petriew. Document T.Lombry.

Le 18 août 2001, au cours d'une soirée d'observation organisée au Saskachewan au Canada, Vance Avery Petriew cherchait la nébuleuse du Crabe avec un télescope Obsession de 510 mm d'ouverture. Voyant qu'il s'était trompé d'étoile de repère son attention fut attirée par un objet diffus mais condensé près de Beta Tauri d'une magnitude estimée à 11 et de 3 minutes d'arc de diamètre.

Richard Huziak du Saskatoon Centre de la Royal Astronomical Society du Canada (RASC) était présent à cette soirée et connaissait suffisamment bien cette région du ciel pour savoir qu'il n'existait aucune galaxie à cet endroit. Ils prirent alors tous deux conscience que Vance venait de découvrir une comète !

Excité par sa potentielle découverte - imaginez-vous qu'ils n'étaient que deux observateurs au monde à connaître l'existence de cette comète à cet instant - Petriew contacta par e-mail Maik Meyer en Allemagne qui lui confirma sa découverte. Avec une magnitude de 11, d'autres amateurs purent utiliser des télescopes plus petits (à partir de 100 mm) pour confirmer l'observation de Vance.

Petriew annonça sa découverte quelques heures plus tard à Brian Marsden du Centre des Planètes Mineures (MPC) du Smithsonian. Une confirmation sera demandée à A.Hale de l'Observatoire du Nouveau Mexique. 

Le 19 août, la magnitude de la comète Pretriew fut estimée avec des moyens CCD à 13-13.4 alors que Vance l'estima visuellement à 11. Le 20 août, elle était de magnitude 10.7 et brilla encore un peu plus durant les semaines qui suivirent. Elle présentait un diamètre qui n'excéda pas 2.5'. Elle sera cataloguée P/2001 Q2, Petriew. Vance signait ainsi la découverte de la deuxième comète par un amateur au cours de l'année 2001, juste derrière la comète Utsunomiya-Jones, C/2000 W1 (IAUC 7652) sur un peu plus de 70 comètes découvertes par les professionnels.

La découverte de Vance venait seulement un jour après celle de la comète Neat par les astronomes professionnels K. J. Lawrence, E. F. Helin et S. Pravdo du JPL dans le cadre du programme NEAT. Oui vraiment, Vance Petriew pouvait être fier de sa découverte et témoigner bien fort de l'utilité de la communauté des astronomes amateurs !

A lire: Le prix Edgard Wilson pour récompenser les découvreurs de comètes

Honneur aux amateurs

A gauche, la comète Petriew photographiée le 23 août 2001 par Tim Puckett au foyen d'un télescope Ritchey-Chrétien de 600 mm équipé d'une caméra CCD Apogee AP-7. A sa droite, Vance Petriew et sa petite fille Emilie devant le télescope Obsession de 510 mm. Document NASA-Science. A droite du centre, la comète Lovejoy (C/2014 Q2) photographiée par Gerard Rhemann le 14 janvier 2015 avec un astrographe ASA de 200 mm f/2.8. A sa droite, Terry Lovejoy photographié en 2011 dans son observatoire de Thornlands, en Australie avec le télescope Celestron de 200 mm Fastar qui lui permit de découvrir une comète en 2011 (C/2011 W3). Au total, entre 2007 et 2017, il a découvert 6 comètes qui portent toutes son nom. Document Amy & Sarah Lovejoy.

On peut expliquer la découverte de Petriew en raison du fait que les amateurs ont toutes les chances de réaliser ce genre d'observations lorsque les comètes sont près du périhélie. En effet, au plus près du Soleil les glaces du noyau se subliment en formant une coma très brillante qui rend la comète visible dans des instruments de 150 mm d'ouverture environ. Ainsi chaque année en moyenne 4 amateurs parviennent à inscrire leur nom en lettres de feux sur le velours du ciel. Certains l'y ont inscrit plusieurs fois comme Terry Lovejoy.

Tentez votre chance !

Cet article fut publié sur Futura-Sciences en 2004 et mis à jour.

Pour plus d'informations

Les comètes (sur ce site)

Eurêka ! (sur ce site)

Sites internet de Don Machholtz : Donald Machholtz, The comet hunter

Le prix Edgard Wilson

Minor Planet Checker (CfA)

Les potins d'Uranie/Université de Strasbourg

Ephémérides du Bureau des Longitudes

Ephémérides du JPL (Encke)

Données de l'American Meteor Society

Oberwerk ("Bigbinos" Orion, en Europe contacter SSC en Angleterre)

BigBinoculars

BigBinoculars UK.

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