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La gestion de la crise sanitaire de Covid-19

Patient en soins intensifs aux HRS de Luxembourg entouré des appareils de monitoring des fonctions vitales, respirateur, cathéter et éventuellement d'une sonde, pousse-seringue, appareil d'hémofiltration, etc.

La capacité du système de santé (IV)

Le CDC, le centre américain de contrôle et de prévention des maladies publia en 2017 un guide de 33 pages décrivant les lignes directrices de réduction (mitigation) du risque sanitaire afin de prévenir la pandémie de grippe (virus Influenza). Ce rapport s'applique également à tous les virus susceptibles d'infecter la population par les mêmes voies respiratoires (cf. le tableau des modes de transmission des virus), c'est-à-dire la plupart d'entre eux y compris les coronavirus et donc le Covid-19.

Dans ce guide on apprend que la toute première chose à faire est d'évaluer la capacité du système de santé à gérer la vague épidémique. En effet, si les hôpitaux manquent de ressources, n'ont pas suffisamment de lits, d'appareils médicaux et de personnel pour traiter tous les patients jusqu'à leur guérison, le pays va subir la pire épidémie de son histoire et le nombre de décès explosera. Il faut prioritairement s'assurer que le pays dispose de suffisamment de moyens, notamment en réanimation et soins intensifs.

Selon l'OCDE, en Europe, les systèmes de santé sont très différents d'un pays à l'autre ainsi que leurs ressources (en personnel et en équipement), ce qui a impact sur la qualité des services offerts aux patients. Autrement dit, il y a des pays en sous-effectif ou sous équipés où il est préférable de ne pas tomber malade et de demander un rapatriement d'urgence !

Les hôpitaux européens disposent en moyenne de 5.3 lits pour 1000 habitants (2019) mais les écarts sont importants. Le nombre de lits varie du simple au triple entre l'Allemagne (8/1000 en 2017) et le Royaume-Uni (2.5/1000 en 2017) et le quadruple avec la Suède (2.2/1000 en 2017). On trouve également des taux d'équipement relativement bas au Portugal (3.3/1000), en Italie (3.2/1000), en Norvège (3.2/1000) et aux Pays-Bas (2.9/1000).

L'Allemagne à l'un des taux les plus élevés des pays de l'OCDE, après le Japon (13.1/1000 en 2017) et la Corée (12.3/1000 en 2017).

En Belgique (6.41/1000), 20.2% des lits d'hôpitaux sont des lits psychiatriques (cf. Santé Wallonie et ce fichier PDF). Début 2020, il y avait 2300 lits aux soins intensifs.

La France (6/1000) ne disposait que d'environ 5500 lits aux soins intensifs (soit 3.2/1000) en mars 2020, une valeur qui s'est avérée au moins 3 fois trop faible pour offrir un service de qualité aux patients Covid.

Pour y remédier, tous les pays européens ont pris des mesures d'urgence. En effet, connaissant les capacités limitées du système de santé, chaque pays doit s'assurer de trouver une méthode pour ne jamais dépasser la capacité de ses hôpitaux et des autres acteurs de santé dont les laboratoires d'analyses.

Comme l'ont bien expliqué le guide du CDC et les recommandations de l'ECDC, la première idée proposée par les épidémiologistes est d'étaler le nombre de cas dans le temps afin que les services de santé et en particulier les hôpitaux ne soient jamais saturés et puissent toujours admettre de nouveaux patients. A défaut de place, ils ne pourront pas les prendre et charge et devront être conduits vers d'autres centre de soins. C'est rarement efficace dans une situation d'urgence. On y reviendra.

La Belgique augmenta donc son nombre de lits aux soins intentifs en mars 2020, passant à 2800 lits dont 2000 étaient réservés aux patients Covid (cf. RTBF). La France fit de même, passant à 7500 lits aux soins intensifs. Mais cela resta insuffisant. En France, dès mars 2020 on dépassa les 150% d'occupation dans l'Est de la France (cf. Statista, Libération). En Belgique, au plus fort des première et deuxième vagues épidémiques, des hôpitaux ont refusé des patients Covid qui furent temporairement pris en charge par des hôpitaux situés en Flandre ou à l'étranger. L'Allemagne doubla son nombre de lits aux soins intensifs, passant de 28000 à 56000 lits soit atteignant un taux de 12/1000, c'est 2.5 fois plus qu'en Italie !

A consulter : The World FactBook, CIA

Lits d'hôpitaux, OCDE

L'étalement des cas dans le temps est la seule méthode permettant d'éviter la saturation des hôpitaux. Pour y parvenir, il faut prendre des mesures de protection pour éviter la propagation du virus (hygiène des mains, distanciation sociale, quarantaine, voire confinement et port du masque dans les endroits publics à risque). Document CDC adapté par l'auteur.

Mais à lui seul, l'étalement des cas dans le temps ne permet pas d'assurer à la population un service de qualité. En effet, comme expliqué précédemment, en complément il faut que les gestionnaires de ces établissements voire le ministre de la Santé veille sur le stock disponible d'accessoires médicaux (masques, respirateurs, curares, réactifs, etc) et de médicaments et prévoit une montée en puissance du nombre de malades au plus fort de l'épidémie. Ajouter des lits sans augmenter les effectifs, les équipements accessoires et les médicaments ne sert donc à rien si on ne contrôle pas la propagation du virus.

C'est l'étape d'évaluation que beaucoup de pays ont minimisé voire dénié, imaginant égoïstement que la première et la deuxième vagues épidémiques ne les toucheraient pas ou très peu... Mais comme le montre la simulation ci-dessus, sans isolement strict des deux populations tout le monde finit par être contaminé, ce n'est qu'une question de temps. Si un gouvernement sans scrupule et sans culture scientifique pense que son économie prime sur la vie de ses citoyens comme aux Etats-Unis, au Brésil et dans une moindre mesure en Suède, une épidémie peut affecter une grande partie de sa population et durement impacter son économie.

Mais même en disposant de 13 lits pour 1000 habitants soit plus du double qu'en Europe, le système hospitalier du Japon est sur les genoux. Pourquoi ? Car sa gestion a été confiée au secteur privé et tous les hôpitaux et cliniques sous sous-dimensionnés. Résultat, certains patients Covid meurent avant d'avoir reçu les premiers traitements, d'autres doivent attendre 2 jours dans une ambulance avant d'être pris en charge ou des personnes contaminées sont confinées chez elles pratiquement sans aucun suivi.

Isolement des patients

Pour limiter la propagation d'un virus comme le Covid-19, parmi les premières mesures de précaution à prendre, il faut isoler et soigner les personnes contaminées et mettre en quarantaine à leur domicile durant 14 jours toutes les personnes susceptibles d'avoir été en contact avec une personne contaminée, y compris les touristes revenant de vacance d'un pays classé "rouge" (à haut risque de contamination).

Rappelons que le terme "quaranta" est né en Italie après l'épidémie de peste de 1629-1631 bien qu'en pratique l'isolement était déjà pratiqué du temps biblique et au Moyen-Âge, notamment pour les léproseries et sur les navires revenant d'un pays ou sévissait une épidémie.

Sans prévoyance, une étude de l'Université d'Harvard publiée dans le "New York Times" le 17 mars 2020 a montré que 60% des adultes des Etats-Unis soit 151 millions de personnes risquaient d'être contaminées en l'espace de 6 mois ! Face à ce risque, le président Trump adapta sa stratégie pour éviter un shutdown complet du pays. Ceci dit, les gouverneurs des États conservent heureusement une certaine autonomie et ont toujours la possibilité de prendre leur propre destin en main sans attendre l'avis du Président, ce qui permit par exemple à Gavin Newsom, gouverneur de Californie de réagir très tôt contrairement à son collègue de Floride ou de New York.

Au final, au terme de son mandat, le déni de la dangerosité du virus par Donald Trump et ses supporters et son manque de stratégie sanitaire pour endiguer l'épidémie entrainèrent plus de 23 millions de contaminations aux États-Unis et près de 400000 décès en janvier 2021, un triste record mondial.

Une image valant mille mots, à Hong Kong le gouvernement a publié dans les médias y compris sur Facebook des affiches rappelant les consignes pour éviter la propagation du virus. Elles s'adressent également aux jeunes. Documents gov.hk

La roulette russe suédoise

Mais ce n'est pas la stratégie adoptée en Suède où l'épidémiologiste Anders Tegnell a fait le pari de ne pas confiner les citoyens et de compter sur leur sens civique. Il a choisi la stratégie de l'immunité collective, à l'image de ce qu'on fait subir au bétail lors d'une épidémie ! Concrètement, les autorités attendent qu'au moins 70% de la population soit contaminée en espérant qu'elle développe une immunité collective contre le Covid-19. Le gouvernement a accepté cette stratégie unique en Europe. L'avantage est que cela préserve l'économie qui continua de tourner et la population n'a pas ressenti la crise si ce n'est que les frontières étaient fermées. Si psychologiquement, c'est un facteur important, sur le plan sanitaire c'est beaucup moins recommandable.

Cette stratégie est dangereuse car imprévisible. En Suède, le 30 avril 2020 le taux de létalité était de 12.1% contre 4.4% le 31 mars. Autrement dit, cette stratégie n'est pas efficace et le taux de létalité fut 3 à 4 fois supérieur à celui des pays limitrophes (taux de létalité de 2.7% en Norvège, 4.2% en Finlande, 4.9% au Danemark au 30 avril 2020). Cette stratégie a tué également de manière très inégale. 40% des contaminés sont issus des populations immigrées refoulés dans les quartiers populaires de la banlieue de Stockholm, notamment dans les communautés somalienne, irakienne, syrienne et turque. Face à cette situation, une partie des collègues scientifiques de Tegnell ont critiqué ses méthodes et l'Agence de Santé Publique a reconnu son échec et tenté d'y remédier. Elle interdit les visites dans les maisons de retraite et les rassemblements de plus de 50 personnes.

Finalement, le 3 juin 2020 Tegnel qui prétendait encore un mois plus tôt que le confinement n'est pas orthodoxe et qu'il avait la population avec lui (cf. YouTube) fit son mea culpa et reconnut que le Covid-19 avait fait trop de morts (cf. BBC); sa stratégie fut un échec. S'il avait suivi les recommandations de l'OMS, la Suède aurait probablement évité de sacrifier plus de 4000 patients !

Rappelons qu'en 2009, Tegnell avait validé un vaccin contre la grippe A qui fut administré à 5 millions de Suédois. Depuis, plus de 400 Suédois souffrent de narcolepsie et ont été indemnisés par l’État, qui a reconnu sa responsabilité. Certains se demandent à juste titre si Tegnell n'est pas en train de faire des "expériences" d'épidémiologie en jouant avec la vie des Suédois ! Le mathématicien Marcus Carlsson de l'Université de Lund a même déclaré qu'Anders Tegnell et le Premier ministre Stefan Löfven "jouaient à la roulette russe avec la population suédoise" (cf. The Guardian). Heureusement qu'il ne joue pas avec un pistolet ! (pour rappel à l'inverse d'un revolver, le fait d'armer un pistolet place automatiquement une balle dans la chambre du canon).

Par comparaison, et bien involontairement cette fois, c'est à Bergame, dans le nord de l'Italie que l'immunité collective fut la plus élevée avec 42 à 50% de la population qui s'est auto-immunisée après le passage de la première vague épidémique qui tua des milliers de personnes en mars 2020. Les habitants ont conservé leur immunité contre le Covid-19 au moins jusqu'en novembre 2020 soit pendant plus de 8 mois et peut-être bien davantage. Par conséquent, ils n'ont que très peu subi la deuxième vague épidémique, une situation unique en Europe.

Distanciation sociale et confinement

Lorsque la contamination devient exponentielle, la seconde mesure qu'il faut combiner avec la première est la distanciation sociale ; en tout lieu (sauf évidemment à domicile) on impose une distance de sécurité entre les personnes d'au moins 1.5 mètre. Soulignons que plusieurs pays d'Asie fixent la distance minimum à 2 m et à 5 m dans les transports en commun.

Simulation de l'isolement partiel - la séparation est ouverte - des personnes contaminées (en brun à gauche) des personnes saines (en vert à droite). Avec le temps, tout le monde finit par être contaminé. Cliquer sur l'image pour lancer l'animation (GIF de 6.4 MB). Voici une analyse plus détaillée de cette simulation. Document White Box Analytics.

Soulignons bien que la distanciation sociale ne doit pas être synonyme de méfiance envers les autres comme on l'observe parfois quand on fait ses courses ou qu'on croise ses voisins notamment. Ne parlons même pas des cas scandaleux où du personnel de la santé fut prié par lettre anonyme voire forcé par leur voisin ou leur colocataire de déménager durant l'épidémie, autant d'actes inciviques inacceptables que la Justice compte bien condamner en France comme en Belgique (cf. Sud-Ouest, Le Parisien, RTBF, France Bleue).

D'autres règles doivent également être respectées pour endiguer la propagation du virus. Il faut réduire les déplacements au strict nécessaire, en recommandant le télétravail et les cours à distance dans la mesure du possible. Comme le montre les diagrammes présentés ci-dessous, en coupant très tôt la chaîne de contamination, on peut ainsi rapidement réduire de 50% le nombre de personnes contaminées. Si on le répète à chaque niveau, on réduit drastiquement le risque de contamination.

A consulter : Track Corona Isolation

A tester : Epidemic Simulator - GLEAMviz Simulator

Plague Inc - Disease Epidemic Model - Global Epidemic Simulator

Effet de la distanciation sociale sur la propagation d'un virus. Cette stratégie peut s'appliquer à chaque niveau et réduira d'autant la propagation du virus. Cliquer sur l'image de droite pour lancer l'animation. Documents J.Corum/The New York Times et SiouxsieW/Xtotl.

Malheureusement, faute de moyens ou de volonté, le 10 mars 2020, alors que la vague épidémique avait déjà atteint la Belgique et la France et que les hôpitaux étaient déjà sur le pied de guerre depuis le début du mois, en Belgique comme dans d'autres pays aucune consigne n'avait encore été donnée dans les transports en commun et dans les aéroports, au point que les étrangers transitant par Brussels Airport furent étonnés de ne recevoir aucune information, qu'il n'y ait pas de mesures de confinement et que personne ne portait de masque alors que dans le pays qu'ils venaient de quitter en Asie ou aux Etats-Unis, des mesures de sécurité sanitaire étaient déjà appliquées.

Si les autorités ne veulent pas appliquer la stratégie de l'immunité collective comme aux Pays-Bas et en Suède mais constatent qu'elles ne maîtrisent plus vraiment la situation et que le nombre de cas augmente, que les malades risquent de saturer les hôpitaux, le confinement est la seule alternative. En effet, il permet de protéger les personnes saines qui restent potentiellement des cibles pour le virus, à l'inverse des personnes contaminées auto-immunisées ou guéries qui, en principe, n'ont plus rien à craindre du virus pendant un an probablement.

Choisir le confinement est aussi un risque dans la mesure où tant que les personnes restent confinées, elles ne s'exposent pas au virus mais elles risquent de l'attraper lors d'un contact rapproché avec une personne asymptomatique ou malade qui ne se protège pas. Nous verrons que c'est pour éviter le risque de contacter le virus que les personnes qui sortiront durant le déconfinement dans des lieux fréquentés devront porter un masque tant que l'épidémie est présente dans leur pays.

A Séoul, derrière ces passants portant un masque de protection, des posters rappellent aux usagés du métro (à gauche, une photo prise le 10 février 2020) les risques de contamination et les gestes barrières. A droite, le titre de cette affiche dit "La nouvelle action de prévention du coronavirus". Photo prise le 10 mars 2020. Documents Ahn Young-joon/AP.

Il va de soi qu'à ce stade, étant donné que la population va malgré tout circuler un minimum et parfois sans respecter les consignes de sécurité, l'épidémie va progresser et contaminer de nouvelles personnes parmi lesquelles certaines devront être hospitalisées. Les hôpitaux doivent être prêts, suffisamment équipés y compris en réanimation, le personnel de la santé en suffisance et qu'il faut prévoir une progression exponentielle du nombre de malades jusqu'au pic épidémique et donc en fonction des ressources, prévoir éventuellement des renforts extérieurs ou transférer du matériel et du personnel médicaux voire évacuer les patients en cours de guérison vers d'autres hôpitaux non saturés, par exemple en province ou à l'étranger (ce qui fut le cas entre la France, la Belgique, le Luxembourg et l'Allemagne).

Selon les pays, en fonction des conditions sanitaires et des besoins sociétaux, les règles ont été assouplies comme au Luxembourg où le pays maîtrise bien la situation. Mais le gouvernement a toutefois demandé à la population de respecter les consignes et de rester vigilante car le virus est toujours présent. Les règles de distanciation sociale et de confinement restent d'application pour éviter une deuxième vague. C'est ainsi qu'après avoir assoupli leurs règles, la Chine et l'Espagne ont dû faire face à une deuxième vague épidémique. Généralement, elle est plus importante que la première. Nous voilà prévenus.

Le décret fut particulièrement strict en France et le fut plus encore début 2021 avec un couvre-feu à 18h, ce qui n'étonne pas les étrangers car l'Hexagone à la réputation d'être un pays très répressif, ce qui fait même sourire les habitants des pays limitrophes et évidemment les Anglo-Saxons bien plus "relax" en toute circonstance mais pas moins disciplinés.

Ce confinement strict n'a pas pour autant réduit le nombre de décès, le taux de létalité atteignant 14% en France au 24 avril 2020, soit 36% de plus que la moyenne européenne. Ajoutée aux autres erreurs, la stratégie du président Macron fut critiquée par une grande partie de la population et certains politiciens.

Ceci dit, il faut insister que le confinement reste la mesure la plus efficace pour réduire la propagation du virus et donc pour contrôler l'épidémie et son impact sur le système de santé. Qu'on apprécie ou pas la mesure, est un autre problème qu'il faut également gérer.

Si la plupart des États ont appliqué des mesures strictes durant le premier confinement, elles furent progressivement assouplies dans l'intérêt de la population. La population a pu sortir prendre l'air, s'asseoir 5 minutes sur un banc, les sportifs on pu faire leur jogging ou du vélo en solo. Si en France, le temps consacré au sport était limité à une heure par jour, la plupart des pays n'ont pas imposé de durée maximale. Avec de telles contraintes, il est certain qu'à la campagne ou sur une île les mesures étaient plus faciles à supporter et furent mêmes assouplies tout en restant obligatoires et les contrôles adaptés.

Notons que selon une déclaration du Dr Robert Sebbag du service des maladies infectieuses et tropicales de l'Hôpital de la Pitié Salpêtrière à Paris sur la radio RMC, le jogging est déconseillé durant une épidémie car le fait d'être en hyperventilation risque d'accélérer la propagation du virus. De plus, un porteur asymptomatique qui crachouille des micro-gouttelettes virales va les répandre autour de lui. C'est pour la même raison qu'en Belgique, le ministère de la Santé dermanda aux nombreux joggers et aux cyclistes qui profitèrent du beau temps pour faire du sport dans les parcs, de laisser une distance de sécurité suffisante entre eux pour éviter les particules virales éventuellement exhalées par ceux qui les précédaient ou qu'ils croisaient. Ce n'est qu'une estimation qualitative du risque mais elle rappelle une fois de plus que le risque zéro n'existe pas.

En Belgique, dès le 6 avril 2020, on pouvait rendre visite à un proche vivant dans une autre province ou faire son jogging, du vélo ou se balader dans un parc en respectant la distanciation sociale et sans porter de masque. Même politique en Allemagne.

Le fait d'avoir une terrasse côté jardin, de vivre à la campagne ou près de la nature comme ici dans la Drôme en France devient un privilège durant un confinement.

Pendant des mois, les Pays-Bas et la Suède ont ignoré le confinement. L'État comptait sur le "confinement intelligent" (Pays-Bas) ou la "responsabilité des citoyens" (Suède). Les Pays-Bas ont malgré tout pris des mesures. Les écoles, les restaurants, les bars ont été fermés au public à partir de la mi-mars, les maisons de repos ne reçoivent plus de visiteurs, les rassemblements de plus de deux personnes trop proches les unes des autres peuvent être sanctionnés et les évènements publics sont interdits. Le gouvernement a même déclaré : "N'allez dehors que si c'est nécessaire." Toutefois, la population continua à vivre comme à l'accoutumée et sans respecter la distanciation sociale.

Malgré les inquiétudes du personnel de la santé, aucune précaution ne fut mise en place pour protéger les personnes vulnérables comme les retraités, les malades d'Alzheimer ou les personnes handicapées mentales. Résultat, le taux de létalité atteignit 12.2% aux Pays-Bas et 12.1% en Suède pour une moyenne européenne de 9.5% au 30 avril 2020. Finalement, on constate que la stratégie adoptée par ces deux pays n'a pas été efficace pour endiguer l'épidémie.

Mais visiblement la police et la gendarmerie ont abusé de leur pouvoir. Ainsi, en Belgique, un homme qui venait de faire ses courses fut verbalisé parce que juste avant de rentrer chez lui, il s'était arrêté cinq minutes pour prendre l'air. Ailleurs, un médecin généraliste fut verbalisé parce qu'il était sorti pour une consultation et n'avait pas de motif officiel ! Il y a beaucoup d'autres "inciviques" ou anecdotes de ce type. A chacun de juger de la justification d'un tel PV.

En revanche, il y eut beaucoup de désinvolture  et d'abus de côté de la population. Au Luxembourg, le virologue Marc Van Ranst très médiatisé, a même menacé les inciviques : "Il y a donc des individus qui, par leur mauvaise conduite, vont contribuer à nous rapprocher d'un lockdown à la Wuhan... pendant lequel vous ne serez pas autorisés à faire du sport ou à travailler dehors !" (cf. Wort). Est-ce la meilleure façon de communiquer ? Sans doute pas, mais la population était prévenue.

Mais si la communication passe mal entre le gouvernement et les citoyens, si ces derniers sont lassés par les restrictions et considère que les décisions prises ne sont pas justifiées ou injustes, le fait de renforcer les mesures sanitaires et les contrôles policiers peuvent avoir un effet contraire aux attentes avec une augmentation des actes inciviques et de la violence lors des contyrôles.

A l'inverse autoriser les sorties et lâcher un peu la pression quand le Soleil brille ne signifie pas qu'on lâche la population dans la nature et qu'elle ne doit pas respecter les consignes et ne plus avoir de sens civique ! Or c'est malheureusement ce qu'on a constaté un peu partout, d'où les contrôles de police renforcés dans les zones trop fréquentées et une augmentation des PV à partir de début avril en Belgique, en France et au Luxembourg. Même constat après les chutes de neige durant les vacances d'hiver où beaucoup de personnes ont visité les sites naturels et notamment les Fagnes, où elles n'ont pas respecté les règles sanitaires, forçant les bourgmestres à interdire l'accès à certaines zones naturelles fragiles.

Marc Moulin prédit le confinement mondial en 2003

En cherchant de la documentation, le réalisateur belge Olivier Monssens découvrit une "prédiction" assez étonnante qu'il publia sur les réseaux sociaux. Le 27 avril 2003, l'artiste et chroniqueur belge Marc Moulin (1942-2008) décrivit dans une chronique pour le magazine"Télémoustique" (aujourd'hui "Moustique") une situation que nous avons tous connu tout récemment. La coïncidence est criante de vérité. Voici sa composition reproduite mot pour mot. Nous devons l'illustration d’origine à Pierre Kroll.

"Vers la civilisation du couvre-feu"

par Marc Moulin

"Je nous vois déjà dans 20 ans. Tous enfermés chez nous. Claquemurés (j’adore ce verbe, et ce n’est pas tous les jours qu’on peut le sortir pour lui faire faire un petit tour). Les épidémies se seront multipliées: pneumopathie atypique, peste aviaire, et toutes les nouvelles maladies. Et l’unique manière d’y échapper sera de rester chez soi. Et puis il y aura toujours plus de menaces extérieures: insécurité, vols, attaques, rapts et agressions — puisqu’on aura continué de s’acharner sur les (justes) punitions en négligeant les (vraies) causes. Et le terrorisme, avec les erreurs à répétition des Américains, sera potentiellement à tous les coins de rues. La vie de « nouveaux prisonniers » que nous mènerons alors sera non seulement préconisée, mais parfaitement possible, et même en grande partie très agréable. Grâce au télé-travail qui nous permettra de bosser à la maison tout en gardant les enfants (qui eux-mêmes suivront l’école en vidéo-conférence). Grâce à Internet qui nous épargnera bien des déplacements: on n’aura plus besoin ni de poster les lettres, ni d’acheter un journal «physique», ni d’aller faire la file dans les administrations. (…). Dans les rues, il ne restera plus que des chiens masqués qui font seuls leur petite promenade (pas de problème, sans voitures), et du personnel immigré sous-payé en combinaison étanche, qui s’occupera de l’entretien des sols et des arbres. D’autres s’occuperont de la livraison de notre caddy de commandes à domicile.

Alors nous aurons enfin accompli le dessein de Big Brother. Nous serons des citoyens disciplinés, inoffensifs, confinés, désocialisés. Nous serons chacun dans notre boîte. Un immense contingent de «je», consommateurs inertes. Finie l’agitation. Finie la rue".

Surprenant de réalisme et de clairvoyance, n'est-ce pas ? Comme si Marc Moulin avec le don de prémonition, il anticipa également la crise financière de 2008 (la crise des subprimes) et n'hésita pas à se moquer des rasoirs multi-lames avant même qu'ils existent !

Mais un point sur lequel les experts ne se sont pas exprimés jusqu'à y être confrontés est celui des impacts psychologiques du confinement, une question qui avec le temps est devenue de plus en plus pressante car personne n'est habitué et ne supporte cette privation relative de liberté. Ce n'est donc par un sujet qu'on peut écarter du plan d'action sous prétexte qu'il n'a rien à voir avec la crise ou serait sans effet notable. Que du contraire. On reviendra sur les impacts psychologiques de la crise sanitaire au Covid-19.

Les dommages collatéraux

Selon une enquête menée en Belgique en novembre 2020 par des journalistes du journal "Le Soir" auprès de l'INAMI (Institut national d'assurance maladie-invalidité), l'Agence intermutualiste, les Mutualités libres, la Fondation contre le cancer notamment, les dégâts potentiels de la Covid-19 sont nombreux, variés et de ce fait peu rassurants.

On ne parle pas ici des conséquences directes de la maladie ni des séquelles présentés par certains convalescents mais bien des dommages collatéraux induits par l'absence de soins, le report de consultations, le déni face à des symptômes inquiétants, la peur de fréquenter les hôpitaux, la fermeture des blocs opératoires, etc.

Il s'agit de symptômes apparemment bénins pour lesquels, plus par habitude que par nécessité, on consulte généralement son médecin de quartier. Or selon cette enquête, il s'agit aussi de symptômes inquiétants que le stress du confinement a sous-estimé ou mis de côté. Il peut aussi s'agir de patients atteints de maladies chroniques qui furent empêchés de poursuivre leur traitement. Cela concerne en majorité des patients ayant un cancer, les victimes d'infarctus, d'AVC, présentant une hernie, des problèmes locomoteurs, d'ulcères, de bronchites obstructives, d'inflammations en tout genre, etc. Les pathologies sont nombreuses.

Si le ministre de la Santé et les directeurs des centres hospitaliers ont tiré les leçons des conséquences néfastes du confinement lors la première vague épidémique, l'explosion du nombre de patients hospitalisés pour la Covid-19 au cours de la deuxième vague empêcha de résoudre ce problème de ressources du secteur hospitalier et sa surcharge de travail. L'apport d'argent frais et l'aide de personnel temporaire n'ont pas résolu le problème.

Si toutes les pathologies citées exigent des traitements soit d'urgence soit récurrents, les cas de cancers restent les plus inquiétants.

Surmortalité des cancers

Les professionnels de la santé l'avaient constaté pendant le premier confinement et avaient averti le public concerné (et les autorités) en son temps : "Ne tardez pas pour votre prise en charge car votre santé est en jeu." En effet, par craindre d'être contaminés à l'hôpital, certains malades ont annulé leur consultation. Quelques mois plus tard, les médecins ont constaté les conséquences de ces annulations.

Dès le 22 avril 2020, l'association Unicancer mettait en garde les citoyens français contre les retards de diagnotics pendant le confinement. Selon le Dr Jean-Yves Blay du centre d'oncologie Léon Bérard de Lyon, "Nous craignons 5000 à 10000 morts supplémentaires du cancer [...] les Anglais ont des projections allant jusqu'à 40000 patients décédés en excès."

Grâce à la thérapie génique, les lymphocytes T du patient munis d'un récepteur CAR (Chimeric antigen receptor) se transforment en cellules CAR-T (en cyan) et combattent avec succès les cellules cancéreuses (magenta). Document Laurent Schmitt.

Le Dr Blay cite deux exemples. Une patiente qui présentait un petit ganglion pensait pouvoir attendre la fin de la pandémie pour faire un examen clinique. Finalement, elle fut prise en charge car il s'était transformé en un lymphome hodgkinien. Autre exemple, des femmes qui sentaient une boule dans l'un de leurs seins attendirent avant de se faire examiner. Or une tumeur d'un ou de cinq centimètres n'est pas la même chose et le traitement peut devenir très lourd, d'où l'importance de se faire dépister au moindre doute.

Chaque année, en France on diagnostique 380000 nouveaux cas de cancer soit environ 30000 par mois et près de 70000 nouveaux cas en Belgique !

Selon une étude surnommée "Grouvid" présentée en septembre 2020 par la statisticienne Aurélie Bardet de l'Institut Gustave Roussy de Villejuif (F), "les retards de diagnostic et de traitements des cancers se traduisent chez les patients non contaminés par le Covid par un excès de mortalité par cancers de 2 à 5%, cinq ans après le début de la prise en charge."

Selon les chercheurs, ce sont les retards et les décalages qui ont eu le plus fort impact. L'étude indique que cette surmortalité toucherait principalement les cancers du foie, les sarcomes, les cancers de la tête (pas seulement les tumeurs cérébrales) et du cou et serait liée aux décalages suite au confinement.

L'étude est basée sur 4900 patients et l'exploitation d'un modèle mathématique permettant de faire une évaluation de l'impact de la pandémie de Covid-19 sur l'organisation des soins en cancérologie et les conséquences sur le pronostic. Ce modèle d'évaluation sera à terme étendu à d'autres centres nationaux et européens et sera développé pour déterminer le décalage maximum à ne pas dépasser dans chaque situation clinique pour minimiser l'impact sur la survie des patients.

Les auteurs notent qu'en cas de reprise de l'épidémie, l'importance de ne pas décaler la prise en charge doit être soulignée auprès des pouvoirs publics, des patients ou des personnes devant réaliser un dépistage. Pour certains cancers à un stade avancé, un retard dans la prise en charge peut se traduire par une dégradation majeure du pronostic.

Cette étude préliminaire fut présentée au Congrès de la Société européenne d'oncologie médicale (ESMO 2020) qui s'est tenue en ligne du 19 au 21 septembre 2020. En raison de la deuxième vague épidémique, la situation a empiré, une raison de plus de se faire vacciner contre la Covid-19. On y reviendra.

Les réactions de la population

Nous avons tous vu des personnes inciviques ou entendus des personnes en ayant "marre" de devoir respecter les consignes anti-Covid-19. Face à des contraintes et un stress parfois dignes d'un état de guerre et très inhabituels, si la grande majorité des citoyens a compris la gravité de la situation et a respecté les injonctions ministérielles, certaines personnes n'ont pas longtemps supporté cette situation parmi lesquelles les inciviques d'un jour ou patentés et les réfrataires aux mesures anti-Covid-19. D'autres, au contraire, ont profité de la situation.

Rétrospectivement, en Europe, c'est en Belgique et dans les pays Méditerranéens (Espagne, France, Italie, Grèce) et spécialement en Fance que le confinement fut le plus contraignant et les mesures les plus répressives. Les mauvaises langues mais clairvoyantes diront qu'à défaut de politique sanitaire efficace, le gouvernement de Jean Castex sour la présidence d'Emmanuel Macron choisit la méthode la plus facile à mettre en oeuvre, celle du contrôle de sa population, comme si nous étions en Chine !

Les procès-verbaux et les délis

Contrôle des attestations à Metz, en France, par la police pendant le confinement en 2020. Document Radio France / Natacha Kadur.

En France, pendant le confinement entre mars et avril 2020, les procès-verbaux sont tombés par dizaines de milliers. Sur quelque 9 millions de contrôles, la police et la gendarmie ont dressé 600000 PV soit 7% des contrôles. Au total, lors du premier confinement, les forces de l'ordre ont réalisé 20.7 millions de contrôles et dressé 1.1 million de contraventions dont les deux-tiers à l'encontre de personnes n'ayant pas d'attestation (cf. le tweet de C.Castaner). Mais il faut dire que certains policiers ont verbalisé avec zèle notamment un médecin faisant son travail, un homme allant chercher du pain et un kidam prenant l'air en cherchant des pokémons. Lors du second confinement, 3.2 millions de contrôles ont été effectués et 298500 PV ont été dressés par les forces de l'ordre (cf. France Bleue).

En France, si la première amende s'élevait à 135 €, la première récidive portait l'amende à 1500 €. Si un récidiviste commettait quatre violations du confinement dans les 30 jours, l'amende était portée à 3700 € et six mois de prison au maximum.

Au total, la France dressa 20 millions de PV durant le confinement contre une moyenne de 1 million de PV en temps normal. C'est dire à quel point les contrôles furent nombreux. Ce zèle typiquement français à tout vouloir interdire fut même accentué dans les communes, y compris dans les compagnes alors que le risque sanitaire y était moindre.

La Belgique a grosso modo suivit la méthode française. La police de Bruxelles dressa 5648 PV entre le 14 et le 30 mars et pour l'ensemble de la Belgique plus de 173000 PV furent dressés entre mars et décembre 2020 (cf. bx1) dont plus de 50000 PV durant les 6 premières semaines de confinement, pour des amendes variant entre 50 et 1250 € (en théorie l'amende de base est de 250 €).

En Belgique, durant la deuxième vague épidémique, l'amende Covid s'éleva entre 250 € et 750 €, le montant le plus élevé étant généralement exigé lors du non-respect des consignes durant les périodes de confinement ou face à des injures ou des actes de violence envers les forces de l'ordre.

Si la personne en infraction était renvoyée devant un tribunal et condamnée, elle risquait une amende pouvant aller jusqu’à 4000 € et éventuellement une peine de prison (cf. Le Soir). Cela représente 13 millions d'euros que le fisc compte bien récupérer via les impôts (cf. RTBF).

Toutefois, selon la loi, les PV dressés dans le cadre du Covid devaient être prouvés par l'autorité verbalisante. Or dans le cas de la distanciation sociale qui n'aurait pas respectée, les policiers n'ont jamais apporté de preuve tangible. Par conséquent, des milliers de PV pourraient simplement être annulés pour vice de forme (cf. Le Soir).

Document AFP/Jeff Pachoud.

En revanche, lorsque la police avaient des preuves d'une violation des mesures anti-Covid-19, elle n'a pas hésité a frappé fort. Ainsi lors d'un mariage rassemblant plus de 50 convives mi-décembre dans la commune de Dilbeek en Belgique, le père de l'un des deux époux a payé sur le champ l'amende des mariés et de tous les convives qui s'éleva à 4000 € (cf. RTBF). D'autres PV furent dressés à des groupes de 17 et de 40 personnes rassemblées sans autorisation. L'amende Covid était de 750 €.

Au Luxembourg, entre mi-mars et le 7 juillet 2020, la police grand-ducale dressa 2600 amendes pour non-respect des mesures préventives anti-Covid (cf. Paperjam, L'essentiel). Entre mars et novembre, 3500 PV furent dressés pour non-respect des règles sanitaires dont 2000 pour non-port du masque de protection (cf. Wort). L'amende Covid est passée de 150 à 300 €. En cas de flagrant délit (combinaison d'une violation du confinement, du non-respect de la quarantaine et non-port du masque), l'amende pouvait atteindre 2400 € avec constitution d'un casier judiciaire.

Fait intéressant, face à l'incivilité de certaines personnes, dans les départements ou communes françaises où le couvre-feu fut imposé au mois de mars, la propagation du virus s'est arrêtée. Ce fut également la solution qui fut choisie dans la province chinoise de Hubei où cette mesure radicale combinée au confinement et au port du masque ont finalement permis de mettre fin à l'épidémie, du moins temporairement.

Enfin, des escrocs n'ont pas hésité à se présenter au domicile des personnes âgées sous un faux prétexte pour commettre des délits (cf. Ouest France). Si ces faits furent peu nombreux, la contrainte du confinement a surtout provoqué des réactions inciviques et parfois violentes de certaines personnes. Sans entrer dans les détails qui sortent de notre sujet, outre les actes criminels comme la menace armée passible d'un emprisonnement, le vol de matériel médical chez les infirmières et l'irrespect voire la violence de certaines personnes envers le personnel de la santé, la police a été confrontée à des milliers d'actes inciviques. Les contrevenants et notamment les conducteurs et les jeunes qui ne respectent pas les règles du confinement ont payé parfois de lourdes amendes.

La délation

Revers du confinement, tout au long de l'année 2020 la police reçut de nombreux appels parfois anonymes dénonçant des comportement jugés inciviques ou reçut du courrier de délation dont les médias et les réseaux sociaux se sont faits l'écho. Parmi ces actes, il y a des histoires de voisinage, de jalousie, de réglement de compte voire un sens civique exacerbé. On observa ce comportement en Belgique, en France et ailleurs dans le monde jusqu'en Nouvelle Zélande où même la police publia sur sa page Facebook ou sur Internet un formulaire permettant aux habitants de dénoncer les personnes inciviques ! Toutefois, cela reste des exceptions car généralement les autorités ne veulent pas revenir à des méthodes qu'on a connu durant la Seconde guerre mondiale !

Paris a également son quota de dénonciateurs jusqu'à des cas à "tomber de sa chaise" comme l'a déclaré un policier. Il rapporte par exemple le cas d'une femme dénonçant son mari qui viole le confinement car il découche et se rend chez sa maîtresse le soir ! (cf. Le Parisien).

En Belgique également, pendant les périodes où les magasins de détails et autres commerces durent fermer leurs portes, des artisans restés ouverts et faisant leur métier ont été dénoncés par des voisins intolérants. Des délateurs ont également dénoncé leurs voisins, y compris des enfants sans reproche (cf. Bx1, Moustique). Bien sûr, après vérification ces personnes qui agissaient en toute légalité n'ont pas été sanctionnées. En revanche, lorsque le gouvernement limita les rassemblements à 2 ou 3 personnes, que ce soit lors d'un contrôle planifié ou par délation, toute violation des règles du confinement exposait le citoyen à une amende.

Pour rappel, en droit pénal la délation calmonieuse est un délit. En cas de délation non justifiée, la personne lésée peut porter plainte contre X pour dénonciation calmonieuse. S'il ne peut pas prouver ses allégations, s'il se trompe ou s'il a l'intention de nuire, en Belgique le délateur s'expose à une amende de 400 à 8000 € et à 15 jours à 6 mois de prison. En France, il encourt jusqu'à 45000 € d'amende et jusqu'à 5 ans de prison.

Ceci dit le phénomène de dénonciation n'est pas nouveau et existe probablement depuis que les lois existent. Même l'État l'utilise en toute légalité. En Belgique par exemple, certains ministres l'ont encouragée en 2011 et 2016 pour identifier des clients suspects ou dénoncer des fraudes sociales au fisc (cf. RTBF, RTL). En France, certains ministres l'ont utilisée sous la présidence de Macron pour inviter la population à dénoncer des inégalitées sexistes salariales ainsi que les fraudeurs fiscaux notamment (cf. Les Echos, Paris-Match). D'autres pays comme la Chine et la Corée du Sud encouragent même la dénonciation des inciviques voire la délation (cf. RFBF), jusqu'à offrir des privilèges aux "bons citoyens".

La majorité des citoyens trouve ça normal car ils ne supportent pas devoir se plier aux règles alors qu'à côté d'eux les inciviques s'en moquent et restent impunis. C'est donc un phénomène de société voire culturel dans certains pays, y compris chez les Anglo-saxons où il porte un nom "Name and Shame" (Nomme et Couvre de Honte) qui fut inventé aux États-Unis.

On peut comprendre la frustration ou la colère des personnes qui respectent scrupuleusement les mesures de protection sanitaire et constatent à quel point d'autres sont inciviques, désinvoltes ou inconscientes des risques et mettent en danger leur voisinage. Mais nous ne sommes pas en Chine et encore moins du temps de la Gestapo ! En Europe, la dénonciation choque une majorité de citoyens qui font la différence entre ce genre de délation soi-disant "civique" et par exemple la dénonciation d'une personne commettant un délit (un harceleur sexuel, un pédophile, un raciste, un émeutier, etc), sa dénonciation permettant de l'empêcher de nuire. En Europe, la population considère que c'est au pouvoir exécutif de protéger la population et non aux citoyens d'organiser des milices. Mais dans beaucoup de pays où les partis d'extrême droite comme d'extrême gauche séduisent une certaine frange de la population, la délation est tolérée, parfois sous prétexte qu'il s'agit d'un acte civique. On frise ici les limites de la violation des libertés individuelles.

Un avocat de Bruxelles déclara que la délation n'est pas appropriée et divise plus qu'elle ne rassemble les citoyens. Un philosophe considère aussi que la délation fragilise la société et la démocratie, ce que confirma le politicien Olivier Maingain qui déclara que "dans un système démocratique comme le nôtre, cela conduirait petit à petit à une société de la méfiance" (cf. RTBF).

Impact des inciviques sur l'épidémie

Nous avons constaté qu'après chaque confinement et chaque retour de vacances, y compris en 2021, les courbes épidémiques sont reparties à la hausse.

Pour ne prendre qu'un seul exemple, en Belgique, depuis la fin du premier confinement au printemps 2020, 20% de la population ne supportaient plus les contraintes sanitaires, ce que les psychiatres confirmèrent. Dans un sondage réalisé en octobre 2020, on apprenait que 20% des sondés n'avaient pas respecté l'obligation de porter un masque dans les lieux à risque et 40% des sondés ne respectaient pas la distanciation sociale.

Centre de test PCR pour le Covid-19 installé à l'aéroport de Bruxelles et ouvert depuis le 15 septembre 2020. Le test est gratuit si vous êtes affilié à une caisse d'assurance maladie belge et sur présentation de votre code d'activation. Document Brussels airport.

Comme malheureusement on s'y attendait, le 13 janvier 2021, suite aux retours de vacances à l'étranger, la plupart du temps dans des pays en zone rouge et donc vivement déconseillées par les autorités, les dépistages ont montré qu'en deux semaines le taux de contamination augmenta en moyenne de 30% (et même de 115% à Bruxelles du fait que la ville est cosmopolite) alors que pendant les vacances de Noël ce chiffre oscillait entre 1 et 2% grâce aux citoyens ayant respecté les consignes (cf. La Libre, RTBF). Il faut toutefois souligner que début janvier 2021 les dépistages augmentèrent de 70% en Belgique, augmentant probablement le nombre de cas positifs détectés et donc le pourcentage de quelques points.

Une analyse fine des cas de contamination montra que la majorité des voyageurs partis à l'étranger sont des personnes vivant dans des communes à haut revenu où résident notamment des ressortissants européens dont des fonctionnaires, ceux qui par nature rendent visite à leur famille restée à l'étranger. Cela confirme que les contaminations importées peuvent relancer une épidémie.

Contrairement à ce que demandait le ministre belge de la Santé, à leur retour de vacances au moins 30% soit près de 50000 voyageurs ne se sont pas faits dépistés pour la Covid-19 et sont probablement retournés chez eux ou au bureau et les enfants à l'école une semaine plus tard comme s'ils n'avaient rien à signaler ! Or parmi eux, statistiquement il y avait des asymptomatiques, y compris parmi les enfants.

Le cas suivant soulève un autre problème. Il s'agit d'une maman de la région d'Anvers revenue de vacances en Suisse début janvier 2021. Elle s'est fait dépistée à son retour et son prermier test était négatif pour le Covid-19. Se sentant en sécurité elle n'est pas restée en quarantaine. Une semaine plus tard, son deuxième test s'avéra positif pour le variant britannique Alpha (B.1.1.7). Problème, entre-temps sa fille est retournée chez son père puis à l'école vu qu'elle n'avait pas de symptômes. Mais les premiers symptômes sont finalement apparus chez l'enfant, puis chez son père. Quelques jours plus tard, la direction de l'école détecta une deuxième enfant contaminée ainsi que sa mère, enseignante dans un autre établissement. Par sécurité, sur l'avis d'un infectiologue en accord avec la direction des écoles, les deux établissements scolaires ont été fermés pendant une semaine (cf. RTBF).

En résumé, comme l'effet domino, une seule personne porteuse du virus en contamina 5 autres et ce sont finalement 5000 personnes qui furent mises en quarantaine ! Pire, à elle seule, cette personne introduisit le nouveau variant en Belgique !

D'autres cas furent signalés dont celui d'une personne portant le virus qui ne s'est pas fait testée au retour de vacances et contamina une cinquantaine de personnes en quelques jours !

Contrôle numérique de la température corporelle des passagers le 26 juin 2020 dans un aéroport parisien. Ailleurs, ce contrôle est passif et réalisé grâce à des caméras infrarouges thermiques. Document Reuters/Charles Platiau.

La situation vécue en Belgique n'est que le reflet de ce qui se passe ailleurs dans le monde. Si les Européens respectent globalement les consignes quand ils sont dans leur pays, ils perdent vite la mémoire sur leur lieu de vacance et d'autant plus quand ils sont loin de l'Europe ! L'incivisme des Européens est particulièrement flagrant dans les pays touristiques, des stations de ski suisses aux Caraïbes en passant par les pays méditerranéens où, en plus, les autorités sont parfois laxistes sous le prétexte que le tourisme les fait vivre.

En fait, ce n'est pas seulement la personne imprudente qui est responsable de la contamination mais les autorités (gouvernement, pouvoir législatif et pouvoir exécutif) ont également leur part de responsabilité en comptant uniquement sur l'auto-discipline des citoyens pour contrôler le respect de la procédure de quarantaine.

Dans les pays démocratiques, le pouvoir législatif refuse de cautionner des mesures de suivi numérique trop sévères comme celles appliquées en Corée du Sud (le port d'un bracelet durant la quarantaine avec contrôle vidéo régulier, géolocalisation des contaminés) ou en Chine (bracelet électronique, géolocalisation des contaminés, QR code d'accès, délation, etc). En effet, les parlementaires qui votent nos lois jugent à juste titre que les citoyens sont a priori innocents, ils n'ont commis aucun délit et ne doivent pas être considérés comme des prisonniers.

Il n'empêche que par leur comportement incivique, ce tout petit pourcentage de personnes met en péril la stratégie de lutte contre le Covid-19 de tout un pays. Les autorités fédérales et régionales ont donc décidé de renforcer les contrôles y compris de tenter de convaincre par téléphone toutes les personnes dépistées et réfractaires ou sceptiques vis-à-vis de l'efficacité des mesures du gouvernement et de la vaccination. La population a le choix entre cette méthode "douce" et la méthode "dure" consistant à interdire les voyages et à imposer le confinement total. En 2021, aucun pays européen ne réimposa ces mesures très impopulaires.

Contrôles et sanctions

Face à ces récalcitrants qui ne se font pas tester au retour de zone rouge et risque de contaminer leur entourage, la seule façon de changer leurs habitudes est par la manière forte en touchant à leur portefeuille.

Depuis le 8 janvier 2021, la plate-forme "Plasma" est opérationnelle en Belgique. Elle permet aux bourgmestres wallons d’être informés des cas de non respect des mesures anti-Covid et de les siganler à la police.

La police belge contrôlant le respect des règles Covid (formulaire PLF, test négatif, quarantaine, etc) par une passagère. En cas d'infraction, l'amende Covid est de 250 €.

En pratique, les personnes qui reviennent de l'étranger doivent compléter le formulaire PLF, lequel est transmis aux services de l'Aviq, l'agence wallonne chargée de la santé. En amont, le service de tracing doit s'assurer du respect de la quarantaine et que le test PCR est effectué. Si ces agents ne parviennent pas à joindre la personne, un agent territorial de l'Aviq peut essayer de la contacter. Si une personne refuse ostensiblement la quarantaine ou ne répond pas aux appels, un rapport est rédigé par un inspecteur d'hygiène de l'Aviq, qui le transmet au bourgmestre concerné via la plate-forme Plasma. La police locale peut alors se rendre sur place pour contrôler et sanctionner le récalcitrant.

En deux semaines, les bourgmestres ont transmis 127 cas à la police, ce qui constitue un pourcentage très faible du total des quarantaines. 169 bourgmestres sur 253 ont activé leur accès à la plate-forme. En Wallonie, l'amende peut aller jusqu'à 500 €. Le problème qui se pose maintenant est de savoir jusqu'où les bourgmestres peuvent aller et à ce jeu là tous ne sont pas d'accord (cf. RTBF).

Au niveau national, le 19 janvier 2021, le ministre de la Justice belge Vincent Van Quickenborne décida de sanctionner les personnes qui ne se faisaient pas tester pour le Covid-19 le premier et le septième voire le dixième jour de quarantaine (pour le variant Alpha alias B.1.1.7) d'une amende de 250 €. En parallèle, les contrôles furent donc renforcés, y compris aux frontières (cf. RTBF). 

Malheureusement, il faut encore répéter le même discours et convaincre les inciviques et les réfractaires qu'il va dans l'intérêt de tous et en priorité des personnes vulnérables de maintenir les mesures de protection sanitaire dans les endroits fréquentés et d'être vigileant dans le cercle familial dès lors que certaines personnes entrent et sortent et rencontrent d'autres personnes potentiellement contaminées. Si on ne respecte pas tous les consignes aujourd'hui, dans un an on sera toujours confiné et on portera toujours le masque ! Nous reviendrons sur la question éthique (cf. page 6) et sur les personnes réfractaires aux mesures anti-Covid-19. Cela nous offrira aussi l'opportunité d'étudier leur profil psychologique.

Effet positif du confinement sur l'épidémie

Les modèles épidémiques montrent que toute réduction du taux de reproduction de base du virus a un impact direct et positif sur les taux de contamination et de létalité.

Selon une étude publiée dans la revue "Nature" le 8 juin 2020 par Samir Bhatt de l'Imperial College de Londres et ses collègues, les mesures sanitaires prises par les États auraient permis d'épargner 3.1 millions de vie dans 11 pays européens (Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, France, Italie, Norvège, Royaume-Uni, Suède et Suisse). Autrement dit, selon cette étude le confinement et les mesures de protection sanitaire furent salutaires et ont évité les 2/3 des décès.

Pour obtenir ce résultat, les chercheurs ont comparé le nombre de décès recensés par l'ECDC avec le nombre de décès survenu en absence de mesures, comme les restrictions de déplacements, la fermeture des commerces, des écoles ou encore sans interdictions des spectacles et des évènements publics. Le Ro chuta également de 82% en moyenne, passant en dessous de 1.

Toutefois, les chercheurs temporisent leurs résultats. Ils soulignent qu'une des limites de leur modélisation est qu'elle fait l'hypothèse qu'une mesure donnée a eu le même effet partout, alors qu'en réalité "il y a eu des variations dans l'efficacité du confinement selon les pays." Ainsi on sait que la distanciation sociale par exemple fut plus ou moins respectée d'un pays à l'autre. De plus, les mesures s'étant succédées selon un calendrier rapproché, il est difficile d'évaluer l'impact de chacune d'entre elles séparément. Ils concluent néanmoins que "Nos résultats montrent que les principales interventions non pharmaceutiques et le confinement en particulier ont eu un effet important sur la réduction de la transmission. Une intervention continue devrait être envisagée pour maintenir la transmission du Covid-19 sous contrôle."

Malgré ces chiffres encourangeants, au 1 janvier 2021 la pandémie de Covid-19 tua plus de 1.9 million de personnes dans le monde. En Europe, cela représentait 1 décès pour 1167 habitants (IFR de 2.2%). On reviendra sur le taux de létalité.

Opportunités à saisir

Deux voire trois mois de confinement comme l'ont imposé certains pays, c'est très long et d'autant plus difficile pour les personnes en situation précaire ou subissant une situation familiale difficile. Mais il fallait tenir bon en tenant compte de la résilience de chacun. Les jeunes générations ont dû faire un effort en calquant leur attitude sur celles des plus âgés qui en ont connu d'autres et prirent en général les choses plus sereinement.

Les eaux du Grand Canal de Venise aussi claires que du cristal et le Rialto vidé de ses touristes le 18 mars 2020 lorsque les autorités locales ont décrété le confinement total dans l'ancienne cité des Doges. Document Andrea Pattaro/AFP.

Le gouvernement a ensuite prodigué quelques conseils à la population : restez positif et raisonnable. N'appelez pas une ambulance au moindre symptôme suspect car elle va mobiliser au moins trois personnes et n'allez pas encombrer l'hôpital au moindre mal de tête, à la moindre toux ou perte d'odorat car le personnel de la santé à d'autres cas plus urgents à traiter. Votre médecin traitant peut très bien vous examiner et conclure que vous avez simplement attrapé un rhume, une grippe voire une allergie et vous prescrire le remède adéquat.

Vu les circonstances il fallut aussi expliquer la situation aux plus jeunes et aux personnes handicapées mentales afin qu'ils ne soient pas anxieux, angoissés, paniqués ou s'énervent, et le répéter autant de fois que nécessaire aux personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer, toutes ces catégories de personnes vulnérables pouvant ne pas comprendre pourquoi elles sont isolées et ne voient plus leurs proches qu'à distance, par ordinateur interposé ou par téléphone.

Autre solution, télétravaillez ou suivez une formation à distance (certaines sont gratuites) - une bonne manière d'éviter le virus -, pratiquez un hobby ou faites du sport (même d'intérieur) en essayant de conserver un rythme quotidien, notamment l'heure des repas, l'heure des breaks, etc. A défaut, pour ne pas déprimer, vous énervez ou perdre votre temps, c'est l'occasion de rendre service à la communauté, de trouver une passion, d'apprendre quelque chose, de rattraper votre retard dans certaines matières, de bricoler, d'inventer, d'écrire, de remettre certaines choses en question ou de penser à l'avenir. Bref, si vous y réfléchissez bien, ce moment dur à passer est une opportunité dont chacun peut tirer profit. Evitez en tout cas l'ennui car si une seconde semble durer un mois, que ressentirez-vous dans un mois ?!

Par chance, les écrivains, les traducteurs, les reporters en chambre et certains artistes comme les dessinateurs qui ont l'habitude de travailler chez eux ou les chanteurs et musiciens qui ont l'habitude de travailler en studio ne remarqueront peut-être même pas qu'ils sont confinés puisque certains avouent rester parfois une semaine chez eux sans mettre le nez dehors ! Même chose pour les photographes d'extérieur (animaliers, etc) et les chercheurs isolés dans la jungle, étudiant une population d'animaux, cherchant un spécimen rare d'insecte ou déblayant la terre pour trouver des vestiges archéologiques ou des fossiles. Pour ces reporters et ces scientifiques, la solitude ou l'isolement fait partie du métier qui est parfois une vocation, comme pour les moines bénédictins et les ermites !

En conclusion, en temps de crise sanitaire, la personne qui pratique diverses activités a beaucoup plus de chances de garder le moral qu'une personne qui ne pratique aucun hobby ou ne s'intéresse à rien. Le photographe qui fait du vélo, pratique la marche, rédige des articles ou dessine et gère un blog supportera mieux l'isolement qu'une jeune fille reclue dans sa chambre face à son smartphone ou son ordinateur. Mais il ne faut pas en déduire que les hommes qui sont majoritaires à pratiquer un hobby s'en sortiront mieux que les femmes qui restent par exemple plus souvent à domicile. La sociabilité et le statut civil (isolé, marié ou en famille) jouent également un rôle dans la faculté de résilience. On reviendra sur l'impact psychologique de la crise sanitaire au Covid-19.

La résilience psychologique face au virus

Enfin, n'oublions pas les astronautes confinés dans la station ISS à 430 km d'altitude (Expédition 62). A ce sujet, au cours d'une émission diffusée sur Euronews le 31 mars 2020, l'astronaute canadien Chris Hadfield qui passa 166 jours dans l'espace à bord de Soyouz, de la navette spatiale et d'ISS, avant d'être confiné au sol comme tout le monde, conseillait aux téléspectateurs de ne pas avoir peur du virus afin de mieux supporter ce confinement. Comme nous avions du temps libre, il proposait notamment d'essayer d'en apprendre plus sur le Covid-19, sa structure cellulaire, ses voies de transmission, comment il infecte une cellule, quels sont les effets de la maladie, comment guérir, comment peut-on éliminer ce virus, etc. C'est une bonne méthode qui peut aider chacun à mieux appréhender cette situation inhabituelle et ne plus voir ce virus comme un ennemi invisible et invincible mais comme un parasite vulnérable dont on connaît les propriétés et les points faibles. Espérons que cet article y ait contribué.

A ce propos, selon une étude publiée dans la revue "Personality and Individual Differences" le 1 janvier 2021, l'anthropologue et expert en sciences cognitives Coltan Scrivner de l'Université de Chicago et ses collègues ont montré que "les fans de films d'horreur ont fait preuve d'une plus grande résilience pendant la pandémie et que les fans de film de survie (genres "prepper" comme les films d'invasion extraterrestre, apocalyptiques et zombies) ont fait preuve à la fois d'une plus grande résilience et préparation. [...] la curiosité morbide était associée à une résilience positive et à l'intérêt pour les films pandémiques pendant la pandémie. Pris ensemble, ces résultats sont cohérents avec l'hypothèse selon laquelle l'exposition à des fictions effrayantes permet au public de pratiquer des stratégies d'adaptation efficaces qui peuvent être bénéfiques dans des situations réelles."

Comme le disait le général chinois Sun Tzu (544-496 avant notre ère) dans "L'art de la guerre" : "Connais ton ennemi et connais-toi toi-même, eussiez-vous cent guerres à soutenir, cent fois vous serez victorieux."

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