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Les voies de transmission du Covid-19

Microphotographie TEM de virions du Covid-19 quittant une cellule (un monocyte ou un macrophage ou peut-être celle d’un organite dans lequel ils se trouvent) par fusion de leur enveloppe avec la membrane plasmique par un processus d’exocytose. Malgré les apparences, la cellule n'est pas détruite comme lors d’une infection d’une bactérie par un bactériophage. Document SPL.

Contagiosité (III)

Le Covid-19 se transmettant surtout par voie respiratoire, il s'avère contagieux. Avec un taux de reproduction de base ou indice de contagiosité Ro compris entre 2 et 3, il contamine en moyenne 2 ou 3 personnes (cf. J.Rocklöv et al., 2020; Z.Lin et al., 2020; X.Zhang et al., 2020). Une autre étude donna un Ro médian de 5.7 (cf. R.Ke et al., 2020) et d'autres études ont déjà indiqué un Ro de 6.5. On retrouva un Ro > 6 au début de la deuxième vague épidémique. On reviendra sur le calcul du Ro (cf. la modélisation des épidémies).

Les chercheurs ont calculé le Ro médian sur base des données de 140 patients contaminés déclarés en Chine entre le 15 et le 30 janvier 2020. Ils ont utilisé des paramètres tels que la période d'incubation du virus (4.2 jours), le temps écoulé entre le moment où les gens ont été exposés au virus et le moment où ils ont montré les premiers symptômes.

Soulignons que ces différents Ro dépendent de la complexité des modèles mathématiques utilisés et l'interprétation des résultats dépend également des gestes barrières qui affectent le taux de contact et la probabilité de contamination, des paramètres qui peuvent modifier constamment le Ro.

Le Covid-19 est plus contagieux que la grippe saisonnière (Ro = 0.9 à 2.1) et le rhume (Ro = 2 à 3) mais 3 fois moins contagieux que la coqueluche (Ro = 15 à 17) ou la rougeole (Ro = 12 à 18).

On peut diminuer le Ro et donc le taux de contamination du virus en renforçant l'immunité collective. Comment ? Soit par la vaccination mais temporairement non disponible pour le Covid-19 soit... en attendant que la majorité de la population soit contaminée avec tous les risques d'aggravation que cela comprend. Pour un Ro = 3, cela représente 66% de la population. Pour Ro = 5.7, cela représente 82% de la population.

Le Royaume-Uni adopta cette dernière stratégie avant de l'abandonner. Il en fut de même en Suède qui a longtermps mis sur l'immunité collective.

Un Ro faible signifie également que le pic épidémique sera faible, plus tardif et étalé, ce qui permettra de rapidement isoler les malades et de ne pas saturer les hôpitaux.

Si on se base sur l'épidémie de SARS en 2003, lorsque le Ro est passé de 4 à 1, l'épidémie s'est arrêtée et lorsque tous les cas furent isolés, elle n'a pas repris. Nous verrons que sur les recommandations de l'OMS, la stratégie adoptée par la plupart des pays contre le Covid-19 fut le confinement de la population mais cette décision qui relève du pouvoir politique a un énorme impact socio-économique dont chacun a pu mesurer les conséquences.

Malheureusement, si les gouvernements en concertation avec les professionnels de la santé ont finalement pris leurs responsabilités, les Européens ont appris à leurs dépens que le non respect des consignes sanitaires par la jeune population a conduit à une deuxième vague épidémique en octobre 2020 avec un Ro atteignant localement 14 pendant quelques jours et de nombreux foyers d'infection qui imposèrent à nouveau un confinement dans certains pays. Autrement dit l'incivisme d'un petit pourcentage de la population (1-10%) suffit à relancer l'épidémie. On y reviendra.

Evolution de la contagiosité

Plusieurs variants du Covid-19 se sont rapidement propagés en Europe en commençant par le variant Alpha (B.1.1.7) qui est ~60% plus contagieux ou transmissible entre humains que la souche de Wuhan mais pas forcément plus infectieux ainsi que Delta (B.1.617.2) qui est 40% plus transmissible qu'Alpha.

Sur base des données cliniques et des simulations, on constate qu'avant les campagnes de vaccination la moitié des contaminés détectés lors des dépistages étaient asymptomatiques. On savait également que les groupements de personnes non protégées dans les lieux publics et notamment les restaurants favorisent la propagation du virus (cf. K.A. Fisher et al., 2020) et que les voyages à l'étranger accélèrent sa propagation comme on le constata en septembre 2020. Sachant qu'on avait annoncé la deuxième vague épidémique en Europe (cf. G.Cacciapaglia et al., 2020) et qu'elle perdura dans certains pays jusqu'en janvier 2021, on comprit rapidement l'intérêt de maintenir les mesures de protection sanitaire et les gestes barrières pour éviter que la situation ne perdure des mois et des années. On y reviendra à propos de la gestion de la crise sanitaire de Covid-19.

A lire sur le Covid-19 : Soyons responsables et conscients des risques, 2020

 Flambée de maladies à coronavirus Covid-19, OMS, 2020

A gauche, microphotographie SEM colorisée d'une cellule apoptotique, s'autodétruisant (en vert) car fortement infectée par des virus Covid-19 (en violet). Echantillon extrait d'un patient. A droite, microphotographie SEM de virions de Covid-19 (en violet) émergant à la surface d'une cellule en culture. A droite, microphotographie TEM colorisée de Covid-19 isolés d'un patient. Documents NIAID/Flickr et NIAID-RML/Flickr.

Contamination des professionnels de la santé

Le Covid-19 frappe en aveugle et sans discrimination mais il est aussi opportuniste, embusqué sur un hôte asymptomatique et profitant de la moindre faille dans les mesures sanitaires et les gestes barrières pour contaminer ses victimes, y compris le personnel de la santé.

 Selon Santé Publique France, au 22 mars 2020 il y avait 6019 cas potentiels de contamination par le Covid-19 en France parmi les professionnels de santé et les salariés d'établissements médico-sociaux.

En Belgique, selon un enquête de la FAMGB publiée en janvier 2021, depuis le début de la pandémie le Covid-19 a infecté 28% des médecins généralistes francophones à Bruxelles. 73% d'entre eux estiment qu'ils ont contaminé des patients (cf. Le Soir).

En France comme en Belgique ou en Suisse, le personnel de la santé a dénoncé ses manques de moyens, les risque auxquels il était exposé et les graves déficiences du système de santé. On y reviendra à propos de la gestion de la crise sanitaire.

Au cours d'une allocution présentée le 14 février 2020, l'OMS annonça qu'en Chine 1716 professionnels de la santé avaient été contaminés par le Covid-19. Ils étaient plus de 3000 le 25 février 2020 (cf. Le Soir). On apprit par la suite que les deux-tiers du personnel soignant de Wuhan furent contaminés.

En Espagne, 50000 membres du personnel de la santé ont été contaminés par le Covid-19.

On reviendra sur le taux de létalité et sur la propagation de la pandémie de Covid-19.

Les clusters et les foyers d'infection

Au début de l'épidémie, le Covid-19 s'est rapidement répandu dans les "clusters", des foyers d'infection comme les marchés (cf. Wuhan) où circule énormément de monde. Les lieux abritant une grande population comme les restaurants, les bars, les cinémas, les salles de sport, les maisons de retraite et autre EHPAD (en France), les transports en commun ainsi que les établissements scolaires sont également d'importants foyers potentiels de contaminations.

Les épidémiologistes et les experts en vaccinologie savent qu'il existe des individus "index" à l'origine de foyers d'infection ou "clusters"; ce sont ces fameux super-contaminateurs (super-spreaders) qu'on a déjà vu au cours des épidémies de SARS, d'Ebola, du SIDA et de la rougeole. Pour l'anecdote, dans les années 1970 aux Etats-Unis, un seul homme ayant la rougeole est parvenu à contaminer tout un amphithéâtre !

La difficulté est d'identifier ce super-contaminateur ultra contagieux car en général le virus mute et il devient très difficile de remonter la chaîne de propagation jusqu'au patient zéro, c'est-à-dire le premier porteur du virus. Heureusement, le Covid-19 paraît stable mais jusqu'à présent ce super-contaminateur n'a pas été identifié. Par conséquent, si un autre cas similaire émerge, les chercheurs ne peuvent toujours pas l'identifier et le reconnaître ou seulement quand ilsera trop tard.

Un facteur crucial de la transmission communautaire est que les personnes contaminées mais asymptomatiques peuvent transmettre le Covid-19. L'infectiosité peut culminer avant l'apparition des symptômes de la Covid-19. Les charges virales semblent être similaires entre les patients asymptomatiques et symptomatiques, bien que les implications pour l'infectiosité ne soient pas encore claires. Les personnes présentant des symptômes peuvent s'auto-isoler ou demander des soins médicaux, mais celles qui ne présentent aucun symptôme ou qui présentent des symptômes bénins peuvent continuer à circuler dans la communauté. Pour cette raison, les personnes aymptomatiques portant une forte charge virale ont le potentiel d'être des super-contaminateurs et peuvent avoir une influence démesurée sur le maintien de l'épidémie.

Les cas de super-contamination sont souvent autant le résultat de l'établissement que des caractéristiques de l'hôte. Des cas apparemment généralisés de Covid-19 se sont produits dans des chorales, des supermarchés, lors d'évènements religieux et dans les établissements de soins de santé. Ce sont tous des paramètres où une personne peut avoir de nombreux contacts étroits sur une courte période de temps.

Selon le virologue Frédéric Tangy, directeur du Laboratoire d'innovation vaccinale à l'Institut Pasteur, avant l'été 2020 les chercheurs avaient identifié 19 super-contaminateurs en Autriche, en France et en Corée du Sud. Ces individus sont capables de transmettre le virus jusqu'à 10 ou 20 personnes en moyenne. On ignore pour quelle raison ces porteurs sains ou malades (il n'y a pas de règle) présentent une charge virale aussi élevée mais de toute évidence le virus a trouvé chez eux un biotope idéal pour se multiplier.

Les jeunes adultes super-contaminateurs

Depuis le mois de mars 2020 les jeunes adultes (18-24 ans) sont considérés comme des super-contaminateurs car d'une part ils sont généralement asymptomatiques (comme les enfants, voir plus bas), et d'autre part ils ont tendance à ne pas respecter les consignes et les gestes barrières pour des motifs aussi ridicules que l'atteinte à leur mode de vie et leurs libertés (ils penserazient sûrement autrement s'ils avaient connu la guerre ou vécu en Chine !). Leur comportement incivique s'est confirmé tout au long de l'année (en particulier durant les vacances d'été, lors de la rentrée en septembre 2020 et lors des fêtes de fin d'année).

La Fête de la musique célébrée à Paris le 21 juin 2020. Combien de jeunes adultes respectaient les gestes barrières ? D.R.

Si cela se confirme dans les études comme l'enquête française "CoviPrev", d'autres groupes sont apparus dont les 25-34 ans qui ont également tendance à ne pas respecter les mesures élémentaires de sécurité sanitaire.

Autrement dit, dans un pays comme le France ou la Belgique, ce sont à peine 20% des habitants qui mettent en danger 80% de la population de leur pays dont plus de 30% de personnes vulnérables et qui risquent d'affaiblir son économie !

Même s'il ne faut pas stigmatiser les jeunes - la majorité d'entre eux ont heureusement le sens civique -, ces abus eurent des conséquences sanitaires graves. Pour éviter que la situation devienne incontrôlable avec une saturation du système de santé, les gouvernements n'ont pas eu d'autre choix que d'appliquer des mesures strictes et parfois coercitives (avec compensation financière au besoin) pour endiguer la propagation du Covid-19. La situation sanitaire fut particulièrement critique durant la deuxième vague épidémique survenue à partir d'octobre 2020 qu'on aurait pu sinon éviter, du moins fortement aplanir si tout le monde avait respecté les règles. On y reviendra à propos de la gestion de la crise sanitaire de Covid-19.

Selon Ariane Bazan, psychologue à l'ULB et membre de la cellule d'évaluation de crise Celeval, "il faut mieux sensibiliser les jeunes au risque de contamination. Plutôt que de les forcer à se mettre en quarantaine dans un studio avec leur famille - ce qui est psychologiquement invivable - mieux vaut en faire des partenaires pour les impliquer dans le combat contre le Covid et leur donner des perspectives". Malheureusement si la plupart des jeunes l'ont compris, il y a un pourcentage sensible de réfractaires à toute mesure anti-Covid dont l'incivisme a un impact direct sur la durée de l'épidémie. On y reviendra.

Les enfants contaminants mais peu malades

Qu'en est-il des enfants ? Les études ont montré qu'entre mars et août 2020 les enfants (< 20 ans) n'étaient pas des vecteurs importants de la souche originale du SARS-CoV-2 (cf. A.Fontanet et al., 2020; P.Poletti et al., 2020; M.Levinson et al., 2020; R.Laxminarayan et al., 2020; L.Di Domenico et al., 2020). Les enfants peuvent être contaminés et propager le virus et même être à la base de clusters. Cependant, comparativement à d'autres maladies respiratoires comme la grippe, les enfants sont proportionnellement moins contaminés par le Covid-19 que les adultes. En revanche, il sont plus sensibles aux nouveaux variants (Alpha, etc).

Selon des tests PCR réalisés sur 36 enfants en Chine entre janvier et mars 2020, il s'avère que 28% des enfants testés positifs étaient asymptomatiques au moment de la découverte de leur infection. Ces enfants ont gardé des virus dans leur nez pendant 9 à 11 jours (cf. H.Qiu et al., 2020). Si ce sont généralement des porteurs sains, ils présentent plus facilement des infections ORL que respiratoires (cf. (A.T. Cruz et al., 2020). En outre, les enfants développent très rarement la Covid-19 et les décès sont exceptionnels (moins de 1% des enfants et ados infectés) contrairement aux adultes.

Selon les psychologues, faire porter un masque à un enfant n'est pas inquiétant ni difficile car ils sont déjà habitués depuis des mois à voir toute leur famille masquée. Document D.R.

Aux Etats-Unis, selon le rapport du CDC publiée le 6 avril 2020, sur environ 149082 cas de contamination on comptait seulement 2572 jeunes de moins de 18 ans, soit 1.7% d'entre eux. Cette proportoion est très faible et ne tient pas compte des campagnes de dépistages. Selon les chercheurs, "Les enfants atteints de Covid-19 pourraient ne pas avoir signalé de fièvre ou de toux aussi souvent que les adultes".

Durant la première vague épidémique, sur base des données d'avril 2020, il n'y a pas eu d'épidémie documentée dans les crèches, écoles, collèges, lycées ou universités, sauf une dans un lycée de Crépy-en-Valois en France où le virus a touché 38% des lycéens, 43% des enseignants et 59% des personnes travaillant dans l’établissement. Dans les autres établissements scolaires, les rares contaminations se comptaient sur les doigts d'une main. Dans ces cas, l'école ferma durant deux semaines.

Si on prend l'exemple du Luxembourg qui reste un modèle exemplaire de bonne gestion de l'épidémie, jusqu'en novembre 2020 les étudiants furent peu contaminés : 0.53% des écoliers du primaire ont été testés positifs et 0.88% des élèves du secondaire. Selon Claude Meisch, ministre de l'Éducation, sur le total d'élèves inscrits, les contaminés représentent moins de 1.3% des cas dans l'enseignement supérieur et même 30 fois moins au plus faible de l'épidémie. Le pourcentage de cas positifs parmi les enfants de < 20 ans est toujours resté inférieur au quart de la population totale contaminée par le Covid-19 (cf. Le Quotidien; L'essentiel.lu).

Toutefois, sur le plan biologique, le risque zéro n'existe pas. Tout individu, enfant ou adulte et nous-même, risquons donc d'être contaminés par le Covid-19. En France par exemple, les dépistages réalisés en 2020 ont montré que les enfants et adolescents testés positifs au Covid-19 représentaient respectivement 12 et 16% des cas alors que les adultes testés positifs représentent plus de 20% des cas (cf. Gouv.fr). Ce résultat était toutefois biaisé car il est plus difficile de détecter des enfants positifs puisque généralement ils ne présentent pas de symptômes.

Des élèves d'une école élémentaire à Bischwiller, dans l'est de la France, à la rentrée scolaire du 2 novembre 2020. Document Patrick Hertzog/AFP.

Le discours scientifique et les résultats des dépistages peuvent donc prêter à confusion et même des politiciens s'y sont faits prendre dans leurs communications au point que dans une commune de France on imagina de confiner les enfants durant la récréation ! En novembre 2020, dans la commune belge de Courcelles, la bourgmestre (qui fut elle-même contaminée par le Covid-19) exigea que les enfants à partir de 6 ans portent un masque à l'école alors que cela n'a jamais été une directive du Centre de Crise ni de la ministre de la Santé. Son ordonnance devint finalement une recommandation que 20% des parents n'ont pas suivie.

La situation sanitaire changea à partir de juillet 2021 avec la propagation du nouveau variant Delta plus transmissible que les autres. A partir de septembre ou novembre selon les pays, après des avis contradictoires sur l'âge minimum, la Belgique, la France et d'autres pays ont étendu le port du masque aux enfants dès l'âge de 6 ans.

Les opposants au port du masque peuvent se réjouir car aux Etats-Unis, mi-2020 l'Académie de Pédiatrie avait suggéré que les enfants portent le masque chirurgical dès 2 ans.

En Belgique, dans son rapport épidémiologique du 21 janvier 2022, l'institut fédéral Sciensano rapporta qu'entre octobre et décembre 2021, en raison de la plus forte circulation du virus, le nombre d'enfants présentant des anticorps contre le Covid-19 avait presque doublé, passant de 26.6% en octobre à 50.9% en novembre (sur 432 élèves testés). Seul un enfant sur quatre savait qu'il avait été contaminé suite à un test PCR, ce qui signifie les trois quarts des enfants ne savaient pas qu'ils avaient été contaminés.

Selon Sciensano, en décembre 2021, "En Wallonie 58.6% des enfants possédaient des anticorps, contre 48.2 % en Flandre et 47.3 % à Bruxelles". Cette proportion augmentera probablement encore avec la circulation du variant Omicron.

Les enfants ont donc bien été en contact avec le Covid-19 mais la plupart sont asymptomatiques. Selon Sciensano, "les enfants qui atttrapent la Covid sont rarement gravement malades".

Ceci montre l'intérêt que les enfants portent un masque de protection dans les endroits fermés très fréquentés pour éviter qu'ils propagent le virus autour d'eux.

En résumé, il faut retenir que l'avantage des enfants est qu'ils sont moins sensibles à la maladie que le reste de la population. En revanche, selon le variant, la contagiosité des enfants peut être importante, notamment avec les variants Delta et Omicron. Quant aux adultes, ils doivent s'auto-discipliner et s'ils cotoyent des enfants, sachant qu'ils peuvent être asymptomatiques, ils ne sont pas à l'abri d'une contamination.

Les restaurants et lieux clos sources de contaminations

Aux Etats-Unis, sur 314 personnes d'au moins 18 ans suivies par le CDC dont 154 patients Covid et 160 participants témoins sains, les personnes contaminées avaient une probabilité pratiquement deux fois plus élevée d'avoir fréquenté un restaurant que les personnes saines (cf. K.A. Fischer et al., 2020).

Dans une deuxième étude publiée dans la revue "Nature" le 10 novembre 2020 (en PDF sur medRxiv), l'informaticien Jure Leskovec de l'Université de Stanford et ses collègues ont utilisé un modèle épidémique SEIR reprenant des données démographiques, des estimations épidémiologiques et des données GSM anonymes de citoyens américains pour réaliser une méta-analyse des habitudes de sortie de la population : où les gens se sont rendus, combien de temps ils y sont restés et combien de personnes se trouvaient dans le lieu concerné. Ensuite, ils ont calculé leur effet sur la propagation du Covid-19 et son impact en fonction du niveau socioéconomique (dont l'éthnie et le revenu).

Les chercheurs ont analysé le comportement de quelque 98 millions de personnes dans 10 grandes villes américaines (Atlanta, Chicago, Dallas, Houston, Los Angeles, Miami, New York, Philadelphie, San Francisco et Washington D.C.). Ils ont constaté que la plupart des contaminations se sont produites dans les lieux clos où de nombreuses personnes ont passé beaucoup de temps comme les restaurants, les salles de fitness, les lieux de culte ainsi que les hôtels et motels notamment. Dans ces lieux, les personnes avaient entre 10 et 100 plus de risque d'être contaminées par le Covid-19 que dans les autres endroits. Le risque de contamination était également plus élevé dans les populations défavorisées.

Attributs analysés dans 10 grandes villes américaines. Dans les deux graphiques supérieurs, ils sont regroupés selon le temps de séjour (gauche) et le nombre moyen de visiteurs horaires divisé par la superficie du lieu (droite). Les deux graphiques inférieurs montrent les prévisions de l'augmentation des infections (pour 100000 habitants) suivant la réouverture d'une catégorie de lieu trié par lieu (gauche) et pour la catégorie dans son ensemble (droite). Document J.Leskovec et al. (2020).

Cette étude fut critiquée par les représentants de l'Horeca, notamment en Belgique, pour deux raisons. D'une part les habitudes américaines ne sont pas celles des Européens. En effet, aux Etats-Unis dans la plupart des restaurants les clients ne restent pas plus d'une demi-heure. En Belgique, en France ou au Luxembourg, les clients restent plus d'une heure à table, y compris les salariés se rendant dans les restaurants d'entreprise. La dynamique de propagation du virus est donc différente.

D'autre part, l'étude ne tient pas compte d'un lieu soi-disant à risque, les écoles qui rassemblent en Belgique près de 2 millions de jeunes de 5 à 21 ans au comportement très sociable et potentiellement asymptomatiques.

Selon le représentant de l'Horeca, en stigmatisant une nouvelle fois les restaurants, non seulement ce type d'étude porte un grave préjudice au secteur mais le ministre de la Santé peut en déduire à tord qu'il s'agit du principal foyer de l'épidémie et qu'il doit donc resté fermé comme d'autres lieux à haut risque.

Cette critique est-elle justifiée ? Cette méta-analyse ne prend pas en compte tous les lieux publics très fréquentés (écoles, cinémas, supermarchés, etc).

D'abord on ne peut pas comparer la première à la deuxième vague épidémique car les réponses des autorités furent différentes, on a fini par mieux connaître le virus, la population apprit à se protéger, la souche virale s'est également adaptée au fil du temps (cf. les variants) et on a tous tiré des leçons des erreurs du passé (cf. la gestion de la crise sanitaire de Covid-19).

Des simulations ont montré que si le fait de fermer les écoles réduit sensiblement la propagation du virus, elle n'est pas suffisante pour enrayer l'épidémie. Seule la fermeture des restaurants et des commerces de détails aplatit la courbe et freine la propagation du virus avec un Ro tombant entre 0.4 et 0.8 en l'espace de 2 semaines avec un effet immédiat sur la baisse du taux d'hospitalisation et du nombre de patients aux soins intensifs.

En tenant compte des étudiants dans les simulations, on constate que ce n'est pas la population la plus contaminante. De plus, si les jeunes mangent dans des snacks et parfois au restaurant sur l'heure de midi, comme en soirée, la majorité des clients sont des adultes. Ceci dit, il est vrai que les jeunes ont plus de probabilité de propager le virus pendant l'heure de midi ou les repas en général que pendant les cours où ils respectent les gestes barrières.

La seule fermeture des établissements scolaires n'a jamais été suffisante pour enrayer l'épidémie car le problème est ailleurs. 

Aujourd'hui, il est prouvé que les restaurants clos sont l'une des principales sources de propagation du virus car les clients sont nombreux dans une petite surface, il y a des asymptomatiques, il y a plusieurs services et donc un brassage important et personne ne porte de masque à table.

Les autorités furent donc contraintes de (re)confiner secteurs économiques, des quartuers, des villes voire toute une province pendant quelques semaines au printemps ou à l'été 2020 comme ce fut le cas en Chine, en Inde, à Madagascar, aux Etats-Unis, en Argentine, en Australie, en Ukraine, et plus près de nous au Portugal, en Espagne, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Italie (cf. RTBF). Il en fut de même durant la deuxième vague épidémique en Europe entre septembre 2020 et début 2021.

Les salons de coiffure et d'esthétique

La majorité de la population va chez le coiffeur et beaucoup de femmes vont également chez l'esthéticienne. Pour beaucoup de personnes, c'est une nécessité presque aussi importante que se nourrir. Pour d'autres c'est plus une question de relations sociales et des lieux où finalement on entretient sa bonne humeur et sa bonne santé mentale.

Pourtant certains pays comme la Belgique et la France ont fermé temporairement les salons de coiffure et d'esthétique pendant les première et deuxième vagues épidémiques. Cela provoqua la colère des commerçants concernés car non seulement d'autres commerces de proximité et même les églises restèrent ouvertes mais dans les pays limitrophes ces salons sont restés ouverts, alimentant une économie transfrontalière au détriment de l'économie locale.

Au Luxembourg par exemple, les salons de coiffure et d'esthétique sont restés ouverts et ce n'est que suite à l'ampleur de la deuxième vague qu'ils furent fermés juste avant la Noël pour réouvrir un mois plus tard.

En Belgique, les responsables du secteur ont réclamé au gouvernement la réouverture des salons mais n'ont jamais reçu satisfaction pour des raisons de sécurité sanitaire. Etait-ce raisonnable de fermer ces salons ?

Les autorités ont déclaré que les mesures sanitaires prises par ce secteur n'ont pas suffi à réduire le risque de contamination au plus fort des vagues épidémiques. Selon les experts belges de la santé, les métiers de contact sont plus exposés que les autres au Covid-19. Ces salons sont généralement petits, peu aérés, assez fréquentés (jusqu'à un client toute les demi-heure par coiffeur) et le personnel discute souvent en tête-à-tête avec les clients pendant 30 minutes à plus d'une heure.

Il n'existe actuellement aucune étude universitaire sur la contamination par le Covid-19 dans les salons de coiffure et d'esthétique, un manque qui fait dire aux représentants de ces métiers que la fermeture de leur commerce est une décision injuste et arbitraire. En fait, il existe des données. En Belgique, selon les chiffres de l'Office National de Sécurité Sociale, les coiffeurs et esthéticiennes ont plus souvent été testés positifs que les autres professions. Il en est de même pour les personnes qui se sont rendues dans un salon de coiffure ou d'esthétique, en particulier les personnes de plus de 60 ans, la population la plus à risque. Ce n'est donc pas une décision arbitraire mais basée de l'analyse des statistiques officielles et des courbes de l'épidémie, y compris des hospitalisations que le gouvernement décida de fermer temporairement ce secteur.

 Les ménages, foyers d'infection

Pour rappel, au sens statistique un ménage est défini comme l'ensemble des occupants d'une résidence principale, qu'ils aient ou non des liens de parenté. La famille est la partie d'un ménage comprenant au moins deux personnes ayant un lien de parenté direct (conjoint, enfant).

Dans une étude publiée dans la revue "Science" le 23 octobre 2020, Justin Leesler de l'École de santé publique Johns Hopkins Bloomberg et ses collègues ont analysé les cas cliniques de contamination par le Covid-19 et leur origine. Leurs résultats montrent que "la majorité des contaminations surviennent probablement au sein du cercle familial et d'autres milieux résidentiels (comme les maisons de retraite). En effet, la plupart des individus vivent avec d'autres personnes et les contacts familiaux incluent de nombreuses formes d'interaction étroite, de haute intensité et de longue durée".

Le Covid-19 se transmet principalement au sein des ménages et dans des contextes de type familial. Une proportion décroissante de cas de transmission se produit à des échelles spatiales croissantes, mais ces cas deviennent plus critiques pour soutenir la pandémie. Document N.Cary/Science pour J.Lessler et al. (2020) adapté par l'auteur.

Selon une étude chinoise portant sur 391 personnes réalisée en février 2020 (lorsque l'épidémie présentait un Ro = 0.4), les contacts familiaux et les personnes voyageant en contact avec une personne asymptomatique présentaient le risque le plus élevé d'infection avec 6.27%. Pour les contaminations intra-familiales, le taux d'attaque secondaire était de 11.2%. Les enfants étaient aussi susceptibles d'être infectés que les adultes avec un taux d'infection de 7. 4% chez les enfants < 10 ans contre 6.6% dans la moyenne de la population (cf. Q.Bi et al., 2020).

En France, durant la première vague épidémique le taux de transmission secondaire intra-familial était de 11% vers les parents et de 10% vers les frères et sœurs, similaire au taux observé par Bi et ses collègues à Shenzen, en Chine.

Les retours de vacances sont des périodes de l'année particulièrement à risque. On a cité plusieurs exemples où des parents n'ayant pas respecté la quarantaine contaminèrent leur entourage y compris des enfants qui transmirent le virus dans leur école. Au final, il est arrivé en Belgique qu'un seule personne porteuse du virus n'ayant pas respecté la période de quarantaine en contamina 5 autres, forçant 5000 personnes à se mettre en quarantaine ! On reviendra sur l'impact des inciviques sur l'épidémie.

Des études de recherche précoce des contacts et une vaste étude de plus de 59000 cas parmi les contacts réalisée en Corée du Sud ont révélé que les contacts familiaux avaient une probabilité 6 fois plus élevée d'être contaminés par le Covid-19 que les autres contacts étroits. Les contacts familiaux représentaient 57% des infections secondaires identifiées dans l'étude sud-coréenne, malgré un suivi exhaustif des contacts communautaires. À l'échelle mondiale, la proportion de cas attribuables à la transmission par les ménages varie en raison de nombreux facteurs dont la taille du ménage.

Les études sur les contacts suggèrent que 17 à 38% des contacts se produisent au sein des ménages, ce qui représente 46 à 66% des transmissions. Cela concorde avec le fait que les contacts familiaux sont un facteur clé de transmission d'autres virus respiratoires.

Même parmi les contacts étroits au sein des ménages, il existe des hétérogénéités considérables dans le risque de transmission. Les conjoints des cas index (voir plus haut) ont une probabilité au moins deux fois plus élevée d'être contaminés que les autres membres adultes du ménage, et les cas index symptomatiques ont toutes les probabilités de transmettre le virus.

De plus, un âge plus avancé est associé à une contamination potentiellement accrue et à une transmissibilité accrue d'une maladie grave. Les membres plus âgés peuvent faire face à un risque supplémentaire dans les ménages multigénérationnels si les membres plus jeunes ont des obligations scolaires ou professionnelles, bien que les jeunes enfants puissent être moins sensibles à l'infection et transmettre le virus moins facilement.

Les résidences collectives à risque

Tout comme dans les ménages, ceux qui vivent dans des résidences collectives telles que les prisons, les cités-dortoirs et les établissements de soins de longue durée ont des contacts étroits, intenses et de longue durée. Dans ces milieux, la promiscuité offre plus de contacts potentiels qui appartiennent souvent à des groupes plus âgés.

Ajoutons que dans certains établissements de soins et maisons de retraite, le manque de moyens ne permet pas toujours de protéger tous les résidents. En Belgique par exemple, dans certaines maisons de retraite, la moitié et même parfois tous les pensionnaires ont été contaminés. Dans certains établissement il y eu 50% de décès ! On y reviendra.

Les centres pour handicappés n'ont pas été épargnés. En Wallonie, il y eut des mises en quarantaine de certains pavillons en raison de l'un ou l'autre cas de contamination amené par un visiteur. Heureusement, ces alertes furent peu nombreuses et sans gravité car les responsables de ces établissements ont rapidement pris des mesures de distanciation ou isolé le personnel interne des visiteurs pour éviter les contacts à risque.

Concernant les contaminations dans les prisons, l'OMS a préparé des plans de prévention et de lutte mais ils sont rarement appliqués avec les conséquences fatales qu'on peut imaginer.

Selon les auteurs, la confluence de ces facteurs peut conduire à des taux élevés de contamination lors d'épidémies (taux d'attaque). Ainsi, 66% des résidents furent contaminés dans un refuge pour sans-abri, 62% dans une maison de soins infirmiers et 80% dans un dortoir de prison. Même lorsque les résidents partent rarement, ces installations sont étroitement liées aux communautés par le biais des travailleurs et des invités.

Bien que la transmission puisse être la plus facile et la plus fréquente dans les ménages et les résidences collectives, la transmission communautaire relie ces milieux et est donc essentielle pour soutenir l'épidémie, même si elle provoque directement moins de cas. Toutefois, les propriétés de la transmission communautaire sont difficiles à mesurer, et c'est à cette échelle que se situait en octobre 2020 une grande partie du débat restant sur la transmission du Covid-19.

Logo du risque biologique (biohazard).

Outre l'effet des super-contaminateurs, la transmission du virus peut également être amplifiée si plusieurs infections ultérieures se succèdent rapidement et si des épidémies avec des taux d'attaque élevés se sont produites dans des milieux de contact rapproché tels que les églises (38%), les usines de transformation de viande (36%) et les écoles (14%). A ce sujet, les lieux de culte restent des foyers d'infection (cf. le premier cas identifié dans une église en Corée du Sud), les mosquées et les synagogues (en Israël), raison pour laquelle au début de l'épidémie elles ont d'abord réduit l'affluence des fidèles puis furent fermées au public vers la mi-mars 2020 (cf. The Guardian).

Il reste toutefois des pays où des communautés de croyants comme les Évangélistes aux Etats-Unis, les Ultra-Orthodoxes en Israël ou certains Musulmans en Inde se croient protégés par une Puissance supérieure ou refusent de suivre les actualités et continuent à se rassembler malgré le confinement (cf. RTBF, La Meuse, CNews). On y reviendra quand nous ferons le bilan de la crise sanitaire à propos de la théorie du complot, des mensonges et de l'obscurantisme.

Justin Leesler et ses collègues abordent également les stratégies des gouvernements. "Les moteurs de la pandémie de Covid-19 - les environnements domestiques et résidentiels, la communauté et la transmission à longue distance - ont des implications importantes pour les stratégies de lutte. En effet, en passant de l'échelle internationale à l'échelle des ménages, le poids des interventions est partagé par plus de personnes; il y a peu de voyageurs internationaux, mais presque tout le monde vit dans des ménages et des communautés. Les mesures visant à réduire la propagation au sein des ménages peuvent sembler particulièrement difficiles, mais comme elles affectent directement un très grand nombre de personnes, elles n'ont pas besoin d'être parfaites. L'utilisation de masques de protection et le cloisonnement des espaces domestiques, l'isolement ou la mise en quarantaine à l'extérieur du domicile et, à l'avenir, la fourniture de médicaments préventifs aux ménages pourraient avoir des effets importants même s'ils n'offrent qu'une protection modeste. Inversement, les mesures de lutte à plus grande échelle spatiale (par exemple, interrégionale) doivent être largement mises en œuvre et très efficaces pour contenir le virus. En effet, peu de pays ont réussi à enrayer la contamination sans confinement de la population et sans fermetures des entreprises, en particulier lorsque la transmission communautaire est répandue". Ce sont exactement les stratégies que nos gouvernements ont essayé d'appliquer avec les succès et les échecs que l'on sait, le principal facteur de réussite étant l'adhésion de la population aux mesures prises.

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