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Opinions : Claude Allègre dénonce les "écolo-intégristes"

Un combat entre Science et "Star system" ?

Présentation du livre

Claude Allègre, professeur émérite à l'Institut Universitaire de France et membre de l'Académie des Sciences de Paris, ancien géophysicien et membre de la Royal Society a publié un ouvrage polémique sur l'écologie intitulé "Ma vérité sur la planète" sous-titré "Non, M.Hulot!".

Ecrit par un scientifique de renommée internationale, ancien ministre de l'Education nationale, de la Recherche et de la Technologie (gouvernement Jospin, 1997-2000), Allègre a les qualités et les défauts d'un scientifique : si cet universitaire de talent sait de quoi il parle quand il discute de géophysique, son franc-parlé peut déranger le grand public plus habitué à un discours prudent et timoré de la part des scientifiques. Mais Allègre n'est pas un écologiste, ni un physicien ni un historien des sciences et commet à ce titre énormément d'erreurs quand il sort de son domaine de compétence.

Toutefois, ce livre revendicateur présente l'avantage de remettre à sa place le débat sur l'écologie, c'est-à-dire dans son contexte naturel, loin des "sectes vertes" comme Allègre qualifie les "écolo-intégristes". Extraits choisis.

Allègre affirme par exemple que si "l'écologie est incontournable [...] cet unanimisme est dangereux lorsque petit à petit émerge un dogme qui par définition doit être accepté comme tel, sans contestation possible." Et de poursuivre : "Dans la 'secte verte', il en est de même. Il n'y a rien à comprendre. La science n'est présente que lorsqu'elle conforte ce qu'on pense. Dès qu'un danger est annoncé comme possible, il est considéré comme certain et le principe de précaution justifie à lui seul l'attitude. C'est ainsi ! Un point c'est tout. Questionner, c'est déjà être rebelle! [...] Tout ce qui est naturel est bon. Donc tout ce qui modifie la nature est à proscrire, à condamner. L'Homme et la société passent au second rang." 

Par ce discours, Allègre vise en particulier trois ténors écologistes : "Nicolas Hulot : le bon qui cultive l'angélisme caché derrière ses magnifiques reportages, un discours aussi mobilisateur qu'imparfait et finalement dangereux [...]. José Bové : la brute; son mode d'expression c'est d'abord et avant tout la violence [...] Al Gore : le truand, à la tête d'une gigantesque pompe à fric [...]."

Faire de l'écologie un moteur de la croissance économique

Selon Allègre, pour développer l'écologie il ne faut pas faire comme ces "gourous autoproclamés de l'écologie" et accuser le progrès et sa conséquence, la croissance. Il faut agir tout autrement : "il faut en faire un moteur de la croissance vigoureuse, un élément essentiel du progrès économique et social !"

Allègre termine sa plaidoirie en énumérant les véritables priorités de l'écologie et propose des solutions. La première priorité est l'eau, la deuxième, ce sont les déchets urbains et la troisième c'est la question de l'énergie. Viennent ensuite la question du changement climatique, les OGM et la biodiversité.

Parmi les solutions technologiques, Allègre envisage plusieurs axes de développement : la séquestration du gaz carbonique (dans les calcaires), l'hydrogène en tant que source d'énergie, la voiture hybride, les centrales nucléaires de 4egénération qui consomment cent fois moins d'uranium et détruisent leurs propres déchets, les OGM et les bactéries transgéniques, espoirs de progrès alimentaires et médicaux, l'industrie du recyclage des déchets urbains et industriels et la gestion de l'eau (potable et des mers).

Allègre confirme que "cette stratégie de croissance par l'écologie doit être menée à l'échelle européenne [...] La stratégie que nous proposons est déjà en place aux Etats-Unis [...] C'est à cette échelle qu'il faut mobiliser les ressources et stimuler les recherches et les stratégies économiques."

Commentaires

Fixons tout d'abord au mieux l'image sulfureuse du personnage. Rappelons que Claude Allègre n'est pas à son premier coup de gueule, que ce soit en politique ou en science. Il semble de plus en plus s'aigrir à mesure qu'il vieillit, se transformant en "agitateur en col blanc". Même "L'Express" lui a retiré la tribune politique qu'il tenait dans ce magazine. Les faits sont donc avérés et de notoriété publique : Allègre est intolérant.

Ayant terminé sa formation aux Etats-Unis, il estime sans doute que les gens qui n'ont pas son quotient intellectuel ni ses diplômes n'ont pas le droit de s'exprimer ni d'agir. Triste mentalité pour un scientifique censé avoir de la retenue et rechercher la vérité. Oscillant entre la gauche et la droite, je pense plutôt que M.Allègre est un opportuniste. Celui qui ose traiter les écologistes "d'intégristes" membres d'une "secte verte" est lui même un homme sectaire qui aime casser du sucre sur tout qui ne partage pas ses idées. Dans son esprit écologie rime sans doute avec jalousie et démagogie.

Claude Allègre.

Ceci dit, Allègre a soulevé quelques faits intéressants, mais ce n'est pas le seul à le dire ni même le premier à l'avoir fait. En tant que scientifique, je partage le point de vue d'Allègre et son coup de poing sur la table mais il y a des nuances et une intolérance que je n'apprécie guère de la part d'un scientifique.

Je partage tout à fait ses priorités et ses axes de développements qui sont depuis longtemps intégrés dans le concept de développement durable. Ici Allègre, n'a rien inventé.

Je reconnais que José Bové est une tête brûlée qui agit (souvent mal) avant de réfléchir, que Nicolas Hulot ne va jamais au fond des choses ou n'entame jamais de débat contradictoire et on peut critiquer Al Gore qui utilise 3 places d'avion en première classe pour présenter son film sur l'écologie qui lui rapporte 50 millions de dollars et qui se paye 200000 dollars l'heure pour chacune de ses conférences.

Mais quand bien même Al Gore dépense 220000 kWh par an pour alimenter sa maison, soit 20 fois plus que la moyenne des maisons individuelles américaines, que Nicolas Hulot n'est pas à sa place dans une arène politique et que José Bové casse du McDo ou des OGM, tous trois ont fait la démarche d'agir à leur façon pour sensibiliser l'opinion publique et les gouvernements sur les menaces qui pèsent aujourd'hui sur la planète. Qui d'autre agit réellement ? Très peu de gens sont sensibilisés par l'écologie.

Sans leur intervention, certes parfois maladroite et mensongère, le "Pacte écologique" n'aurait sans doute jamais été signé par les partis français et belges en 2007. Pourquoi dès lors M.Allègre ne faites-vous qu'une critique négative de toutes les actions des écologistes alors que vous savez pertinemment bien qu'elles conduisent à des projets positifs et une prise de conscience collective que le monde politique n'a pas vraiment réussi à transmettre...

Non, M.Allègre, quand le gouvernement n'entend pas les écologistes, ils n'ont pas d'autres solutions que d'utiliser le pouvoir des médias et parfois la violence pour se révolter contre l'inaction des autorités ou l'emprise des lobbies et faire entendre leur voix. Et ne me nous dites pas qu'il existe une stratégie écologique à l'échelle européenne quand toutes les institutions et les gouvernements (même l'Elysée) sont infiltrés par les lobbies pétroliers, les cigarettiers, pro-OGM ou pro-nucléaire parmi des centaines d'autres ! Vous avez été membre du gouvernement français. Avez-vous agit contre l'intervention des lobbies, jamais !... Qui défendez-vous M.Allègre ?

Grâce aux actions des ONG et notamment des écologistes, aujourd'hui le ministère de l'Environnement ou son équivalent allemand ou américain prend en considération les arguments écologiques quand il doit couler une épave, installer une usine, remodeler un paysage ou assenir un site pollué par exemple.

Non, M.Allègre, contrairement à ce que vous pensez, les écologistes que vous qualifiez d'intégristes ne sont pas les gourous d'un nouveau "star system" et ils ne prêchent pas la "bonne parole" pour amasser des millions de dollars. Cet argent est confié à des fondations. Certes, Al Gore est un homme riche mais il a toujours été écologiste. Libre à vous également de voyager en première classe; ce n'est pas la qualité du fauteuil ou du service qui pollue mais le kérozène ! Certes, la maison d'Al Gore consomme à elle toute seule autant qu'un building mais vous devez aussi reconnaître que son discours a été entendu et suivi d'actions au plus haut niveau du pouvoir.

Rappelez-vous que les actions des écologistes sont dictées par un constat : l'inaction des autorités en matière d'environnement et des études scientifiques impartiales pour ne prendre que les rapports des experts de Greenpeace. N'oubliez pas non plus M.Allègre, que c'est le gouvernement français qui a fait courir le bruit - mensongé évidemment - voici quelques décennies que Greenpeace France était un groupe terroriste... (cf. Les activistes écologiques). De quelle côté êtes-vous franchement pour prétendre que leurs actions sont mensongères, dangereuses voire inutiles ? Etes-vous un défenseur des OGM ou des produits chimiques (cf. le projet REACH) sans même connaître les risques associés, des pêcheurs qui épuisent nos bancs de cabillauds et de saumons, des aliments calibrés, conditionnés et insipides que veulent nous faire manger les supermarchés et de tous ces industriels irresponsables au discours mensongé comme Engie (ex EDF) qui cherchent le profit immédiat au mépris de la santé des gens et des risques d'accidents...

La politique ne vous va pas M.Allègre, restez dans votre domaine, la géophysique, et ne critiquez pas vos confrères avec autant de mépris. A force de tirer la couverture à vous en décriant l'action des scientifiques, plus personne ne prendra la science au sérieux. Là, se situe le véritable péril ! Alors, modérez votre discours et soyez moins intolérant envers ceux qui ne partagent pas vos idées car nous poursuivons tous un même but : sauver la Terre pour les générations futures !

Un extrait de cet article a été publié dans le magazine Télépro N° 2780 du jeudi 14 juin 2007.

Pour plus d'informations

Finding Solutions To The Climate Crisis, par Al Gore

Plaidoyer : quand la Terre tourne à l'envers

L'eau, l'or bleu

La biodiversité

Le développement durable

L'après-Kyoto

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