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L'Europe, source de nos maux

Un drapeau emblématique et fédérateur mais dont les plis et le côté sombre cachent mal le malaise régnant autour du modèle européen.

Les étoiles de la discorde (I)

Après avoir décrit les tendances du développement durable d'ici 2050 et constaté les faiblesses de nos sociétés, discutons de l'attitude et de l'avenir de l'Europe qui a également sa part de responsabilités dans la fracture Nord-Sud. Mais pas uniquement envers les pays pauvres.

L'action sociale comme la vision économique de l'Europe sont très négatives. Les technocrates européens plus afférés à faire respecter leurs normes que de veiller au bien être de leurs citoyens semblent de plus en plus appliquer à leur population les règles méprisantes et irréfléchies qu'ils appliquait jadis à leurs anciennes colonies.

Voyons tout d'abord deux problèmes qui sont particulièrement exacerbés et urgents à résoudre au risque d'affronter dans un avenir peut-être pas si lointain  une crise sociale majeure en Europe de l'Ouest : l'immigration et le modèle "social" européen. Nous nous étendrons ensuite sur des considérations économiques en prenant pour exemple quelques problèmes majeurs dans les secteurs agricole et industriel.

1. Gérer l'immigration avec humanité

Selon la Commission européenne, en 2001 le nombre d'immigrés résidant légalement sur le territoire européen (alors constitué de 15 États) était estimé à 14.3 millions de personnes, soit 3.8% de la population d'alors. Depuis la fin des années 1980 tous les pays d'Europe ont également assisté à une augmentation croissante du nombre de réfugiés et de demandeurs d’asile (pour raison politique). Ne citons que deux chiffres : en 1984, l'Europe recensait 104000 demandes d’asile. En 1992, ce chiffre est passé à 692000 demandes pour ensuite diminuer jusqu'environ 400000 demandes au tournant de l'an 2000. Dix ans plus tard la tendance était à la baisse dans toute l'Union européenne car la raison politique n'est plus souvent reconnue comme valable. Seule la Bosnie-Herzégovine et la Croatie continuèrent à abriter plus d'un million de réfugiers suite à la guerre du Kosovo (1999).

En fait, au début des années 2000 ainsi qu'on le constate sur cette carte de 2004, faute d'argent, la majorité des réfugiés furent contraints d'immigrer dans un pays limitrophe; ils se sont rassemblés en Afrique (Burundi, Soudan, Erythrée, Angola, Somalie, Libéria, Sahara occidental, Sierra Leone, République Démocratique du Congo, etc), au Moyen-Orient (Palestine, Afghanistan, Azerbaïdjan, Irak, etc), en Asie du Sud-Est (Viêt-Nam, Myanmar, Sri Lanka, Boutan, etc) et même en Chine.

Malgré les risques, des migrants partis de France tentent de traverser la Manche pour rejoindre l'Angleterre en 2020. Document Glyn Kirk/AFP.

Chacun de ces pays abrite au moins un million de réfugiés politiques avec un triste record de 4 millions de Palestiniens et autant d'Afghanistans. La plupart d'entre eux restent dans le pays d'accueil durant 20 à 30 ans avant de retourner chez eux s'ils ne sont pas morts de faim entre-temps ou faute de soins. Mais avec le niveau de vie que l'on connaît en Europe, personne ne quitte le territoire si ce n'est sous la contrainte ou pour une destination encore plus profitable !

Puis, à partir de 2010 environ, le terrorisme enflamma le Moyen-Orient et l'Afrique, contraignant des millions de personnes à immigrer ou s'exiler dont une bonne partie a tenté sa chance en Europe.

Depuis fin 2018, des centaines de milliers de migrants ont embarqué depuis la France (Calais ou Dunkerque) à bord de "small boats", des dinghies ou des embarcations de fortune, pour tenter de rejoindre les côtes anglaises. En 2021, plus de 50000 personnes avaient tenté leur chance mais seules quelque 28395 y sont parvenues (dont 1185 personnes pour le seul jour du 11 novembre 2021), soit trois fois plus qu'en 2020 où plus de 8400 migrants avaient traversé la Manche.

Prenant tous les risques, naviguant de nuit et parfois par tous les temps, les infortunés ont soit péri en mer, ignorant les conditions météos et de navigation, la force des courants, l'eau froide et le risque de collision avec les cargos naviguant dans le "rail" de la Manche comme illustré ci-dessus à gauche (vu la taille monumentale de certains cargos, depuis la passerelle de navigation certains capitaines ne voient même pas les petites "coquilles de noix" naviguant à proximité de leur navire et lancés parfois à pleine vitesse, ils sont incapables de manoeuvrer pour les éviter), soit furent reconduits en France par des équipes de sauvetage et les associations prêtes à intervenir en cas de naufrage. Mais tous les migrants revenus en France retenteront leur chance car la plupart ont parcouru des milliers de kilomètres, bravé tous les dangers et ne font pas s'arrêter à 50 km de la destination à laquelle ils ont toujours rêvé et où les attend peut-être leur famille.

En 2022, ces traversées clandestines de la Manche font toujours l'objet de vives tensions entre les autorités françaises et britanniques et représentent une préoccupation majeure pour les secours en mer.

A. Origines des immigrés européens

Pourquoi l'Europe subit-elle un tel afflux de ressortissants étrangers ? Plusieurs raisons font que l'Europe est considérée comme un "Eldorado" par beaucoup d'habitants de pays tiers. Selon les pays, il y a de 3 à 10% d'étrangers dans chaque pays européen (avec une exception au Luxembourg qui regroupait plus de 47% d'étrangers fin 2021, mais le pays est petit et plus riche que ses voisins, ceci expliquant cela, sans parler de la Principauté de Monaco). Penchons-nous un instant sur les origines des immigrés de Belgique ou de France par exemple. D'où viennent-ils ?

Du XIXe siècle à 1914, la majorité des immigrés vivant en Belgique ou en France étaient des ressortissants des pays limitrophes mais on recensait malgré tout quelques immigrants du Royaume-Uni, de Russie, de l'empire Austro-Hongrois ainsi qu'un petit nombre d'Afrique et très peu du Moyen-Orient. Entre les deux guerres la plupart des immigrés provenaient d'un pays limitrophe (Belgique, France, Italie, Suisse, Allemagne) mais on commença à observer un flux croissant d'immigrants Espagnols et Polonais. C'est au début de la Seconde guerre mondiale (1939-1940) qu'on assista à un nouveau afflux de populations étrangères fuyant les pays en guerre.

Soldes migratoires mondiaux de 1990 à 2000. Document La documentation française.

Entre 1945-1960, c'est-à-dire au début de la Guerre froide (qui s'étendit de 1945-1991), les frontières de l'Europe (comme celles des Etats-Unis) sont restées ouvertes à tous les citoyens. C'est alors qu'on observa une augmentation sensible des immigrants en provenance du Portugal, d'Italie, du Maghreb et de l’Afrique noire.

A partir des années 1960, de multiples guerres civiles et autres conflits ethniques ont éclaté en Afrique, en Amérique du Sud, en Asie puis en Europe de l'Est. Durant ces guerres civiles les opposants paramilitaires (milices, etc.) ont souvent pris pour cible les populations civiles. Pour éviter de périr au cours de ces rafles, vendetta et autre "nettoyage ethnique", beaucoup de ressortissants ont quitté leur pays en espérant trouver le calme et un meilleur niveau de vie en Occident. Comme certains maîtrisaient déjà l'une des langues européennes (le français qui est la 4e parlée dans le monde ou l'anglais qui est la 1ere langue parlée, le mandarin et l'hindi venant juste derrière), qu'ils pouvaient prétendre à un emploi qualifié et pouvaient utiliser des transports économiques pour traverser les pays (train, bus et convois organisés de voitures-taxi), en quelques années ce sont des centaines de milliers de personnes qui ont émigré à l’Ouest, souvent au risque de leur vie.

Contrairement aux années d'après-guerre ou durant la période 1960-1973 où tous les pays européens ont massivement fait appel à de la main d'oeuvre étrangère (des ressortissants de l'Afrique et d'Europe en France, des Italiens en Belgique, des Portugais au Luxembourg, des Turcs en Allemagne, etc.) pour relever leur économie, après la crise pétrolière de 1973, les pays européens industrialisés ont tenté de bloquer le flux d'immigration pour raison économique et ont seulement accepté le regroupement familial ou les demandes d'asile politique.

Mais l'Europe est restée impuissante à contrôler l'immigration clandestine car elle n'est jamais parvenue à convaincre les États tiers qu'ils devaient également enrailler leur flux d'émigrants et surveiller un peu mieux leurs agitateurs publics (leaders politiques ou religieux, groupes terroristes, etc.). A défaut de dispositions prises à la source, sous la pression de ses États-membres, l'Europe a donc été contrainte de prendre des mesures. On y reviendra.

B. La crise des migrants

Suite aux effets délétères des politiques étrangères américaine et européenne dont celle de la France et du Royaume-Uni qui sont à l'origine du terrorisme au Moyen-Orient et en Afrique et son exportation en Occident, vers 2010 l'Europe subit la "crise des migrants" qui connut son paroxysme en 2015. Cette année là plus de 800000 migrants arrivèrent en Grèce par la mer. Selon Eurostat, jusqu'en février 2016 on estime que plus de 1.6 million de citoyens du Moyen-Orient sont entrés en force en Europe (sur 5 millions de migrants) comprenant une majorité de Syriens (30%), d'Afghans et d'Irakiens, mais également quelques terroristes incognito porteurs de faux-papiers. En parallèle, près de 3 millions d'émigrants ont quitté le territoire Européen.

Par comparaison, selon le DHS (US Department of Homeland), chaque année les États-Unis accueillent plus d'un million de migrants et en moyenne 20% de plus que dans les années 1990 (cf. cet article du Figaro publié en 2018).

Pendant la période estivale, l'Italie reçoit encore en moyenne 20000 migrants chaque mois provenant d'Afrique du Nord, d'Albanie, de Grèce et de Turquie. Rien que pour l'année 2015, on déplore le décès de 3770 migrants ayant essayé de traverser la Méditerranée (jusqu'à 1250 décès en août 2014). Malgré l'appui financier de l'Europe afin que l'Italie contrôle ces flux migratoires, le Gouvernement ne contrôle pratiquement pas ces populations et les laisse migrer dans toute l'Europe.

Selon l'UNHCR, entre 2016 et 2017 le nombre de migrants arrivés en Grèce depuis la Turquie diminua de 94% mais il y a toujours autant de migrants venant d'Afrique du Nord (83752 personnes à la fin juin 2017).

En moyenne, 25% des migrants du Moyen-Orient parvenus en Europe sont des jeunes sans leurs parents et 25% des migrants sont des hommes de moins 21 ans. Si l'Allemagne a accepté d'aider plus de 33% des migrants, la France en accepte de moins en moins pour atteindre 6% en 2016. Relativement à la population résidente, le Luxembourg présente le plus grand taux d'immigration avec 40 immigrants par 1000 habitants en 2014. Quant aux taux d'immigrations nationales au sein des États-membres européens, ce sont les pays de l'Est qui présentent le taux d'immigrants le plus élevé avec 91% en Roumanie, 80% en Lithuanie, 65% en Estonie et 57% en Pologne contre à peine 10% en Allemagne, Autriche et Luxembourg.

A gauche, origine et destination des immigrants dans les pays européens. Au centre, politique européenne envers les migrants. A droite, évolution de l'immigration et nombre de camps ouverts en Europe suite à la "crise des migrants". Documents Eurostat (2015) et collectif (2012).

Enfin, sur l'ensemble des immigrants enregistrés dans un État-membre européen, en 2014 moins de 9% d'entre eux avaient acquis la nationalité d'un pays membre. Du fait que chaque demandeur d'asile fait l'objet d'une enquête administrative, selon le pays il faut entre 6 mois et 1 an pour qu'un immigrant obtienne un permis de séjour sans lequel il peut être expulsé vers son pays d'origine. Lorsque sa demande est acceptée, l'État accorde au migrant une allocation variant entre 350-500 € par mois selon le pays. Si l'avis est négatif, beaucoup de migrants choisissent la clandestinité et tentent leur chance dans un autre pays, en rejoignant notamment le Royaume-Uni via Calais où heureusement la célèbre "Jungle" fut rasée fin 2016, une tache dans un pays soi-disant respectueux des Droits de l'homme mais tout à l'image de la politique européenne.

Notons que parmi les immmigrants légalement installés en Belgique, seuls 30% ont déclaré en 2018 qu'ils accepteraient de voter, notamment pour remercier leur pays d'accueil, signe d'un malaise social voire d'un échec du gouvernement en matière d'immigration.

C. Du ghetto à l'intégration

Historiquement, les "primo immigrants", les immigrants de l'ancienne génération ont généralement réussi à s’intégrer au tissu social de leur pays d'accueil. Mais le Gouvernement a participé à cette intégration. Ces migrants ont été reçus à bras ouverts car ils venaient soutenir la reconstruction et le développement économique du pays. L'État leur a accordé des facilités, ils ont appris la langue du pays, ils ont trouvé du travail, fondé une famille et certains sont actifs dans des associations de migrants afin de facilité l'intégration des nouveaux arrivants tandis que d'autres se sont engagés en politique ou dans l'action syndicale. Leurs enfants, nés en terre étrangère et scolarisés n'ont plus aucune attache avec leur pays d'origine et se sentent aussi intégrés que les nationaux.

Ceci dit, dans beaucoup de pays dit "civilisés", certains de ces enfants d'immigrés bien qu'ayant acquis la nationalité du pays se sentent encore parfois marginalisés quand ils recherchent un emploi, un logement ou sont confrontés à un contrôle de police du seul fait de leur apparence physique. La France (rappelez-vous les banlieues mises à sang et à feu) est particulièrement concernée par ce problème de xénophobie, de même que le Luxembourg (en raison de ses 54% de travailleurs étrangers), l'Allemagne (rappelez-vous les groupements néonazis et leur antisémitisme) et dans une moindre mesure la Belgique (rappelez-vous la directive sur l'Egalité des chances et les problèmes de racisme qui couvent notamment à Bruxelles, Anvers et Charleroi).

Evolution des flux migratoires officiels avant et après la chute du mur de Berlin en 1989. Si l'Europe a plus ou moins fermé ses portes à l'immigration, l'Allemagne réunifiée reste une terre d'accueil pour les migrants des anciens pays de l'Est d'autant que dans certaines grandes villes la population a un train de vie équivalent à celle des Luxembourgeois. Mais ne dit-on pas que c'est la diversité de la population qui fait la richesse d'un pays... Document Science Po.

Si des facteurs sociaux ont favorisé l'intégration des anciens immigrés, on ne retrouve pas ces facteurs d'intégration dans la nouvelle génération de migrants, ceux arrivés en Europe après la chute du mur de Berlin en 1989 et de l'éclatement de l'ex-URSS en 1991. En effet, ces nouveaux immigrants ayant fuit des conflits ou des conditions de vie misérables n'ont pas été appelés par leur pays d'accueil pour lesquels ils représentent encore trop souvent une charge économique et sociale. Seule l'Allemagne réunifiée a accepté sans préjugé ses anciens citoyens de l'Est mais partout ailleurs leur intégration n'a jamais été assurée.

Ces populations d’origines étrangères sont en majorité âgées de moins de 50 ans. Elles sont constituées de jeunes enfants (< 5 ans), d'adolescents (10-19 ans) et d'adultes entre 30 et 40 ans. 

Certains migrants n'ont aucune qualification professionnelle et ne comprennent pas la langue du pays. Une minorité d'entre eux, désoeuvrés mais intelligents sont uniquement présents sur le territoire pour y commettre des larcins et autres délits. En effet, certains ont profité d'un visa touristique de quelques mois pour entrer en Europe mais ne sont jamais retournés chez eux et sont aujourd'hui en séjour illégal et sans permis de travail. D'autres sont simplement entrés en Europe clandestinement. Quelques-uns sont en relation avec la pègre déjà installée dans le pays et en tire avantage pour commettre toutes sortes de délits (vols, marché noir, travail illégal, etc). Lorsque les services de la répression des fraudes ou la police les prend sur le fait ils sont reconduits dans leur pays d'origine mais ils reviennent toujours clandestinement car leur pays d'origine est souvent sinistré et ils considèrent à juste titre que l'Europe de l'Ouest peut les entretenir. Aujourd'hui, les ressortissants clandestins Tchetchennes et des anciens pays de l'Est sont devenus les bêtes noirs des services de répression et de la police.

Parfois les immigrants les plus qualifiés mais rejetés de la société profitent du flou des législations nationale et européenne pour commettre des délits informatiques en toute impunité (manipulations de cartes de crédit, d'émail, vol par Internet ou par les terminaux de paiment, etc). Quelques-uns viennent en Europe uniquement pour se marier, ou plutôt pour éviter ainsi d'être reconduits à la frontière (mariage blanc). 

Quoi qu'il en soit, ces étrangers en situation illégale donnent une très mauvaise image des immigrés venus en Europe pour refaire leur vie. Si ces derniers ne parviennent pas à s'intégrer, ils seront marginalisés, vont se regrouper dans des ghettos où ils stigmatiseront les problèmes économiques et sociaux de toute la société : oisiveté, problème de scolarité, chômage, délinquance, criminalité, etc.

Comment l'Europe gère-t-elle cette problématique et les effets négatifs de l'immigration ?

D. Aspects légaux

Que dit le législateur européen à propos de l'immigration ? Depuis 2001 et les attentats du 11 septembre, l'Union européenne a adopté de nouvelles directives afin de protéger les immigrés mais également ses ressortissants :

Le siège de la Commission européenne et du Conseil de l'Union dans le quartier Schuman à Bruxelles.

- La directive 2001/40/CE du Conseil : reconnaissance mutuelle des décisions d'éloignement des ressortissants de pays tiers. Une décision d'éloignement formulée par un État-membre s'applique automatiquement sur tout le territoire de l'Union. Cette directive vise à refouler toute personne représentant une menace grave et actuelle pour l'ordre public ou la sécurité nationale (telle qu'une condamnation pour une infraction passible d'une peine privative de liberté d'au moins un an) ou qui ne respecte pas les dispositions nationales relatives à l'entrée et au séjour des étrangers.

- La directive 2001/51/CE du Conseil : sanctions pécuniaires contre les transporteurs qui font entrer dans l'Union des ressortissants de pays tiers dépourvus des titres ou visas nécessaires.

- La directive 2003/86/CE du Conseil : droit au regroupement familial (du conjoint et des enfants mineurs du couple)

- La directive 2003/109/CE du Conseil : statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée. Le statut de "résident de longue durée" est obtenu après 5 années de résidence légale et ininterrompue dans le pays d'accueil. Ce statut exige que le ressortissant possède des ressources stables et suffisantes sans devoir recourir à l'aide sociale. Il peut aussi être soumis à la maîtrise de la langue locale. Ce statut assure au ressortissant des droits égaux aux nationaux, notamment dans les domaines professionnel, scolaire et social.

Ces textes sont complétés par le Programme de La Haye qui définit en 2004 dix priorités relatives à l'espace de liberté, de sécurité et de justice paneuropéenne. Ce programme prévoit par exemple de lutter contre l'immigration illégale, en particulier contre la traite des femmes et des enfants, de mettre en place un plan relatif à l'immigration légale et de favoriser l'intégration des immigrants dans les pays de l'Union en fournissant par exemple aux administrations locales et aux employeurs un recueil de bonnes pratiques.

Enfin, depuis 2004 l'Union européenne a créé le Frontex, l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États-membres de l'Union. En résumé, le Frontex a pour but de gérer de manière intégrée les frontières extérieures de l'Europe. Son quartier général est installé en Pologne, à Varsovie. Depuis 2006, cette agence dispose en complément d'une "patrouille européenne contre l'immigration clandestine" qui vise avant tout à freiner l'afflux des migrants en provenance d'Afrique subsaharienne vers les Canaries. Elle travaille sous l'égide du Frontex.

Enfin, rappelons que suite à la "crise des migrants", les frontières de l'espace Schengen ont été fermées en février 2016. En contrepartie l'Union européenne aide financièrement les pays situés aux portes de l'Europe (Italie, Grèce, Turquie, etc.) subissant de plein front l'afflux des migrants afin que ces pays organisent la prise en charge de ces personnes mais surtout dans le but d'empêcher qu'elles entrent clandestinement en Europe. La porte est toutefois ouverte aux regroupements familiaux, en particulier aux enfants dont les parents ont immigré en Angleterre et aux ressortissants de pays en guerre, notamment des Ukrainiens depuis 2022.

E. Les effets contradictoires des réglementations

Malheureusement pour les immigrés et certains réfugiés soi-disant politiques, depuis les années 1980 et plus encore depuis 2001 avec un durcissement en 2016, l'Europe n'est plus le paradis pour beaucoup de migrants non européens.

Le mécanisme d'immigration s'est enraillé du fait des crises socio-économiques qui couvent en Occident, du racisme latent qui en découle et des crimes comme des attentats perpétrés par des terroristes qui sèment la suspicion sur toute une population d'immigrés. C'est alors que se pose les problèmes du regroupement familial autour des migrants et de l'immigration clandestine.

Origine des immigrés de France métropolitaine. C'est la région d'Ile-de-France qui reçoit le plus d'immigrés (15%) suivie par la Corse (10%) et la Provence, Alpes et Côte d'Azur (9.5%). Document INSEE. A l'inverse de la France et pour des raisons historiques, la Belgique reçoit très peu d'immigrés Algériens et Tunisiens (<10000 personnes en 2000) mais abrite en revanche plus de 106000 Marocains. Ils sont devancés par les Français et les Italiens ainsi que le révèle cette étude belge pour l'OCDE.

Les Etats-Unis ont pratiquement fermé leurs frontières et ont érigé un véritable mur à leur frontière avec le Mexique. Les pays d'Europe de l'Est ont fait de même en érigeant des barrières et placés des fils barbelés le long de leurs frontières extérieures. L'Europe occidentale est indécise car elle est doit également gérer son élargissement aux nouveaux pays membres et favoriser la relance de ses industries (cf. les Livres Verts de l'Union européenne) tout en luttant contre l'immigration clandestine et le terrorisme, y compris le trafic d'armes.

Aujourd'hui on constate de plus en plus que les règles communautaires imposées par l'Europe entrent en contradiction avec des réglementations nationales. L'Europe est en fait décrochée de la réalité. D'un côté, au siège de la Commission européenne on ne parle plus de frontières formelles entre pays européens mais de frontières "administratives". On ne parle plus de nationalités mais d'ethnies ou de peuples.

D'un autre côté, sa politique d'immigration se durcit : il y a deux fois moins d'immigrants aux Pays-Bas, elle est limitée aux emplois hautement qualifiés en Allemagne, le contrôle est plus sévère en Angleterre, la France a tendance à "nettoyer" ses banlieues par la force, la Belgique renvoie les étrangers subversifs, etc. Finalement les aérogares se transforment en No man's land, en anti-chambres des ambassades alors que Bruxelles demande tout le contraire, qu'on augmente les flux d'immigrations... Il n'y a plus de logique.

L'Etat, que ce soit la France, la Belgique ou un autre pays européen voire même le Canada ou l'Australie, édicte des règles d'immigration tellement complexes qu'il faut 2 à 3 ans pour les mettre au point pour constater finalement sur le terrain qu'elles ne s'appliquent pas car elles sont incompréhensibles ou contradictoires pour les administrations qui doivent les appliquer.

Ces lois portent finalement préjudice aux immigrants alors qu'elles devraient les protéger en préparant leur venue dans de bonnes conditions. Tout ce que les gens y gagnent s'est finalement un sentiment d'insécurité et une augmentation du malaise social avec des problèmes socio-économiques exacerbés, des notions qui semblent échapper à tous les Eurocrates. Mais un jour cela va se payer cash, car comme l'on dit en politique "chacun doit prendre ses responsabilités". Nous en avons eu un avant-goût amer avec l'élection du président Donald Trump aux Etats-Unis en 2016, un businessman ultra-conservateur, raciste et sexiste, une combinaion très peu compatible avec le profil d'un président censé unifier son pays. Le public peut réagir à l'identique en Europe.

Le problème de l'immigration est complexe et on ne peut pas choisir entre un État Providence aux portes grandes ouvertes et l'immigration zéro. Même dans un pays soi-disant riche comme le Luxembourg, le temps des "vaches grasses" est révolu. S'il existe toujours des classes privilégiées comme celle des fonctionnaires et des cadres payés plus de 100000 € par an, les chômeurs en fin de droits se voient attribués un minimum vital plafonné à environ 1400 € net (2018) pour un célibataire sans enfant. Mais comme en Belgique, cette allocation est régressive et dépend de la somme d'argent dont la personne dispose éventuellement sur son compte en banque, allocation qui sera récupérée sur son éventuel héritage ou gros gain à la loterie l'année de sa pension.

Comme en Belgique et ailleurs en Europe, le gouvernement a exigé que tous les employeurs proposent une pension complémentaire à leurs salariés en prévision des années de vaches maigres prévues vers 2030 où les caisses de l'État seront pratiquement vides si rien ne change. En pratique, tous les employeurs ne proposent pas cet avantage à leurs salariés dont notamment les sociétés de services ayant des succursales à travers l'Europe sous prétexte soi-disant qu'il leur est impossible d'harmoniser les salaires à travers l'Europe...

En soi, la présence des migrants n'agrave pas la situation socioéconomique des pays européens (du moins celle des plus riches) contrairement à ce que prétendent certains opposants à la politique européenne (ou nationale) qui voient des risques partout, car ces 5 millions de migrants ne représentent finalement qu'à peine 0.7% de la population européenne et sont répartis dans les 28 Etats-membres.

Si l'Europe peut facilement intégrer ces migrants, en revanche dans le cadre d'un développement durable qui ne doit défavoriser personne, il est certain qu'il faut créer une véritable coopération bilatérale entre le Nord et le Sud, l'Est et l'Ouest; il faut inciter le développement dans les pays d'origines des migrants et simultanément éviter que ces rêves d'un avenir meilleur en Europe ou ailleurs ne se transforment en cauchemar. La seule solution est de renforcer la coopération entre l'Europe et les pays migrants et de ne surtout pas ériger de murs entre pays riches et pays pauvres. Essayons de faire rimer humanisme et capitalisme.

Voyons à présent les points faibles du modèle "social" européen.

Deuxième partie

Malaise autour du modèle social européen

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