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Occultations et appulses

Un phénomène rare, l'occultation rasante de Mars par la Lune le 6 septembre 2020 photographiée en time-lapse (400 vidéos !) par Thierry Legault depuis Lisbonne en Espagne au foyer d'un Celestron C8.

L'occultation rasante (II)

L'observation des occultations rasantes est la plus intéressante car elle permet d'étudier la "troisième dimension", le mouvement de la Lune en latitude et en particulier la longitude du noeud de son orbite.

Les occultations rasantes permettent également d'étudier le profil du bord lunaire dans les régions polaires de notre satellite. Dans des conditions favorables, des dénivellations d'une dizaine de mètres peuvent être décelées.

Enfin, les observateurs d'occultations rasantes ont permit de découvrir plusieurs dizaines d'étoiles doubles serrées, avec des séparations aussi petites que 0.01". De telles étoiles doubles sont trop serrées pour être décelées avec les méthodes visuelles classiques mais trop écartées pour être découvertes par spectroscopie.

Lors d'une occultation ordinaire, il n'y a généralement aucune surprise car l'observateur sait d'avance ce qui va se passer : l'étoile disparaîtra (ou réapparaîtra) au bord de la Lune, et ces instants peuvent actuellement être prédits à quelques secondes près.

Mais il en va tout autrement lors d'une occultation rasante. Non seulement il n'est pas possible de prédire les instants de ces phénomènes avec précision, mais généralement il n'est même pas possible de prévoir ce qui va se passer. Cette incertitude donne à l'observation d'une occultation rasante un caractère "sportif" d'aventure dont MM.Jean Bourgeois, Jean Meeus et Jean Schwaenen furent longtemps les chefs de file en Belgique, ainsi que David Dunham aux Etats-Unis.

Il faut d'ailleurs préciser que c'est aux limites australes des zones d'occultations que les "phénomènes multiples" sont les plus nombreux car comme nous le précise Mme W.Cameron qui travaillait au centre GSFC de la NASA, le pôle Sud de la Lune présente un relief beaucoup plus accidenté que le pôle Nord.

Pratiquement, l'observation consiste à mesurer avec précision les instants des diverses disparitions et réapparitions de l'étoile. Contrairement à ce qui se produit lors d'une occultation ordinaire, ces instants varient énormément sur de petites distances à la surface de la Terre comme l'explique la figure présentée ci-dessous.

Les occultations rasantes

Prenons un cas fictif où cinq observateurs sont situés à quelques centaines de mètres les uns des autres; le dessin représente le déplacement de l'étoile par rapport au bord de la Lune, dont le relief a été fortement exagéré pour la compréhension.

L'observateur A est situé à quelques centaines de mètres en dehors de la zone d'occultation. Pour lui l'étoile n'est pas occultée par la Lune. L'observateur B assiste à une occultation de très courte durée, l'étoile disparaissant quelques secondes derrière un sommet. Pour C, l'étoile disparaît plus près de la base de cette même montagne, et de ce fait l'occultation a une durée plus longue. D voit d'abord une occultation encore plus longue que C, suivie d'une courte disparition derrière un autre sommet lunaire. Enfin, E voit une occultation ordinaire de durée encore plus longue.

Le choix des stations

De ce qui vient d'être dit il résulte que pour obtenir des mesures utiles, il est nécessaire d'observer une occultation rasante d'un certain nombre de stations convenablement situées. On les choisira à quelques dizaines voire quelques centaines de mètres les unes des autres, selon une ligne à peu près perpendiculaire à la limite calculée de la zone d'occultation, de sorte que les stations voient des phénomènes différents comme dans le cas de la première figure.

Ainsi que nous le verrons un peu plus loin, on évitera les routes fréquentées et les lumières artificielles en prospectant sur place à l'avance. On placera ensuite les stations au voisinage de repères que l'on puisse retrouver sur les cartes topographiques, car il faudra connaître, outre les instants observés, les positions exactes des observateurs.

Le nombre de stations dépendra bien entendu du nombre de participants mais aussi de leur expérience, quitte au début, si le groupe est inexpérimenté, à placer deux ou trois observateurs par station.

L'observation d'une occultation rasante et la mesure des instants n'est pas une tâche facile. Il est rare qu'un novice fasse du bon travail lors de sa première tentative. MM.Bourgeois et Meeus conseillent instamment aux observateurs de s'exercer en observant des occultations ordinaires, qui d'ailleurs ont leur importance également. Un observateur débutant est toujours surpris par la soudaineté de la disparition ou la réapparition d'une étoile.

Les lieux d'observation nécessitent toujours un déplacement des amateurs et du matériel allant parfois jusqu'à des centaines de kilomètres suivant l'intérêt de l'observation. Ce déplacement est dû au fait qu'une occultation rasante n'est observable que dans une bande terrestre dont la largeur varie de quelques centaines de kilomètres pour une occultation boréale à deux ou trois kilomètres seulement pour une occultation australe, la plus intéressante. 

Comme pour l'occultation totale, il suffira d'enregistrer simultanément sur magnétophone les tops horaires émis par la radio et les tops vocaux de tous les instants de contacts. Mais avant d'en arriver là, il y a tout un travail de préparation qui s'impose et que nous allons détailler.

Travaux préparatoires

Généralement c'est l'amateur expérimenté qui se charge de préparer et d'organiser une expédition d'occultation rasante. Il sera tout naturellement responsable du groupe ou chef d'expédition. C'est lui qui reçoit un an à l'avance les prédictions qui lui fourniront les renseignements nécessaires à la préparation de cette expédition et principalement les latitudes en degrés des lieux d'où le phénomène sera visible.

Ces prédictions qui sont calculées et envoyées par centres d'analyse demandent toute une série de calculs assez complexes que nous verrons plus en détail un peu plus bas. A partir de ces données, le responsable trace sur une carte du pays la ligne centrale du phénomène. Compte tenu du déplacement à effectuer il peut aussi choisir la région la plus appropriée à l'observation, la plus accessible. Il achète ensuite, s'il ne l'a possède pas déjà, une carte topographique beaucoup plus détaillée (1/25000e) de la région choisie où il pourra tracer avec plus de précision une nouvelle ligne suivant les longitudes de cette carte et au moyen de la formule d'interpolation suivante, où Y est la latitude recherchée et H la longitude :

(1)

Exemple :

24 septembre 1981

Etoile ZC 1362

AD : 9h97m58.879s

Mv : 7.4

Déc : +17°32'45.46"

PA : 18.2°

K : 0.16-

PABL : 108.8

On obtient alors le tableau suivant pour la limite Nord et la position de l'étoile sur le bord obscure (graze at dark limb):

l

f

T.U.

h

PA

-3°

-4°

-5°

-6°

49.9434°

50.1036°

50.2574°

50.4048°

4h26m46s

4h27m32s

4h28m19s

4h29m07s

29.7°

30.5°

31.2°

31.9°

8.55°

8.67°

8.80°

8.92°

L'étoile se trouve entre 30.5 et 31.2° au-dessus de l'horizon à l'instant donné (h). D'après ces valeurs, le responsable a choisit une région se situant entre 4 et 5° de longitude Est (l). Il doit donc d'après la formule (1) recalculer la ligne pour les longitudes comprises entre 4 et 5° et pour trois points différents, par exemple pour 4.25°, 4.50° et 4.75° de la façon suivante.

Exemple :

Calculer a, d et H sachant que a = Y1 - Y°,     d = b-a,     H = x1 - x°.

avec   b 

= Y2 - Y1 a = 50.2574 - 50.1036 = 0.1602

= 50.1036° b = 50.4048 - 50.2574 = 0.1538

Y1

= 50.2574° d = 0.1538 - 0.1602 = -0.0064

Y2

= 50.4048° H = 5 - 4 = 1

= 4°

x1

= 5°

= longitude du lieu considéré

Pour la longitude de 4.25°, la latitude Y vaut :

Y = 50.1036 + (( 0.1602 / 1 ) * ( 4.25-4 )) + (( -0.0064 / 2 ) * ( 4.25 - 4 ) * ( 4.25 - 5 )

    = 50.1426°

Pratiquez de la même façon pour 4.50° et 4.75°.

La nouvelle ligne tracée, le responsable peut maintenant choisir sur la carte un endroit accessible où il pourra placer les stations (petit chemin, croisée de sentiers, prairie, etc).

Projection du profil lunaire sur le lieu d'observation.

Cette ligne marque en fait une limite car, si la Lune était imaginée comme une sphère parfaite, d'un côté il n'y aurait pas d'occultation et de l'autre côté il y aurait occultation totale. Mais comme le bord lunaire est accidenté, la ligne s'élargit en une bande de plusieurs centaines de mètres. Cette variation est dûe à l'amplitude du relief lunaire et à l'altitude de la Lune au-dessus de l'horizon terrestre.

Il ne reste plus maintenant qu'à envoyer les invitations aux amateurs intéressés qui se retrouveront à un endroit précis le jour de l'observation, au minimum 1h30 avant l'instant du phénomène afin de les répartir sur leurs positions respectives, où ils devront être prêt à observer une demi-heure à l'avance, afin de pouvoir reconnaître et s'habituer au relief lunaire.

LPD et PMR sont des émetteurs-récepteurs UHF portables de faible puissance (10 mW et 500 mW) et bon marché qui ne requièrent aucune licence d'émission. Leur portée varie entre 500 m et 6 km.

Le responsable quant à lui doit si possible se trouver sur place beaucoup plus tôt, car il doit s'assurer que l'endroit choisi sur la carte est resté le même sur le terrain et ainsi pouvoir préparer les stations. Il arrive parfois en effet que des modifications aient eu lieu à l'endroit choisi (nouvelles constructions, propriété privée, route fortement éclairée, travaux, etc) ce qui rendrait l'observation très difficile sinon impossible. Il aura ainsi le temps de rechercher un autre endroit plus approprié à l'observation.

Le responsable doit également dans la mesure du possible tenir compte de la puissance des instruments et de l'expérience des observateurs afin de les répartir au mieux de leurs possibilités. Il placera par exemple les observateurs les plus expérimentés et les gros instruments aux stations susceptibles d'obtenir le plus de contacts possibles.

Ces stations seront réparties sur quelques centaines de mètres pour une occultation boréale, avec des écarts entre elles de trente à cinquante mètres environ. Pour une occultation australe, les stations seront réparties sur deux ou trois kilomètres, parfois plus, et avec des écarts beaucoup plus grands entre chacune d'elles. 

Les smartphones (pour ceux qui ont un forfait) ainsi que les talky-walkies et autres PMR (voire un émetteur CB ou radioamateur) seront utiles pour "garder le contact" dans la nuit.

Bien entendu le nombre de stations et leurs écarts dépendront surtout du nombre d'observateurs présents. 

Essayez dans la mesure du possible de les placer près de certains repères (bornes géodésiques, croisement de chemin, etc) pour faciliter leur repérage sur la carte afin de déterminer après l'occultation leurs position exactes avec une précision de 10m ou 0.3". Si vous disposez d'un GPS ce problème est résolu.

Dernier chapitre

Calcul des prédictions

 

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