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La pollution lumineuse

Sucre en Bolivie photographié en 2001. Document F.Guinepain

La ville de Sucre en Bolivie plongée dans les lumières artificielles photographiée en 2001 par Guinepain.

L'usage des filtres anti-pollution lumineuse (II)

Avant de commencer, rappelons que plusieurs anciennes entreprises américaines qui proposaient aux amateurs tout un éventail d'instruments et d'accessoires très utiles ont cessé leurs activités dont Scopetronix en 2006, Lumicon en 2016, JMI (Jim's Mobile) en 2017, Astrodon in 2018, Meade en 2019 et Orion Telescopes & Binoculars en 2024. Malgré cette hécatombe, rassurez-vous leur marché a été récupéré par d'autres fabricants et revendeurs y compris en Europe qui proposent aujourd'hui des articles similaires. Dans cet article, les références de leurs produits ont été conservées pour mémoire (et pour le marché d'occasion en particulier).

Dans les régions urbaines et de banlieue, l'éclairage public est omniprésent et nuit à l'observation du ciel. De plus, parfois l'arrière-plan du fond du ciel est affecté par la présence de brume, d'humidité, de poussière présentes dans l'air, de la pleine Lune ou simplement parce que les objets se situent dans une zone brillante du ciel, en plein milieu de la Voie Lactée par exemple. Tous ces paramètres réduisent le contraste entre le sujet et le fond du ciel et ne facilitent en rien son observation.

Dans quelles conditions faut-il utiliser un filtre LPR ?

Dès qu'on souhaite photographier le ciel nocturne en présence de pollution lumineuse même faible, après la sélection du site d'observation, la première question qui vient à l'esprit est de savoir s'il faut ou non utiliser un filtre anti-pollution lumineuse, dit filtre LPR (Light Pollution Rejection). Vu le prix parfois élevé de l'accessoire (voir plus bas), c'est une question qui mérite un peu d'attention.

Avant d'investir dans un filtre LPR, il faut connaître le niveau de pollution lumineuse de votre site d'observation (voir page précédente) et évaluer si sa présence vous dérange et affecte votre activité soit d'observation à l'oculaire d'un instrument d'astronomie soit d'astrophotographie, le niveau d'exigence des deux activités étant différent.

En présence de pollution lumineuse modérée à forte - ≥ 5/9 sur l'échelle de Bortle décrite précédemment -, vous n'avez que deux choix possibles : vous déplacer vers un endroit plus sombre et moins pollué par la lumière ou vous achetez un filtre LPR.

 Dans ces endroits, la pollution lumineuse est déjà assez importante et gênante pour masquer les objets les plus pâles du ciel comme les étoiles de magnitude 5.5 et plus faibles, la Voie Lactée, la lumière zodiacale, la plupart des comètes, certains satellites artificiels et les objets les plus brillants du ciel profond comme certaines galaxies, nébulosités et amas globulaires (M31, M33, M42, M13, etc).

A télécharger : Spectre de l'éclairage public (.xls)

Spectre des sources lumineuses

Lampe au sodium basse pression

Lampe au sodium haute pression

Lampe aux vapeurs de mercure

Lampe à incandescence (2620 K)

LED blanche chaude (3000 K)

LED blanche froide (4000 K)

Lampe Fluocompacte (6000 K)

Coucher du Soleil (3614 K)

Lumière du jour à midi (5561 K)

Documents T.Lombry

En revanche, dans les zones rurales où le niveau de pollution lumineuse ne dépasse pas 4/9 sur l'échelle de Bortle et où la Voie Lactée est visible mais sans structure évidente, en général vous n'avez pas besoin de filtre LPR car soit son effet reste visuellement faible ou ne gâche en rien l'astrophotographie soit un simple traitement d'image permet éventuellement de la supprimer. Ceci dit le filtre LPR peut être un plus si certains secteurs du ciel situés assez bas sur l'horizon sont plus lumineux.

Quant aux campagnes reculées, les sites désertiques ou d'altitude particulièrement épargnés de tout éclairage où la pollution lumineuse tombe en dessous de 3/9 voire sous 2/9 sur l'échelle de Bortle (les zones bleues foncées et noires sur les cartes de pollution lumineuse), le ciel est tellement sombre et brillant d'étoiles que l'idée ne vous vient même pas d'utiliser un filtre LPR.

Enfin, pour l'observation visuelle du ciel nocturne à l'oeil nu dans les zones rurales (≤ 4/9 sur l'échelle de Bortle), l'usage d'un filtre LPR est inutile même si en théorie il peut augmenter le contraste des astres sur le fond du ciel. Mais entre la théorie et la perception physiologique de cette légère augmentationn du contraste, il y a matière à débat car cette sensation visuelle est très subtile et dépend des facultés visuelles de l'observateur (sa capacité à apprécier de petites différences de luminosité) ainsi que de son âge et des conditions d'observations (des facteurs qu'on trouve dans le calcul de l'équation personnelle).-

Principales raies d'émission des nébuleuses

dans le spectre visible

Principales raies d'émission

de l'éclairage artificiel (hors LED)

Hydrogène alpha

656.3 nm (R)

Mercure HP

404.7, 435.8 nm

546.1, 578.2 nm

Hydrogène bêta

486.1 nm (B)

Mercure BP

184, 254 nm (UVC)

Oxygène III

"Nébulium"

495.9 nm (V)

500.7 nm (V)

Sodium BP

(LPS)

589.0 nm (D2)

589.6 nm (D1)

Soufre II

671.6 nm (R)

673.1 nm (R)

Sodium HP

(HPS)

671 nm

819 nm 

Azote II

654.8 nm (R)

658.4 nm (R)

Sodium HP

(HPS, HID)

faibles : 405, 474, 536, 547, 569, 578, 590, 591, 593, 671 nm, ...

L'intérêt d'utiliser ou non un filtre LPR dépend de chacun et des conditions d'observation, en particulier du degré de pollution "tolérable", du sujet concerné et du système optique éventuellement utilisé. En effet, comme les aurores polaires ou les lueurs nocturnes, la pollution lumineuse est moins visible et moins colorée à l'oeil nu que sur les photographies en raison de la haute sensibilité des photocapteurs des APN sur un large spectre. Les attentes d'un astrophotographe averti en matière de qualité du ciel sont aussi très différentes d'un observateur ou d'un photographe lambda occasionnel.

Ceci dit, même l'astrophotographe exigeant peut être tolérant envers la pollution lumineuse en fonction du sujet qu'il photographie. Si son thème de prédilection sont les paysages et les photographies panoramiques de la Voie Lactée se profilant au-dessus de l'horizon, le halo formé par la pollution lumineuse remontant des villes et des routes proches risque d'être visible sur ses photos nocturnes prises au grand-angle. S'il juge que cela nuit à la qualité de ses photos - mais c'est très subjectif si on en juge par les commentaires sur les forums et les photos primées - dans ce cas l'usage d'un filtre LPR est conseillé.

Mais disons-le clairement, pour des photos générales du ciel où l'horizon est visible, même sur les hauteurs d'une banlieue ou d'une ville (on exclut les capitales et autres mégapoles vraiment trop lumineuses), la majorité des astrophotographes n'utilise pas de filtre LPR et fixe la balance de couleur de leur APN soit en mode automatique (AWB) ou manuellement entre 4500 et 5500 K, la première température ajoutant un peu plus de chaleur à la scène.

A consulter : Astronomical Filters Spectral Transmission, C.Buil

Réponse spectrale des filtres LPR communs

Effet d'un filtre LPR sur une lampe au sodium HP. On comprend pourquoi certains astrophotographes ne sont pas effrayés par la pollution lumineuse. Document IDA.

LPR Broadband (large bande)

LPR Narrowband (bande étroite)

O-III

H-beta

En revanche, plus d'un astrophotographe utilisent un APN modifié sensible jusqu'à 700 nm (cf. les APN convertis 4'Astro par Richard Galli de EOS for Astro) afin d'enregistrer les nébuleuses émettant en hydrogène alpha. Pour ceux qui photographient des paysages, la combinaison de lumière artificielle et de ciel étoilé est même une façon de créer une photo artistique où l'activité frénétique de la vie urbaine contraste ou se combine selon le point de vue avec la sérénité et le calme de la nature. C'est un sujet devenu à la mode depuis que les photocapteurs des APN sont devenus suffisamment performants pour photographier le ciel nocturne (c'est également le cas des smartphones de dernière génération bien que généralement les images du ciel manquent de saturation).

Courbes de transmission des filtres LPR Optolong L-Pro et Astronomik CLS testés en laboratoire par Nico Carver aka Nebula Photos au moyen d'une lampe à Quartz Tungsten-Halogène QTH10 de ThorLabs reliée à un spectromètre Thunderoptics et analysés par le logiciel Theremino v2.3. Les courbes théoriques transmises par le fabricant sont en jaune, les courbes pleines arc-en-ciel sont les résultats des tests en laboratoire. Les deux filtres bloquent les raies d'émission de l'éclairage artificiel au mercure et au sodium. Bien que le filtre CLS d'Astronomik présente une transmission plus régulière avec des pentes plus abruptes, l'Optolong L-Pro est un peu plus lumineux avec des couleurs plus naturelles car il slalome également entre les raies d'émission étroites entre 530 et 620 nm que la plupart des autres filtres bloquent. Il bloque aussi tout rayonnement au-delà de 700 nm, réduisant les halos rosés indésirables autour des étoiles brillantes.

Courbes de transmission théorique (fournies par les fabricants) de quelques filtres anti-pollution lumineuse (LPR) à large bande. Le filtre CLS d'Astronomik est adapté à l'observation visible mais en photo son spectre étendu dans l'infrarouge crée des auréoles disgracieuses autour des étoiles brillantes. Par conséquent le filtre CLS-CCD est plus utile sur les APN modifiés pour l'astro (jusqu'à la raie H-alpha).

En revanche, si l'astrophotographe préfère photographier le ciel profond au moyen d'une longue focale, en général la pollution lumineuse s'estompe à plus haute élévation et peut être invisible au téléobjectif ou sur les photos prises au foyer d'une lunette ou d'un télescope. De plus dans la majorité des cas, cet amateur est habile en traitement d'image et peut les corriger si nécessaire. Dans ce cas, l'usage d'un filtre LPR ne se justifie pas, et cet amateur a épargné entre ~50 et ~250 € voire le double selon le type de filtre.

Les filtres LPR visuels et photographiques

Comme les filtres colorés, certains filtres LPR sont plus adaptés aux observations visuelles et d'autres, plus sombres, avec des bandes passantes plus étroites, à la photographie (aux APN reflex, aux hybrides et aux caméras CCD).

Pour l'observation visuelle des nébuleuses pâles, vous pouvez utiliser un filtre Hβ. Le filtre Hα à bande large est utile pour les nébuleuses en émission et le filtre DeepSky (O III, S II, etc.) ou Minus-Violet pour observer toutes les nébuleuses de réflexion. Notons que les filtre DeepSky de Lumicon et le Skyglow d'Orion Telescopes & Binoculars conservent une transmission dans la partie rouge du spectre. Vous trouverez quelques données techniques supplémentaires sur ces filtres et d'autres dans l'article rédigé en anglais passant en revue quelques excellents filtres LPR.

A lire : Formats et types de filtres, Pierre Astro

Deep Sky filters, Ultrablock vs. UHC

Useful filters for viewing deep-sky objects, D.Kniseley

Les anciens modèles (années 1980-2010) de filtres anti-pollution lumineuse (LPR). A gauche, des filtres LPR de différentes bandes passantes vendus par Thousand Oaks Optical. Au centre, un filtre IR bloquant diélectrique de Baader Planetarium. A droite, le filtre Ultrablock d'Orion Telescopes & Binoculars en différentes tailles.

Pour l'astrophotographie, que vous souhaitiez créer une image LRGB ou une simple image N/B ou couleur, vous pouvez tirer parti de certains filtres à bande étroite comme ceux dédiés aux nébuleuses en émission.

Dans les endroits où l'éclairage public consiste encore en lampes à haute ou basse pression au mercure (vert) ou au sodium (orange), ainsi que nous l'expliquerons dans l'article comparant les filtres Ultrablock et UHC (en anglais), les meilleurs filtres LPR sont le Lumicon UHC (demi-bande passante de 25 nm) et l'Ultrablock d'Orion Telescopes & Binoculars qui sont des filtres LPR dit "Nebula" à bande étroite.

Parmi la nouvelle génération de filtres LPR (~2015), les filtres Optolong série L Duo et Triband offrent une demi-bande passante de seulement 7 nm dans 2 ou 3 raies spectrales :  le filtre L-eXtreme pour les raies Hα et O III et le filtre L-eNhance pour les raies Hβ, Hα et O III.

Quelques filtres sélectifs y compris LPR, CLS, bloquants et neutres proposés par l'entreprise chinoise Optolong. Fondée en 1999, elle ne fut vraiment connue des astronomes amateurs que depuis sa campagne marketing en 2015.

Mais en banlieue modérément polluée par la lumière et notamment pour la photographie de vaste champs stellaires dont la Voie Lactée, ces types de filtres (Optolong Serie-L et autre UHC) sont trop sélectifs (voir les courbes d'Astronomik). Dans ce cas, et surtout pour les APN modifiés pour l'astrophotographie, il est préférable d'utiliser le filtre CLS-CCD d'Astronomik qui filtre moins la lumière et ne modifie pas la balance des blancs (il affiche une transmission de 95% dans les raies Hβ et O III et 97% en Hα).

Notons qu'un filtre à bande large comme le CLS diminue voire bloque non seulement les raies d'émission de l'éclairage public au sodium et au mercure mais également celles des lueurs nocturnes vertes et rouges. Toutefois ce filtre présente une perte de transmission et des distorsions chromatiques sur les optiques les plus lumineuses (< f/3), raison pour laquelle on conseille d'utiliser le CLS sur des optiques ouvertes entre f/3 et f/15 même s'il donne encore d'excellents résultats sur les optiques ouvertes entre f/1.4 et f/2. De plus, étant donné que certains amateurs utilisent des sensibilités très élevées (3000-6400 ISO) pour réaliser des panoramas à basse résolution de la Voie Lactée, ces (légères) aberrations optiques sont noyées dans la faible résolution, dans le bruit électronique ou dans les défauts de guidage.

Mais à l'heure où la plupart des villes et villages remplacent leur éclairage urbain par des LED, les anciens filtres LPR "classiques" à bande large (DeepSky de Lumicon, SkyGlow d'Orion Telescopes & Binoculars, ... ) ou ceux à bande étroite (UHC de Lumicon, Ultrablock d'Orion Telescopes & Binoculars, ...) sont presque obsolètes en raison du spectre d'émission continu et étendu des LED. En théorie, ils sont justes encore un peu utiles pour augmenter le contraste des objets du ciel profond. Mais il y a un écart entre la théorie et l'impression visuelle physiologique. En présence d'une faible pollution lumineuse, cette petite amélioration du contraste sera peu sensible et surtout subjective car elle dépend de l'âge de l'observateur et des conditions d'observation (des facteurs qu'on retrouve dans le calcul de l'équation personnelle). Dans ces conditions, un filtre multi-bande est plus utile comme le filtre Astro Nightscape ou Astro Multispectra.

Dans cette même catégorie, le filtre Optolong L-Pro disponible en différents formats est très apprécié des astrophotographes car il "slalome" entre les raies d'émission pour éviter la pollution lumineuse mais il peut affecter la balance des blancs (d'où l'intérêt d'enregistrer vos photos au format RAW afin d'avoir le maximum de souplesse lors du traitement d'image).

Concernant le type et la taille des filtres LPR, ils sont disponibles en version Clip à placer dans l'ouverture de la chambre noire de l'APN (pour Canon, Pentax et certains APN Sony et Nikon), filtre oculaire standard (31.75 ou 50 mm), filtre externe à visser en divers diamètres de 28.5 à 77 mm ou encore en format carré de 50 ou 65 mm de côté et sans cadre (chez Astro-Shop ou Unterlinden).

Astronomik UHC

Astronomik UHC-E

Astronomik CLS-CCD

Optolong L-Pro M77

Astro Mutlispectra

Astronomik UHC 50 mm

Documents Astro-Shop et Optique Unterlinden.

Mais on n'a pas toujours le choix du format du filtre LPR. Un fabricant peut par exemple proposer un filtre CLS-CCD sous forme à clipser pour tous les modèles d'APN reflex Canon, mais seulement pour quelques modèles de Nikon et encore moins de modèles d'APN Pentax et Sony. L'intéressé devra donc se reporter sur un filtre externe à visser sur l'objectif qu'il payera très cher dans les grands diamètres, à condition qu'il existe. C'est une raison de plus qui explique pourquoi la plupart des astrophotographes amateurs utilisent un APN Canon, la marque supportant le plus vaste choix de filtres à clipser (qui viennent compléter les filtres externes) proposés à des prix parfois inférieurs aux modèles des marques concurrentes. Même les conversions H-alpha et infrarouge sont moins chères pour les Canon.

Mais malgré ces filtres LPR de nouvelle génération multi-bande, les LED ont encore le dernier mot; il restera toujours une pollution lumineuse résiduelle non filtrée que seul un éventuel traitement d'image pourra neutraliser.

Mis à part Astrodon, Lumicon et Orion Telescopes & Binoculars qui ont cessé leurs activités, les entreprises Astronomik, Baader Planetarium, Optolong et Thousand Oaks Optical proposent un large éventail de filtres LPR visuels et photographiques (APN et CCD) qu'on retrouve chez leurs représentants européens.

Parmi les revendeurs européens de filtres LPR, citons APM Telescopes, Astro-Shop, La Maison de l'Astronomie, Médas Instruments, Optique Unterlinden, Pierro Astro et Teleskop Express.

Concernant les prix, étant donné leur courbe de réponse très particulière et les procédés de fabrication qui font parfois appel à des revêtements diélectriques, les filtres LPR sont assez onéreux mais il varie fortement selon le fabricant, le modèle, ses dimensions et parfois d'une année à l'autre. 

Généralement le filtre à clipser est moins cher que son équivalent à visser sur l'objectif, le prix pouvant doubler pour les grands diamètres (par ex. 67 ou 77 mm)  et pour certaines montures d'APN (par exemple Pentax K).

En 2024, un filtre LPR circulaire à visser revenait entre ~52 € (Æ 31.75 mm ou 1.25" pour oculaire) et ~530 € (Æ 77 mm pour l'objectif d'un APN) et un modèle à clipser (clip filter) revenait entre ~110 et 249 € selon le fabricant et le modèle d'APN. 

Pour information, depuis 2018 le prix du filtre UHC à clipser sur un Canon EOS est passé à 219 € contre 159 € en 2015 !

Si quelques modèles de filtres d'entrée gamme restent à des prix raisonnables (mais il s'agit de produits chinois), certains filtres très appréciés ont vu leur prix exploser, la loi du marché l'emportant sur le budget des amateurs.

Y a-t-il un effet du diamètre et du grossissement sur la pollution lumineuse ?

Etant donné qu'un instrument d'astronomie est conçu pour capter la lumière, pollution lumineuse comprise, on a tendance à croire que le diamètre de l'instrument influence l'effet de la pollution lumineuse. Mais c'est un leurre et une rumeur ! En effet, c'est un faux débat probablement entretenu par la mauvaise interprétation d'études scientifiques.

Dans des conditions identiques, quelle que soit l'ouverture d'un instrument d'optique, si la pupille de sortie (le diamètre du cône lumineux sortant de l'oculaire) est identique, la quantité de lumière sera équivalente. Cela veut dire que contrairement à ce qu'on pourrait penser, dans ces conditions le petit télescope donnera un fond de ciel aussi brillant que celui observé à travers un grand télescope.

En d'autres termes, si la pupille de sortie reste constante, ce n'est pas l'augmentation du diamètre de l'instrument qui augmentera la brillance de la surface des objets étendus (nébuleuses, galaxies ou comètes) et accentuera leur contraste mais le grossissement comme indiqué dans le tableau ci-dessous (simulation effectuée avec le fichier EP.xls).

Instrument

Focale de

l'oculaire

Diamètre de la

pupille de sortie

Grossissement

100 mm f/10

40 mm

4.0 mm

25 x

200 mm f/10

40 mm

4.0 mm

50 x

200 mm f/10

80 mm

8.0 mm

25 x

L'explication est la suivante. L'augmentation de lumière croît comme le carré du diamètre (un télescope de 200 mm d'ouverture recueille 4 fois plus de lumière qu'un instrument de 100 mm) et la brillance de surface d'un objet étendu varie en fonction de l'inverse du carré du grossissement et est directement proportionnelle à la quantité de lumière reçue. Ainsi, en utilisant un instrument de plus grand diamètre, le fait d'augmenter le grossissement permet de maintenir la pupille de sortie constante tout en disposant d'un collecteur de lumière plus important. C'est pourquoi les objets étendus paraîtront plus brillants quelles que soient les conditions atmosphériques. Le fait qu'il y ait ou non de la pollution n'y change rien. L'augmentation de contraste apparaîtra surtout dans l'observation des amas d'étoiles et dans une moindre mesure sur les surfaces planétaires.

Ce sont les lunettes astronomiques qui présentent le contraste le plus élevé malgré leur diamètre inférieur, du fait qu'elle sont libres de toute obstruction (un télescope Schmidt-Cassegrain tel le Celestron Nexstar 5 présente une obstruction pouvant atteindre 40% du diamètre). On y reviendra en détails à propos de la qualité des optiques.

Enfin, certains observateurs évoquent la sensibilité des cellules de la rétine et de l'interprétation du cerveau pour expliquer ces différences de contraste en fonction du grossissement (les cellules recevant plus ou moins de lumière). Ici aussi la logique est plus forte que les pseudo-arguments des amateurs. Par définition, le champ d'un oculaire étant fixe, quel que soit le grossissement utilisé la taille de l'image du fond du ciel demeure inchangée. C'est pourquoi on dit que le grossissement est directement proportionnel à l'ouverture de l'instrument, la pupille de sortie demeurant constante (voir le tableau). Dans ces conditions on peut donc en déduire que le fond du ciel présentera une intensité constante parce que la lumière sera répartie également sur les cellules de la rétine. C'est en revanche la distribution des cônes et des bâtonnets sur la rétine qui modifiera l'aspect des objets en fonction de leur chromaticité, ceci étant principalement valable pour des objets ponctuels.

A gauche, le site d'observation choisi par le talentueux Robert Gendler. A l'avant-plan son télescope Ritchey-Chrétien Cassegrain de 317 mm f/9 construit par Optical Guidance Systems. A droite, le ciel d'Orion photographié par Matt Aust sans et avec filtre CLS d'Astronomik fixé dans un APN Canon EOS 6D muni d'un objectif Sigma ART 24-35 mm à 24 mm f/2.8, exposition de 153 s à 800 ISO + 212 s pour l'avant-plan).

En conclusion, même si vous habitez dans un endroit pollué par la lumière, n'hésitez pas à sortir votre télescoposaure à l'image de l'installation de Robert Gendler présenté ci-dessus à gauche.

En revanche, il faut bien être conscient que l'effet de la turbulence, toujours très présente dans les agglomérations, peut être en défaveur d'un télescope de plus de 400 mm d'ouverture. En effet, les cellules convectives et les courants turbulents ont une dimension variant entre 50 cm et 1 mètre. Le faible diamètre et la faible résolution des petits instruments masquent la détérioration des conditions d'observation qu'un observateur averti discernera à forts grossissements dans un grand télescope. Mais ceci est une autre histoire qui fait l'objet d'un article spécial consacré au choix d'un site astronomique.

Finalement si la pollution lumineuse est trop importante et que souhaitez vraiment observer ou photographier le ciel dans les meilleures conditions, pourquoi ne pas vous déplacer vers des cieux plus cléments ? Ne fut-ce que pendant les vacances, faites-vous plaisir et choisissez un lieu désertique ou d'altitude éloigné de toute agglomération.

A ce sujet, il existe des "Astro-Inn" spécialisés dans ce type de vacances et équipés d'instruments de large diamètre et des dernières technologies. Là, dans le Val d'Aoste, dans les Pyrénées, à Ténériffe, au Chili, dans une île de l'océan Indien ou du Pacifique ou encore dans le désert, les étoiles de magnitude 6 brillent comme des diamants sur le velours noir du ciel. C'est un merveilleux spectacle que vous n'oublierez jamais...

Dernier chapitre

Les méfaits du passage des satellites

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