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SETI à la recherche d'objets extraterrestres artificiels

Un jour, au petit matin, quatre sondes d'exploration extraterrestres se mirent en orbite d'insertion autour de la Terre.

Déterminer la distance d'un signal (II)

Qu'entend-on par signal "proche" ou "puissant" ? Comment savoir si un signal suspect provient du système solaire ou de l'espace interstellaire ?

La question de l'énergie d'un signal est importante dans la recherche SETI et autre SETV. Un radiotélescope est capable d'émettre un signal à 25000 a.l. ou d'écouter toutes les étoiles dans un rayon de 100 ou de 1000 a.l. Avec l'antenne de 70 m de Goldstone une sonde spatiale comme Voyager est encore détectable à deux fois la distance de Pluton où son signal atteint à peine 10-21 watt. C'est une puissance suffisante pour mettre en alerte les protocoles SETI.

Si nous sommes confinés au spectre micro-onde pour la recherche SETV, l'argument consiste à dire que les signaux extraterrestres ne seront pas très puissants car l'énergie consomme beaucoup de ressources et donc de l'argent alors que le résultat est incertain. Une autre raison est que les éventuels extraterrestres ne savent pas que nous existons (cf. le paradoxe de Fermi) car nos "fuites" électromagnétiques ont a peine atteint 70 a.l. (en l'an 2000), un volume qui ne contient qu'environ 4500 systèmes stellaires et aucune planète réellement habitable (toutes subissent les éruptions ionisantes de leur étoile). Compte tenu de la rareté des exoplanères réellement propices à la vie, on estime que la plus proche éventuelle civilisation serait située beaucoup plus loin dans la Galaxie, au-delà de 1000 années-lumière.

Face à  ette réalité, dans une attitude conservatrice et qui s'impose d'elle-même, la recherche SETI dans l'espace proche se limite traditionnellement à l'intérieur du système solaire.

Parfois, durant les programmes de veille SETI, des objets du système solaire se trouvaient dans le faisceau principal de l'antenne ou dans les lobes latéraux. Avec un seul radiotélescope aux capacité directionnelles limitées, il est souvent difficile de connaître le décalage Doppler ou la forme gaussienne de l'énergie détectée, et donc de savoir si le signal est émis de l'intérieur ou de l'extérieur du système solaire. Durant les 5 années d'existence du projet META-I de l'Université d'Harvard, 37 candidats furent identifiés dépassant la sensibilité moyenne de 1.7x10-23 W/m2 du récepteur[2]. Aucun de ces signaux ne fut confirmé lors des observations ultérieures. En 1989 deux parmi ces candidats furent détectés alors que l'antenne était pointée près de Saturne et de ses lunes, tout près de la position de la sonde Voyager II[3]. Durant la réobservation de ces deux signaux, Saturne s'était déplacée dans le ciel et ne fut plus aux coordonnées indiquées lorsque l'antenne fut mise en position. Il n'est pas encore prouvé que les chercheurs ont eut conscience que le Saturne se trouvait dans le faisceau de l'antenne durant les observations.

Rétrospectivement, ils auraient dû se rendre compte de leur erreur en passant en mode drift-scan (filé) et en cherchant à déterminer si les émissions se déplaçaient rapidement par rapport au fond stellaire ou si elles accusaient une effet Doppler inhabituel.

L'analyse du décalage Doppler d'un signal est principalement utilisée pour déterminer le mouvement relatif (linéaire ou rotatif) d'un objet. En recherche SETI traditionnelle, les signaux détectés sont compensés pour différents cadres de référence inertiels (CMB, GBC et LSR) qui ne s'appliquent pas aux corps du système solaire. Ces compensations, si elles sont ajoutées à des signaux émis depuis le système solaire feront qu'ils seront rejetés par le système car leur déplacement n'obéit pas au mouvement sidéral que l'on attend d'un corps situé à plusieurs années-lumière.

A ce propos, tous les corps du système solaire peuvent faire l'objet d'un suivi micro-onde SETI mais lorsqu'ils sont dans le faisceau de l'antenne, leurs signaux doivent être traités différemment des émissions stellaires pour déterminer s'ils se situent tout près ou très loin de la Terre.

La seule contrainte observationnelle est la position géocentrique des corps par rapport au Soleil. A moins de 3° du Soleil le bruit thermique du disque solaire domine les faibles émissions qui peuvent émaner d'une planète et le rapport signal/bruit devint inacceptable. Mercure par exemple sera moins étudiée que Jupiter ou même que Pluton dont l'orbite est très excentrique.

La seconde contrainte est technique et concerne la durée durant laquelle l'astre est visible depuis deux antennes. La vérification indépendante d'un signal requiert que deux ou plusieurs antennes détectent le même signal aux mêmes coordonnées astronomiques.

Pour cela Arecibo est une d'une grande utilité pour vérifier les signaux détectés avec l'ATA. Toutefois en raison de sa latitude beaucoup plus basse (18°N contre 35°N), l'antenne d'Arecibo ne peut pas observer certains corps lorsque ATA peut le faire et vice versa. Si un signal est détecté avec l'ATA alors qu'Arecibo ne peut pas le confirmer, cela crée un problème. Dans ce cas, d'autres radiotélescopes doivent être sollicités pour vérifier la concordance du signal.

Le protocole de recherche S3ETI

Quels genres de signaux seront recherchés et quelle est la probabilité d'en découvrir ? Les adaptes de la recherche S3ETI vont rechercher toutes les objets pouvant signaler une sonde spatiale, des machines, des vaisseaux et des phénomènes extraterrestres suspects présents dans l'orbite terrestre ou près de la Terre. Précisons pour éviter toute ambiguïté qu'il n'y a aucune raison d'assumer qu'une sonde robotisée vienne visiter le système solaire avec l'intention de communiquer avec la Terre. Cette stratégie vise donc toute émission qu'elle soit fortuite ou jugée intentionnelle. 

Les responsables de SETI soulignent qu'un signal par micro-ondes ou faisceau optique peut provenir de distances interstellaires et ne doit pas nécessairement être émis à partir d'une sonde spatiale. Si cela s'avère exact, les signaux intentionnels seront encore moins probables que les fuites involontaires...

Si des signaux intentionnels sont émis ils peuvent ne pas nous être destinés mais plutôt signaler quelqu'un ou quelque chose à l'extérieur du système solaire. Si des sondes robots évoluées transmettent des signaux aux longueurs d'ondes infrarouge-visible-UV sous forme d'impulsions laser, nous pourrions détecter les fuites émises par les amplificateurs micro-ondes. Dans ce cas si une émission dirigée constituerait une grande découverte, les fuites sont plus probables.

Bien sûr dans le protocole de détection il faut inclure un système d'analyse des erreurs pour exclure toute fuite d'origine terrestre irradiée par un système proche pour ne pas retomber dans les fausses alertes du passé comme le fameux signal Wow! de 1977.

Vue aérienne de l'installation d'Arecibo (avant qu'elle soit endommagée en 2013 et restaurée en 2018). Document NAIC.

Nous avons vu à propos des communications avec Mars que le bruit terrestre et les interférences affectent toutes les recherches SETI en micro-ondes. Le programme S3ETI doit prendre en considération les mêmes seuils critiques et utiliser les mêmes techniques de filtrage que celles utilisées par SETI et proposées pour l'ATA. Ces interférences peuvent même provenir de nos propres sondes spatiales, telle Cassini ou celles explorant les comètes ou les astéroïdes.

Nous ne devons pas non plus oublier les pulsars qui sont à la fois périodiques et émettent fortement dans le spectre micro-onde. Si des pulsations périodiques sont détectées en observant un objet du système solaire, elles devront être confrontées aux périodes des centaines de pulsars connus. Il devrait être assez simple de déterminer si l'objet est un nouveau pulsar dans la mesure où son signal suivra le mouvement sidéral. Une autre analyse consiste à examiner la polarisation du signal. Une émission naturelle devrait présenter des polarisations aléatoires et non cohérentes. La détection d'un signal statistiquement plus énergétique dans un plan de polarisation signifierait qu'il provient d'une source non naturelle.

Enfin, il faut éviter de tomber sur les constellations de satellites en orbite autour de la Terre. Certains transiteront sans aucun doute devant le lobe principal de l'antenne. Ces interférences affectent tant les recherches d'objets proches que lointain et doivent être traités de la même manière et rejetés.

Ces signaux parasites ont un profil connu, on connaît leur porteuse et leurs bandes latérales et ils peuvent donc être facilement éliminés le cas échéant par traitement numérique des signaux. Des éruptions de bruits peuvent aussi apparaître pendant que les chercheurs analysent les signaux des planètes géantes. Ces parasites naturels peuvent être provoqués par les impacts de petits astéroïdes ou de comètes. Les astronomes doivent les reconnaître pour les discriminer d'un éventuel signal artificiel. Rechercher une périodicité dans les bruits est l'une des manières de déterminer si un signal est artificiel, méthode qui doit immédiatement être suivie d'une identification avec des interférences terrestres artificielles (RFI).

En élaborant ce projet, il faut bien se dire que si une sonde extraterrestre évoluée veut dialoguer avec nous, elle utilisera des détecteurs adaptés à sa mission. Elle ne fera pas comme le sonde Galileo durant son vol vers Jupiter qui fut au début de sa mission incapable de détecter si la Terre était hospitalière ou non d'un point de vue chimique, parce qu'à courte distance ses détecteurs étaient saturés car ils étaient en fait prévus pour étudier Jupiter. La sonde Galileo était conçue pour observer une certaine cible et n'était pas calibrée pour observer autre chose, comme un détecteur dans une chambre à bulle est capable de détecter des électrons mais il ne mettra jamais en évidence une particule neutre. Mais ce n'est pas autant qu'il faut en conclure que les particules neutres n'existent pas (par exemple les neutrinos) ou que la vie n'existe pas sur Terre...

Le fait que l'ATA soit utilisé pour la recherche SETI interstellaire ne constitue par contre pas un obstacle à la recherche SETI dans le système solaire. En effet, durant la recherche SETI certaines cibles du système solaire peuvent être rejetées lorsque les antennes sont utilisées au maximum de leur sensibilité.

La cible la plus évidente à éviter est bien sûr le Soleil. A part qu'il sert de source de "bruit chaud" pour calibrer les systèmes, il réduit la sensibilité du système de réception et cela devrait être évité.

La Lune et Jupiter sont également des sources de bruit connues. En observant ces cibles on s'attend à une certaine dégradation de la température de bruit, mais pas suffisamment pour saturer le système de détection.

En outre, il est possible d'annuler certaines sources de bruits ponctuelles en configurant certaines antennes en opposition de phase. Les sources non thermiques comme Cassiopeia A, la nébuleuse du Crabe, M87 et Cygnus A peut, si nécessaire, être annulées durant les observations, lorsqu'elles transitent devant les antennes pendant que les chercheurs visent des régions bien précises du système solaire.

L'avenir

Scot Stride durant la 3e conférence OSETI en 2001. Document SETI League.

Scot Stride considère que "Des radiotélescopes comme l'ATA sont des outils merveilleux parce qu'ils peuvent être configurés afin de rejeter les sources de bruit connues durant les recherches SETI dans le système solaire. Après la construction de l'ATA, à partir de 2010 le "Square Kilometer Array" (SKA) pourra également servir la recherche SETI traditionnelle ainsi que la recherche SETI dans le système solaire. Au-delà il est difficile d'envisager concrètement l'avenir."

"Dans l'immédiat nous allons soumettre des propositions techniques aux responsables de l'ATA afin qu'ils acceptent le projet S3ETI et nous garantissent du temps d'observation, soit en mode primaire soit en parallèle sur d'autres programmes. Si nous gagnons du temps d'observation sur l'ATA, cela nous ouvrira des portes pour mener des stratégies de recherches alternatives dont SETI a véritablement besoin. Nous avons encore beaucoup à apprendre du fonctionnement d'ATA et sur l'implémentation des expériences S3ETI."

"La recherche SETI dans le système solaire ne peut évoluer que si nous acquérons de l'expérience pratique en réalisant de la recherche appliquée. Si SETI ne peut développer ces alternatives en raison du conservatisme qui entoure cette idée, nous ne saurons jamais si des intelligences extraterrestres ont où non déjà découvert notre système solaire."

"Actuellement la recherche S3ETI n'a pas de concurrent. Lorsque l'ATA sera opérationnel, il sera capable d'observer 17000 systèmes stellaires habitables jusqu'à 300 parsecs (978 a.l.) de la Terre. Si nous détectons un signal à cette distance, il ne faut pas oublié qu'il aura été émis il y a environ mille ans, vers l'an 1000 de notre calendrier..."

En 2023, où en sommes-nous ? Le projet S3ETI n'a toujours pas séduit les chercheurs SETI même si tous reconnaissent qu'une civilisation extraterrestre avancée peut utiliser d'autres moyens que les ondes radioélectriques pour communiquer et explorer son environnement. Comme nous l'avons expliqué, le projet ATA est opérationnel depuis 2007 tandis que le SKA devrait être mis en service vers 2027.

Le premier projet de l'Institut SETI consista à rechercher des transmissions radio à bande étroite qui trahiraient l'existence d'une vie extraterrestre technologiquement avancée ailleurs dans la Galaxie. Aujourd'hui, l'Institut SETI utilise l'ATA dans un programme à long terme pour étudier des dizaines de milliers d'étoiles naines rouges, susceptible d'être des lieux de prédilection pour la recherche d'une vie intelligente. L'Institut utilise également l'ATA pour examiner les exoplanètes nouvellement découvertes qui se trouvent dans la zone habitable de leur étoile. Il y aura probablement des dizaines de milliards d'exoplanètes de ce type dans notre Galaxie. Enfin, l'Institut développe un système relativement peu coûteux pour faire du SETI optique, qui recherche des flashs laser que d'autres sociétés pourraient utiliser pour signaler leur présence.

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[2] Horowitz et Sagan, "Five years of Project META - An all-sky narrow-band radio search for extraterrestrial signals", Astrophysical Journal, Part 1, vol. 415, no.1, pp218-235, 1993.

[3] Le 8 février 1989, Paul Horowitz et Carl Sagan ont probablement confondu les émissions de la sonde Voyager II avec un signal extraterrestre, les deux signaux se trouvant à 0.6° d'écart, mais rien ne permettait de calculer la distance exacte du signal extraterrestre. Des recherches ultérieures indiquent que le signal émis par la sonde Voyager vers la Terre se trouvait sur la même trajectoire que Saturne. Il s'avère que le satellite Japet a réfléchi le signal de la sonde spatiale vers la Terre. En fait le satellite de Saturne se trouvait à moins de 0.25° du signal extraterrestre, d'où la confusion.


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