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Les volcans

L'explorateur Sam Cossman au bord du lac de lave du volcan du Mt Marum aux Vanuatu en 2014. Cossman porte une combinaison ignifugée recouverte d'aluminium lui permettant de supporter quelques minutes une température supérieure à 1000°C et des projections de plus de 2000°C. Lors de cette photo, la lave bouillonnante rayonnait une chaleur supérieure à 700°C et libérait du dioxyde de soufre qui forma de l'acide sulfurique au contact de la vapeur d'eau.

Caractéristiques des laves (II)

Nous allons décrire les différents types de laves, leur comportement et leurs formes. Nous verrons ensuite leurs origines et leur composition qui nous permettront de mieux comprendre la stucture et l'aspect des roches qu'on retrouve partout sur la planète.

Définition

La lave (en sachant qu'il en existe de différents types) consiste en roche fondue émise par un volcan durant une éruption, qu'elle soit à l'état liquide (visqueuse) ou solide (roche ignée ou magmatique). La lave provient du manteau terrestre et se forme grâce à l'énergie thermique libérée par les réactions radioactives et notamment la décroissance des éléments en produits plus stables.

Au sortir d'un volcan, la lave présente une température d'environ 700 à 1200°C (parfois 1650°C) et est très visqueuse, c'est-à-dire qu'elle offre une forte résistance à la déformation, en particulier à la pression et aux contraintes (ses propriétés peuvent être comparées à celles d'un sirop épais ou du miel qui est plus visqueux que l'eau). Cette viscosité dépend de la composition, de la température et de l'acidité de la lave. Ainsi la viscosité diminue (la lave devient plus liquide) lorsque la température augmente ou lorsque le milieu devient alcalin (moins acide). Elle augmente également fortement lorsque la lave (ou le magma) contient plus de 40% en volume de cristaux.

En raison de sa viscosité 100000 fois plus élevée que celle de l'eau (100 Pa.s pour la lave contre 10 Pa.s pour le miel et ~10-3 Pa.s pour l'eau à 20°C), la lave met également longtemps pour se refroidir.

Le choc thermique au contact de l'air empêche la lave de former un réseau cristallin comme la plupart des roches et sa structure devient amorphe comme celle du verre, d'où le nom de verre volcanique donné à l'obscidienne, cette roche noire brillante très commune par exemple en Amérique centrale et du sud.

Rappleons qu'on peut facilement évaluer la température de la lave en observant sa couleur : jaune (>1000°C), orange (800-900°C), rouge carmin (600-700°C), rouge foncé (400-500°C), etc. Pour qu'elle brille à la lumière du jour elle doit avoir au moins 475°C.

Les différents types de laves

Les laves de l'écorce terrestre contiennent principalement de la silice (SiO2) dont la proportion varie en fonction du type de volcan, du gisement et de paramètres physiques sur lesquels nous reviendrons. Il y a d'une part les laves pauvres en silice (45-51%) émises par les volcans effusifs et les laves riches en silice (> 65%) produites par les volcans explosifs. On parle de lave ou de magma intermédiaire lorsque la teneur en silice varie entre 52-65%. A ce niveau d'analyse, on peut indistinctement parler de lave ou de roche.

- Les laves de silice sont des roches ignées que l'on classe en quatre types en fonction de leur composition chimique : 

- la lave felsique (concaténation de feldspath et silice) comme la rhyolite et la dacite se forme à partir de lave très visqueuse dans des coulées ou des domes portées entre 650-750°C. Elle est associée à des dépôts pyroclastiques qu'on peut retrouver jusqu'à plusieurs dizaines de kilomètres du volcan si la lave est très chaude (>950°C). Cette lave contient une grande proportion de silicium, d'aluminium, de potassium, de sodium et de calcium formant des macromolécules (liquide polymérisé). Après son refroidissement, elle forme une roche riche en feldspath (plagioclases calciques) et en quartz contenant également de la muscovite et de l'orthose.

A voir : Yasur Volcano 2019, hshdude

Lava Fountains from Bardarbunga Volcano, 2014

A gauche, spectaculaire éruption strombolienne de lave fluide du stratovolcan Bárdarbunga en Islande en septembre 2014. Il fait partie d'un système volcanique couvrant environ 190x25 km et se situe exactement au sommet d'un point chaud. Il est actif depuis plus de 6000 ans et produit principalement des basaltes et de la rhyolite. A droite, éruption sur le volcan Yasur au Vanuatu, en 2019. Ce volcan est actif depuis 1774. Documents Orvar Atli Thorgeirsson/Barcroft Media et hshdude.

- la lave intermédiaire ou andésique contient moins de silicium et d'aluminium et plus de magnésium et de fer. Typique des volcans andins, elle se forme entre 750-950°C. Au-delà, les macromolécules se brisent et la lave devient plus fluide et à tendance à former des cristaux géants (1-100 mm de diamètre) appelés phénocristaux.

- la lave mafique (concaténation de magnésium et férique) présente une grande teneur en fer et magnésium (des minéraux ferromagnésiens) et contient peu d'aluminium et de silice. Elle est généralement produite à des températures supérieures à 950°C. En raison des hautes températures, la lave est relativement peu visqueuse et faiblement polymérisée. De ce fait, elle forme des phénocristaux. Cette lave très coulante est produite par les volcans boucliers et se refroidit lentement en parcourant de grandes distances, formant d'immenses coulées et des champs basaltiques sombres s'étendant sur plusieurs kilomètres. Parmi les plus connus citons les trapps du Deccan en Inde, les trapps de Sibérie, la Coulée de Moïse (Moses Coulee) dans l'État de Washington aux Etats-Unis et le Cap d'Ours à l'ouest du Québec au Canada.

Les principales roches mafiques sont les basaltes et les gabbros. Ils contiennent des minéraux d'olivine, de pyroxène, d'amphibole, de biotite et parfois quelques pourcents de magnétite. Ces basaltes constituent également le principal constituant de la croûte océanique et des croûtes des planètes telluriques (Mercure, Vénus et Mars).

A voir : 42 photos de l'Etna prises entre 2002-2014, Lovethepics

A gauche, l'éruption de l'Etna le 11 novembre 2006. Ce stratovolcan présente une caldéra et un cône pyroclastique et émet principalement des dérivés de basaltes et de la trachy-andésite, cette dernière étant typique des zones de subduction. A droite, l'éruption du Stromboli en juin 2014. Documents Wim Malfait et Salvatore Allegra/AP.

- la lave ultramafique comme la komatiite et les autres roches hautement magnésiennes contiennent peu de silice et entre 18 et 35% d'oxyde de magnésium (MgO), soit trois fois plus que les basaltes. Cette lave s'est formée à plus de 1600°C dans la manteau. A de si haute température, la lave est aussi fluide que l'eau et les minéraux ne se sont pas polymérisés. Les roches de ce type contiennent suffisamment de minerai de nickel (sulfure de nickel, NiS) pour qu'on l'exploite à des fins industrielles (l'industrie produit ~1 million de tonnes de nickel par an contre 26000 tonnes par les volcans et l'érosion).

La komatiite présente une structure unique appelée spinifex constituée de lamelles ou baguettes de cristaux d'olivine et/ou de pyroxène comme on le voit en bas de page à droite.

La plupart des laves de ce type ont moins de 2.5 milliards d'années (fin du Précambien ou Protérozoïque). Il s'agit de komatiite métamorphique. Le gisement le plus jeune se situe sur l'île Gorgona en Colombie et est âgé d'environ 541 millions d'années.

A gauche, le lac de lave du Erta Ale en Éthiopie. A droite, épanchements du lac de lave du Nyiragongo en RDC en juin 2010. Documents D.R. et Olivier Grunewald.

Il faut ajouter des laves de compositions inhabituelles comme la carbonatite et la natrocarbonatite du stratovolcan Ol Doinyo Lengaï situé dans la vallée du Rift en Tanzanie. Sa lave contient en majorité du carbonate de sodium et très peu de silice (<1%). Sa température est la plus basse au monde avec seulement 500 à 550°C. Cette lave est très fluide. Comme illustré ci-dessous, sa lave est de couleur noire lorsqu'elle est en fusion et devient blanche en se refroidissant et que ses minéraux s'hydratent au contact de l'air.

Citons également les laves d'oxyde de fer (Kiruna, El Laco), les laves soufrées (Lastarria) formées à très basses températures (jusqu'à seulement 113°C) et les laves néphélinites (foïdites) à base d'olivine qui proviennent des régions les plus profondes du manteau et qu'on trouve principalement dans le rift est-africain (Nyiragongo) et des formations anciennes de même nature.

A gauche, éruption de lave natrocarbonite en août 2003 du stratovolcan Ol Doinyo Lengaï situé en Tanzanie. Au centre, effusion de lave carbonatite à 500°C de l'Ol Doinyo Lengaï en 2003. A droite, des dépôts de lave de natrocarbonite blanche de l'Ol Doinyo Lengaï en août 2001. Documents Tom Pfeiffer/Volcano Discovery, Cartsen Peter/National Geographic et Thomas Kraft/CC BY-SA 2.0.

Comportement et forme des laves

En s'épanchant sur le flanc des volcans, les laves présentent différents aspects; certains sont lisses, d'autres rugueuses ou forment des plis cordés. Les chercheurs n'ont pas encore compris ce qui détermine un aspect plutôt qu'un autre si ce n'est qu'il semble lié au type d'activité éruptive et donc à la composition des laves.

- Laves très visqueuses :

Cette lave basaltique riche en silice atteint une température de 1200°C sur la bouche du cratère et s'écoule lentement (20 km/h). Elle piège énormément de gaz formant des vésicules (bulles). Elle peut présenter un aspect rugueux à l'image des laves aa ('a'a) d'Hawaï, de La Palma ou du Piton de la Fournaise sur l'île de la Réunion qui forment des reliefs irréguliers et chaotiques pratiquement infranchissables. Ces types de lave sont corrélés avec les éruptions explosives ou phréatiques. Comme on le voit ci-dessous à la Réunion, c'est ce type de lave qui forme des murs de plusieurs mètres de haut qui détruisent tout sur leur passage. Ce type de lave se déplaçant très lentement, elle est moins dangereuse que les laves fluides mais étant donné sa masse, elle peut fumer pendant plusieurs années après l'éruption.

A gauche, flot de lave 'a'a (très visqueuse) durant l'éruption du Piton de la Fournaise sur l'île de la Réunion le 2 avril 2007 coupant la route RN2. Le volcan qui fut actif pendant 27 jours émis également du dioxyde de soufre et les pluies furent acides, incommodant les habitants. Par endroit, la lave très chaude et très épaisse a fumé pendant 2 ans. A droite, une coulée de laves pahoehoe (peu visqueuse) durant l'éruption du Kilauea à Hawaï en août 1994. Documents anonyme et Paul Kimberly/Smithsonian Institution.

- Laves peu visqueuses :

Très fluides, elle peuvent jaillir du volcan sous forme de rivière de lave (Hawaï) ou de fontaine de lave (Islande). Elle peut également s'accumuler et former un lac de lave (Hawaï, etc.). Cette lave est composée généralement d'au moins 55% de silice et se compose de grains fins (< 1 mm de diamètre) de nature basaltique, andésitique, téphritique, etc. En raison de sa faible viscosité, cette lave libère des gaz en permanence et forme de plus grands blocs que la lava aa. 

Les coulées fluides qui se refroidissent au contact de l'air et contenant peu de gaz forment une surface plutôt lisse appelée lave pahoehoe (Hawaï, La Palma, etc.) formée de grands lobes tandis que les laves refroidies par l'eau forment des coussins ou pillows qu'on retrouve surtout sur les versants submergés des formations volcaniques et à l'air libre notamment à Boatman Harbour en Nouvelle Zélande comme on le voit ci-dessous à gauche.

La lave pahoehoe récente présente une couleur argentée et un aspect brillant en raison de la recristallisation du verre volcanique pendant une phase d'hydratation ou d'oxydation.

L'activité des volcans est généralement calme avec peu d'émissions pyroclastiques. Ils ont également tendance à former des boucliers étendus plutôt que des cônes, ce qui explique l'étendue des champs volcaniques hawaïens dans lesquels des visiteurs se sont déjà perdus pendant trois jours.

A gauche, le stratovolcan Antisana situé dans la Cordillère Royale, à 50 km au sud-est de Quitya, en Equateur a le sommet enneigé et est couvert de glaciers. Sur ses flancs on observe de monumentales coulées de lave visqueuse d'origine fissurale appelées "Antisanilla" et "Potrerillos" qui ont bloqué les rivières Isco et Papallacta, formant ainsi respectivement les lagunes de Secas et Papallacta. La coulée de lave "Antisanilla" survenue en 1728 s'étend sur 11 km et mesure jusqu'à 2 km de large. Au centre, accumulation de coussins de lave (pillows) à Boatman Harbour en Nouvelle Zélande entre lesquels des sédiments (roches calcaires) provenant d'un ancien fond marin se sont incrustés. A droite, des laves pahoehoe se solidifiant en formant des laves cordées à La Palma aux îles Canaries. Documents Jorge Anhalzer via Cuenca 4Ríos, M.Casty et Shutterstock.

Comme on le voit ci-dessus à droite, les laves pahoehoe peuvent également former des laves cordées en se refroidissant, formant des plis et des bourrelets successifs.

- Les laves prismées :

Elles forment des colonnes hexagonales perpendiculairement à la face de refroidissement. La forme hexagonale est due au fait qu'il s'agit de la forme géométrique présentant le plus petit périmètre et donc requérant le minimum d'énergie. En effet, lorsque le magma remonte du manteau, il s'immise dans les matières et fissures offrant la plus faible résistance. Les colonnes de basalte se forment par refroidissement soit près de la base d'une coulée soit dans un lac de lave qui n'est plus alimenté en magma.

Elles peuvent former des structures en éventail comme la rosette de lave "Margarita de Piedras" visible à Ténérife dans les îles Canaries qui est le sommet d'un tunnel volcanique. Parfois elles forment des structures monumentales comme les orgues basaltiques d'Usson dans le Puys de Dôme ou ceux de Coubon en Haute-Loire en France, la Gorge de Garni en Arménie ou les extraordinaires cascades de Litlanesfoss et de Skaftafell (ci-dessous au centre) en Islande.

Une célèbre formation de basalte est la fameuse "Chaussée des Géants" (Giant's Causeway) située à Bushmills sur la côte nord de l'Irlande du Nord présentée ci-dessous à droite. Cette formation découverte en 1693 s'étend sur 4.8 km (cf. cette carte interactive) et est formée d'environ 40000 colonnes basaltiques verticales juxtaposées dont la disposition varie entre l'allée de pavés, le monticule et la falaise. Ces colonnes basaltiques sont surgies il y a 50 à 60 millions d'années (Paléocène). Le site est classé depuis 1986 au patrimoine mondial par l'UNESCO.

A gauche, la rosette de lave "Margarita de Piedras" située à La Orotova, au centre de l'île de Ténérife, aux Canaries. Elle mesure environ 5 m de hauteur. Au centre, les cascades de basalte du Parc National de Skaftafell en Islande. A droite, un aperçu de la "Chaussée des Géants" qui s'étend sur 4.8 km en Irlande du Nord photographiée par Felipe Pitta.

Citons également la très étonnante île de Staffa présentée ci-dessous située à 10 km de l"île de Mull à l'ouest de l'Écosse et faisant partie des Hébrides intérieures où se trouve la célèbre grotte de Fingal (Fingal's cave). L'île s'est formée il y en environ 60 millions d'années et émergea suite à la baisse du niveau de la mer.

Connue depuis l'époque des Vikings, elle mesure 0.5 x 1 km. Elle repose sur une couche de tuf entièrement recouverte par des piliers ou orgues de basalte hexagonaux s'élevant en étages jusqu'à 42 m de hauteur. C'est du basalte tertiaire noir à grains fins qui est par endroit recouvert d'une troisième couche de lave basaltique sans structure cristalline.

Son aspect inattendu et surréaliste impressionna plusieurs romanciers dont Jules Verne qui s'en inspira pour son roman "Le Rayon vert". Par contraste avec ces falaises, le sommet de l'île forme une vaste étendue plate couverte d'herbe. C'est le site naturel le plus visité d'Écosse.

L'îsle de Staffa en Écosse et sa célèbre grotte de Fingals. Documents Getty Images.

Ne pas confondre ces laves fluides avec d'autres laves solidifiées d'aspect similaire mais formées par l'énergie d'un éclair tombé soit sur des roches, de la lave ou du sable en formant des gouttes de fulgurite claires ou sombres (cf. la collection Tricottet) ni avec la trinitite qui se forme à l'endroit des explosions nucléaires.

Les éjecta : bombes, lappilis, cendres, ponces, tuf et cheveux de Pélé

Outre les coulées de lave et les gaz sur lesquels nous reviendrons, un volcan éjecte également de la lave dans l'air sous forme d'éjecta plus ou moins compacts ou pulvérisés. Les géologues les regroupent sous le terme générique de téphras (du grec "tefra" signifant "cendres") ou pyroclastes (du grec "pyroclastos" signifiant "fragment de feu") définis comme étant des fragments de roche en fusion (lave) éjectés dans l'air pendant une éruption volcanique.

La forme la plus connue d'éjecta est la bombe volcanique ou téphra dont le diamètre dépasse 6.4 mm (2.5"). Il s'agit de très grosses scories dont la taille et le poids sont très variables et parfois très impressionnants. Ainsi aux deux extrémités de l'échelle, une bombe de 0.05 m3 (60x40x20 cm de côté et de densité 0.5) en pierre ponce pèse environ 25 kg et peut être portée à bout de bras comme on le voit ci-dessous à droite, alors qu'une bombe de basalte (densité entre 2.6-3.3) de même dimension peut peser plus de 160 kg.

L'immense colonne de cendres et de fumée zébrée d'éclair) émise lors de l'éruption du Taal en Indonésie (à 65 km de Manille) le 13 janvier 2020. Document Anne Curtis Smith

Un éjecta de lave (en basalte) de 2 m de diamètre pesant 8 tonnes éjecté à la vitesse de 150 m/s d'un volcan culminant à 700 m d'altitude va suivre une trajectoire balistique et atteindre 998 m d'altitude avant de s'écraser 27 secondes plus tard à 2.4 km de distance et restera compact, chaud et mou pendant plusieurs heures. En revanche, les cendres volcaniques de moins de 50 microns peuvent facilement être projetées à plus de 30 km d'altitude. Les cendres inférieures à 2 microns mettront 1 an pour retomber au sol alors que les cendres de 30 microns retomberont en 1 jour (cf. B.Reed, 2016).

Au sortir d'un volcan comme le Vésuve, une bombe présente une température d'environ 1100°C et reste brûlante au sol pendant quelques heures. Il n'est donc pas question de la ramasser sans protection et sans la faire refroidir avec beaucoup d'eau (ou de neige) qui s'évaporera instantanément au contact de la lave.

Notons que les coulées pyroclastiques (voir page suivante) produisent également des roches qui peuvent avoir l'aspect de bombe comme c'est le cas aux pieds du Mont St.Helens.

Les bombes volcaniques présentent différentes formes (cylindrique, sphérique, fusiforme, etc.), textures (lisse, trouée, striée, en scorie, en bouse de vache, pâte à pain, etc.) et des couleurs variées qui dépendent de leur composition chimique (du clair au gris foncé/noir en passant par les nuances de brun et de jaune-vert pâle). Elles présentent une structure microlithique et se compose de plagioclases (50%), de pyroxènes (25-40%), d'olivine (10-25%) et de 2-3% de magnétite. Il est déjà arrivé qu'un géologue confonde de petites bombes en obsidianite (lave vitrifiée à la surface rugueuse) avec des tectites (des roches fondues suite à l'impact d'une météorite). Cf. la collection Tricottet.

La pierre de lave est exploitée commercialement pour fabriquer des dalles décoratives (salle de bain, cuisine, etc.), des accessoires (mobilier, batterie de cuisine, etc.) et comme combustible pour certains barbecues à gaz.

On utilise les bombes volcaniques et des agglomérats de lapilli notamment dans la région de La Geria à Lanzarote dans les îles Canaries pour construire des murets de protection en arc de cercle (Zocos) pour abriter les plantes du vent. Ils servent aussi d'élément drainant pour les plantes.

Quand la taille des éjecta de lave est inférieure à celle de la bombe et similaire à celle des scories ou des graviers (2 à 64 mm de diamètre), on parle de lapilli (du latin "lapillus" signifiant "petite caillou").

A une échelle encore plus petite (< 2 mm), la lave devient la cendre volcanique qui a la texture de la farine ou du talc. On parle communément de poussière volcanique et de sable noir lorsqu'elle forme une plage comme à Naples, aux Canaries (à Ténérife, La Palma, etc), au Cap-Vert, à Tahiti ou à Mayotte. Les plus petites particules mesurent entre 1 et 15 microns (contre moins de 75 microns pour le talc et entre 200 et 800 microns pour la farine).

Si la cendre est très légère et peut être emportée par le vent sur des centaines de kilomètres et davantage, les plus lourdes pouvent atteindre une densité de 2.7. Par comparaison, la densité du sable sec et meuble varie entre 1.4 et 1.7. Tombée en quantités importantes, la cendre peut donc être très lourde et endommager des structures au sol. On y reviendra.

Quant à la pierre ponce (pumice en anglais), c'est la seule pierre qui flotte sur l'eau. Sa densité varie entre ~0.2 et ~2.0. Comme la bombe volcanique, elle s'est formée par la projection dans l'air de lave portée entre 500-600°C. Le dégazage a laissé des cavités microscopiques qui expliquent sa porosité et sa faible densité. La pierre ponce peut être grise, brune, jaune ou orangée. Elle peut-être relativement rugueuse (grossière ou à grain fin) ou vacuolée. Les pierres ponces de Turquie, de Grèce ou du mont Shasta en Californie par exemple sont reconnaissables à leur couleur gris clair. La ponce contient de la rhyolite, de la dacite et de l'andésite. On en trouve sur tous les volcans et elle recouvrit la ville de Pompéi. On l'exploite pour fabriquer de la poudre à récurer (par ex. le Cif ou comme composante de la pâte dentifrice), pour polir les lames de couteaux et pour lisser et exfolier les callosités des pieds. Notons qu'on fabrique des pierres ponces artificielles en verre recyclé. Si on ne l'analyse pas au microscope, il est impossible de la distinguer d'une pierre ponce naturelle.

Le tuf est une roche rhyolitique mais plus légère que la rhyolite (densité 2.51) car il est mélangé à de l'eau. Il est donc tendre, compacte, plus léger et plus mou que la cendre. Sa densité varie entre 1.0-1.8. Sa couleur est orangée-rouge ou jaunâtre. Il peut être composé de breccia (fragments) et présenter une densité atteignant 2.54. Lorsque le tuf forme des strates alternées avec des cendres, on parle de cinérite. Le tuf a notamment formé les formations typiques en forme de cône de la Cappadoce en Turquie et fut utilisé en Italie pour construire des édifices publics entre l'époque Etrusque et la Renaissance. Les célèbres Moaï de l'île de Pâques ont également été sculptés dans du tuf basaltique, plus exactement de la tholéiite (tuf saturé en silice et contenant de l'olivine).

Enfin, citons les "cheveux de Pélé" ou "lauoho o Pelé" qui sont de fines aiguilles de silice de lave étirées par le vent. Elles peuvent former des pelottes. On en trouve sur de nombreux volcans dont ceux d'Islande et d'Hawaï.

A consulter : Calcul de densité - Density calculator - Ellipsoid volume calculator

Quatre formes d'éjecta volcaniques (téphras). Ci-dessus à gauche, une bombe volcanique de basalte vacuolaire, c'est-à-dire de la pierre ponce couverte de vésicules (cf. cet autre spécimen de Géologues-Propecteurs), formée par refroidissement rapide d'éjecta de lave au contact de l'air. Ce spécimen mesure 8.5 x 6.4 x 3.8 cm et pèse seulement 90 g. Sa densité est de 0.4. D'autres spécimens peuvent être gris clairs ou bruns-orangés. A droite, des lapillis de Haute-Loire, dans le Massif Central (F). Ci-dessous à gauche, une pelotte de "cheveux de Pélé" composée d'aiguilles de silice de lave étirées par le vent. A droite, le volcanologue Ray Anderson soulevant une bombe volcanique en pierre ponce d'environ 60 cm de longueur pesant ~25 kg (densité ~0.5) découverte en Californie, aux Etats-Unis (à Long Valley, entre Lee Vàning et Mammoth Mountain, près du lac Mono, sur le versant est de la Sierra Nevada). Elle fut éjectée d'un volcan phréato-magmatique il y a environ 1 million d'années. Les indiens Mono Païutes y exploitent également l'obsidienne. Documents T.Lombry, Raynald Ethien, D.R. et Ray Anderson.

Ces différentes laves et roches ne sont pas exclusives et sur la plupart des volcans de type strombolien émettant des laves on peut par exemple trouver côte-à-côte des coulées de lave aa et pahoehoe ainsi que des laves cordées, des bombes, des lapillis et des cheveux de Pélé.

Notons que les particules volcaniques ayant la densité la plus élevée et plutôt dures (au moins 5 sur l'échelle de Mohs) présentent de fortes angularités et sont très abrasives, en particulier celles à haute teneur en silice.

Voyons à présent l'aspect minéralogique des roches ignées.

Classifications des roches ignées

Sans entrer dans les détails qui font appel à des notions de pétrologie et de géologie qui débordent du cadre de cet article, l'analyse visuelle mais surtout microscopique et chimique des laves refroidies et de manière générale des roches magmatiques continentales et océaniques permet de les classer en différents groupes. Comme toute taxonomie, ce classement est complexe mais il n'est pas difficile car pour un expert ce n'est qu'une question d'observation. On peut classer les roches en fonction de trois critères :

- Le gisement (du lieu originel de formation)

- Le mode de formation

- La composition chimique.

Leur combinaison est possible, raison pour laquelle un auteur peut classer une roche dans l'un ou l'autre groupe combiné sans le préciser et donc sans qu'il soit toujours facile de les différencier pour un amateur.

Si on classe les roches en fonction de leur gisement, il existe deux groupes :

- Les roches ignées

- Les roches volcaniques.

Les roches ignées ou magmatiques sont un terme générique désignant les roches plutoniques formées en profondeur et les roches volcaniques formées près de la surface y compris les minéraux. Cela englobe également les roches ou minéraux acides et basiques et donc pratiquement toutes les "pierres". Ces roches sont dites ignées ou endogènes par opposition aux roches exogènes formées par sédimentation ou métamophisme (transformation).

A gauche, le cycle des roches. A droite, le paysage volcanique de Campo de Piedra Pómez dans la province argentine de Catamarca. Située à 3000 m d'altitude, la région contient de vastes zones de dépôts de ponce provenant d'anciennes éruptions pyroclastiques régionales qui ont subi une érosion considérable et un remplissage par des dépôts éoliens de sable noir. Ces dépôts sont le résultat de l'activité d'environ 200 anciens volcans. Documents Education adapté par l'auteur et Geomorphología Para Todos.

Les roches magmatiques plutoniques sont principalement représentées par les granites (95%) et dans une moindre proportion par le gabbro, la diorite et autre syénite tandis que les roches volcaniques sont représentées par les basaltes (90%), la rhyolite, la trachyte ou andésite et autre rhyodacite. Visuellement les deux types de roches peuvent se ressembler car toutes deux peuvent être claires ou sombres et présenter des inclusions mais une analyse pétrographique de leur structure et composition chimique lèvera le doute.

Si on classe les roches en fonction de leur composition minéralogique, le tableau devient beaucoup plus complexe car il décrit l'ensemble des minéraux et des roches. Par simplicité, les géologues ont tout de même définis des minéraux communs dits cardinaux et des minéraux accessoires tels que les oxydes et deux types de roches (plutoniques et volcaniques) également différenciées selon leur acidité. Mais même réduits de la sorte, le tableau contient encore 17 types de roches magmatiques (quartz, feldspaths alcalins, micas, olivines, granites, diorites, gabbro, basaltes, etc.). Nous allons donc nous limiter à l'essentiel, le lecteur souhaitant approfondir le sujet étant invité à consulter les liens repris en fin de 3e page.

D'un point de vue minéralogique, en 1974 le géologue et pétrographe suisse Albert Streckeisen (1901-1998) proposa la classification des roches plutoniques illustrée par le "diagramme QAPF" ou "Double Triangle de Streckeisen" présenté à gauche qui différencie toutes les roches magmatiques à l'exception des roches ultrabasiques (par ex. la péridotite) selon qu'elles contiennent du quartz (Q, acide, sur ou sous-saturés en silice) ou des feldsapths (F, alcalins ou calco-sodiques) auxquels s'ajoute la distinction du gisement plutonique (A pour feldspaths Alcalins parfois dénommé O pour Orthoclases) ou volcanique (P pour Plagioclases). Aux quatre extrémités de ce classement en losange on trouve la quartzolite ou silexite (Q), la foidolite (F), la syénite (O) et l'anorthosite ou le gabbro (P).

A lire : Le métamorphisme

A gauche, la classification des roches plutoniques de Streckeisen. Voici une autre version en anglais. Au centre et à droite, la classification des roches ignées. Les roches ignées sont classées en fonction des abondances relatives des minéraux qu'elles contiennent. Une roche donnée est représentée par une ligne verticale dans le diagramme. A droite, dans la colonne mafique, les flèches représentent une roche contenant 48% de pyroxène et 52% de feldspath plagioclase. Le nom d'une roche ignée dépend non seulement de sa composition, mais aussi du fait qu'elle soit intrusive ou extrusive. Documents Oxford Geology Group et K.Panchuk/T.Lombry.

Quant aux roches volcaniques également appelées effusives, les critères minéralogiques permettent également de les diviser en deux groupes : les basaltes et la trachyte.

- Les basaltes. Il s'agit de roches basiques de couleur sombre qu'on retrouve par exemple sur les volcans de points chauds tels ceux d'Hawaï, d'Islande, des Acores ou de la Réunion connus pour leurs plages de "sable" noir. A l'oeil nu, la roche contient des cristaux vert-jaune d'olivine, des cristaux noirs de pyroxène noyés dans une matrice grise ou noire de microlites (des cristaux prismatiques) et de verre. Sous une lumière polarisée, on découvre de grands fragments cristallins d'olivine d'aspect craquelé et de couleurs vives, de petits fragments de pyroxène souvent striés en oblique et également de couleurs vives, des microlites de feldspaths blancs ou gris noyés dans une matrice noire de verre. Cette matière provient du magma issu du manteau et s'est formée à relatives hautes températures comprises entre 1100-1200°C lors d'éruptions effusives, ce qui explique la formation de petits cristaux de taille homogène.

- La trachyte (andésite). Il s'agit de roches plutôt acide de couleur claire typique des roches andines très communes au-dessus des zones de subduction. A l'oeil nu, la roche contient des fragments noirs de pyroxène, du feldspath clair noyés dans une matrice gris clair de verre. Sous une lumière polarisée, on observe des phénocristaux (des cristaux géants) colorés de pyroxène, des phénocristaux de feldspath blancs ou gris noyés dans une matrice noire de verre. Cette matière provient d'un mélange de matériaux issus du manteau et de la croûte continentale. Le magma y est plus acide et sa température de 900 à 1000°C et donc plus visqueux que les basaltes. De ce fait, la trachyte stagne généralement dans les cheminées volcaniques, formant des bouchons de lave à l'origine des phénocristaux. Ce magma est généralement éjecté violemment du volcan lors de phénomènes explosifs, les chocs mécaniques et thermiques expliquant la formation de microlites.

A voir : Classification des roches, CSTC

Rocks under the Microscope, U.Oxford/OESIS

Photomicrographies de lames minces (~30 microns d'épaisseur) de roches d'origines très différentes photographiées en lumière polarisée. Les échantillons mesurent entre 0.2 et 5 mm de longueur. A gauche, de l'augite (roche mafique), un basalte alcalin constitué d'olivine et de pyroxène noyés dans une matrice sombre de verre. A sa droite, de la komatiite (roche ultramafique) révélant la texture de spinifex. A droite du centre, du jaspe océanique. Les agrégats sphériques de quelques millimètres de diamètre sont le résultat de l'altération et d'un saturation en silice (silicification) de coulées de tuf ou de rhyolite (roche felsique). A droite, de la péridotite (roche métamorphique granitoïde située près de la zone Q du diagramme AQPF) riche en cristaux d'olivine (jusqu'à 90%) et de pyroxène. Documents Henry Bertrand/ENS-Lyon et Bernado Cesare/U.Padoue.

On retrouve des structures équivalentes dans les roches métamorphiques y compris dans les météorites à la différence que les roches ou les cristaux portent des noms différents (par exemple porphyroblastes au lieu de macro ou phénocristaux, histoire que les experts d'une discipline restent bien isolés dans leur petit club fermé !). On reviendra en détails sur la composition primordiale du système solaire et de celle des météorites.

En raison de leur structure interne particulière, l'étude des laves permet de connaître la fluidité du magma, sa pression, sa vitesse d'ascension dans la cheminée volcanique, le temps qu'il a séjourné dans la chambre magmatique et indirectement l'orientation du champ magnétique local grâce à l'orientation des grains de magnétite qui a été figée après le refroidissement.

Nous n'aborderons pas ici les roches sédimentaires et métamorphiques dont la nature et la formation dépendent d'autres mécanismes que purement magmatiques.

Venons-en à présent aux phénomènes les plus dangereux associés aux émissions volcaniques, les lahars, les coulées pyroclastiques et les émissions de dioxyde de carbone et de dioxyde de soufre.

Dernier chapitre

Les émissions volcaniques

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