CHAPITRE 9
L'ÉVÉNEMENT
DE LA TOUNGOUSKA EN 1908
Un événement exceptionnel s'est produit le 30 juin 1908 (1)
en Sibérie centrale (longtemps connu sous l'appellation inexacte et
trompeuse de "météorite" de la
Toungouska (2) et aujourd'hui sous
celle de événement de la Toungouska) : la collision d'un corps céleste de bonne taille avec la Terre. Ce
cataclysme a suscité depuis presque un siècle d'innombrables hypothèses et
élucubrations, et il mérite bien que nous lui consacrions un chapitre entier de
ce livre dans la partie " Preuves ".
En
effet, cette collision est la meilleure et la plus irréfutable des preuves
concernant la réalité actuelle de l'impactisme terrestre, théorie
qui n'est pas seulement une vérité du passé comme ont
voulu (et voudraient encore) le faire croire certains scientifiques (de moins
en moins nombreux cela dit), qui ignorent tout ou presque du volet astronomique
du problème.
Les circonstances de la collision et les premières constatations
Le météore et la collision
L'objet
(objet car son origine n'a jamais pu être déterminée
d'une manière définitive avec certitude) de la Toungouska est tombé le
30 juin 1908, à 7h17mn11s heure locale (soit à 0h17mn11s TU), dans la vallée pierreuse de
la rivière Toungouska, un affluent du Iénisséi, le grand fleuve sibérien. La
localisation exacte de l'impact se situe à la latitude 60°55' nord et à la
longitude 101°57' est, à 60 km de la petite ville de Vanavara et à environ 800
km au nord-ouest du lac Baïkal. Il s'agit d'une région boisée, marécageuse en été
et gelée en hiver, pratiquement déserte dans la taïga sibérienne.
La
matinée démarrait à peine quand un météore blanc-bleuté éblouissant, suivi
d'une épaisse traînée de poussières beaucoup plus sombre, fut observé pendant
quelques dizaines de secondes par de nombreux témoins, dans une très vaste
région en forme de demi-cercle de plus de 700 km de rayon. Des simulations
modernes ont permis de préciser plusieurs paramètres, notamment ceux concernant
la magnitude du météore (3) vu de plusieurs villes et villages situés
dans la zone d'observation.
A
90 km d'altitude, il était de magnitude –5, déjà magnifique, attirant
l'attention des rares habitants de la région. A 75 km, la
magnitude apparente était de –9, passant très rapidement à –13 à 60 km, puis à –18
à 45 km et à –22 à 30 km d'altitude. A cet instant, le météore était
encore 100 fois moins brillant que le Soleil, mais tous les témoins
pressentaient déjà la catastrophe à venir. A 15 km
d'altitude, il atteignit quasiment l'éclat du Soleil (–27), c'était un deuxième
soleil dans le ciel, comme l'on raconté les témoins éberlués et
terrorisés. Juste avant l'impact, au-dessus de Vanavara, la ville la plus
proche, il atteignit la magnitude fantastique de –32, 100 fois la
magnitude du Soleil, aveuglant les rares témoins qui suivaient encore
sa course folle dans le ciel. Puis ce fut l'explosion finale, la
désintégration, dans un paroxysme de bruit et de lumière, comme il
ne s'en produit sur Terre qu'une fois tous les 500 ans peut-être (figure 9-1).
Le
météore, qui avait une trajectoire sud-est/nord-ouest, apparut au
nord du lac Baïkal et survola le ciel sibérien jusqu'à 60 km au nord de
Vanavara, avant d'exploser dans l'atmosphère, provoquant la lueur aveuglante
dont nous avons parlé et des phénomènes acoustiques intenses, puisque des
explosions sourdes furent entendues à des distances supérieures à 1000 km. Au-dessus
du site de l'explosion, des flammes et un nuage de fumée, que des témoins
comparèrent à une "fontaine de feu", furent observés montant vers le
ciel à une hauteur supérieure à 20 km. Les Toungouzes, seuls et
rares habitants de la région, crurent que c'est leur dieu du feu, Ogdy (4),
qui tombait sur la Terre.
Dans
de nombreux endroits de la région, le sol et les bâtiments tremblèrent comme
pendant un violent tremblement de terre. A Vanavara, un souffle brûlant jeta
des témoins à terre, brisa des vitres et provoqua des dégâts sévères dans les
récoltes. Un peu plus au nord, les plus proches témoins (5) du drame,
des nomades vivant sous la tente, furent littéralement balayés par cette
formidable onde de choc et leurs tentes arrachées. Pourtant, comme il n'y avait
pas, apparemment, d'habitants dans une aire de 30 km autour du point
d'explosion, cette catastrophe extraordinaire n'a fait aucune victime
humaine connue. Seuls, paraît-il, un troupeau de rennes et probablement quelques
autres animaux vivant dans la forêt de sapins, au-dessus de laquelle eut lieu
l'explosion, furent anéantis par la chaleur ou le feu qui dévasta plusieurs
centaines de kilomètres carrés de forêt.
La
chute de l'objet de la Toungouska et l'explosion qui suivit causèrent une onde
sismique importante. Celle-ci fut enregistrée à Irkoutsk, ville située à 893 km
exactement de l'épicentre du lieu de l'explosion, 45 minutes et 6 secondes plus
tard, se déplaçant à la vitesse classique de propagation des ondes aériennes,
soit 330 mètres/seconde environ. L'onde sismique, qui fit le tour de
la Terre, fut également enregistrée à Potsdam en Allemagne. Trois autres ondes
sismiques moins importantes laissèrent aussi leur empreinte sur les appareils
enregistreurs, elles seraient dues à des ondes aériennes d'explosion.
Les premières constatations
Parmi
les premières constatations, faites tout de suite après le cataclysme (6),
il faut encore citer un phénomène optique intéressant qui a été noté par de
nombreux observateurs du ciel nocturne, ignorant tout de la chute du 30 juin.
La première nuit suivant celle-ci, c'est-à-dire la nuit du 30
juin au 1er juillet 1908, fut exceptionnellement brillante partout
en Europe et en Sibérie occidentale. Dans le Caucase, dans le sud de la Russie, la
nuit fut si claire qu'il était possible de lire à minuit sans l'aide d'une
lumière artificielle. Les nuits suivantes furent encore nettement plus claires
que la normale. Cet effet, dû à la dispersion d'un très abondant
nuage de poussières abandonnées dans l'atmosphère avant ou pendant l'explosion
par l'objet cosmique, diminua très lentement et dura pratiquement deux
mois, jusqu'à la fin août. Corrélativement avec cette luminosité du ciel
nocturne inhabituelle et anormale, les astronomes notèrent une importante
diminution de la transparence de l'atmosphère qui gêna considérablement leurs
observations.
Les
diverses constatations concernant l'événement de la Toungouska amenèrent
immédiatement les astronomes à formuler l'hypothèse la plus logique : notre
Terre venait d'être frappée par une météorite gigantesque qui avait dû causer
un cratère géant. Pourtant, chose absolument impensable de nos jours, aucune expédition
ne fut organisée pour aller étudier sur place, sans attendre, les effets de la
catastrophe. Au début du siècle, il est vrai, la Sibérie était encore "le
bout du monde" et, apparemment, jusqu'en 1927, aucun scientifique
soviétique ne put convaincre les autorités successives de financer une
expédition digne de ce nom.
Les premières expéditions : l'étude de la région dévastée
La première expédition de 1927
La
première expédition réellement scientifique (7) sur le site de la
Toungouska eut lieu en 1927 seulement, dix-neuf ans après la catastrophe. Elle était
conduite par le minéralogiste soviétique Leonid Kulik
(1883-1942), sommité de l'époque dans le domaine des météorites. Plusieurs
surprises attendaient les chercheurs des diverses disciplines de l'expédition.
D'abord ils trouvèrent une zone de 60 km de diamètre
complètement dévastée par l'onde de choc balistique. Tous les
arbres de la forêt préexistante avaient été soufflés, arrachés par les racines
qui étaient dirigées vers l'épicentre du cataclysme. Un tel arrangement radial
montrait, sans erreur possible, que la chute avait été accompagnée d'une
explosion extrêmement violente. L'onde de choc a été maximale latéralement,
puisque la région nord-est a été la plus touchée.
Dans
la partie centrale de la zone d'impact existait une dépression marécageuse de
plusieurs kilomètres carrés où les chercheurs notèrent une centaine de petites
cavités peu profondes de quelques mètres à quelques dizaines de mètres de
diamètre. Ils les prirent d'abord, à tort, pour des cratères météoritiques car Kulik
pensait que l'explosion avait entraîné une fragmentation complète de l'objet
cosmique originel, et donc une pluie météoritique de nombreux
fragments de toutes les tailles. En fait, il fut établi plus tard que toutes
ces formations étaient des fondrières naturelles, très nombreuses dans cette
région qui, nous l'avons dit, a la particularité d'être marécageuse durant la
période chaude et évidemment d'être gelée l'hiver.
Autre
surprise de taille, et une grosse déception pour les membres de l'expédition,
ils ne découvrirent aucune météorite, exception
faite de quelques infimes poussières, et cela malgré un ratissage sérieux et
méthodique de la région sinistrée. Ils durent se rendre à l'évidence :
contrairement à l'opinion première de Kulik, l'objet cosmique n'avait
pas touché le sol, même sous forme de petits fragments. Cet objet
n'était donc pas une météorite, au sens propre du terme, c'est-à-dire un objet
ferreux ou pierreux qui aurait dû laisser au moins quelques fragments
significatifs. L’hypothèse de la comète semblait donc s’imposer, avec une
explosion et une désintégration dans l’atmosphère et non un véritable impact.
Les expéditions de 1928,
1929-1930 et 1938-1939
Deux
autres expéditions sur le site eurent lieu en 1928 et en 1929-1930 (8),
cette dernière fort importante puisqu'elle dura plus d'un an. Elles
n'apportèrent rien de très nouveau. On creusa plusieurs des dépressions que
Kulik croyait encore être des cratères météoritiques, mais sans succès. L'une
d'entre elles fut explorée très soigneusement, jusqu'à 34 mètres de profondeur.
Devant le résultat totalement négatif, il fallut accepter l'origine naturelle
de ces fondrières.
Enfin,
en 1938-1939, une couverture photographique aérienne très complète de la
région fut effectuée, permettant de connaître d'une façon précise le
plan de la région touchée et de constater les extraordinaires dégâts, encore
nettement reconnaissables bien que datant déjà de trente ans. Ces photos ont
fait le tour du monde et illustrent encore tous les livres qui parlent en détail
de l'événement de la Toungouska.
Ces
quatre expéditions permirent donc d'exclure définitivement l'hypothèse de l'impact
au sol d'un astéroïde planétaire. Elles confortèrent la
majorité des scientifiques dans une nouvelle hypothèse assez plausible a priori,
celle de l'explosion dans l'atmosphère
du noyau d'une petite comète active. Cette hypothèse cométaire fut proposée dès 1930,
après les premières expéditions sur le site, par Francis Whipple (1876-1943)
(9) et confirmée en 1933 par Igor Astapovich (1908-1976).
Cependant, l'étude de la composition des comètes était encore bien peu avancée
à l'époque, et il était impossible de démontrer d'une façon certaine que ce
type d'objets célestes est capable de provoquer les divers effets observés
pendant et après l'explosion.
L'incertitude
des savants sur la nature exacte de l'objet responsable de cette catastrophe,
frappante pour les imaginations, surtout après la publication de photographies
particulièrement révélatrices de la puissance de l'explosion, allait entraîner
l'apparition de très nombreuses hypothèses plus ou moins (souvent moins que
plus) plausibles. Nous en dirons quelques mots en conclusion de ce chapitre.
Les points d'accord dans une controverse serrée
Trois hypothèses plausibles en
concurrence
De
nos jours, près d'un siècle après le cataclysme sibérien, la controverse sur la
nature exacte de l'objet responsable reste vive (10), même si l'on
semble s'acheminer vers une solution imprévisible il y a vingt ans, plus
complexe que tous les spécialistes qui ont étudié la question pouvait
l'envisager.
En
effet, la solution qui semble s'imposer est celle-ci : la désintégration dans
l'atmosphère d'un fragment astéroïdal de l'ancien centaure Hephaistos (mi-comète,
mi-astéroïde, c'est-à-dire un objet mixte, je le rappelle), et dont l'existence
explique enfin la majorité des événements concernant l'impactisme terrestre
récent. L'astronome slovaque Lubor Kresak (1927-1994) (11) avait
déjà trouvé une partie de la vérité dans les années 1970 en montrant que l'objet
de la Toungouska, connu maintenant également sous le nom d'Ogdy, était
lié à la comète P/Encke. On comprend que les astronomes ne pouvaient se
mettre d'accord, puisque pour les uns il ne pouvait s'agir que d'une comète,
alors que les autres démontraient le caractère astéroïdal du fragment
désintégré.
Pendant
trois quarts de siècle, trois hypothèses furent très logiquement en concurrence
: celle du vrai astéroïde, celle du noyau
cométaire et celle de la comète active. Ces trois
hypothèses ont eu (et ont encore) leurs partisans et restent d'ailleurs les
seules réellement envisageables. Bien entendu, chacune a été étayée de nombreux
arguments, disséquée, analysée, confirmée (!) par des simulations multiples et
parfois convaincantes (mais une simulation convaincante n'est pas forcément le
reflet de la réalité). Jusqu'à présent aucune d'entre elles ne s'était
vraiment imposée, faute de connaître et de prendre en compte Hephaistos, car toutes
les trois présentent des insuffisances et des faiblesses plus ou moins sérieuses.
Seul le mixage des trois est concluant.
Les points d'accord
Avant
d'étudier séparément ces trois hypothèses, examinons les points d'accord.
D'abord, il faut insister sur le fait que, pratiquement, tout le monde est
d'accord pour admettre que le cataclysme est dû à la collision d'un
objet appartenant au Système solaire, et que les hypothèses de l'antimatière et du mini
trou noir (voir plus loin) ne sont que des hypothèses d'école.
Un point important est celui de la masse de l'objet
et de la puissance de l'explosion. Toutes les valeurs entre 1014
joules et 8 ´ 1017 joules ont été
avancées pour cette dernière, depuis la première estimation d'Astapovich en
1933, mais on penche aujourd'hui pour une valeur intermédiaire proche de 5 ´
1016 joules. (Tableau
9-1). Ce résultat important a été obtenu (12)
après une nouvelle analyse des anciens sismogrammes enregistrés le 30 juin
1908, et d'autres données, relatifs à l'événement et de leur comparaison avec
les effets sismiques et acoustiques concernant les explosions nucléaires
aériennes des années 1945-1965, dont les paramètres sont connus avec précision.
L'énergie libérée par la catastrophe
de la Toungouska correspond à une explosion de 12,5 mégatonnes de TNT, soit en
gros 600 fois la puissance de la bombe d'Hiroshima.
Pour
la masse, les valeurs ont été fixées dans une très large fourchette, entre 10
000 et 1 million de tonnes. Mais là encore, les recherches dans les années
1960-1970 ont sensiblement clarifié la situation. Une
valeur approximative de 500 000 tonnes pour la masse préatmosphérique
semble fort raisonnable et elle est maintenant généralement acceptée par
les spécialistes actuels. Par contre, évidemment, le désaccord a longtemps été
total pour le diamètre de l'objet de la Toungouska,
puisqu'il dépend de la densité retenue, très variable selon la nature de
l'objet, même si l'on sait de nos jours que les densités les plus faibles
envisagées ne sont pas crédibles à la lumière des connaissances actuelles, et
que seules les densités planétaires (3,0 et
supérieures) sont réellement acceptables.
Une
autre certitude, et donc un point d'accord total entre les spécialistes, est
que l'objet n'a pas touché le sol et a explosé dans
l'atmosphère entre 5 et 10 km d'altitude. Il s'agit donc d'une explosion basse, ce qui est
un très mauvais point pour l'hypothèse cométaire, comme nous le verrons.
Le
problème de l'orbite préatmosphérique de l'objet de la Toungouska,
particulièrement ardu pendant cinquante ans, s'est un peu éclairé à partir de
1960 avec l'utilisation des ordinateurs pour le calcul des différentes
possibilités. Car il ne faut pas oublier l'extrême complexité du problème,
compte tenu du fait que les observations en 1908 n'ont pas
excédé quelques dizaines de secondes. Tout ce que l'on sait, c'est que l'angle de la
trajectoire du bolide avec la surface terrestre était de 10° environ seulement,
et que la distance angulaire entre le bolide et le Soleil était également fort
petite. C'est ce qui explique que l'objet cosmique n'ait pas été observé plus
tôt : il était pratiquement indécelable pour un
observateur terrestre (13), perdu dans le rayonnement solaire
(figure 9-2).
Les
premiers calculs sérieux, dans les années 1930 ont tous montré, étonnamment,
que l'orbite du bolide était probablement rétrograde et que
l'objet devait être une comète à longue période. Astapovich
envisageait une vitesse géocentrique comprise entre 50 et 60 km/s, et
localisait le radiant du bolide vers l'apex de la Terre. Mais l'ordinateur a
remis les choses en place grâce à des simulations, et de rétrograde, l'orbite
la plus probable est devenue directe, ce qui rend toutes leurs chances
aux objets planétaires (qui n'ont jamais d'orbite rétrograde). On penche
actuellement pour une vitesse géocentrique de l'ordre
de 30 km/s, qui est celle des objets à forte excentricité, mais qui peut concerner
aussi bien une comète qu'un astéroïde.
Au
sujet de l'orbite intra-atmosphérique, il faut démentir les bruits qui ont
longtemps couru sur le fait que l'objet de la Toungouska aurait eu une
trajectoire erratique et qu'il aurait fait "un coude" au-dessus de
l'Europe centrale (de la Bohème plus précisément). Rappelons que le bolide
durant son court passage dans l'atmosphère n'a pas été observé en Europe et
qu'il est apparu au nord du lac Baïkal, avec pour seuls témoins les populations
de la Sibérie centrale. Les pseudo-observations européennes ont été annoncées
après coup et furent le fait de mythomanes en mal de publicité.
Végétation post-catastrophe et
mutations possibles
Enfin,
signalons deux constatations datant des années 1970 fort intéressantes (mais
qui semblent aujourd'hui contestées par les chercheurs occidentaux qui n'ont
pas eu accès au site avant les années 1980). Des chercheurs soviétiques ont
découvert avec surprise que certains végétaux qui poussent aujourd'hui dans le
périmètre de la région sinistrée en 1908 ont une vitesse de croissance très
sensiblement supérieure à la normale. Elle serait de l'ordre de
5 à 10 fois plus rapide que dans les régions voisines non sinistrées, et que
dans des cultures de contrôle surveillées par les chercheurs. Ceux-ci ont fait
des vérifications sur près de 200 espèces différentes de plantes diverses pour
comparer les dosages d'oligo-éléments. Cette nouvelle végétation
"post-catastrophe" s'est avérée anormalement riche en arsenic, iode,
brome, zinc et tellurium. Les savants soviétiques ont expliqué ce résultat
surprenant, lié sans doute possible à la diffusion du matériel pulvérisé lors
de l'explosion, par l'enrichissement du sol dû aux éléments
chimiques cités plus haut et qui étaient obligatoirement présents dans l'objet
cosmique avant sa désintégration.
Deuxième
constatation à retenir, il semble que les savants soviétiques aient eu la
preuve que des mutations soient
également apparues sur plusieurs espèces d'insectes qui ont repeuplé la région
sinistrée. Ces mutations (si elles sont réelles car là aussi il y a doute) ne
peuvent être liées qu'à l'augmentation de la radioactivité
locale. Au fond, ce ne serait pas vraiment une surprise, car on sait depuis
longtemps qu'une radioactivité accrue débouche presque obligatoirement sur des
mutations génétiques parmi la faune et la flore. On ne peut que regretter
vivement le temps perdu entre 1908 et 1927, car une étude poussée immédiatement
dans les années post-catastrophe aurait permis de lever cette ambiguïté et ce
doute qui sévissent aujourd'hui.
Après
ces points d'accord, nous allons voir les trois hypothèses concernant la nature
de l'objet de la Toungouska. Car au-delà d'un consensus relatif sur certains
points, il ne faut pas se cacher que les raisons de désaccord entre les
différents spécialistes de toutes les disciplines concernées restent profondes,
et que l'on ne peut que difficilement envisager une "théorie" qui
aurait l'assentiment de tous. Nous resterons encore longtemps au niveau des
"hypothèses", même si celle du fragment planétaire issu de Hephaistos paraît
nettement la plus probable.
L'hypothèse de la comète active
L'hypothèse
cométaire pour l'objet de la Toungouska a toujours été en faveur depuis les
travaux de Francis Whipple en 1930 et plus tard ceux de Vassili Fesenkov
(1889-1972). Il faut dire que de nombreux indices militent en sa faveur (14/15),
mais sa cote a continuellement baissé depuis 1960 avec les premières simulations
sur ordinateur qui ont montré qu'une orbite directe était la plus probable.
L'étude
d'une collision entre la Terre et une comète a, comme tout le reste, été faite
sur ordinateur (16), avec des scénarios différents concernant la masse,
la vitesse et les conditions d'approche de la comète. Dans tous les cas de
figure, il apparaît qu'une telle collision ne produit pas de cratère car l'objet
ne touche pas le sol, mais sa désintégration totale
provoque une explosion dans l'atmosphère, capable de carboniser une forêt sur plusieurs
kilomètres carrés et sur une déflagration audible à plus de 1000 km comme on
l'a vu en Sibérie en 1908. La tête de la comète s'échauffe d'une façon
fantastique en très peu de temps (quelques secondes) en traversant l'atmosphère
terrestre à une vitesse de 20 km/s (rappelons qu'une telle vitesse
équivaut à 66 fois la vitesse du son dans l'air, soit une vitesse de Mach 66 (17))
et la température peut atteindre plusieurs millions de degrés. C'est
insuffisant cependant pour que s'amorcent des réactions nucléaires, mais
l'explosion est loin d'être sans effets (18). D'une part, la tête de la
comète se volatilise en moins de dix secondes en milliards d'éclats
infinitésimaux et d'autre part, il y a production de rayonnements X et gamma et
de particules accélérées, électrons et neutrons. Tout cela s'est trouvé
confirmé en Sibérie.
Des micro-sphérules par
millions dans la zone d’impact
Lors
de campagnes sur le terrain en 1958 et 1961, menées avec du matériel
sophistiqué (notamment des appareils enregistreurs très sensibles), sous la
direction du météoricien soviétique Evgenij Krinov
(1906-1984), on a découvert de très nombreuses micro-sphérules de
silicates (d'un diamètre de 80 à 100 micromètres) ayant la structure et la
composition des chondrites carbonées, que l'on soupçonne être des vestiges de
noyaux cométaires.
On
a également trouvé des particules de magnétite (oxyde de
fer magnétique) et des billes microscopiques d'aspect vitreux contenant des
vacuoles remplies de gaz carbonique ou de sulfure d'hydrogène. Il y en a,
à coup sûr, plusieurs milliers de tonnes éparpillées dans toute la zone
sinistrée en 1908. Tout cela postule, bien sûr, pour l'origine cométaire.
Quant
à la production de rayonnements nucléaires et à l'augmentation présumée de la radioactivité
à la surface terrestre en 1908 et 1909, elles ont connu une éclatante
confirmation, grâce notamment à la méthode dendrochronologique. On a, en effet,
constaté pour cette époque une augmentation voisine de 1 % par
rapport à la normale de la quantité de carbone 14 contenue dans les arbres
coupés et étudiés sur tous les continents (19). On est obligé d'attribuer cette
augmentation de la radioactivité terrestre en 1908-1909 à l'objet de la
Toungouska, car il n'y a pas eu d'activité solaire anormale à cette époque qui
aurait pu être responsable du phénomène observé dans les anneaux de croissance
des arbres. Là encore, l'hypothèse d'une origine cométaire de la "bombe
cosmique" explique parfaitement cet afflux anormal de particules radioactives,
ainsi que l'extraordinaire croissance observée dans la végétation de la zone
choquée dont nous avons parlé plus haut.
Enfin,
n'oublions pas l'un des principaux arguments utilisés par les partisans de
l'hypothèse cométaire : les fameux phénomènes lumineux, notamment
l'extraordinaire luminosité du ciel nocturne durant plusieurs nuits. Ce
phénomène serait dû au passage de la Terre à l'intérieur de la queue de
poussières de la comète.
Dans
l'hypothèse cométaire, il faut admettre un diamètre important pour l'objet de 1908.
Pour une masse de 500 000 tonnes, qui est la plus raisonnable,
combinée avec une densité de 1,0 g/cm3 qui est celle de la glace,
principal constituant des noyaux cométaires actifs, on obtient un diamètre
approximatif de 100 mètres pour un objet sphérique. Mais
certains chercheurs ont émis l'idée que la densité du noyau pourrait avoir été
très faible, largement inférieure à 1,0 g/cm3. Dans ce cas, le noyau
n'aurait pas été un corps unique, mais plutôt un essaim
(ou pseudo-noyau) de particules individuelles plus ou moins soudées entre elles. On cite
deux valeurs à cet égard : une densité de 0,25 g/cm3 qui correspond
à un diamètre de 150 mètres et une densité minimale de 0,001 g/cm3
qui correspond à un diamètre "géant" de 600 mètres. Disons tout de
suite que seule la densité la plus forte : 1,0 g/cm3 est plausible.
Nous verrons pourquoi.
La possible association P/Encke
- Ogdy
Plusieurs astronomes ont essayé d'associer l'objet
de la Toungouska avec une comète à courte période connue. Dans les années 1930,
on croyait possible une parenté avec la comète P/Pons-Winnecke qui s'est
approchée à 0,039 UA de la Terre le 26 juin 1927, l'une des principales
approches du XXe siècle (20), et qui, selon certains, aurait
pu se fractionner il y a quelques siècles en deux ou plusieurs fragments. Mais
cette hypothèse ne reposait sur rien de sérieux et a été rapidement abandonnée.
En 1978, Kresák a repris l'idée et a proposé
une association génétique extrêmement intéressante avec la comète
périodique P/Encke (21). Cet auteur, spécialiste
bien connu des comètes, des astéroïdes et aussi des météores, s'est basé sur une similarité possible entre les deux orbites et surtout
sur la coïncidence de la date de l'événement de la Toungouska (30 juin) avec
celle de l'averse météorique des Bêta Taurides, qui a lieu le même jour et que
l'on sait associée à P/Encke. Cette brillante
hypothèse a pris progressivement de la consistance au cours des années 1980 (22),
mais elle a été vivement contestée car elle se heurtait à de grosses
difficultés dont je vais parler plus loin.
A
l'exposé des "forces" de l'hypothèse cométaire, on pourrait croire
que tout est dit et que le doute n'est plus permis. Nous allons voir maintenant
que tout n'est pas si définitif qu'il peut paraître aux non-spécialistes.
L'hypothèse du noyau cométaire
Une durée de vie active
insignifiante pour Ogdy
On
peut même dire que l'hypothèse de la comète active présente une
faiblesse terrible qui pratiquement la condamne à n'être qu'une hypothèse
d'école (mais rien n'est moins sûr, on a vu en 1994 avec l'impact, tout à fait
inattendu, de la comète Shoemaker-Levy 9 sur Jupiter que toutes les surprises
restent possibles). Car on sait que l'espérance de vie active
des comètes à courte période est extrêmement courte à l'échelle astronomique (23)
, variable selon le diamètre sublimable de la comète, sa période de
révolution et sa distance périhélique (c'est la formule de Öpik (24)). Les
calculs montrent, sans ambiguïté, que les comètes actives à courte période
ayant un diamètre sublimable de l'ordre de 1 km ont une espérance de vie
inférieure dans tous les cas à 3000 ans. Pour une comète de 100 mètres
seulement, cette espérance de vie est inférieure à 300 ans, 500 au grand
maximum. La probabilité d'une collision entre la Terre et une comète active de
100 ou 200 mètres de diamètre, durant cette courte période, est donc pratiquement
nulle. Il faudrait que cette collision ait lieu lors de l'une des 50
premières révolutions de la comète autour du Soleil, après sa capture dans le
Système solaire intérieur. Cela sent trop le "coup de pouce du
destin", inadmissible pour un scientifique sérieux.
J'ai
dit plus haut, dans le chapitre consacré aux comètes, que les fortes approches
à la Terre des comètes actives sont très rares : environ
une demi-douzaine par siècle à moins de 0,100 UA, ce qui est vraiment très peu
(25). Pour les comètes de moins de 100 mètres, on peut tabler sur
seulement une approche par siècle en moyenne. Autant dire que pour ce qui est
de l'impact d'une comète active de 100 mètres de diamètre moyen
avec la Terre, les chances sont quasiment nulles. On voit que l'hypothèse de la
comète active est pratiquement réduite à néant avec ce problème de l'espérance
de vie des comètes.
Il
n'en reste pas moins vrai que l'hypothèse de l'EGA cométaire, ou pour parler
autrement du noyau cométaire, est là pour prendre la relève. Elle a
longtemps été retenue par la majorité des astronomes, car elle semblait
nettement la plus probable, malgré quelques insuffisances gênantes.
On sait que certaines comètes (certaines et pas toutes)
possèdent un noyau solide qui survit sous forme d'astéroïde (d'origine)
cométaire, une fois que tous les éléments volatils qui distinguent une comète
se sont sublimés dans l'espace (26). La vie passive (ou inactive)
des comètes à courte période est environ 1000 fois plus longue que leur vie
active et dure quelques millions ou dizaines de millions d'années. Ce laps de
temps leur laisse, évidemment, tout loisir de venir frôler une ou plusieurs des
quatre planètes intérieures, avant d'entrer en collision avec l'une d'elles, ou
d'être éjectées du Système solaire à la suite de perturbations catastrophiques.
Une densité au moins égale à
2,0 g/cm3
De nombreux spécialistes croient que le noyau cométaire de la
Toungouska était probablement une chondrite carbonée géante, de
densité voisine de 3,0 g/cm3 et d'un diamètre de 70 mètres environ,
si l'on admet la masse de 500 000 tonnes tenue pour la plus probable. Pour une
densité un peu plus faible, c'est-à-dire 2,0 g/cm3, le diamètre
pouvait avoisiner les 80 mètres.
La
majorité des effets constatés pendant et après l'explosion dans l'hypothèse
cométaire restent valables dans celle du noyau. Mais celui des phénomènes
lumineux devient moins évident, encore que les nuits claires sont explicables
par la diffusion dans l'atmosphère des milliards de particules microscopiques
produites lors de l'explosion. Rappelons-nous les éruptions volcaniques de
grande envergure et le "pseudo-miracle de Josué" qui ont été associés
à une luminosité inaccoutumée de l'atmosphère.
Cette
hypothèse de l'impact d'un noyau cométaire, qui semblait s'imposer
définitivement dans le courant des années 1970, et qui reste d'ailleurs tout à
fait envisageable, a cependant été progressivement contestée pour des raisons
que je vais expliquer maintenant.
L'hypothèse de l'astéroïde
Etonnamment,
cette hypothèse qui avait prévalu en 1908, sous l'appellation de météorite
géante de la Toungouska, qui a plus
ou moins survécu par la suite, est revenue progressivement sur le devant de la
scène, soutenue par des grands spécialistes comme Zdenek Sekanina et
Ramachandran Ganapathy. Elle est aujourd'hui de loin la plus probable (27/28),
même si elle a le défaut d'expliquer plus difficilement certains effets
constatés. La difficulté principale dans cette hypothèse est de démontrer que
tous les effets enregistrés pendant et après l'explosion peuvent s'expliquer
aussi bien que dans le cas de l'hypothèse cométaire.
Depuis
le début des années 1960, une dizaine de stations scientifiques permanentes ou
semi-permanentes, réparties dans quelques pays, et depuis les années 1970
l'armée américaine (longtemps sous le couvert "secret défense" pour
des raisons de sécurité militaire), prennent systématiquement des photos des
boules de feu et des gros météores qui entrent dans l'atmosphère. L'analyse des
clichés obtenus dans ces stations a clairement montré que les
collisions entre la Terre et des objets cosmiques allant de 100 à 100 000
tonnes étaient beaucoup plus fréquentes que ce qu'on imaginait
auparavant. Mais seule une très faible proportion de ces bombes cosmiques parvient
à survivre à la traversée de l'atmosphère terrestre, qui s'est avérée être un
écran protecteur très efficace, notamment les couches inférieures (troposphère
et stratosphère).
L'étude
soigneuse de milliers de clichés a permis de distinguer trois types différents
de corps heurtant la Terre. D'abord, des objets durs, rocheux, que l'on a
identifié avec les météorites pierreuses de nos collections (types H, L et LL)
et qui sont des vestiges d'astéroïdes brisés lors de collisions dans l'espace. Il
s'agit de la population dite planétaire. Ensuite, des objets plus
fragiles, semblables aux météorites carbonées (type Cc) et que l'on pense être
des vestiges cométaires. La "météorite" de la Toungouska serait l'un
d'eux selon certains spécialistes. Enfin, un troisième groupe concerne deux
types de matériaux très friables : une forme primitive de roches carbonées et
des boules de poussières, essaims de particules soudées entre elles. Ces
deux groupes concernent la population dite cométaire. Peu de
météorites métalliques et de sidérolithes ont été observées par les stations de
surveillance, et l'on pense maintenant que ces deux types de météorites
représentent seulement 1 ou 2 % du matériel cosmique balayé journellement par
la Terre.
Une désintégration tardive
Le
problème de l'altitude des apparitions et des disparitions des différentes
boules de feu enregistrées sur les clichés a été particulièrement étudié. Une
surprise apparaît au moment des conclusions. C'est que même les grosses roches
du groupe planétaire sont pulvérisées durant leur traversée de l'atmosphère et
que seuls quelques débris, atteignant parfois une tonne, touchent le sol. C'est
encore nettement plus évident pour le matériel des deux groupes cométaires qui,
dans la plupart des cas, ne parvient pas jusqu'à la surface terrestre.
En
octobre 1969, une boule de feu a survolé la ville d'Ojarks aux Etats-Unis. Elle
s'est désintégrée à 22 km d'altitude en donnant lieu à deux fortes explosions,
qui produisirent des ondes de choc comme en Sibérie. En décembre 1974, une
boule de feu encore plus grosse, dont la masse a été estimée à 200 tonnes
environ, a survolé la ville de Sumawa en Tchécoslovaquie. Elle s'est totalement
désintégrée en trois secondes. Les principales émissions lumineuses eurent lieu
entre 73 et 61 km d'altitude. Seul un petit fragment a atteint 55 km, et aucun
débris n'a touché le sol.
Pour l'objet de la Toungouska, il est certain que l'explosion a
eu lieu entre 5 et 10 km d'altitude, la plus probable étant 6 km. A cette
altitude, la pression aérodynamique est environ trente fois supérieure à celle
existant à une altitude de 22 km, à laquelle se désintégra la boule de feu
d'Ojarks. On voit qu'il y a là un problème sérieux. Une explosion à 6 km d'altitude
est une explosion basse, incompatible avec l'hypothèse d'un noyau de
glace envisagé dans le cas d'une comète active. Cette explosion basse est même
difficilement conciliable (mais sans doute pas impossible) avec l'hypothèse de
l'EGA cométaire, avec un noyau à base de chondrite carbonée qui est un matériau
fragile, mais qui parvient quand même parfois à toucher le sol, puisqu'on en
connaît plusieurs spécimens dans nos collections de météorites.
Le verdict de la résine :
un astéroïde à enstatite
C'est
ce problème de l'explosion bien tardive, d'autant plus que l'objet de la
Toungouska a eu une longue trajectoire intra-atmosphérique, qui a obligé les
spécialistes à réenvisager l'hypothèse, longtemps abandonnée, de la météorite
véritable. Certains ont longtemps penché pour un matériel planétaire, composé
de roches relativement dures (densité de l'ordre de 3,5 g/cm3),
comparables à celles des chondrites des types LL ou L de nos collections de
météorites. Le bombardement se serait uniquement produit sous une forme
microscopique et ses vestiges seraient les milliards de globules minuscules qui
existent, sous forme de "mitraille" enfouie dans la zone sinistrée de
la Sibérie centrale.
Un
progrès très significatif a pu être obtenu au début des années 1990. Une équipe
Italienne, menée par Giuseppe Longo et Menotti Galli
(1922-2011) 29/30), a eu l’excellente idée d’étudier des gouttes
de résine datant de 1908 et préservées dans le tronc même de certains conifères
meurtris de la zone d’impact. Cette résine s’est révélée
extraordinairement riche, puisqu’elle contient en grande quantité des
micro-particules, en particulier du fer, du calcium, de l’aluminium, de la
silice, de l’or, du cuivre, du titane, mais aussi plusieurs autres éléments.
Les spécialistes italiens ont conclu à l’explosion d’un astéroïde à
enstatite de type E, c’est-à-dire un corps équivalent à nos chondrites
à enstatite dont on connaît deux variétés (EL et EH).
Comment
interpréter ce résultat étonnant et très important ?
Ogdy : un fragment
planétaire d’un objet mixte
Ogdy, dont le diamètre était de 60 ou 80 mètres, était
obligatoirement un fragment d’un astéroïde cométaire, c’est-à-dire un
objet qui a eu dans le passé une activité cométaire. Mais si cette activité
était définitivement stoppée, peut-être à cause de l’existence d’une croûte
trop épaisse pour permettre aux derniers éléments volatils de se sublimer, la
désintégration a libéré la totalité du matériel du corps cosmique et permis les
effets cométaires indiscutables dont j'ai parlé.
On
sait aujourd'hui que les innombrables fragments générés par Hephaistos et ses
divers groupes, nés d'un émiettement inéluctable et quasi permanent
depuis quelques milliers d’années, sont de nature soit cométaire, soit
planétaire. Certains morceaux existant encore doivent être mixtes, avec des
traces de glace originelle remontant à la formation même du corps parent.
Nous
avons expliqué que le fameux Complexe des Taurides, identifié
par Fred Whipple (1906-2004) dans les années 1950, mais sans qu’il
fasse le rapprochement avec Ogdy, contient d’innombrables
morceaux de taille décamétrique, de nombreux autres de taille hectométrique et
quelques-uns de taille kilométrique et que tous ne sont pas homogènes, loin de
là. L’hétérogénéité pourrait être la règle, si l’on en
croit la grande variété des micro-particules repérées dans la fameuse résine
des chercheurs italiens et celles ramassées sur le site lui-même, et qui ont
étonné par leur richesse qui a fait croire à certains que leur origine était
artificielle (voir plus loin).
Personnellement,
je crois, comme tous les astronomes de l’école britannique des
néo-catastrophistes, à l'hypothèse de Kresak, d'une
parenté entre P/Encke et Ogdy, mais pour celui-ci une composition ou
planétaire ou mixte. Cette hypothèse devrait se préciser ces
prochaines années. Mais d'ici là un léger doute subsiste.
Une source inépuisable d'hypothèses et d'élucubrations
La Toungouska : un OVNI
qui a explosé
Ce
doute, à coup sûr, arrangera tous ceux qui aiment le mystérieux et le
fantastique, et surtout ceux qui en vivent. Le mystère "fait vendre",
il faut s'y faire. Mais le mystère s'est éclairci quand même très sérieusement,
et les nouveaux auteurs auront du mal à être crédibles s'ils s'éloignent des
trois hypothèses classiques.
J'ai
expliqué que l'absence de cratère météoritique et de débris apparents constatés
lors de la première expédition scientifique de 1927 avait débridé les
imaginations. A ce jour, on ne compte pas loin d'une centaine d'hypothèses
publiées, certaines n'étant rien d'autre que des élucubrations dénuées de tout
fondement scientifique (31). Pour conclure ce chapitre, je rappelle pour
mémoire les trois hypothèses les plus connues et qui ont toutes obtenu lors de
leur parution un petit succès d'estime. Il faut cependant ajouter, d'ores et
déjà, que la très grande majorité des scientifiques sérieux ne les considère
plus que comme des curiosités.
Il
faut d'abord parler de l'hypothèse de l'astronef
extraterrestre, émise en 1946 par l'ingénieur soviétique Alexandre Kazantzev (1906-2002)
(32), et reprise depuis par de nombreux auteurs, scientifiques ou non.
Pour certains, l'astronef entier aurait explosé dans le ciel sibérien, mais
pour d'autres, il pourrait seulement s'agir d'un dispositif nucléaire de
l'engin largué sur Terre pour une raison inconnue. Kazantzev avait été frappé
par la similarité des dégâts constatés en Sibérie et à la suite des explosions
de Hiroshima et de Nagasaki en 1945. Il est facile de comprendre pourquoi
Kazantzev a fait de nombreux émules depuis, le côté fascinant de son hypothèse
est plus passionnant que la stricte hypothèse astronomique.
Il
est inutile de cacher que depuis 1946, cette possibilité de l'explosion d'un
vaisseau extraterrestre a toujours excité la curiosité des amateurs d'insolite.
Cette hypothèse s'est donc souvent trouvée répercutée par des organes de presse
un peu trop complaisants, pratiquement chaque fois qu'un nouveau chercheur
connu l'a reprise à son compte, bien souvent pour se faire un peu de publicité
facile. Ainsi dans son numéro du 30 octobre 1978, le
Parisien Libéré s'est fait l'écho de l'hypothèse de l'astronome
russe Felix Zigel (1920-1988) sous le titre suivant : " Selon
un savant soviétique, un OVNI s'est écrasé sur la taïga en 1908 (33)
". Dans cet article, repris d'autres articles parus en URSS, Zigel
conclut que l'engin était une sonde interplanétaire d'origine artificielle et
que la puissance de l'explosion était de 40 mégatonnes, équivalente à 2200
bombes atomiques de type Hiroshima (ici les chiffres les plus probables sont
multipliés par 4). Il reprend à son compte les sornettes selon lesquelles le
corps céleste aurait changé deux fois de trajectoire en pénétrant dans les
couches denses de l'atmosphère : venant du sud, il aurait d'abord obliqué vers
l'est, pour finir ensuite vers l'ouest. D'après Zigel, seul, évidemment, un
engin artificiel aurait pu effectuer de telles manœuvres. Il parle aussi de la
radioactivité accrue, des preuves de mutations chez certaines espèces
d'insectes et de plantes et de leur teneur anormalement élevée en zinc, brome,
sodium et fer. Il conclut que tous ces éléments ne sont pas typiques des noyaux
cométaires, mais sont très valables pour des constructions artificielles. Je
rappelle quand même que si Zigel a eu un certain succès avec les organes de
presse, il n'en a eu aucun avec les scientifiques soviétiques.
De l’antimatière au trou noir
Cet
exemple montre bien que la passion reste vive quand on aborde le sujet de la
Toungouska. Il n'est donc pas étonnant que chaque hypothèse vraiment nouvelle,
émise par des chercheurs reconnus, bénéficie d'une large publicité. Ce fut le
cas pour les deux hypothèses suivantes qui méritent qu'on les rappelle
rapidement en passant. Elles ont l'avantage sur beaucoup d'autres d'être
crédibles, même si leur probabilité reste extrêmement faible (pour ne pas dire
quasi nulle).
En
1965, trois scientifiques américains : Clyde Cowan
(1919-1974), Chandra Atluri et Willard Libby
(1908-1980) (34) proposèrent leur hypothèse de la
rencontre de la Terre avec un fragment d'antimatière, qui se serait
annihilé lui-même dans l'atmosphère. L'énergie libérée dans ce genre de
collision matière-antimatière est si importante que le fragment d'antimatière
n'aurait pas excédé 16 grammes (contre 500 000 tonnes dans
l'hypothèse météoritique).
Enfin,
il faut citer l'hypothèse du micro-trou noir, avancée en
1973 par deux autres physiciens américains, Albert Jackson et Michael Ryan (35).
Le micro-trou noir aurait eu la masse d'un gros astéroïde (1014 à 1016
tonnes) et un rayon géométrique négligeable (moins d'un millionième de
millimètre). Il aurait traversé la Terre de part en part, à environ 100 000 km
à l'heure, et serait ressorti dans l'Atlantique nord avant de continuer sa
course dans l'espace.
Inutile
de dire que les trois hypothèses ci-dessus, ainsi que toutes les autres dont je
n'ai pas parlé (il faudrait un livre entier), souffrent de la comparaison avec
celles étudiées précédemment, notamment celle de l'astéroïde qui est presque
satisfaisante. Toutes ces hypothèses marginales présentent des
insuffisances notoires, et leur probabilité, comme nous l'avons dit, est
pratiquement nulle.
L'imagination étant l'un des propres de l'homme en
général, et du scientifique en particulier, de nouvelles idées apparaîtront
encore dans l'avenir pour tenter d'expliquer cette catastrophe cosmique, la
plus importante du XXe siècle. Mais ce n'est pas s'avancer beaucoup
de dire qu'elles resteront, à coup sûr, des hypothèses marginales.
La région de la Toungouska, site protégé pour l'avenir
Le
retard pris pour aller étudier la région de l'impact (il a fallu attendre 19
ans pour que Kulik puisse atteindre la région dévastée) a été une faute
impardonnable sur le plan scientifique, une faute totalement inimaginable de
nos jours, et, il faut bien le dire, incompréhensible. Aujourd'hui c'est une
lutte sans merci, quasiment une course de vitesse, entre les scientifiques qui
veulent percer les secrets encore décelables et la nature qui, comme toujours
sur la Terre, reprend progressivement ses droits et efface inexorablement les
traces du passé.
Les
autorités russes, bien conscientes de l'intérêt tout à fait considérable de la
région sur le plan scientifique, ont ouvert le droit aux savants étrangers de
venir, eux aussi, sur le site, privilège réservé aux chercheurs
soviétiques jusqu'au début des années 1980 (36). On sait que cette non-étude par les
savants des autres pays a débouché sur des querelles concernant certains
résultats qui ont été ouvertement critiqués, notamment ceux concernant les
mutations, données comme certaines par les uns et niées par les autres.
On
peut être certain que l'internationalisation de la recherche sur le site de la
Toungouska va déboucher sur des résultats importants. De nouvelles simulations
dues à l'astronome russe Vladimir Svetsov (37) laissent à penser
que des petits fragments de l'objet de la Toungouska ont pu se
séparer du corps principal à une altitude de 20 à 15 km et ainsi éviter la
désintégration générale qui l'a totalement détruit entre 5 et 10 km. Certains
de ces petits fragments ont pu survivre et toucher le sol. Reste à les trouver.
Les calculs de Svetsov montrent qu'il faudrait chercher nettement au sud-est de
l'épicentre, entre 5 et 10 km.
Quelle
satisfaction si de nouvelles recherches intensives sur le terrain permettaient
de retrouver ne serait-ce que quelques-uns de ces fragments ayant survécu à la
désintégration. Malgré les difficultés, les chercheurs restent optimistes.
Avoir dans les mains un échantillon du centaure Hephaistos qui a fait
tant de misères à nos ancêtres est probablement une réalité de demain.
Notes
1.
Cette date du 30 juin 1908 est celle du calendrier international (grégorien),
quasiment utilisé dans le monde entier à l'époque, sauf en Russie et
dans d'autres pays soumis à la religion orthodoxe (Grèce, Bulgarie,
Yougoslavie). En Russie, on utilisait encore à l'époque tsariste le calendrier
julien (établi sous Jules César) qui comportait un décalage de 13 jours
en moins. Pour les Russes de l'époque présoviétique, la catastrophe sibérienne
est donc datée du 17 juin 1908 (date notée dans les pays étrangers 17/30 juin,
17 vieux style, 30 nouveau style ou grégorien). Ce n'est que le 1/14 février
1918 que l'URSS adopta le calendrier grégorien. La Grèce s'y soumit en 1923
seulement. On se doute que c'est le poids du clergé qui permit aux pays de
religion orthodoxe de rester si longtemps à l'écart d'une (r)évolution
calendaire tout à fait indispensable.
2.
J'ai choisi d'utiliser le terme français de Toungouska plutôt que le
terme international de Tunguska. Alain Carion, dans son livre Les
météorites et leurs impacts, et d'autres auteurs ont fait un choix
identique, mais le terme Tunguska reste très utilisé, même en France.
3. Z. Sekanina, The Tunguska event : no
cometary signature in evidence, Astronomical Journal, 88, pp. 1382-1414,
1983. Article de référence écrit par un expert des comètes qui réétudie toutes
les données astronomiques et physiques sur le météore de la Toungouska et qui
conclut à une origine astéroïdale pour cet objet.
4. R.A. Gallant, Journey to Tunguska, Sky
and Telescope, 87, pp. 38-43, june 1994.
5. C. Sagan, Cosmos (Mazarine, 1981). Titre
original : Cosmos (1980). Dans ce livre de vulgarisation, associé à une
série d'émissions télévisées, Carl Sagan a consacré le chapitre IV, intitulé Le
paradis et l'enfer (pp. 73-99) aux cataclysmes d'origine cosmique. Il parle
du cataclysme de la Toungouska et publie de nombreux récits obtenus, lors de la
première expédition de 1927, de témoins oculaires proches et souvent victimes
eux-mêmes du drame.
6. E.L. Krinov, Giant meteorites
(Pergamon Press, 1966). Le premier livre de référence pour les impacts de
la Toungouska en 1908 et celle de Sikhote-Alin en 1947.
7.
Quelques personnes ont atteint la région de la Toungouska avant 1927, mais on
ne peut pas parler d'expédition scientifique. Dès 1910, à l'époque
tsariste, un certain négociant russe nommé Susdalev, sans doute appâté par un
profit possible (on était persuadé qu'il était tombé une météorite à
l'époque), se rendit sur place, mais hormis l'ampleur impressionnante des
dégâts, il ne trouva rien de monnayable et en tout cas aucun fragment de
météorite.
8. E.L. Krinov, The Tunguska and Sikhote-Alin
meteorites dans B.M. Middlehurst and G.P. Kuiper (eds), The Moon,
Meteorites and Comets (University of Chicago Press, 1963). Dans le chapitre
8 de ce gros livre collectif (pp. 208-234), Krinov raconte d'une manière
détaillée les premières expéditions sur le site.
9.
Ne pas confondre Francis Whipple (1876-1943), astronome britannique qui
le premier, en 1930, proposa une origine cométaire pour l'événement de la
Toungouska et Fred Whipple (1906-2004), astronome américain spécialiste
de l'étude des comètes. Leurs initiales identiques ont parfois prêté à
confusion.
10. C. Trayner, The Tunguska event,
Journal of the British Astronomical Association, 107, 3, pp. 117-130, 1997. Intéressant
article de synthèse qui comporte une bibliographie d'une centaine de titres.
11. L. Kresák, The Tunguska object : a
fragment of Comet Encke ?, Bulletin of the Astronomical Institutes of
Czechoslovakia, 29, 3, pp. 129-134, 1978.
12. A. Ben-Menahem, Source parameters of the
siberian explosion of june 30, 1908, from analysis and synthesis of
seismic signals at four stations, Phys. Earth Planet. Int., 11, pp. 1-35,
1975.
13.
Ogdy était obligatoirement un EGA de type Apollo qui s’éloignait du Soleil
et qui donc avait été dans les jours précédant l’impact noyé dans le
rayonnement solaire. La géométrie de son approche à la Terre était telle qu’il
était totalement indécelable.
14. V.G. Fesenkov, A study of the Tunguska
meteorite fall, Soviet Astronomy, 10, pp. 195-213, 1966. Vassili
Fesenkov (1889-1972) a été l'un des pionniers de l'astrophysique en URSS et un
expert en météorites et en cosmologie.
15. K. Hindley, Tunguska, la boule de feu du
siècle, La Recherche, 112, pp. 717-718, 1980. Dans cet article, Keith
Hindley signale qu'en 1834, à l'occasion d'un draînage, on a trouvé des traces
comparables à celles de la Tougouska dans l'île d'Axholme dans le Lincolnshire
(Angleterre). Le cataclysme pourrait remonter à quelques millénaires. Est-il
possible qu'il soit associé au cataclysme du 13e siècle avant J.-C.,
ce qui paraît assez vraisemblable compte tenu de sa localisation géographique,
ou à l'impact d'un autre fragment de Hephaistos ?
16.
Tous les spécialistes, pourvus d’ordinateurs de plus en plus performants,
travaillent sur différents modèles de collision, en faisant varier évidemment
tous les paramètres. Cela donne des résultats satisfaisants pour l’esprit mais
qui restent théoriques. Les résultats obtenus n’ont souvent rien à voir
avec ce qui s’est passé ponctuellement pour une collision donnée.
17.
Le nombre de Mach qui est utilisé pour les vitesses supersoniques n'est
pas une unité de vitesse. C'est le rapport, variable selon le milieu et la
température, entre la vitesse du mobile et celle du son. La vitesse du son,
dans l'air à 0°C, est de 331 m/s (1192 km/h). Dans une atmosphère surchauffée,
comme dans le cas d'un impact, cette vitesse augmente (par exemple, dans de
l'air à 500°C, elle est de 557 m/s, soit 2005 km/h). Dans l'eau à 8°, la
vitesse du son est beaucoup plus élevée : 1435 m/s (5166 km/h). On voit qu'une
vitesse moyenne d'impact, qui est de 20 km/s, n'a rien de comparable avec la
vitesse du son : elle est près de 60 fois supérieure.
18. B.Y. Levin and V.A. Bronshten, The
Tunguska event and the meteors with terminal flares, Meteoritics, 21, pp.
199-215, 1986.
19. J.C. Brown and D. W. Hughes, Tunguska's
comet and non-thermal 14C production in the atmosphere, Nature, 268,
pp. 512-514, 1977.
20.
M.-A. Combes et J. Meeus, Les fortes approches des comètes à la Terre,
L'Astronomie, 110, pp. 254-261, 1996.
21.
En 1982, dans la version originale de La Terre bombardée, j'écrivais un
peu trop légèrement : " Mais là encore, ces deux coïncidences
sont tout à fait insuffisantes pour prouver une origine commune ". On
sait aujourd'hui que P/Encke est le résidu (pas forcément le résidu principal,
même s'il semble être le dernier encore actif, donc le
seul d'apparence cométaire) d'une grosse comète qui venait il y a quelques
dizaines de milliers d'années à proximité de la Terre. De nombreux petits corps
d'apparence astéroïdale circulent sur des orbites similaires (voir le
chapitre sur les comètes pour plus de détails).
22. P.A. LaViolette, The cometary breakup
hypothesis re-examined, Monthly notices of the Royal astronomical society,
224, pp. 945-951, 1987.
23.
M.-A. Combes, Note sur les EGA planétaires et cométaires, L'Astronomie,
94, pp. 131-137, 1980.
24. E.J. Öpik, Interplanetary encounters,
1976.
25. Voir le tableau 7-1 qui recense seulement 4
fortes approches (inférieures à 0,100 UA) de comètes actives à la Terre
pour le XXe siècle. Même si certaines comètes faibles ont pu être
ratées par les astronomes, il est exclu que les fortes approches aient
dépassé la dizaine, ce qui est très peu.
26. Z. Sekanina, A core-model for cometary
nuclei and asteroids of possible cometary origin, pp. 423-428, in T.
Gehrels (ed.), Physical studies of minor planets (NASA, SP-267, 1971).
27. J.G. Hills and M.P. Goda, The
fragmentation of small asteroids in the atmosphere, Astronomical Journal,
105, pp. 1114-1144, 1993.
28. G.V. Andreev, Was 1908 Tunguska's event
begot by Apollo-type object ?, in C. Lagerkvist and H. Rickman (eds), Asteroids,
Comets, Meteors III, 1987.
29. G. Longo et al., Search for mocroremnants
of the Tunguska cosmic body, Planetary and Space Science, 42, pp. 163-177,
1994.
30. Tunguska’s smoking gun ?, Sky
and Telescope, p. 14, december 1994.
31.
On a recensé une cinquantaine d'hypothèses différentes pour expliquer le
cataclysme de la Toungouska, certaines étant totalement farfelues, quasiment
débiles. Seules une demi-douzaine sont possibles, trois seulement sont crédibles.
32.
L'ingénieur russe Alexandre Kazantzev a proposé le premier l'hypothèse de
l'impact accidentel d'un vaisseau spatial dès 1946, mais il n'y a pas le début
de commencement d'une preuve. Cette hypothèse n'est ni plus ni moins qu'un
fantasme, mais il ne faut pas oublier que Kazantzev était aussi un auteur de
science-fiction.
33.
Le Parisien Libéré, Selon un savant soviétique, un OVNI s'est écrasé sur la
taïga en 1908, numéro du 30 octobre 1978.
34. C. Cowan, C. Atluri and W. Libby, Possible
anti-matter content of the Tunguska meteor of 1908, Nature, 206, pp.
861-865, 1965.
35. A.A. Jackson and M.P. Ryan, Was the Tunguska
event due to a black hole ?, Nature, 245, pp. 88-89, 1973.
36.
Ce sont les savants russes eux-mêmes qui demandent que la région de la
Toungouska soit classée site protégé par l'UNESCO. Ce serait le seul moyen de
retrouver encore des traces du cataclysme de 1908 qui s'effacent
inexorablement.
37.
Vladimir Svetsov, comme beaucoup de ses confrères, a effectué plusieurs
simulations concernant l'entrée dans l'atmosphère du météore de la Toungouska.
Il en a déduit que la fragmentation a débuté dans la haute atmosphère, et donc
que les petits débris séparés rapidement du fragment majeur ont pu éviter la
désintégration totale. D'après lui, la découverte de petits fragments rescapés
est très possible, probable même si l'on cherche au bon endroit.
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