Eridan, le grand fleuve ! qui prend sa source aux pieds d'Orion - "Rigel" - remonte un peu, avant de redescendre par 60° de déclinaison sud. Fleuve au long cours ! Las ! son estuaire, marqué par la brillante étoile "Achernar", reste invisible depuis la France. Le Nil pâlit... Le Pô sourit... Et pour cause !...  Ecoutez plutôt cette histoire  :

    "Je t'interdis de prendre mon char !" ordonne Hélios à son fils, "tu le conduirais à sa perte !" Le jeune Phaëton se le tint pour dit. Pour un temps... Lorsqu'il voyait son Père atteler ce char d'or, sillonner les espaces au jet de la lumière, il en mourait d'envie. "Quand pourrai-je, et plus tôt que plus tard, piloter cet engin ?"  Quelques années passèrent. "Si je ne fais qu'un tour, juste le temps d'un vol..." ...Bientôt, la tentation gagna sur sa résolution. Le voici aux commandes ; il connaissait les gestes, il les avait vus faire : il saurait les refaire. Oui, le char démarra sans retard. Quel délice ! Enfin, il l'expérimentait cette dive machine... pour un dieu tel que lui, quel bonheur ! Mine de rien, il avait pris de la vitesse, il cinglait maintenant vers des cieux inconnus. Du moins, le croyait-il.  Freiner ? "Dans un instant, tout à l'heure, quand j'aurai achevé ma conquête."  Soudain, par mégarde, il bouscula les rênes  ; un cheval se cabra, l'autre ferma ses ailes, le dernier paniqua.  Comment rétablir l'ordre ?  Il cria, actionna le fouet qu'il gardait sur sa droite. Rien n'y fit. Le char battait de l'aile, ainsi que les chevaux.  La chute s'amorça, terrible, inexorable. La surface terrestre apparut  : elle grossit fort vite. Ah !... cria Phaëton. Hi !...  lancèrent les bêtes, avant de percuter les eaux larges du fleuve, où le fils du Soleil disparut, dans l'onde submergé. Tout était terminé... et le père éploré... Quel fleuve ?  Le Pô ! il porte le nom mythique d'Eridan.

    Une, deux, trois boucles avant de s'enfoncer très bas vers les mers australes : tel est ce long fleuve Eridan. Le premier méandre prend naissance à l'étoile Lambda (à côté de Rigel), le second rejoint les eaux de la Baleine avant d'amorcer un sérieux repli auprès des étoiles Tau 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 ! Le troisième contourne l'obscur "Fourneau" des alchimistes  ; là, nous perdons la trace de cette eau céleste qui plonge sous notre horizon  ; elle s’en va gagner les frontières de l'Hydre Mâle et du Toucan. Vaste constellation, la sixième en grandeur.

    "Epsilon Eridani", et "Omicron 2 Eridani" ( = "40 Eridan")  : deux étoiles qu'il faut connaître, parmi cette ribambelle de lumignons qui jalonnent le fleuve Eridan, en raison de leur proximité à la Terre. Elles sont si peu nombreuses nos proches voisines ! La première, de magnitude 3,8 se trouve à 10,7 a-l, et la seconde à 15,7 a-l, de magnitude 4,5.  Cette dernière est amusante  : composée d'une étoile semblable au Soleil, elle est accompagnée dans sa course galactique - course rapide puisqu'elle parcourt 4"1 par an en mouvement tangentiel - accompagnée, dis-je, par un couple aux composantes rares : une naine blanche (m = 9,6) et une naine rouge (m = 11,1) écarté de 7" (actuellement), accomplissant un tour d'orbite en 248 ans. Vous trouverez ce couple fidèle à 83" de l'étoile Omicron 2, qui l'emporte dans son sillon.
    Omicron 2 forme avec Omicron 1 un couple optique, écarté de 1°11’

    L'amas de galaxies du Fourneau empiète largement sur Eridan, vers -36° de déclinaison.  Bien difficile à observer...

    b    Bêta Eridani  : Cursa

    a = 5 h 07 m 50 s        d = -5° 05' 11"     Sp  : A3  III    T = 9200 K    (BC  : -0,3)
    m = 2,78    M = 0,6    L = 50        p = 36,71    Dist  : 89 a-l      un compagnon
   
    "Cursa" = "la Course", celle de ce ruban d'argent, qui commence à l'étoile Lambda et passe par cette étoile Bêta. Nous sommes ici à 4° de la source, intarissable, qui alimente le fleuve aux eaux réchauffées par ces puissantes étoiles qui brillent sur son passage. Qu'il fait bon s'y délasser... après notre long voyage au pays des merveilles célestes... 50 soleils marient leurs feux, dans une vasque superbe (3 diamètres solaires), au bord de laquelle devisent... tous les astronomes de la planète, vous et moi... Cette halte auprès des eaux scintillantes se trouve à 89 a-l de nos frontières.
    A 116"7  brille une étoile de magnitude 10,8.


    g    Gamma Eridani   :  Zaurak

    a = 3 h 58 m 01 s        d = -13° 30' 31"     Sp  : M0  III    T = 3500 K    (BC  : -1,6)
    m = 2,97    M = -1,19    L = 250    p = 14,75    Dist  : 220 a-l         un compagnon

    "Zaurak" = "le Canot". Evidemment bien sûr, il fallait y penser... A moins d'être poisson... Le voici au creux de la vague, à la jonction des deux boucles supérieures. Petit point rouge sur les flots impétueux... Parviendra-t-il, avec nous, au terme du voyage ? Depuis longtemps il arpente les eaux, à 220 a-l de notre étoile. 250 soleils-vapeur, 88 diamètres solaires, - 62 millions de km ! - 7 masses solaires en réserve. Vogue, grand canot, ce fleuve est fait pour toi...
    A 52"8 se trouve une étoile très faible de magnitude 12,5.


        Thêta Eridani  :  Acamar

    a  = 2 h 58 m 15 s    d = -40° 18' 17"     Sp  : A3  V et  A    T = 9200 K    (BC  : -0,2)
    m(r) = 2,88    M = -0,59    L = 150    p = 20,22    Dist  : 160 a-l         Double
   
    "Acamar"  : déformation de Achernar  = "le bout du fleuve", nom de l'étoile Alpha. Il parait que du temps de Ptolémée, cette étoile était de première grandeur. Depuis Alexandrie, elle symbolisait le bout du fleuve, l'étoile Alpha étant trop basse. D'où son nom "d'Achernar", déformé depuis.
 
    Que voyons-nous aujourd'hui à l'oculaire d'un télescope ? Un très joli couple installé sur les rivages du fleuve. 8"2 séparent la paire délicatement bleutée (m = 3,28 et 4,36).  100 et 38 soleils unissent leurs coeurs, et réchauffent les nôtres... Spectacle à voir à 160 a-l de nos frontières.


    a    Alpha Eridani   :  Achernar

    a = 1h 37 m 42 s        d = -57° 14' 12"     Sp  : B5  IV    T = 17000 K    (BC  : -1,7)
    m = 0,45    M = -2,77    L = 1100    p = 22,68    Dist  : 144 a-l        simple

    "Achernar" = "le bout du fleuve" - le vrai bout  : le voilà enfin ! et avec lui, le terme de ma croisière sidérale  ; bonheur ! J'ai parcouru les cieux, visité une à une les constellations – les trois quart d’entre elles, toutes celles visibles à nos latitudes (+45°). Pour vous, j'ai joué de la Lyre, combattu le Taureau, apprivoisé le Cygne... Je vous offre ces perles, collier multicolore, qui chassent la nuit noire... Gardez-les lumineuses !...