L  e s      P o i s s o n s      (Psc)
P i s c e s (i s)      (889 degrés carrés)


    Où est-il ce poisson vorace, friand d'Andromède ? Vite, que nous le maîtrisions ! Saisissons-le par les ouïes !  Qu'il tombe dans le filet, et morde à l'appât fatal ! Il se cache dans l'eau écumante, se tapit dans le fond des abîmes.  Parviendrez-vous à le voir ?  Ce n'est pas facile, j'en conviens... Portez d'abord votre attention sur le carré de Pégase. Le premier poisson - celui de l'histoire - apparaît à l'est immédiat du carré et au sud d'Andromède.  Là se dessine le corps de l'animal : un ovale composé d'étoiles faibles - magnitude 4 et 5 - encerclant le méridien 1 heure. Le second poisson - car ils sont deux -  se dissimule au sud du carré. Passivement installé sur le dos du coursier, attend-il qu'un regard perçant le découvre et le happe au passage ? Vous ?... Composé d'étoiles peu lumineuses, de forme plutôt allongée, il nage entre les méridiens 23 et 0 h.

    Pour vaincre l'ennemi aquatique, Persée a lancé sur les flots deux fils solidement ferrés : c'est du moins ce qui apparaît sous nos yeux. Les voici qui mordent à l'hameçon. Voyez ces deux lignées d'étoiles, de faible éclat, qui se rejoignent à l'étoile Alpha, la plus lumineuse de la constellation (magnitude 3,82). Pour découvrir cette dernière, prolongez vers le sud la corne du Bélier (étoiles b et g). Faut-il connaître le Bélier ! me direz-vous. Rien de plus facile : ses deux étoiles (a et b), les plus brillantes, apparaissent au sud d'Andromède.

    Quoique trop faible pour entrer dans notre étude, Alpha Piscis mérite qu'on s'arrête un instant auprès d'elle. Couple orbital très serré (1"8 en l'an 2000), il gravite en 720 ans. Magnitude des composantes : 4,16 et 5,27. Demi-grand axe : 4". Bleuté, ce duo exécute sa danse éternelle à 140 a-l (mesure Hipparcos).

    Fixez maintenant le poisson méridional, qui brille au sud du carré. Tout près de lui, un petit quadrilatère (étoiles n° 27, 29, 30, 33 sur la carte) marque un lieu tout à fait unique ! Figurez-vous qu'au jour précis de l'équinoxe de printemps, le soleil vient se percher sur cette forme géométrique, telle une lampe sur son lampadaire, une flamme sur son chandelier. Magnifique ! C'est là, au nord immédiat de ce quadrilatère, que se croisent l'équateur céleste et l'écliptique, au point appelé « vernal » (1) , là que passent le méridien 0h et le parallèle 0° des coordonnées, là que sonne l'heure précise de l'équinoxe - à la seconde près - lorsque la droite passant par le centre du soleil et le centre de la terre passe également par ce point  : oui, en ce lieu dépourvu d’étoiles brillantes - sinon notre étoile un fois l'an - s'opère l'égalité des jours et des nuits, et le passage d'une saison à la suivante... Vous pouvez toujours afficher ces deux coordonnées sur votre télescope et observer le champ à l'oculaire  : c'est celui du Soleil au jour et à l’heure du printemps ! champ visible de nuit six mois plus tard.

    A cause de la précession des équinoxes - curieuse "machine" à remonter le temps - ce point vernal "Gamma" rétrograde sur le ciel, si bien que, d’une année sur l’autre, le printemps gagne 20 minutes, ou si vous préférez 50"25 de degré sur 360 °. Il y a 4000 ans, ce point "Gamma" entrait dans le Bélier  : origine du zodiaque à cette époque - origine que les astrologues jalousent aujourd'hui encore, comme si le ciel s'était arrêté de tourner. Passons... 2000 ans plus tard - soit au temps de Jésus-Christ - il entrait dans les Poissons. Il va bientôt en sortir pour entrer dans le Verseau. L'ère d'abondance évoquée par cette corne prolifique va bientôt commencer. Chic !
    Quant à vous, astrologues, devins, magiciens, sorciers, nécromanciens... rangez vos copies, brûlez vos archives, trop longtemps adorées. Elles ne valent plus rien. Et vous, clients juteux, crédules, gobes-mouches... gardez vos sous et... faites de l'astronomie !...


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note 1 - "ver" = printemps en latin. Les astronomes appellent le point vernal de la lettre grecque "gamma".