Le  Scorpion     (Sco)
Scorpius  (ii)      (497 degrés carrés)


    Lever les yeux pour voir le Scorpion ? Inutile ! Sa tête et son corps émergent juste de l'horizon sud, à nos latitudes. Son dard  surgit recourbé, au niveau des brumes estivales. Qui veut-il piquer de cet aiguillon venimeux ? Le bouillant tortionnaire qui, d'un coup de tenaille, a tranché ses pinces géantes pour les transformer en "Balance" égyptienne ? Métamorphose des plus inattendues... Qu'il prenne garde, l'auteur du forfait, profanateur de la nature !  Qui veut-il atteindre de sa queue gorgée de poison ? – Orion ! le chasseur intrépide. L'insensé osa - scandale ! - brandir son épée d'acier, contre Diane, la vierge sacrée. Oui ! les yeux pleins de convoitise du fils de la mer ont souillé la Reine des bosquets et des bois. Faute impardonnable ! Seule la mort expiera le crime. "Va, et tue-le", cria Diane au scorpion. Sitôt dit, sitôt fait !

    Jeu d'enfant que de voir le Scorpion ! C'en est un, il n'y a pas de doute ! Seul problème : il ne sort de sa cachette qu'en été, le soir, en quête de nourriture. Là, vous le trouverez à coup sûr. La Voie Lactée dans sa course aérienne le croise sur sa gauche. Voyez comme son étoile principale, Antarès, rouge de son état, brille de mille feux... coeur éclatant pour ce sombre arachnide... A sa droite (nord-ouest), l'éventail de la tête - ou si vous préférez ce qui reste des pinces - s'ouvre sur trois étoiles presque verticales : Bêta, Delta et Pi. Au sud, se déploie le corps, avec ses nombreux anneaux, avant de rebondir à la jonction de la queue. Quant au dard, il montre sa pointe à l'étoile Upsilon, par 40° de latitude sud.

    "La grandeur du Scorpion l'a fait partager en deux signes, écrit Eratosthène. Dans l'un sont les Serres et dans l'autre le corps et l'aiguillon ; on voit deux étoiles à chaque serre, l'une brillante et l'autre obscure, trois brillantes au front, deux au ventre, cinq à la queue, quatre à l'aiguillon. Elles sont précédées par la plus belle de toutes : l'éclatante de la serre boréale."  Comment ? Que dis-tu Eratosthène (III av.J.C.) ? L'animal que tu décris n'est plus celui que nous voyons ! du moins plus exactement... "L'éclatante de la serre boréale" (Bêta librae) a décliné !  Quant à Antarès, tu n'en dis pas un mot ! rien  - sinon compté avec "les deux au ventre", comme si elle ne surpassait pas ces compagnes... Hipparque pourtant, au siècle suivant, la range parmi les étoiles de deuxième grandeur... Et de fait, il faut attendre le XVIème siècle, pour qu'Antarès soit listée parmi les étoiles de première grandeur, dans le club très restreint des "stars". Sûr ! elle a gagné quelques magnitudes depuis Eratosthène... Avec ces "filles" de feu, il faut s'attendre à tout... Les chinois d’ailleurs l’appelaient "L’étoile de feu", à cause de sa coloration rouge.

    "Il faut s’attendre à tout", la preuve : en 134 avant notre ère, une "Nova" éclate dans le Scorpion, première de mémoire d'homme. Les Chinois la recensent, les Grecs l'insèrent dans leurs annales. La rumeur grandit d'un bout du monde à l'autre : "une étoile est née au firmament du ciel !" Oui ! A côté de Bêta Scorpii ! Elle est éclatante, plus que toutes les étoiles de la région. Hipparque eut des frissons. Quoi ? le monde des fixes serait-il mouvant ? Foi d'astronome ! Il décida de traiter le trouble-fête avec toute la rigueur scientifique qui s'imposait alors. Et de rédiger un catalogue d'étoiles, "afin que la postérité connaisse si des changements arrivent réellement dans le ciel", rapporte en son nom Pline l'Ancien. N'en déplaise aux partisans d'Aristote ! Bientôt, un millier d'étoiles remplirent ses longs feuillets. Précieuse nomenclature ! Premières archives astronomiques qui serviront de base à toute rédaction ultérieure. (1) De fait, au XVIème siècle, Tycho Brahé prit le relais de cet inventaire, depuis son île de Hven, au Danemark. Des fenêtres de son château, sortaient des instruments étranges - cadrans géants, alidades immenses... - propres à effrayer le commun des mortels. Sur les terrasses supérieures s'activaient de curieux ouvriers qui travaillaient la nuit... Tycho Brahé répertoriait longitudes et latitudes de tous les astres visibles à l'oeil nu  - la lunette n'existait pas encore. Travail phénoménal d'une précision remarquable (au tiers de minute de degré). Grâce à ses nombreux registres, exploités ensuite par Képler, l'astronomie fit un bond prodigieux dans la compréhension des phénomènes célestes. Si Tycho Brahé s'est enflammé pour la "Science des sciences", c'est grâce à la nova de Cassiopée, celle de 1572, dont nous avons déjà parlé  ; mordu par le virus, grâce à une nova, comme Hipparque... Il avait alors 26 ans. De même Képler ! Lorsqu'il vit la nova de 1604 dans le Serpentaire, à l'âge de 35 ans, son zèle décupla pour la belle Uranie... A croire que le ciel suscite lui-même ses "amants", au bon moment, et à bon escient...!

    393 après J.C  : seconde nova dans la queue du Scorpion. (catalogue de Ma-Tuan-Lin)
    + 827  : troisième apparition d'un astre dont la "lumière égale celle de la Lune à son premier quartier", toujours dans le Scorpion. L'observation est celle de deux célèbres astronomes arabes, à babylone  (2) . L'apparition dure quatre mois.
    1203  : quatrième signal, bleuâtre, sans nébulosité, semblable à Saturne (en éclat), qui s'éveille dans la queue. (catalogues chinois)
    1584  : cinquième nova, près de Pi Scorpii. (observation chinoise)

    Dernière nouvelle  : Février 2007, nova près de l’étoile RR Scorpii (voyez la carte), qui atteint la magnitude 3,6  le 16 du mois.

    A croire que le Scorpion est la "pochette-surprise" des astronomes ! Alors, observez-la cette constellation ! En fait, elle se projette sur le bulbe galactique, devant ce tourbillon central où se déroule une foule d'événements - ce qui explique ce flot de manifestations. L'épaisseur de ce "noyau" moteur : 30 degrés sur le ciel (16 000 a-l) en grande partie occultés par des poussières interstellaires : d'où la séparation du bulbe galactique en deux branches distinctes, nous l'avons dit déjà. On raconte même, que, sans ces poussières, le coeur galactique brillerait comme la pleine lune ! Adieu les nuits profondes de l'été ! Adieu nébuleuses et galaxies ! Et pour peu que la Lune, la vraie, s'en mêle, bonjour les dégâts ! Autant rester sur l'oreiller... à moins d'opter pour d’autres observations, comme la mesure des étoiles doubles ou variables, par exemple...



    a    Alpha  Scorpii  : Antarès

    a = 16 h 29 m 24 s        d = -26° 25' 55"     Sp  : M1  Ib    T  : 3400 K    (BC  : -2,2)
    m =  1,06    M = -5,28    L = 11 000    p = 5,40  Dist  : 600 a-l    Variable et double

   
    Commençons par la reine de ces lieux lointains : "Antarès".  Belle, plus que toutes ! Rouge comme un écrevisse,  non, comme un scorpion !  Elle a voulu, dit-on, copier la planète Mars - rouge comme chacun sait - qui croise parfois son terrain d'action. Depuis l'allumage de sa phase d'hélium, elle déclare à qui veut l'entendre  : "Je suis Antarès = rivale de Mars" (Anti-Arès). Dès lors, que vit-on ?  Une couleur de sang enflammer la région. Y a-t-il au ciel étoile (brillante) plus rouge ?... "L’étoile de feu" disent les Chinois, "la Rouge" disent les Perses, mais aussi "la Gardienne du Paradis", en 3000 avant Jésus-Christ. Jolie ! Pour les Arabes, c’est le "Coeur du Scorpion".

    Autre clin d'oeil de la belle colorée :  pour attirer sur son nom tous les yeux - prétention inouïe - elle émet des éclairs de lumière. Puissant phare sur la route de Saint Jacques,  elle double son éclat tous les 4,7 ans (1733 jours), passant de la magnitude  1,8 à 0,88.  Et d'une façon semi-régulière. Quelle enjouée ! Alors, les lourdes brumes qui souvent se prélassent sur l'horizon  sud ont beau faire : elles ne l'éteignent plus ! "Je suis le coeur du scorpion,  pourquoi vous étonner qu'il batte ?"  Soit  !  Mais l'on voudrait savoir quel jeu se cache derrière ce faisceau de lumière. "Vous ne le saurez pas, répond-elle, domaine réservé, vie privée !" - "Vie ultra connue, voyons ! sous l'action de l'hélium, tu as grossi trop vite, sans parvenir à équilibrer les forces contraires de la gravitation et de la radiation. 11 000 soleils s'échappent de ta robe de feu, 78 000 si l'on ajoute ton rayonnement dans l’infrarouge...!"- " Je suis fille du ciel... prête à concourir au prix de "Miss Univers". Voyez, si je régnais en lieu et place de votre étoile le Soleil, je vous dévorerais... tout cuits ! et jusqu'à la ceinture de vos astéroïdes, qui gravitent entre Mars et Jupiter. Calculez mon rayon, et voyez !" - Elle dit vrai, la belle : 560 millions de km  (800 rs) ! Adieu veau, vache, cochon, couvée... Adieu Mercure, Vénus, Terre, Mars... Par interférométrie, la mesure du diamètre donne 0,04" - soit un rayon de 550 millions de km. Pas de doute ! "Un jour, j'exploserai en un puissant feu d'artifice. Mes 23 masses solaires s'épancheront dans l'espace. Séduits par tant d'éclat, vous serez sous le charme, sans crainte aucune, vu la distance de votre système solaire : 600 a-l".
 
    Antarès, dévoile-nous tous tes secrets. Nos paparazzi astronomes ont détecté dans tes rayons une liaison ... que tu caches trop bien pour ne pas intriguer nos coeurs et surtout nos esprits.  Inutile de ruser,  nous savons tout. Le français Paul Baize a même calculé la période de cet astre très bleu (B3) que tu serres de près  : 878 ans. D'après lui, le demi-grand axe de son orbite serait de 2"9, sa magnitude de 5,4. En l'an 2000 il se tiendra à 2"6 de tes festons. (3) Allons, explique-toi !  "Curieux! indiscrets ! fouineurs ! inquisiteurs !...  Si vous aviez idée des dimensions de mon système, vous cesseriez vos commérages... Car une immense distance, 13 fois plus grande que celle de Pluton à votre étoile, sépare nos feux, au nombre de deux... d’après votre dupliciste... Mais, un conseil, vous feriez mieux de reprendre vos calculs... Je n'en dirai pas plus !"


    b    Bêta 1 Scorpii  : Graffias  ou  Acrab

    a = 16 h 05 m 26 s            d = -19° 48' 19"     Sp  : B0,5 V (et B2 V)  T : 23 500 K (et 21 000 K)
    m = 2,56 (et 4,90)     M = -3,5    L = 2100    p = 6,15    Dist  : 530 a-l
    double ou triple + double optique

    "Graffias" = "le Crabe" (nom grec), "Acrab" = le Scorpion ( nom arabe). Crabe ou scorpion, c’est toujours une petite bête, avec beaucoup de pattes. Elle brille, cette étoile, sur ce qui est devenu, par la force des choses, la pince supérieure de l'animal - autrefois le front, du temps où la Balance n'existait pas.
    Superbe cette pince, et double comme il se doit. En fait, elle triche, laissant croire à l'astronome cette binarité. Erreur ! Un rien les sépare pourtant : 13"6, mais ce n'est là qu'une apparence, un couple optique, car si la brillante Bêta 1 habite à 530 a-l, la secondaire Bêta 2, de magnitude 4,90, se trouve à 1100 a-l  : deux fois plus loin.

    Allons bon !  Entendez-vous les astronomes qui s'étripent : "Attention, attention ! l'étoile principale est une binaire authentique, car un petit compagnon, de magnitude 10,3,  se perd dans ses rayons, à 0"5 seulement d'écartement !" - "Se perd, en effet... on ne voit rien du tout !... pure illusion, hallucination..." disent les autres.  Nous en sommes là... à ne savoir que penser sur le cas d'Acrab.

     "A nous spectroscopistes, de sauver l'honneur ! L'étoile est double, bien d'accord, mais pas avec ce compagnon fantôme ! Une étoile, invisible pour vous, boucle son orbite en 6,8 jours, temps trop court pour apercevoir un brin de son rayon."
     2100 soleils composent l'éclat de ce vrai couple serré.
 

    d    Delta Scorpii  : Dschubba

    a = 16 h 00 m 19 s        d = -22° 37' 18"    Sp  : B0 V    T  : 24 000 K      (BC  : -2,8)
    m = 2,29    M = -3,16    L = 1600    p = 8,12    Dist  : 400 a-l    spectroscopique
                                    et récemment variable

    Autant tout vous dire :  cette étoile, comme la précédente, comme les suivantes du Scorpion - mise à part Antarès - a misé sur le bleu pour vivre sa vie stellaire - je parle ici des pinces et du ventre.  Toutes ont opté pour des demeures lointaines, loin des soucis terrestres. Quelle chance ! "Dschubba"  : le "front" du Scorpion, habite à 400 a-l, sur le céphalothorax, dit-on, de l'animal. Caparaçonnée dans son armure de feu - 24 000 kelvins - elle lance à l'entour ses flèches brûlantes. Malheur à qui s'approche ! 1600 soleils quittent à chaque instant sa forteresse flamboyante, sans compter ses armes invisibles - ultraviolettes, 19 000 soleils ! Que risque-t-elle derrière son rempart circulaire, sphérique même : 8 rayons solaires ? Géante bleue ! Elle cache dans ses réserves 20 masses solaires (paraît-il), prêtes à l'emploi. (4)

    Du nouveau, concernant cette étoile. Elle a voulu fêter à sa manière le passage à l'an 2000 ! En mai de cette année-là, un astronome amateur (5) signale une augmentation de son éclat. Alors qu'elle n'est pas classée parmi les variables !  Et de s'agiter dans les observatoires. "Il faut tirer son spectre !" Stupeur ! Des raies en émission apparaissent ! Classée dès lors parmi les variables de type "Be", à raies en émission, l'étoile atteignait la magnitude 1,6 en 2002. En cause : des émissions sporadiques de matières dûes à des pulsations internes à l'étoile. Chassés dans l'espace, et accélérés par le vent stellaire, ces gaz - de l'hydrogène surtout - s'ionisent sous le rayonnement ultraviolet, d'où l'apparition des raies brillantes dans le spectre. Elle a tout copié sur "Gamma Cassopeiae" !

    Autre découverte récente. Décidément ! On la croyait simple, pas du tout ! Un compagnon de magnitude 4,3 gravite dans ses rayons, détecté par interférométrie. Il circule en 10,58 ans sur une orbite très excentrique (e=0,94). Joue-t-il un rôle dans les caprices de madame ? Si oui, minime, il n'aurait pas la force, quoiqu'il s'agisse aussi d'une géante bleue, de déclencher lui-même ces sautes d'humeurs. Au mieux de les exciter  (effet d'onde de choc).


    p    Pi  Scorpii

    a = 15 h 58 m 51 s    d = -26° 06' 50"     Sp  : B1 V et B1 V    T  : 23 000°    (BC  : -2,5)
    m = 2,89    M = -2,85    L = 1200    p = 7,10    Dist  : 460 a-l   
    Spectroscopique + un compagnon
   

    Incroyable, inimaginable, stupéfiant ! 1,57 jour. Voici la période de ce couple fou.  Je tremble à la pensée de ce manège emballé.  Ca finira mal...  Et elles s'amusent,  elles rient, elles dansent, ces belles insensées, bleues, de même éclat - 600 soleils chacune. Jusqu'au jour où.... la collision se produira... C'est certain ! Rayon de chacune : 4,7 rs, soit 3,3  millions de km. Masse de chacune : 11 ms. Densité : 0,1. Cherchons maintenant l'écartement des composantes : 11 millions de km, de centre à centre, soit 4 millions de bord à bord !
    Une troisième étoile, très faible, (m = 12,1) s'approche dangereusement de ce tourbillon d’étincelles, à 50"4.


    s    Sigma Scorpii  : Praecordia  ou  Al Nyat

    a = 16 h 21 m 11 s    d = -25° 35' 34"     Sp  : B2  III  et O9,5  V   T  : 21 000 et 25 000 K
    m = 2,9    M = -3,86    L = 3000     p = 4,44    Dist  : 730 a-l
    Spectroscopique, variable et double visuelle
   
    "Praecordia" = "qui précède le coeur" de cette araignée bizarre que l'on nomme scorpion, qui pince, qui pique, qui griffe, qui mord... par devant, par derrière... monstre d'enfer ! Ou "Al Nyat" = "la veine (supérieure) du coeur", qui abreuve Antarès de son jus vermillon. Au télescope, un couple mal appareillé vous dévisage  : 20" d'écartement pour 5 magnitudes de différence (m = 2,9 et 8,5). Mais, que vois-je, qu'entends-je ?...  Un "cri"  caractéristique.  L'étoile principale lance des bips de lumière tous les quarts de jour : un dixième de magnitude (2,94 à 3,06)  en 0,2468 jour.  Pourquoi ce signal ? Messieurs les astronomes, à vos photomètres, vos spectromètres... !  L'implosion est à craindre.  Cette pulsation de type "Bêta Cephei" annonce la fin d'un règne : celui de l'hydrogène qui n'a que trop duré : quelques milliards d'années. Privée, en son coeur, de ce "sang" essentiel, l'étoile va s'effondrer sur elle-même, avant de rebondir pour entamer une nouvelle phase nucléaire, celle de l'hélium  : autre genre de dynastie...

    Vous croyez que l'histoire est finie ? Pas du tout ! Sigma Scorpii a plus d'un tour dans son sac. Figurez-vous qu'elle a convolé en justes noces, depuis de longues, de très longues années. Le couple est invisible mais décelable au spectroscope. Il exécute un pas de danse en 34,32 jours. Duo superbe, d'autant plus que les corps sont très chauds, 21 000 K et 25 000 K, rassemblant en leur sein 3000 soleils en puissance (en tout). 730 a-l nous séparent de ce monde à trois...


    t    Tau Scorpii  : Al Nyat

    a = 16 h 35 m 52 s              d = -28° 12' 58"     Sp  : B0  V    T  : 24 000 K    (BC  : -2,8)
    m = 2,82    M = -2,78    L = 1100    p = 7,59    Dist  : 430 a-l     simple

    "Al Nyat" = "la veine (inférieure) du coeur" qui alimente elle aussi la royale étoile, de jour comme de nuit - et de nuit, pas question, pour ces astres de feu ! de repos non plus... Alors que la belle colorée - Antarès - promène ses charmes à 600 a-l de nos rivages, "Al Nyat" déambule dans les longues artères de l’obscur firmament, à 430 a-l.  De sang bleu, elle se réjouit fort d'être, en ces lieux obscurs, la maîtresse incontestée de la lumière et du jour... 1100 soleils s'échappent à chaque instant de son lampadaire, dissipant les ténèbres. Rayon : 7 rayons solaires. Masse : 14 masses solaires. Densité :  0,04. Un joyau de l'espace...


    e    Epsilon Scorpii

    a  = 16 h 50 m 09 s        d = -34° 17' 36"     Sp  : K2 III    T  : 4500 K    (BC  : -0,7)
    m = 2,29    M = 0,78    L = 41        p = 49,85    Dist  : 65 a-l         simple
   
    "Mon amie, ma soeur, songe à la douceur d'aller là-bas vivre ensemble..."  à 65 a-l... la banlieue, comparée aux lointaines étoiles du Scorpion. Examinons cet astre avec attention. Bleue comme ces consoeurs arachnides ? – Non pas ! "Orange, pour vous séduire. Géante pour vous plaire  : 14 rayons solaires  ; massive pour vous combler  : 3,3 masses solaires ! Tu brilles comme 41 soleils réunis. Que deviendrait la Terre sous tes feux ?...


    m    Mu 1  Scorpii

    a = 16 h 51 m 52 s    d = -38° 02' 51"   Sp  : B1,5  V et  B 6,5  V      T  : 22 000 et 15 500 K
    m = 3,00    M = -4,1    L = 3700    p = 3,97    Dist  : 820 a-l
    spectroscopique, variable (algolide), et double optique
   
    Un régal cette étoile double ! même avec de simples jumelles : 2' d'écartement. Cependant attention  : depuis longtemps,  Mu 1 - la plus brillante - a pris la clé des champs ; la voici rendue à 820 a-l. Alors que sa compagne d’apparat  : Mu 2  (m = 3,56), s’est posée à 520 a-l. A chacun son pré carré ! Couple optique par excellence.

    Vous la croyez paisible, sereine, rangée, la plus étincelante, Mu 1... Nenni !...  Il a même fallu avoir recours au psychologue, foi d'astronome ! en raison de ses crises incorrigibles d'humeur. Tous les 1,4463 jours, elle grince, gémit, tempête... passant en peu de temps de la magnitude 2,80 à 3,08. Ils ont cherché, les médecins, et ils ont fini par comprendre  ; en fait, rien de bien grave  : un trublion, un trouble-fête - une seconde étoile - ose ternir l’éclat de la royale étoile. Quel crime abominable ! Et là encore, voyez la rapidité de la période  : 1,4 jour ! De quoi avoir le coeur en charpie... 3700 soleils bleus sortent de cette union forcée, presque au contact. Quel spectacle cela doit être !


    Eta Scorpii


    a = 17 h 12 m 09 s    d = -43° 14' 21"     Sp  : F2  III (?)    T  : 7100 K    (BC  : -0,03)
    m = 3,32    M = 1,6    L = 19        p = 45,56    Dist  : 72 a-l     simple
   
-43° : invisible depuis Paris cette étoile. Il faut descendre jusque dans les Alpes  : l’observatoire "Copernic"  (6) avec son objectif de 52 cm de diamètre offre une  vue imprenable sur Eta Scorpii. Blanche, malgré les brumes qui baignent l'horizon, elle a choisi la proximité... relative.
"Mesdames et messieurs, vous tous qui avez fait le déplacement jusqu'à notre école d’astronomie, je vous présente la benjamine du Scorpion,  éclairant  la scène obscure du ciel de ses 19 soleils réunis, pas un de plus. Son rayon : 2,8 rayons solaires, sa masse : 2,2 masses solaires, sa densité : 0,09  ; simple comme notre étoile. Admirez-la à l’oculaire... " 


    Thêta Scorpii  : Sargas

    a = 17 h 37 m 19 s    d = -42° 59' 52"     Sp  : F0 I-II    T  : 7500 K    (BC  : -0,1)
    m = 1,86    M = -2,75    L = 1100    p = 11,99    Dist  : 270 a-l     simple

    "Sargas" ! (j'ignore le sens de ce nom) - Toi, tout comme le scorpion, tu cours sur le sol de notre hexagone  : au raz de l’horizon. Malheur à qui mettra le pied sur toi qui marques la frontière entre la queue et le dard ! Orion en fit les frais, en la lointaine époque ! En ton sein,  20 rayons solaires scintillent au gré des vents, au-dessus des rivages... Grosse boule ! 7 masses solaires soutiennent ta belle sphère. Ta robe m’enveloppe, tes rayons me pénètrent... 1100 soleils d’argent... me voici sous le charme !...


    i     Iota 1 Scorpii

    a = 17 h 47 m 34 s    d = -40° 07' 37"     Sp  : F2 Ia    T  : 7100 K    (BC  : -0,1)
    m = 2,99    M = -5,72    L = 16 000    p = 1,82    Dist  : 1800 a-l
    double optique + un compagnon
   
    Et de trois !  Encore une qui joue les faux-époux.  A croire que le Scorpion les collectionne ! 3'40" séparent ces faux amants, qui vivent à distance  : 1800 a-l pour Iota 1, l'éclatante  ; 3700 a-l pour Iota 2 (mesure Hipparcos) ! - l'une des plus lointaines de cet ouvrage. Magnitude de la secondaire : 4,78.
16 000 soleils alimentent les fourneaux de Iota 1, ce monde brûlant  ; 13 000 soleils activent la flamme de Iota 2, ce brasier céleste (Sp A2). La première ne ferait qu'une bouchée de Mercure : 86 rayons solaires, soit 60 millions de km. Elle a passé sa robe à la meilleure lessive : blanche immaculée (on dénombre toutefois quelques taches irréductibles, comme sur toutes les étoiles). Sa masse : 15 masses solaires.
    Une étoile très faible de magnitude 12,9 s'approche de ses rayons, à 37"5.


    k    Kappa Scorpii

    a = 17 h 42 m 29 s    d = -39° 01' 48"     Sp  : B2 IV    T  : 21 000 K     (BC  : -2,5)
    m = 2,39    M = -3,38    L = 1900     p = 7,03    Dist  : 460 a-l     simple
   
    Nous approchons de l’aiguillon...  Prenons garde !  "Il est dressé le dard au-dessus de vos têtes", habitants de la Terre. Il brille à deux pas de cette étoile bleue. Un coup de reins, un bond puissant, et nous risquons le passage à trépas. Un oculaire, un télescope, une coupole... Observons, oui, mais de loin, à 460 a-l. "Ah ! que son entretien est doux, qu'elle a de mérite et de gloire", Kappa Scorpii... Drapée dans son manteau bleu - sous le velours ténu des brumes estivales - elle pouponne 1900 soleils dans les plis de sa robe fourrée. Un rayon magnifique : 10 rayons solaires ; une masse coquette : 15 masses solaires. J'irai te voir un jour... quand le dard menaçant aura cassé  sa pointe. Pas avant !


    l    Lambda Scorpii  : Shaula

    a = 17 h 33 m 36 s    d = -37° 06' 14"     Sp  : B2 IV    T  : 21 000 K      (BC  : -2,5)
    m = 1,62    M = -5,05    L = 8900    p = 4,64    Dist  : 700 a-l     2 compagnons

    "Shaula" = la "queue arquée", juste avant le dard ! Cependant, ne craignez rien... ne doutez pas de la bonhomie de cette étoile. Approchez sans crainte.  Elle vous réchauffera de mes bouillants degrés : 21 000 K. Voyez : deux jeunes filles s'entretiennent gaiement auprès de ses rayons, à 42" et 95" (m = 14,8 et 11,9) se réjouissent de sa grâce. 8900 soleils caressent leurs robes de satin, 83 000 si l'on ajoute ses ultraviolets ! 22 rayons solaires sous leur regard, 24 masses solaires en leur présence... N'hésitez pas, comme elles, admirez... D'autant que Shaula est lointaine  : 700 a-l.


    u    Upsilon Scorpii  : Lésath.

    a = 17 h 30 m 45 s     d = -37° 17' 45"     Sp  : B3  Ib    T  : 19 000 K     (BC  : -2,5)
    m = 2,7    M = -3,31    L = 1800     p = 6,29    Dist  : 520 a-l     simple
   
    Qui s'y frotte s'y pique ! Le voilà le mortel "aiguillon" = "Lésath". 1800 soleils veillent à l'ombre de cette queue, prêts à surgir au moment où nul ne les attend. C'est toujours comme çà !... Prudence donc.
    "Vacances à Lésath, 520 a-l, hôtel compris, tout confort", dixit les publicités du futur, horizon 2500, "voyages au meilleur prix, assurance tout risque...." Un conseil  : restez plutôt derrière vos télescopes, et regardez de loin le venin destructeur : sa poche, gorgée de poison, couvre sans problème 12 rayons solaires. La dose sera forte : 15 masses solaires. N’oubliez pas  : elle a tué Orion, le chasseur invincible.


    G    G  Scorpii.

    a = 17 h 49 m 51 s     d = -37° 02' 36"     Sp : K2  III    T  : 4500 K    (BC  : -0,7)
    m = 3,19    M = 0,24    L = 68        p = 25,71    Dist  : 127 a-l   2 compagnons

    Que fais-tu là, toi, l'esseulée, hors du corps du Scorpion, errant à l’arrière de l'aiguillon mortel ?  "Je me promène, où bon me semble, où le vent pousse... est-ce interdit ?... Rien ne m'effraie, nul ne m'ennuie, tout me sourit. Mes joues sont grasses, mon ventre plein, mon teint splendide. Regardez-moi ! Ma peau cuivrée brille au soleil. Calculez-moi !" C'est chose faite  : 18 soleils quant au diamètre, 68 quant à l'éclat, 3,8 quant à la masse.  Nous le savons : tu tiens salon, en compagnie de deux amies. Nous les voyons à l'oculaire ( 26" et 42"),  astres bien faibles...


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note 1 - Ce catalogue a été conservé dans "l'Almageste" de Ptolémée ;  il renferme 1022 étoiles réparties en 48 constellations.
note 2 - Haly et Giafar, fils d'Alboumazar
note 3 - apoastre : 3"2   périastre  : 2"6 dans l'orbite réelle   Excentricité : 0,1 (presque un cercle)
            En 2020 :  2"3 dans l'orbite apparente vue sur la tranche
note 4 - Je trouvais pour ma part 15 m. s. Quoique classée dans la série principale, l'étoile est géante, située au sommet gauche du diagramme Hertzsprung-Russell.
note 5 - Argentin  : Sébastien Otero, variabiliste
note 6 - http ://www.asso-copernic.org