Les Saisons du Ciel

G. St-Onge, P. Bastien et L. Morin


Le projet RY Tauri au télescope GEMINI-N
Les Télescopes Gemini sont parmi les plus grands Télescopes auxquels
les astronomes canadiens ont accès.


La Section scientifique (2008)

La découverte du jet (HH938) associé à l'étoile jeune RY Tauri

Gilbert St-Onge, CDADFS (Club d'Astronomie de Dorval)
et
Pierre Bastien, département de physique de l'Université de Montréal et Observatoire du Mont-Mégantic.
2008

Cette découverte des auteurs a été publiée dans la revue scientifique "The Astrophysical Journal" en février 2008, un lien vers cette publication est disponible à la fin de ce dossier (APJ )

Page 1

- Résumé :

## Page 1
- RY Tauri (CTTS), Introduction
-
Les images à haute résolution spatiale au télescope GEMINI-N
-
La révélation d'un Jet détecté pour la première fois près de RY Tauri (découverte)
-
L'intérêt particulier du Jet près de l'étoile jeune RY Tauri

- Description des instruments utilisés
-
Les jets près des étoiles jeunes (mécanisme)?

- Un premier papier scientifique concernant le Jet près de RY Tauri

## Page 2
- La réduction des images scientifiques et l'environnement immédiat de l'étoile RY
Tauri

## Page 3

- Le Contre Jet
- Améliorer nos estimations de la vélocité tangentielle des nouds
- Il est rare de pouvoir observer un Jet aussi actif qui nous présente des nouds aussi jeunes
- L'étoile RY
Tauri une étoile qui montre un taux de polarisation élevé et variable
- Références
- Compléments explicatifs

 

Introduction :

RY Tauri est une étoile jeune de type T Tauri classique (CTTS) qui est à ~ 134 pc (Bertout et al. 1999), elle se situe dans la grande nébuleuse obscure du Taureau. Des images à haute résolution spatiale de RY Tauri ont été effectuées au télescope GEMINI-N (télescope de 8 mètres d'ouverture), en février 2005. L'échantillon résultant par pixel en bin 2X2 px des images est de 0.145" pixel, ce qui correspond à ~19 UA par pixel à une distance de ~ 134 parsec.

L'étoile RY Tauri est une étoile qui est notée dans la liste de Joy (1945), il lui attribua un type spectral F5-G5, avec émission du genre de celles observées de la chromosphère du Soleil. D'autres ont aussi estimé le type spectral de RY Tauri : Herbig (1977); Cohen & Kuhi (1979) lui attribuent un type K1 IVe, V (Li), Cabrit et al. (1990) un type G2, Petrov et al. (1999) un type G1 - G2 IV, Mora et al. (2001) un type F8 III, Bastien et al (2005) un type KI IV-V. Comme on le voit, l'étoile à sa maturité devrait être une étoile de près d'une masse solaire. Quoique certains soupçonnent qu'il peut s'agir d'un système d'étoile double, la nouvelle estimation de Bertout et al. (1999), à partir des datas du satellite Hipparcos, donne une distance minimum entre les deux composantes de 3.17 AU sur un angle de (PA) 314° ± 34°. On aurait donc peut-être un partage de la masse totale mesurée entre deux composantes ?

Donc bien des gens ont observé avec rigueur cet objet depuis 1945. Dans un papier paru dans "Astronomy & Astrophysics", A. A. Schegerer et al (2008) signalent que l'on peut attribuer les premières observations de RY Tauri à Pickering (1907). On remarque plusieurs variations dans l'interprétation du type spectral, il semble plausible d'attribuer ces variations aux conditions qui règnent dans la nébuleuse au niveau de l'étoile et aux propriétés physiques mêmes de l'étoile jeune qui peuvent changer dans le temps.

RY Tauri (CTTS)
- RY
Tauri est classée comme étoile " UX Ori " (Grimin 1993)
- (J2000.0) a
:04h 21m 57.942 sec. et d : 28° 26' 34.98" (St-Onge, Bastien 2008).
- Magnitude variable irrégulière : ~
mv 9.3 à ~mv 11.7, Petrov et al, (1996) tableau mv 1965 à 1997
- Polarisation, elle peut excéder 5% (Bastien 1982a, 1982b)
- Polarisation, sur un angle de ~ 20° (Bastien 1982a, 1982b)
- La distance, 134 pc, (
Bertout et al. 1999)
- La masse de l'étoile, 1.69 masse solaire, (
Beckwith et al. 1990)
- Âge, 6.5 ± 0.9 millions d'années, (
Siess et al. 1999)
- Luminosité, 12.8 L. solaire, (
Akeson et al. 2005)
- Rotation rapide de l'étoile, v sin i = 51.6 km s-1 (
Hartman & Stauffer 1989)

1) Les étoiles " UX Ori " sont des étoiles de la pré-séquence principale qui montrent de façon irrégulière des périodes d'assombrissement éclipsées par des matériaux circumstellaires (poussières) en relation au disque qui est probablement vu par la tranche.

Les images à haute résolution spatiale au télescope GEMINI-N

Les images ont été prises le 25 février 2005, au télescope de 8 mètres d'ouverture de l'observatoire Gemini-Nord au sommet du Mauna Kea à Hawaii à 4200m d'altitude. Le détecteur utilisé est GMOS "Gemini Multi-Object Spectrograph" (GMOS; Hook et al. 2004) en mode imageur. Des images en quatre filtres compatibles " Sloan, g, r, Ha et i " ont été effectuées, les filtres correspondants sont : le "g_G0301, le r _G0303, le Ha _G0310, et le i _G0302". Des poses très courtes dans chaque filtre ont permis d'éviter de saturer la région près de l'étoile RY Tauri et de plus longues poses ont permis d'atteindre les plus obscures régions de la nébuleuse associée à l'étoile jeune RY Tauri. Donc des poses courtes de 4X1 seconde pour chaque filtre sauf en Ha qui sont des poses de 4X2 secondes. Puis des poses plus longues de 4X60 secondes sauf pour le Ha qui sont des poses de 4X180 secondes. Le champ des images est de ~ 5 minutes par ~ 5 minutes d'arc, les images sont en pixels binés 2X2.

Un de nos principaux objectifs en utilisant ces filtres était de tenter d'isoler certaines propriétés spécifiques aux étoiles jeunes, soit de détecter des domaines du spectre visible qui soient en émission, principalement la région de l'Hydrogène alpha à ~ "6563 Ä " et quelques autres régions plus subtiles comme les deux souffres interdits à [SII] Soufre à 6717 Ä et [SII] Soufre à 6731 Ä. Les filtres " r _G0303, et le Ha _G0310 " permettaient entre autres de détecter ces domaines en émission, puis il fallait isoler ces régions (émission) sur les images résultantes. Pour cela nous avons utilisé le filtre " i _G0302 " qui lui est un filtre très rouge (~ proche infra-rouge) et qui ne détecte pas de régions importantes en émission, on y voit que du continuum. On a donc pu enlever le signal du continuum de nos images en filtres " r _G0303, et Ha _G0310 " par la soustraction adéquatement effectuée de l'image en filtre " i _G0302 " de celles-ci. Les images résultantes montraient le signal dominant des domaines en émission et presque plus de lumière continue (continuum).

La révélation d'un Jet détecté pour la première fois près de RY Tauri. Il reçut le label "HH938" (Découverte)

L'image en filtre de l'émission de " Ha " (l'Hydrogène alpha) nous révèle dès les premiers pré-traitements de nouvelles sources très ponctuelles juste au nord-ouest de l'étoile RY Tauri et de grandes structures en arc au sud-est de l'image. Ce sont les marqueurs qui étaient cherchés pour confirmer la présence d'un présumé jet qui avait été observé le 15 mai 2005 sur l'image publique couleurs qui nous a été remise et qui était devenue disponible sur le web à cette date.

C'est à la réunion de la CASCA du 15 mai 2005 à l'Université de Montréal qu'on nous a remis (au Club d'Astronomie de Dorval (CDADFS) (G. St-
Onge et al), une superbe image couleurs montée par le Dr. Stéphanie Côté du bureau GEMINI Canada Victoria, C.B. Cette image est une intégration des quatre images résultantes dans les quatre filtres utilisés (Image1). Elle est devenue l'image des communiqués de presse et l'image de tous les sites web qui parlaient du concours " Une Heure de Temps d'Imagerie sur Gemini ". Cette image fut immédiatement analysée et on put y voir en quelques minutes apparaître la signature de quelques structures du Contre Jet au sud-est de l'image voir (Image 2). Les images scientifiques nous sont parvenues plus tard, c'est pourquoi on cherchait ces structures avec autant d'énergie, question de confirmer notre découverte du 15 mai. Voir (Image 3). (Images 2 et 3 côte à côte)

Image 1

Gemini Observatory/Club d'astronomie de Dorval/Stephanie Cote, Herzberg Institute of Astrophysics/Travis Rector, University of Alaska, Anchorage

Gemini North image of stellar nursery RY Tau imaged by the Gemini Multi-Object Spectrograph (GMOS) as part of a Canadian contest for amateur astronomers. Image reveals tremendous detail in the wispy remains of the gas cloud that formed the bright star at bottom/center. This system is approximately 140 parsecs (450 light years) away, and spans about 2/3 of a light year across. The central star is a variable star that ranges from a visual magnitude of about 9-11 over an irregular period.

Image Technical Data : Source de l'image à :
http://www.gemini.edu/index.php?q=node/129

 

Image 2

Image 3

 

L'Image 2 a été traitée et a été ajustée de telle sorte qu'on a pu y découvrir les premières traces du Contre Jet au sud-est de la nébuleuse secondaire sur l'image couleurs du 15 mai 2005 (en rouge à gauche vers le bas) .

L'Image 3 est l'image scientifique en domaine de l'hydrogène alpha, on peut y voir le Contre Jet (C Jet) pâle sur le ciel au sud-est, et quelques nœuds du Jet (Jet) du côté opposé de l'étoile au nord-ouest.

L'intérêt particulier du Jet près de l'étoile jeune RY Tauri

Un fort pourcentage des étoiles jeunes comme RY Tauri et des OSJ "Objets Stellaires Jeunes" présentent des Jets et/ou des flots bipolaires (outflows), on peut souvent y observer des nébuleuses bipolaires dans le domaine visible. Les Jets semblent associés à des phénomènes d'accrétion, mais les mécanismes de formation de ceux-ci sont encore fortement débattus. Ils ont été détectés pour des objets de Class 0/1 ( Bally et al. 2007) et pour des objets de Class 2 (CTTS; Ray et al. 2007). Les modèles suggèrent que les Jets sont accélérés et collimés à quelques U. A. de la source, donc leur largeur et leur vélocité tout près de l'étoile sont des paramètres importants pour tenter de comprendre le mécanisme de formation de ces Jets. Soit des vents provenant du disque ou d'origine stellaire, ou …?

L'étoile RY
Tauri est une source de Classe 2, donc une étoile en phase de se retrouver sur la série principale, une étoile presque mature, il est donc surprenant de détecter pour cette étoile un système de Jets aussi élaboré (au sud-est) et encore plus étonnant d'y observer des nœuds aussi actifs, soit une série d'au moins 3 nœuds qui ont été éjectés de la région de l'étoile il y a moins de 10 ans (2008)! Cette étoile a ~ 6.5 ± 0.9 millions d'années, (Siess et al. 1999).

Les jets près des étoiles jeunes (mécanisme)?:

Description des instruments utilisés : (Par le Dr. Stéphanie Côté du bureau GEMINI Canada)

L'instrument imageur GMOS : (Utilisé pour ce projet) Chaque télescope Gemini a une suite d'une demi-douzaine d'instruments différents à offrir aux astronomes. L'instrument qui a été utilisé à Gemini-Nord pour obtenir les images de RY Tau est GMOS, pour 'Gemini Multi-Object Spectrograph', car cet instrument ne prend pas seulement des images mais peut aussi décomposer la lumière (en spectres), et ce pour une multitude d'objets du champ en même temps. GMOS a été conçu et construit en partenariat entre le Royaume-Uni et le Canada (à l'Institut Herzberg d'Astrophysique du Conseil National de Recherchesdu Canada, situé à Victoria). C'est l'instrument le plus utilisé sur Gemini par les astronomes de tous les pays, et celui qui a conduit au plus grand nombre de découvertes sur ce Télescope.

Télescopes GEMINI : Les Télescopes Gemini sont les plus grands Télescopes auxquels les astronomes canadiens ont accès. Il s'agit de deux Télescopes jumeaux, situés sur deux des meilleurs sites d'observation de la planète, Gemini-Nord au sommet du Mauna Kea à Hawaii à 4200m d'altitude, et Gemini-Sud à 2700m dans les Andes du Chili. Ils ont été construits en collaboration avec six autres pays (Etats-Unis, Royaume-Uni, Australie, Chili, Brésil et Argentine), et le Canada reçoit 15% du temps d'observation. Leur miroir, fait d'une seule pièce, a plus de 8 mètres de diamètre. Par contre leur épaisseur est de seulement 20 cm. Sous le miroir 120 actuateurs le poussent légèrement pour lui donner la forme précise désirée, avec une précision d'un millième de l'épaisseur d'un cheveu. Gemini utilise également la technologie d'optique adaptative pour corriger les distorsions de la lumière des étoiles causées par l'atmosphère terrestre. Ceci permet de produire des images parmi les plus précises jamais obtenues de notre Univers. Les astronomes canadiens étudient, grâce à Gemini, une vaste gamme d'objets telles de jeunes planètes orbitant des étoiles proches, des étoiles en formation dans des nuages interstellaires, et les jeunes galaxies aux confins de l'Univers.

 

Les jets près des étoiles jeunes (mécanisme)?:

Les étoiles jeunes développent souvent un disque tout près de l'étoile sur le plan équatorial (perpendiculaire à l'axe de rotation). Ces disques sont dus à certains mécanismes de formation de l'étoile dont la conservation du moment cinétique (le nuage moléculaire parent est en rotation …). Donc on observe généralement un disque plus important près des étoiles plus jeunes. Ces disques (plus denses que la nébuleuse environnante) sont en partie accrétés par les étoiles tout au long de leur formation, les disques disparaissent graduellement alors que l'étoile atteint sa maturité. Les matériaux du disque qui ne sont pas accrétés par l'étoile lors de ce processus sont dispersés par des vents stellaires importants. Des planètes peuvent se former dans ces disques…

Un des modèles propose que les disques perdent des matériaux qui leur sont arrachés par l'étoile (accrétion), une certaine quantité de ces matériaux tombe sur l'étoile, mais le reste serait rejeté à grande vélocité sur les directions polaires (perpendiculaires au disque). Ces matériaux évacués par les pôles (bipolaires) sont probablement rapidement collimés à quelques Unités Astronomiques de l'étoile (modèle récent). Ils sont donc concentrés dans un espace ~ cylindrique où ils se déplacent à des vélocités pouvant atteindre des centaines de KM/s, un "jet" est alors né. Un autre modèle propose que les jets sont créés directement à partir des disques… (Il pourrait peut-être y avoir contribution des deux mécanismes, des vents qui proviennent de l'étoile et ou du disque???…) Quoi qu'il en soit, ces régions très actives (les jets) sont généralement détectables en lumière "Hydrogène alpha", puisqu'il s'agit de régions très ionisées.

Des nœuds sont souvent observés, comme HH 938 (Herbig-Haro 938), le long des jets. On croit qu'ils peuvent être causés par l'interaction des matériaux de certaines régions du jet avec un milieu de densité différente (propriétés). Soit parce que le jet traverse un médium de densité particulière à cet endroit, ce qui peut créer des chocs en arc, ou parce qu'il se produit un croisement des matériaux à l'intérieur même du corps du jet ? Les matériaux seraient réfléchis sur les parois (membranes) à l'intérieur même du jet puis se recroiseraient à l'intérieur de celui-ci. Là où les matériaux se croisent on peut observer des nœuds lumineux.

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**Nouveau en 2008**

Un premier papier scientifique qui origine des résultats obtenus aux images de GEMINI-N (2005) et qui traite de RY Tauri a été publié dans la revue scientifique "The Astrophysical Journal" en février 2008

Ce papier est :

A Jet Associated with the Classical T Tauri Star RY Tauri
Gilbert St-Onge
Dorval
Astronomy Club, CCSD, 1335 Chemin Bord-du-Lac, Dorval, QC H9S 2E5, Canada; gilberts311@gmail.com
and
Pierre Bastien
Département de physique and Observatoire du Mont-Mégantic, Université de Montréal, Montréal, QC H3C 3J7, Canada; bastien@astro.umontreal.ca

Ce papier est disponible à l'adresse suivante :

http://iopscience.iop.org/article/10.1086/524649/pdf

Et
http://iopscience.iop.org/article/10.1086/524649/meta;jsessionid=B5B26345EB40675CF1091D4391DA12DA.c1

 

 

- Les principaux collaborateurs de la section scientifique sont : G. St-Onge (CDADFS), P. Bastien (U. Montréal) et L. Morin (CDADFS), ....


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