ISIS

Innovative Spectrographic Integrated Software

Christian Buil

Méthodes d'étalonnage spectral

English version



Rappel :
l'opération d'étalonnage spectral consiste à trouver la relation entre le numéro d'un échantillon dans le spectre et la valeur en longueur d'onde de cet échantillon. La figure 1 montre une telle relation pour le spectrographe LHIRES III 1200 traits/mm au voisinage de la raie Halpha. Contrairement aux apparences, cette relation n'est pas strictement linéaire. Il est habituel de l'assimiler à une fonction polynomiale de la forme :

lambda = A0 + A1 . X + A2 . X . X + A3 . X .  X.  X

avec lambda, la longueur d'onde recherchée d'un point d'échantillon de rang X (en pixel). Les paramètres A0, A1, A2, A3 sont les termes (ou coefficients) du polynôme à déterminer.



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Figure 1. Fonction d'étalonnage spectral caractéristique du spectrographe LHIRES III 1200 traits/mm avec une caméra Atik 314L exploitée en binning 2x2.

Ces coefficients sont trouvés en ajustant au sens des moindres carrés une fonction polynomiale décrivant au mieux la relation de couples de points (X, lambda) dans une image de référence ou image d'étalonnage. Avec le spectrographe LHIRES III, l'image d'étalonnage est obtenue en réalisant l'acquisition du spectre de la lampe spectrale néon interne. Ce spectre présente des raies d'émission en nombre plus ou moins grand suivant la région spectrale analysée, la valeur de la dispersion (type de réseau) ou encore la taille du détecteur. L'opération d'étalonnage consiste à mesurer précisément la position X de ces raies, dont on connait par ailleurs parfaitement la longueur d'onde. Il suffit ensuite de faire passer la courbe d'étalonnage parmi ces points de mesure. Un polynôme d'ordre 2 est suffisant avec un LHIRES III 2400 traits/mm (c'est-à-dire que le terme A3 est alors considéré comme nul). Il faut dans ce cas un minimum de 3 raies spectrales d'émission pour effectuer le calcul (le nombre minimal est égal à la valeur de l'ordre augmenté d'une unité). Un ajustement à l'ordre 3 est opportun à la rigueur avec un Lhires III équipé d'un réseau de 1200 traits/mm, et obligatoire avec un réseau de 600, 300 ou 150 traits/mm. En revanche, étalonner le spectrographe LHIRES III avec un polynôme d'ordre 1 (ajustement linéaire) donne un résultat insuffisant dans tous les cas de figure. Le spectrographe LISA s'étalonne avec un polynôme d'ordre 3.

Une fois la fonction d'étalonnage connue (les termes A0, A1, A2), pour étalonner un spectre quelconque en longueur d'onde il suffit de fournir à ISIS la coordonnée X en pixel d'une seule raie donc on connait la longueur d'onde. ISIS actualise le polynôme de dispersion en calculant le terme A0. Le terme A0 est la constante du polynôme qui décrit uniquement la translation du spectre suivant l'axe spectral. D'un objet à l'autre, le terme A0 peut fort bien changer de valeur, par exemple du fait que le spectrographe se déforme mécaniquement à cause de la gravité ou de changements de température. Ces évolutions structurelles mécaniques déplacent l'image du spectre sur le détecteur. C'est la raison pour laquelle il est impératif pour chaque objet observé d'acquérir au moins un spectre d'étalonnage de manière à pouvoir rafraichir au minimum la valeur du terme A0. Dans ce processus, les termes A1, A2, A3 peuvent être considéré comme constant (caractéristique de l'instrument), cependant pour une précision élevée, il est recommandé de les recalculer aussi souvent que possible au sein d'une nuit d'observation.

Dans la partie 1 de cette page on décrit trois méthodes pour effectuer l'étalonnage spectral. Dans la partie 2 on montre les deux façons de produire une image d'étalonnage.

 

 
PARTIE 1 : EVALUATION DE LA LOI DE DISPERSION SPECTRALE
 

Méthode 1 : jeu de raies prédéfini

ISIS utilise un jeu de raies du spectre du néon sélectionné en interne pour étalonner les spectres pour un certain nombre de configurations courantes des spectrographes LHIRES et LISA. Cette méthode ne fonctionne qu’autour de la raie Halpha pour un spectre LHIRES (pour tout le domaine spectral dans le cas du spectrographe LISA).

Pas d'affolement si vous êtres propriétaire d'un LHIRES équipé d'un réseau de 150 traits/mm, de 300 traits/mm ou encore de 600 traits/mm, ou de tout autre modèle de spectrographe en fait ! Nous verrons une autre méthode de traitement plus bas, au moins aussi automatique, et plus universelle, qui va résoudre à coup sûr votre problème.

Tout se passe depuis l'onglet "Général".

Dans l'exemple de la figure 2, nous nous apprêtons à étalonner un spectre acquis avec un réseau de 1200 traits/mm.

Toujours dans la figure 2, noter que nous avons aussi à fournir la position en pixels relevée dans l'image d'étalonnage d'une raie d'émission dont ISIS impose la longueur d'onde (ici la raie néon imposée est située à la longueur d'onde 6506.528 A, vous devez apprendre à la repérer dans le spectre). Dans l'exemple, la position trouvée est X = 594 (vous avez droit à une marge d'erreur de 4 ou 5 pixels).

La copie d'écran de figure 3 indique la manière de préciser le nom de l'image d'étalonnage à ISIS (image du spectre du néon). Remarquez que l'image d'étalonnage est associée à celles de l'objet observé (les acquisitions ont été faites à peu de temps d'intervalle).

Vous n'avez plus qu'à cliquer sur le bouton "Go" pour traiter le spectre. ISIS calcule d'abord les coefficients A0, A1, A2 et A3 pour l'image d'étalonnage fournie, puis étalonne la séquence de spectre de l'objet observé.

A la fin du traitement, si vous êtes curieux, cliquez sur le bouton "Dispersion" de la barre d'outils de l'onglet "Affichage profil" (figure 4). Vous avez sur la gauche de la boite de dialogue la longueur d'onde des 6 raies d'étalonnage utilisée et en face, les coordonnées en pixels trouvées par ISIS. Par exemple, la raie de longueur d'onde 6506.528 A a été automatiquement mesurée à la coordonnée X = 593.163 (en pixels et fractions de pixels).

Sans que cela soit obligatoire, cliquez sur le bouton "Calcul du polynôme" en haut de la boite de dialogue (en sélectionnant au préalable l'ordre 3). ISIS calcule les termes A0, A2, A3, A4 à partir des points relevés dans le spectre de la lampe néon. En bas de la boite dialogue, ISIS retourne l'écart entre les longueurs observé (calculée avec le polynôme) et les longueurs d’onde du catalogue des raies. L'écart RMS est de 0,003 A, ce qui est très précis (mais ce n'est pas obligatoirement la précision finale d'étalonnage du spectre de votre objet - d'autres paramètres interviennent).

Si à présent vous êtes très curieux, ouvrez le fichier texte « _vega_20110529_875.log » que ISIS a créée dans le répertoire de travail au moment du traitement (figure 5). Vers le bas du fichier LOG, vous allez trouver la valeur des coefficients d'étalonnage effectivement utilisés pour traiter la séquence du spectre de Vega. Notez qu'aux erreurs d'arrondi près, ce sont les mêmes coefficients que ceux calculés à partir de l’outil "Dispersion".

Vous pouvez fort bien calculer un polynôme à l'ordre 2 avec les mêmes données, comme l'indique la figure 6. La précision obtenue est fort voisine de celle atteinte avec un polynôme d'ordre 3. En revanche, essayez avec un polynôme d'ordre 1 (interpolation linéaire), le résultat est bien moins satisfaisant.

Pour un exemple complet de traitement avec ce mode d'étalonnage, cliquez par exemple sur ce lien :

http://astrosurf.com/buil/isis/quicklhires/tuto_fr.htm

ou ici :

http://astrosurf.com/buil/isis/isis_tuto/tuto1.htm

 



Figure 2. Sélection du jeu de raie prédéfini en fonction du type de réseau utilisé.
 


Figure 3. Désignez du fichier image du spectre étalon (néon) associé à l'objet observé. On doit aussi fournir aussi la carte du signal d'obscurité associé à l'image d'étalonnage (ici pour une pose de 30 secondes).
 


Figure 4. L'outil "Dispersion", disponible depuis l'onglet "Affichage profil".
 


Figure 5. Contenu du fichier LOG.



Figure 6. Ajustement de la fonction de dispersion avec un polynôme d'ordre 2.
 

Méthode 2 : polynôme prédéfini

Vous pouvez parfaitement calculer les coefficients d'étalonnage dans un autre logiciel que ISIS est les rapporter dans la boite de dialogue de calcul de la dispersion spectrale (figure 8). Dans ce cas, par définition, l’étape de calcul des coefficients par ISIS est éliminée.

Ces coefficients peuvent aussi avoir été calculés par vous antérieurement et utilisés pour un traitement présent.

Aller ensuite dans l'onglet "Général" pour sélectionner le mode d'étalonnage "Polynôme prédéfini" (figure 8). Comme d'habitude, entrer la position en pixel d'une raie de référence. Contrairement à la méthode 1 précédente, il est aussi de votre responsabilité de fournir la longueur d'onde de cette raie.

Lors du traitement du spectre (lors de l'appui sur le bouton « Go » depuis l'onglet "Général"), ISIS va chercher les termes du polynôme de dispersion dans la boite de dialogue de l'outil "Dispersion" (que la boite de dialogue soit ouverte ou fermée).

ISIS possède des fonctions interactives qui aide à calculer les coefficients du polynôme de dispersion sur un jeu de raie de votre choix. Ceci permet d'étalonner n'importe quelle région du spectre à partir du moment où vous disposez d'une image d'étalonnage valable pour cette région.

A titre d'exemple, vous allez trouver ici un exemple complet correspondant à l'étalonnage d'un spectre LHIRES III dans les courtes longueurs d'onde :

http://astrosurf.com/buil/isis/He_calibration/method.htm

La même chose autour de Halpha :

http://astrosurf.com/buil/isis/isis_tuto/tuto6.htm

Vous avez ici un autre exemple indiquant comment établir manuellement les termes du polynôme à partir des raies telluriques :

http://astrosurf.com/buil/isis/quicklhires/advanced_fr.htm

 



 
Figure 7. Entrée d'un polynôme prédéfini.





Figure 8. Il est demandé à ISIS d'utiliser le polynôme défini dans la boite de dialogue de l'outil "Dispersion".

 

Méthode 3 : utilisation d'un fichier de raies spectrales

Avec l'aide d'un logiciel d'édition de texte (NotePad par exemple), écrire le texte présenté sur la figure 9.

Sauvegardez ce texte dans un fichier du nom de votre choix dans le répertoire de travail. Vous devez cependant impérativement respecter l'extension ".LST". Dans l'exemple, le fichier va nous permettre d'étalonner des spectres LHIRES III 1200 traits/mm, aussi nous l'appelons naturellement G1200.LST (G pour Grating).

Il faut respecter l'organisation imposée de ce fichier.

La première ligne indique l'ordre du polynôme que l'on souhaite ajuster (ici 3).

La seconde ligne indique la dispersion moyenne en angströms par pixel. Vous devez évaluer cette quantité (c'est une quasi constante de votre instrument). L’opération est simple.

Par exemple, dans l'image du spectre du néon nous avons relevé que la position de la raie de longueur d'onde 6402.25 A est X = 343 en pixels (utiliser le pointeur de souris depuis l'onglet "Affichage image"). De même, la raie du néon à 6717.04 A est trouvée à la coordonnée X = 1105.

L'écart en longueur d'onde entre les deux raies est dlambda = 6717.04 - 6402.24 = 314.79 A.

L'écart en pixels entre les deux raies est dX = 1105 - 343 = 762 pixels.

La dispersion moyenne est égale au rapport dlambda/dX, soit 314.79 / 762  = 0.413 A/pixel. C'est la valeur adoptée dans notre fichier G1200.LST. Conseil, choisissez des raies relativement écartées pour un maximum de précision.

Les lignes suivantes contiennent des valeurs de longueur d'onde. On reconnait la liste de raies du néon disponible autour de la raie Halpha, mais vous pouvez aussi utiliser les raies provenant d'un tout autre type de lampe spectrale (argon, thorium, ...).

La condition d'usage est que ces raies soient bien sur situées dans votre domaine spectral d'analyse.

La figure 10 montre comment remplir l'onglet "Général" pour exploiter ce mode d'étalonnage. Bien sûr,  vous devez indiquer le nom du fichier de raies (sans l'extension). Tout comme avec la méthode 2, il faut indiquer aussi la position d'une raie de référence en pixels dont on donne par ailleurs la longueur d'onde (dans ce mode de calibration, une valeur précise n'est ici pas requise).

En lançant le traitement, ISIS lit le fichier G1200.LST, puis localise lui-même les raies fournies dans la liste avec précision, calcule le polynôme de dispersion (de degré 3 dans l'exemple), puis enfin gradue en longueur d'onde vos spectres.

Les méthodes 1, 2 et 3 décrites dans les conditions de notre exemple fournissent un résultat quasi identique (figure 11).

De toutes, la méthode 3 est surement la plus universelle et la plus simple. Par exemple, supposons que vous exploitez un réseau de 600 traits/mm sur un spectrographe LHIIRES III. (1) Vous réalisez d'abord une image du spectre du néon avec cette configuration. (2)  Vous repérez les raies les plus intenses et les mieux isolées. (3) Vous écrivez un fichier G600.LST (par exemple) avec ces données, et dorénavant vous pouvez étalonner sans effort et précisément vos spectres. Le fichier G600.LST a été créée une fois pour toute pour votre configuration, vous n'avez plus en vous en soucier (il faut simplement penser à le transporter dans le répertoire de travail courant si besoin).

Avec la méthode 3 vous pouvez étalonner en longueur d'onde quasiment tous les types de spectres avec ISIS pris avec un large jeu de spectrographes.
 




Figure 9. Le contenu du fichier G1200.LST.





Figure 10. Sélection du mode d'étalonnage par fichiers de raies.



 

Figure 11. Fichier LOG après un traitement basé sur un étalonnage spectral exploitant un fichier de raies spectrales.

 

 

PARTIE 2 : MODES D'ETALONNAGE
 

MODE STANDARD

Le mode standard d'étalonnage consiste à associer aux spectres acquis d'un objet, un ou plusieurs spectres d'une source lumineuse, dite d'étalonnage. Cette source possède un spectre de raies d'émission à des longueurs d'onde bien connues. Les spectrographes LHIRES III ou encore LISA intègrent une lampe contenant du gaz néon qui émet une lumière de ce type. Le spectrographe eShel est utilisé avec une lampe contenant un mélange de gaz, du thorium et de l'argon, qui produit un spectre de raies très riche.

ISIS organise le calcul dans le mode standard comme expliqué sur la figure 12. On doit disposer bien sur des images du spectre de l'objet à traiter (ici une séquence de l'étoile delta Scorpius, notée dsco-1, dsco-2, ..., dsco-6). On doit aussi fournir  au logiciel une image du spectre d'étalonnage (contrairement à la demande ISIS, il s'agit ici d'une portion de spectre d'une lampe argon, et non pas une lampe néon - cela ne change rien au principe, il faut voir ici le nom "néon" comme la désignation générique d'un spectre de raies de référence).

Le spectre peut avoir été acquis juste avant les spectres de l'objet, juste après, ou mieux encore, être la moyenne d'un spectre du néon fait avant et après la séquence de l'objet.

Depuis l'onglet "Réglages", il faut ajuster la taille de la hauteur de binning de manière à ce qu'elle soit plus grande que la largeur hors tout de la trace des spectres à traiter (sans exagérer, il vaut mieux toujours choisir une largeur de binning trop large que pas assez large). Ici la largeur de binning du spectre fait 28 pixels de haut.

ISIS évalue lui-même la hauteur de la zone de binning dans le spectre néon, afin d'extraire le profil du spectre de raies d'émission. Plus précisément, ISIS ajoute à la hauteur de binning du spectre de l'objet 30 pixels supplémentaire (soit dans l'exemple une hauteur de binning de 28 + 30 = 58 pixels).

Après les opérations de binning, ISIS dispose de deux profils spectraux. Il peut alors procéder à l'étalonnage spectral du profil de l'objet en se servant du profil de la lampe d'étalonnage. Bien sûr, ces opérations sont réalisées automatiquement en cliquant sur le bouton "Go" de l'onglet "Général"

 

 



 
Figure 12. Principe de l'étalonnage spectral dans le mode standard. Cliquer sur le figure pour l'agrandir.

 

MODE LATERAL

Il est possible d'exposer simultanément sur la même image, au moment de l'observation, à la fois le spectre de l'objet étudié et celui de la lampe d'étalonnage. Le plus simple est d'éclairer pour cela, sur une durée plus ou moins longue, l'entrée du télescope avec la lampe à raies d'émission. L'opération est possible sur les spectrographes à fente longue, tel LHIRES III ou LISA.

Pour plus d'explications sur cette méthode d'observation très efficace, cliquer ici.

C'est la technique d'étalonnage la plus précise car la simultanéité de prise de vue entre le spectre à étalonner et la source d'étalonnage élimine de nombreux biais de mesures (les erreurs causées par les flexions mécaniques temporelles du spectrographe en particulier).

Le mode opératoire du logiciel est présenté dans la figure 13.

Pour choisir le mode latéral, sélectionner l'option correspondate depuis l'onglet "Réglages".

Remarquer de part et d'autre de la trace du spectre (et superposé sur lui aussi), dans les zones "latérales", la présence du spectre de la lampe d'étalonnage (ici une lampe argon Habitat - modèle Filly).

Il n'y a plus de raison de fournir le nom de l'image "néon" de référence, puisque cette référence est incluse dans le spectre même de l'objet à traiter. C'est tout l'intérêt de la technique.

ISIS calcule la moyenne de deux spectres de calibration calculés en effectuant un binning de part et d'autre de la trace du spectre. Le logiciel se sert des coordonnées verticales de calcul du fond de ciel (Yinf1, Yinf2, Ysup1, Ysup2) pour définir la largeur de ces zones de binning.

Une fois le profil moyen de la lampe de référence calculé, ISIS étalonne le spectre de l'objet de manière traditionnelle.

Au final les raies du spectre d'étalonnage sont éliminées du spectre de l'objet au moment du retrait du fond de ciel.

 

 

Figure 13. Principe de l'étalonnage spectral dans le mode latéral. Cliquer sur le figure pour l'agrandir.

 

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