VARIATIONS AUTOUR DU DOUBLET DU SODIUM


L'élément sodium possède une belle signature dans le spectre : deux raies rapprochées dans le jaune. Ces raies,  D1 et D2,  sont situés aux longueurs d'onde respectives de 5890,0 Angstroms et 5895,9 Angstroms (les composantes sont donc séparées de 6 A seulement). Une manifestation de ce doublet est la couleur jaune de l'éclairage public dans nos ville. On peut aussi deviner leur présence en jetant du sel de mer dans une flamme. La lueur jaune que vous voyez dans le crépitement provient du sodium contenu dans le sel et qui brûle dans la flamme. Mais vous pouvez aussi apercevoir ces deux raies dans le spectre de nombreuses étoiles.

Les observations des raies D1 et D2 ont été réalisé avec le spectrographe LHIRES III associé à un appareil photographique numérique Canon EOS 400D. Le spectrographe est équipé d'un réseau de 2400 traits/mm (il est utilisé à sa résolution maximale).


LE SODIUM DANS LA FLAMME D'UNE BOUGIE ET UNE PINCE DE SEL

Positionner une flamme de bougie à l'entrée du spectrographe. Mettre un peu de sel dans la flamme et observer le spectre. A l'oeil et avec un oculaire vous allez déjà apercevoir le doublet du sodium.

Voici ce que donne une pose 10 secondes avec le boîtier reflex. Les deux raies du sodium brillent en émission sur un fond noir :

Si vous craquez une allumette devant la fente, vous allez encore voir le doublet du sodium distinctement. Manifestement, ce matériaux est présent dans la mixture qui enrobe l'allumette. Dans l'image ci-après on note le fond continu de la flamme de l'allumette, le doublet du sodium et quelques autres raies faibles (origine non identifiée) :


LE SODIUM DANS L'ETOILE SIRIUS
Petit guide de traitement du spectre


Objet : l'étoile Sirius (Alpha CMa)

Télescope : Celestron 11 (D = 0.28 m)

Spectrographe : LHIRES III équipé d'un réseau de 2400 traits/mm - fente de 26 microns

Caméra : appareil photo numérique Canon EOS 400D standard (pixels de 5.71 microns) réglé sur 400 ISO

Exposition : 180 secondes de pose en déplaçant en continu l'étoile suivant un mouvement de va et vient le long de la fente.

Le déplacement du télescope lors de la prise de vue est voulu pour élargie la trace du spectre suivant l'axe transverse à la dispersion. L'élargissement est ici de 80 pixels environ. Le but est de rendre le spectre plus lisible sous la forme d'une image, mais aussi de réduire les effets négatif (ajout de bruit) de la matrice de Bayer (damier de filtres rouge, vert et bleu en avant des pixels) qui caractérise le détecteur des appareils photo numérique.

On montre ci-après l'enchaînement des opérations de traitement du spectre avec le logiciel Iris.

Etape 1 : décodage du fichier image

Le spectre est acquis dans le format RAW de l'appareil photo numérique. Le fichier RAW (extension CR2) est décompressé avec Iris (par exemple, à partir du menu Fichier, lancer la commande Charger un fichier RAW...). On montre ci-dessous l'allure du fichier RAW après décodage. Compte tenu de l'orientation donné au boîtier reflex l'axe de la dispersion est vertical. Seule une toute partie du spectre est acquis une fois, ici une région dans le jaune-orangé. Le doublet du sodium est visible vers le milieu de la trace du spectre.


Réducteur de 25% de l'échelle du RAW (c'est le fichier brut - remarquer l'axe de dispersion, approximativement vertical). Le bleu est en haut et le rouge en bas.



Détail du fichier RAW
Les deux raies intenses en absorption au centre sont les composantes D1 et D2 du sodium.
On aperçoit la structure de la matrice de Bayer.

Etape 2 : Retrait du signal thermique et de l'offset

Nota : la nuit étant très fraiche dans le cas présent (température de l'ordre de -2°C), le signal thermique est quasi imperceptible en 3 minutes de pose.

>LOAD RAW
>SUB DARK 0
>SAVE SPECTRE

Etape 3 : Le développement du fichier RAW (passage de la matrice de Bayer en une image couleur)

Utiliser la commande Conversion d'une image CFA... du menu Photo numérique (choisir la méthode d'interpolation linéaire simple) :

Etape 4 : orienter approximativement l'axe de dispersion suivant une axe horizontal et s'arranger pour que les longueurs d'onde croissent de gauche à droite

>MIRRORXY
>MIRRORY

Etape 5 : correction du tilt du spectre

On oriente précisément l'axe de dispersion exactement à l'horizontale. L'inclinaison résiduelle du spectre est de 0,8° (on peut trouver cet angle par essais successifs par exemple ou employer la commande L_ORI). Pour corriger l'orientation faire :

>TILT 1350 -0.8

Le premier paramètre de la commande TILT est la position approximative du spectre suivant l'axe vertical de l'image (valeur non critique). Voici le résultat :

Etape 6 : correction du slant

On corrige l'inclinaison des raies de telle manière quelles soient bien verticales. Par essai successif on trouve un angle d'inclinaision de 3,5° :

>SLANT 2050 3.5

Le premier paramètre de la commande SLANT est approximativement le milieu de l'image suivant l'axe horizontal (valeur non critique). Le résultat :

Etape 7 : addition de plusieurs exposition

Optionnellement, à ce stade, il est possible d'additionner plusieurs spectres de l'objet. Bien sur, le traitement est strictement le même jusqu'à l'étage de compositage. Voici par exemple le résultat de l'addition simple de deux spectres posés chacun 180 secondes :

Etape 8 : transformation en une image monochrome

Pour calculer le profil spectral il est nécessaire de transformer l'image couleur en une image noir et blanc. Le problème est potentiellement délicat car l'information est distribuée sur des canaux rouge, vert et bleu. La localisation du doublet du sodium dans le spectre fait que 68% du signal dans l'image couleur interpolée provient du canal rouge, 32% du canal vert et 0% du canal bleu. Pour synthétiser une image noir et blanc optimale en terme de rapport signal sur bruit il faut sommer les canaux RVB au prorata de leur intensité relative. Mais les images APN sont trompeuses, car en plus, le bruit dans le canal vert est toujours plus faible que celui des canaux rouge et bleu (car la matrice de Bayer contient deux fois plus de pixels vert que de pixels rouge ou bleu). Au final, l'influence, dans la partie jaune-orange du spectre, le poids des canaux rouge et vert est similaire et ils peuvent être additionné sans pondération (de manière équitable). En revanche, le canal bleu n'enregistrant aucun signal, il est souhaitable de le rejeter lors du calcul de l'image monochrome afin de ne pas ajouter du bruit inutilement.

Voici les opérations pour trouver l'image monochrome optimale :

>SPLIT_RGB R G B

Cette  fonction sépare les canaux R, V (ou G) et B dans des fichiers distincts :


Le canal "Rouge"


Le canal "Vert"


Le canal "Bleu"

Addition des canaux rouge et vert uniquement :

>LOAD R
>ADD G
>SAVE MONO

Pour démontrer la légitimité de la démarche on relève de rapport signal sur bruit dans les images rouge et verte. On trouve respectivement 80 et 70. Comme on le voit ci-dessus, l'image verte est moins intense que l'image rouge, mais en même temps, l'image verte est la moins bruitée des deux. Le résultat est un rapport signal sur bruit similaire dans le rouge et dans le vert.

Etape 9 : soustraction du fond de ciel

Retrait du niveau de fond de ciel que l'on évalue de part et d'autre de la trace du spectre en utilisant la commande L_SKY2 :

>L_SKY2

Les pointages caractéristiques "l_sky2" :

Etape 10 : le calcul du profil spectral

Repérer les deux coordonnées verticales à l'intérieur desquelles le signal du spectre est significatif :

Puis, nous faisons l'addition simple des pixels colonne par colonne entre ces deux bornes :

>L_ADD 2016 2080

Le résultat est le profil spectral (que l'on a dupliqué vertical pour mieux le visualiser). Seule la partie centrale est montré ci-dessous :

Etape 11 : tracé de la courbe du profil et exportation du résultat

Pour tracer le profil sous une forme graphique on peut utiliser la commande

>_L_PLOT

Le spectre acquis dans sa globalité (non corrigé de la réponse instrumentale) :

Le profil peut être exporté sous la forme d'image ou de vecteur vers un logiciel comme VisualSpec pour réaliser la calibration spectrale et la correction de la réponse instrumentale.


LE SODIUM DANS LA LUMIERE DU SOLEIL

Le spectre du Soleil est réalisé sans le moindre télescope : simplement le spectrographe LHIRES III est tenu à la main en orientant la fente vers le bleu du ciel. Une pose de 10 secondes est réalisée avec un Canon 400D.


La globalité de l'image acquise. La largeur du spectre enregistré correspond à la largeur de la fente.
On devine l'ombre du miroir de renvoi interne du spectrographe sur le flanc droit du spectre.



Gros plan sur le doublet du Sodium dans le fichier RAW

L'image en couleur après redressement géométrique :

L'image monochrome après les corrections géométriques :

Le profil spectral :



 LE SODIUM DANS LA LUMIERE D'UN LAMPADAIRE

On pointe le télescope sur la lampe type sodium haute-pression d'un lampadaire. Voici le spectre observé :

Au centre de ce spectre on trouve une très forte absorption du sodium emprisonné dans la lampoule (le doublet est visible au centre). Mais les ailes de la raies du sodium, très élargie par la pression, sont par ailleurs très intenses, ce qui donne la couleur jaune caractéristique de la lampe (celle-ci contient aussi des vapeur de mercure, notamment pour donner un peu de bleu discret dans l'ambiance délivré par le lampadaire).

Voir ici, d'autres spectres réalisés avec le spectrographe LHIRES III associé à un reflex numérique.


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