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La médecine sans fil

Miniaturisation des instruments médicaux (III)

Le microscope endoscopique

Nous connaissons les caméras endoscopiques qui permettent aux chirurgiens de visualiser en direct l'intérieur du tube digestif notamment. Aujourd'hui cet appareillage peut être combiné à un microscope.

En 1999, Sacha Loiseau, polytechnicien français expert en instrumentation astronomique, voulut appliquer ses connaissances en imagerie à la biophysique de la vision (ophtalmologie) et à la médecine en fabricant un instrument capable d'identifier précocement un cancer par voie endoscopique.

En 2000, grâce à un capital de 400000 FF, il fonda la société Mauna Kea Technologies (MKT). En partenariat avec EndoControl, spécialisée dans la robotique médicale, la startup mis au point un microscope endoscopique baptisé "Cellvizio" dans le but d'explorer la cavité abdominale de la manière la moins invasive possible.

Rapidement son savoir-faire sera reconnu mondialement et dès 2001, la revue "La Recherche" publia un article sur cette société et son innovation.

A voir : Cellvizio le plus petit microscope flexible du monde

La biopsie optique par Cellvizio

A gauche, l'installation Cellvizio de Mauna Kea Technologies (au centre de l'image) dans un bloc opératoire. Au centre, comparaison des images endoscopiques et microendoscopiques. A droite, l'application pour iOS. Documents Mauna Kea Technologies.

Le microscope endoscopique est constitué de fibres optiques et exploite la technologie confocal qui est adaptée aux coupes optiques à faible profondeur de champ (cf. Intech). Il permet d'obtenir des images en temps réel d'une surface d'environ 1 mm2 avec une résolution de 5 microns, soit 50 à 100 fois supérieure à celle d'un endoscope. L'image tomographique permet de voir un tissu avec une résolution d'environ 10 microns.

Le prototype fut testé en 2000 par l'INRA sur des animaux. L'instrument reçut l'agrément des autorités américaines et européennes en 2005. Il fut ensuite mis à disposition de plusieurs hôpitaux en vue de son évaluation puis commercialisé. Selon MKT, Cellvizio dont il existe aujourd'hui plusieurs modèles, est utilisé par plus de 200 unités de soins dans le monde.

L'équipement transportable dont voici une vue générale se compose d'une unité de scanning laser (LSU) à laquelle est connecté le microscope endoscopique, d'un ordinateur avec son clavier, son écran et une souris sphérique ainsi que du logiciel Cellvizio, l'installation revenant à environ 75000 €.

A des fins éducatives, une application "Cellvizio" est également disponible sur iTunes pour les mobiles d'Apple ainsi que sur Google Store pour les mobiles sous Android.

Grâce à ce système, le chirurgien peut introduire le microscope miniature Cellvizio dans le système endoscopique et effectuer lui-même dans la salle d'opération une analyse microscopique des tissus afin de déterminer par exemple s'ils sont sains ou cancéreux. En cas de suspicion cela évite au patient de devoir attendre les résultats d'une biopsie et d'éventuellement reprendre un rendez-vous. En effet, le chirurgien ayant été formé à l'interprétation des images, il peut si nécessaire procéder directement à l'ablation des tissus malades durant la même séance.

Cette technologie trouve des applications en gastroentérologie, en pneumologie, en gynécologie, en urologie et récemment en prostatectomie où les chirurgiens sont à même d'identifier les cellules nerveuses directement sur la table d'auscultation. Quand on connaît les conséquences de cette opération, le fait de pouvoir préserver les cellules nerveuses reliées aux fonctions urinaires et sexuelles et d'extraire uniquement les tissus cancéreux est une excellente nouvelle pour tous les hommes redoutant cette opération.

A voir : Images du système endoscopique Cellvizio, Flickr

Le microscope confocal endoscopique CellVizio et l'image qu'il donne des cellules.

Les scanners

Il y a encore 10 ans, quand un patient devait passer un scanner (IRM, CT scan ou PET scan), ce qu'on appelle scientifiquement une tomographie aux rayons X, une tomodensitométrie (mammographie, arthroscanner, ostéodensitométrie, coloscopie virtuelle ...), une tomoscintigraphie par émission de positrons, etc, il devait se présenter à l'hôpital et était pris en charge par une équipe d'experts et dirigé vers un salle comportant un lit ou un siège entouré d'un immense anneau mobile générant un puissant champ magnétique. Un pupitre d'ordinateur permettait aux opérateurs et médecins d'effectuer les contrôles et d'analyser les images numérisée reconstruites en 2D ou 3D par le système.

Comme aujourd'hui et encore demain, la vitesse de traitement dépend de la puissance de l'installation et des moyens informatiques, notamment des performances du processeur graphique et du programme d'imagerie médicale.

Heureusement, des moyens plus légers mais tout de même contraignants sont mis en oeuvre pour les mammographies, les échographies, les électrocardiographies et autre électroencéphalographies.

Dans la plupart des cas, il n'est pas rare que le patient passe plusieurs heures à l'hôpital pour un examen qui finalement dure moins d'un quart d'heure (sans compter les éventuelles injections préalables de produit de contraste). Les personnes claustrophobes ou ayant peur de l'hôpital subissent cet examen et donneraient tout pour trouver une alternative.

Alors qu'hier encore, un système IRM de 3 teslas ou un PET scan utilisait un tore magnétique de plus de 2 mètres de diamètre et autant de profondeur, depuis quelques années on a réduit son volume de 50% et augmenté le diamètre du tunnel d'environ 70 cm. Les scanners comprennent quelque 128 détecteurs, permettant d'analyser de plus grands volumes plus rapidement qu'auparavant (en 5 minutes). Grâce aux processeurs graphiques aujourd'hui très puissants, ces systèmes peuvent explorer un organe mobile comme le coeur et les vaisseaux sanguins avec précision tout en atténuant les doses de rayonnement pour le patient.

General Electric Healthcare, très impliqué dans l'imagerie médicale, étudie un projet de PET scan mobile, embarqué à bord d'un camion.

De son côté Gundersen Lutheran Health System en collaboration avec Oshkosh Specialty Vehicles proposent une solution de mamographie mobile Senographe de General Electric, également installée dans un camion, ce qui évite aux patientes d'effectuer parfois de longs déplacements.

Scanner médical Health Care Partner 3D de Creaform.

Depuis 2009, les ingénieurs ont pu réduire certains scanners à la taille d'une malette. Chez Creaform par exemple, le scanner est devenu portable ! 

Ainsi, le modèle Health Care Partner 3D de Creaform présenté à droite pèse 850 g, mesure 258 x 140 x 96 mm et présente une résolution de 1 mm. Il est capable d'analyser une section de 38 mm de côté sans contact avec le patient, sans méthode invasive ou salissante. Pour gagner du temps, il reconstitue l'image 3D en gamme de gris ou en fausse couleurs pendant la numérisation. Les images traitées par le logiciel VXscan sont transférables via un port USB.

Dans sa version industrielle appliquée à l'analyse des pièces manufacturées, ce type de scanner portatif fonctionne au moyen d'un laser, pèse environ 1 kg et présente une résolution variant entre 0.1 mm et 0.04 mm selon les modèles.

Les scanners 3D de Creaform destinés à l'industrie sont proposés à un prix variant entre 30000$ et 125000$ (2011). L'entreprise présente une croissance de 56% et est représentée dans plus de 50 pays. Le prix du scanner médical n'est pas communiqué.

A l'image des scanners thermographiques infrarouge de FLIR présentés en 2014 qui ont la taille d'un téléphone portable, les chercheurs estiment que vers 2030, on pourra réduire le scanner médical à la taille... d'un smartphone !

Cela veut dire aussi que le prix exhorbitant de cette technologie, autant pour l'hôpital que pour la caisse de maladie, va chuter dans les années à venir et rendre leur utilisation à la portée de toutes les cliniques locales et pas uniquement de quelques hôpitaux privilégiés.

D'ici une génération, le médecin transportera son scanner médical dans ses bagages et pourra s'en servir sur le champ de bataille ou au milieu de la brousse. Dans une ou deux générations, n'importe quelle personne pourra acheter un scanner médical de poche !

Et la même évolution s'applique au secteur de l'industrie qui se sert également de scanners pour vérifier la qualité de fabrication des produits.

Mieux encore, concernant la médecine, non seulement le médecin pourra scanner le patient en dehors de l'hôpital, mais équipé d'un smartphone et de quelques capteurs miniaturisés il pourra également connaître en direct son état de santé sans devoir installer des systèmes encombrants de prise de sang et de monitoring, c'est la médecine sans fil de demain.

L'échographie sans fil

A son tour, le stéthoscope et les enregistreurs portatifs du rythme cardiaque type Holter et leur lot de câbles seront bientôt relégués au musée. En effet, on peut aller au-delà de l'écoute des bruits hydroaériques et de la respiration tout en réduisant la taille de l'appareil et en simplifiant le système.

Le système ECG portable Vscan de GE Healthcare.

Ainsi, après avoir participé au développement de l'électrocardiogramme (ECG) portatif, en 2010 General Electric Healthcare a mis au point le Vscan, un appareil à ultrasons portable disposant d'une interface (gateway) pour smartphone.

Présenté sur le site medGadget, le Vscan est tout sauf un gadget et ses performances sont bluffantes. Plus complet, beaucoup plus sensible que les anciens systèmes et aussi facile à utiliser qu'un iPod grâce à son interface tactile, l'appareil qui tient dans la main (13.5x7.6 cm) permet de réaliser une échographie cardiaque mais aussi abdominale, y compris un monitoring foetal.

Les images s'affichent soit sur l'appareil soit sur un smartphone, une tablette ou un ordinateur, y compris en mode Doppler couleur qui permet d'évaluer les mouvements comme par exemple les battements du coeur ou la vitesse du sang dans les vaisseaux.

On peut également utiliser le Vscan dans le domaine de l'urologie, en pédiatrie, en pneumologie, ou pour obtenir une image de n'importe quel autre organe (rein, foie, artère, etc) ou de tout objet tant qu'il répond aux caractéristiques d'une échographie (volume perméable aux ultra-sons).

Si le point fort du système est sa miniaturisation, son prix de 7900$ hors accessoires et frais le réserve pour quelques années encore aux professionnels de la santé. Actuellement, on peut acheter l'appareil sur Internet uniquement aux Etats-Unis. Dans les autres pays, il faut contacter le représentant local du constructeur.

A voir : Introduction to Vscan Portable Ultrasound Device, GE Healthcare

GE Vscan Mobile (video de medGadget)

La médecine 3.0

Google fut fondé en 1998. Dix ans plus tard naquit son moteur de recherche qui domina le marché à partir de juin 2013 et qui depuis n'a plus quitté le haut du classement, revendiquant même sa place parmi les GAFAM (cf. Aux origines d'Internet et de la micro-informatique et la cybercriminalité). En devenant Alphabet en 2015, le géant du web a volontairement séparé ses services Internet (comme par ex. YouTube et Gmail) de ses nouvelles activités tirant notamment profit de l'intelligence artificielle et de l'imagerie tout azimut, devenant un acteur incontournable dans le secteur médical. En effet, le but de son cofondateur Larry page n'est plus seulement de devenir notre ami (cf. le slogan "Google est ton ami") mais de transformer radicalement la médecine de demain, celle qu'on appelle déjà la médecine 3.0 que les chercheurs sont en train de construire de façon éthique et responsable qui combinera les outils du Web 3.0, la télémédecine et les nouvelles technologies.

Qu'est-ce que le Web 3.0 ? Il désigne l'évolution d'Internet, le Web 2.0 actuel représenté à la fois par l'Internet des Objets alias IoT (Internet of Things) et l'émergence du web sémantique. Cette évolution est avant tout marquée par la personnalisation des services, rendue possible par la gestion intelligente des "Big Data" et l'utilisation des données personnelles à bon escient. Outre ses aspects éthiques et sécuritaires qui doivent faire l'objet d'une politique très stricte, le Web 3.0 se définit par son indépendance des supports (écran, imprimante etc.), son universalité (il est indépendant des systèmes d'exploitation et donc des fabricants) et son accessibilité (en vertu des directives de la W3C l'accès aux bases de données est libre de droits, ce qui ne peut pas dire que l’utilisation d'un contenu est exempte de toute condition ou précaution).

Depuis l'invention de l'informatique et des progrès en intelligence artificielle (IA), on constate que les sciences et les technologies tendent à converger : les disciplines scientifiques, les secteurs industriels et les technologies sont interconnectés et seront bientôt indissociables : l'interdisciplinarité, la comptabilité, l'hybridation et la convergence sont au centre des préoccupations des créateurs de notre futur. Cette évolution est très marquée chez les géants du Web comme Alphabet qui a pour objectif de refaçonner l'industrie médicale grâce aux technologies issues de la convergence numérique. Prenons quelques exemples de cette évolution en marche.

La médecine 3.0 allie les outils du Web 3.0, la télémédecine et les nouvelles technologies. A gauche, en septembre 2019, Guerbet et IBM Watson Health ont annoncé un deuxième projet de codéveloppement pour exploiter l'intelligence artificielle en imagerie médicale. A droite, un chirurgien cardiaque secondé dans son diagnostic par l'intelligence artificielle et l'imagerie médicale de dernière génération.

La société Verily, une filiale d'Alphabet dédiée au secteur médical, bénéficia en 2017 d'une augmentation de capital de 800 millions de dollars grâce auxquels elle développa une quinzaine de projets innovants en collaboration avec de grandes entreprises et des startups souvent unies en joint ventures vu les risques encourus.

Ainsi, à terme ces projets devraient par exemple permettre de traiter des maladies par modulation des signaux électriques dans les nerfs périphériques (GSK), proposer des systèmes d'imagerie dotés d'intelligence artificielle pour mieux dépister certaines maladies comme les diabètes (Nikon), créer des solutions hardware et software pour faciliter la gestion de la maladie au quotidien (Sanofi et Onduo), construire une plate-forme de chirurgie numérique connectée (Verb Surgical), lutter contre le vieillissement cellulaire (Calico) ou encore pour mieux intégrer les données issues des capteurs fitness aux systèmes de santé et faciliter l’accès aux informations médicales (FitBit et Google). La liste des projets est impressionnante et montre à quel point l'entreprise californienne est confiante et mise tout sur les nouvelles technologies.

La médecine 3.0 à l'heure du Web 3.0, de l'IA et du Cloud. Document DTC4you 

A l'heure du numérique et de l'IA, si nous combinons la santé et la médecine, on touche alors à la biologie : la chirurgie devient capable de "réparer" des pathologies au cœur de la chair tandis que les découvertes réalisées en microbiologie pourraient bientôt prévenir ou traiter des maladies.

Déjà actuellement, la "médecine 2.0" est une réalité : certains médecins peuvent accéder à des dossiers médicaux numériques via le Cloud (stockage sécurisé de données dans un espace virtuel), des passeports "e-Santé" (cf. PassCare) permettent de connecter par Internet les patients aux médecins, d'échanger des données entre médecins, de connecter des appareils de mesures et les smartphones, les hôpitaux et les organismes de tutelle, tout en démocratisant l'accès à l’information médicale, y compris dans les pays africains en proie aux épidémies.

En médecine 3.0, on fusionne les technologies : l'électronique, l'imagerie numérique, l'impression 3D, la génomique, l'intelligence artificielle, la robotique et la blockchain (la gestion de bases de données distribuées cryptées) notamment.

Concrètement, pour un médecin généraliste, spécialiste ou urgentiste exploitant la médecine 3.0, son travail n'aura plus grand chose à voir avec celui de ses confrères il y a une génération. En effet, l'entrée en force de l'IA et des technologies transversales apportent des avantages très précieux à la fois dans l'accès aux données, la vitesse de traitement des données et le diagnostic. Non pas que le médecin sera remplacé par son alter-ego virtuel mais le praticien sera mieux équipé ou secondé pour mieux comprendre les maladies et leur progression, pour analyser les vastes ensembles de données recueillies, et finalement cela facilitera l'utilisation de technologies disparates et l'émergence de nouveaux modèles.

En combinant génomique, Big Data, IA et la puissance des superordinateurs, l'objectif avoué d'Alphabet est de percer les secrets du code génétique humain pour passer d'un modèle de système de santé curatif à un modèle prédictif. Nous n'en sommes pas très loin quand on sait qu'on peut déjà diagostiquer des maladies héréditaires chez les bébés et prévenir leur émergence en modifiant soit leur ADN soit en faisant appel à des cellules souches.

Il est difficile d'imaginer aujourd'hui jusqu'où ira cette médecine du futur. Mais si nous observons les résultats des sociétés de biotechnologie impliquées dans la médecine 3.0, on peut s'attendre à terme à une transformation radicale de l'industrie et de la pratique médicales. Voici quelques exemples concrets.

1. Agir au cœur du vivant

La dégénérescence rétinienne (de la macula ou des seuls cônes) peut à terme rendre aveugle un patient. La société SparingVison, une spin-off de l'Institut de la Vision de Paris, s'est attaquée à cette maladie sur base de la thérapie génique : grâce à seule injection le patient constate un effet durable à long terme.

De son côté, la société privée Eyevensys spécialisée dans la thérapie génique non-virale a rassemblé 30 millions de dollars en 2020 pour poursuivre le développement des "usines biologiques à l’intérieur de l'œil capables de produire des protéines thérapeutiques ciblant une large gamme de maladies ophtalmiques."

Document Eyevensys.

En décodant le génome et en imaginant des procédés pour pallier à ses insuffisances et dysfonctionnements, la médecine 3.0 agit plus que jamais au coeur du vivant. Elle ne pourrait plus se passer des technologies numériques et notamment de l'intelligence artificielle. Selon la société américaine ATUM qui fournit du matériel génétique de synthèse pour les systèmes d'intelligence artificielle et le deep learning (les méthodes d'apprentissage automatique) : "Le fait que les processus et interactions régissant les génotypes et phénotypes humains soient si peu compris rend l'intelligence articielle très puissante. Elle ne cherche pas à ‘comprendre’ comment les pièces s'assemblent les unes aux autres, mais les algorithmes permettent de trouver des motifs dans l'ensemble des données."

2. Les prothèses bioniques

Nous avons expliqué à propos de la médecine du futur que les implants, les lentilles de contact connectées, les nanosondes ingérables, les prothèses bioniques et les circuits électroniques ou les tatouages affichant les données vitales à la surface de la peau sont déjà une réalité. La bionique, autrement dit l'artificiel s'inscruste déjà dans notre corps et le sera plus encore demain avec des résultats spectaculaires pour les patients qui étaient jusqu'ici handicapés.

Depuis quelques années, les prothèses sont façonnées sur mesure par impression 3D, les traitements sont adaptés jusqu'au niveau moléculaire aux antécédents et au patrimoine génétique du patient. Bientôt, les propres cellules du patient seront utilisées pour produire de la matière organique pour réparer ses os et même sa peau endommagée comme le préfigure la "skin printer", une "imprimante à peau" développée par l'Université de Toronto en 2018 ou remplacer des organes creux défaillants comme le coeur, la vessie, le nez, les artères et dans quelques années le foie.

Concernant le coeur, la société française CorWave a reçu 3 millions d'euros dans le cadre du concours mondial "Innovation 2030" pour développer une pompe cardiaque révolutionnaire. Contrairement aux systèmes mécaniques existants, le nouvel appareil utilise une membrane en polymère souple pilotée par un mécanisme électromagnétique pour faire circuler le sang en douceur.

Aux Etats-Unis, l'Université de Sud Californie (USC) en collaboration avec le Wake Forest Baptist Medical Center a mis au point en 2018 un implant électronique capable d'améliorer de 35 à 37% les performances de mémorisation à court terme de patients épileptiques. Selon les chercheurs : "Ces résultats démontrent la facilitation de l'encodage des souvenirs, un élément clé pour la construction de prothèses neurologiques implantables destinées à améliorer la mémoire humaine."

3. L'IA et l'analyse contextuelle

La société canadienne BlueDot fondée en 2013 a développé un algorithme qui passe en revue des centaines de milliers d’articles de presse chaque jour et des données du trafic aérien afin de détecter et suivre les risques de propagation de maladies infectieuses. L'équipe de chercheurs qui comprend notamment des médecins, des vétérinaires, des épidémiologistes, des analyses de données et des développeurs de logiciels, a mis au point un système d'alerte précoce qui repose sur les méthodes du traitement automatique du langage et de l'apprentissage automatique (machine learning ou deep learning).

A la recherche d'un traitement contre la Covid-19

Dans une interview accordée à l'AFP/Relaxnews, Kamran Khan, fondateur de BlueDot, explique l'objectif du service qu'il propose : "Ce que nous essayons de faire, c'est de repousser les limites de l'utilisation et l'analyse des données et de la technologie afin d'aller plus vite. Face à une épidémie, la gestion du temps est essentielle." Concrètement, toutes les 15 minutes et 24h/24, l'algorithme passe au crible des rapports officiels, des forums professionnels et des milliers d'articles en ligne et scanne les textes à la recherche de mots-clés et d'expressions. Il peut lire 65 langues et est capable de traquer plus de 150 types de maladies.

L'équipe de BlueDot a entraînée la machine à déterminer si l'information repérée correspond à une menace ou une épidémie réelle ou non. Si elle est crédible, elle est introduite dans une base de données qui analyse le lieu du foyer, les aéroports alentour et les itinéraires anonymes des passagers aériens à travers le monde. Des données climatiques, ainsi que sur le système de santé de chaque pays ou encore la présence de moustiques et d'animaux à l'origine de maladies humaines sont aussi examinées. Lorsque cette analyse est terminée, BlueDot envoie une alerte à ses clients - des agences gouvernementales, des compagnies aériennes ou des hôpitaux – dans les lieux qui vont recevoir le plus grand nombre de ces voyageurs. L'objectif est que ces acteurs puissent se préparer au pire et anticiper le risque d'épidémie et son impact.

Boîtes de Petri montrant l'efficacité de l'halicine contre la bactérie E.coli (rangée du haut) comparée à un autre antibiotique courant, la ciprofloxaxine (rangée du bas) contre lequel E.coli a développé une résistance. Document Collins Lab/MIT.

Dans le cas du Covid-19, BlueDot a envoyé à ses clients des alertes dès le 31 décembre 2019, soit quelques jours avant les premières communications officielles des grandes agences de santé publique. Elle a aussi correctement prédit dans quels pays le virus risquait de se propager.

Ainsi le 31 décembre 2019 au petit matin, l'algorithme de BlueDot avait repéré un article en chinois évoquant des cas de pneumonies liés à un marché d'animaux à Wuhan. Le virus n'était pas encore identifié, mais la machine a reconnu deux expressions clés : "pneumonie" et "cause inconnue". À 10 h, une première alerte était envoyée à ses clients, notamment en Asie. Selon Khan, "Nous ne savions pas que cela allait devenir une épidémie mondiale, mais nous avions reconnu certains ingrédients similaires à ceux qu’on avait vus pendant le SARS."

Grâce à sa méthode, BlueDot a également réussi à prévoir que le virus risquait de se propager de Wuhan à Bangkok, Taipei, Singapour, Tokyo et Hong Kong. Ce qui s'est effectivement produit en l'espace de deux mois. En revanche, le système s'est trompé en prédisant que l'épidémie s'étendrait en quelques jours jusqu'à Phuket en Thaïlande (mais elle l'atteignit tout de même en février 2020).

Notons que ce n'est pas la première fois que BlueDot se fait remarquer. En effet, en 2016 la société avait également prédit que le virus Zika au Brésil toucherait aussi le sud de la Floride.

Le résultat est d'autant plus bluffant qu'il est instantané alors que 7 ans auparavant, il aurait fallut plusieurs semaines pour que l'IA calcule ces prévisions. Si l'IA avait été utilisée lors de l'épidémie au SARS survenue en 2002-2003, la Chine aurait pu épargner des centaines de vie (selon l'OMS, le SARS tua au moins 774 personnes dans le monde dont 648 en Chine continentale et à Hong Kong).

Selon Khan, "Ces virus sont complexes. Ces maladies sont complexes. Mais nous repoussons sans cesse les limites de nos connaissances après chacune de ces épidémies."

Dans le même ordre d'idées, grâce à l'IA en 2020 des chercheurs du MIT ont découvert un nouvel antibiotique baptisé Halicine (en hommage à HAL9000 du film "2001: l'Odysée de l'espace") qui serait plus efficace que les antibiotiques actuels comme la ciprofloxacine.

Pour parvenir à ce résultat, les chercheurs ont appris à la machine la nature de 2500 molécules utilisées dans la fabrication de 1700 médicaments et 800 produits naturels. Ils ont ensuite demandé à l'IA (le système d'apprentissage automatique) de trouver les molécules les plus efficaces contre quelques 6000 composés. L'halicine était la molécule la plus efficace, ce qui fut confirmé sur des souris infectées par Acinetobacter baumannii, une bactérie opportuniste (un germe) porteuse d'une infection commune des soldats déployés en Afghanistan et en Iran.

Il faut à présent que des tests cliniques soient réalisés avant que le médicament soit approuvé par la FDA et l'EMA et puisse être commercialisé.

A lire : Five Companies Using AI to Fight Coronavirus, IEEE Spectrum, 2020

Une autre équipe de chercheurs a mis à contribution le superordinateur d'IBM "Summit" installé au Laboratoire National de Oak Ridge (ORNL) dans le Tennessee pour découvrir un traitement capable de combattre le Covid-19. Le superordinateur qui est actuellement (2020) le plus rapide du monde avec 200 PFLOPS (pic) et coûta 200 millions de dollars fut chargé de trouver des composés qui pourraient se lier à la "protéine S" (S pour spike) du virus qu'il utilise pour infecter les cellules hôtes. En rendant la protéine inefficace, le virus ne pourrait plus se propager.

Les chercheurs ont simulé la méthode par laquelle les molécules de la protéine virale réagiraient à différents composés médicamenteux. Ils ont découvert 77 traitements dont les chercheurs ont sélectionné les 7 plus prometteurs pour lutter contre le Covid-19. Les résultats de cette étude furent publiés dans le webzine "ChemrXiv" en 2020.

Cette méthode prouve qu'il est possible de créer de nouveaux médicaments et de modifier des médicaments existants pour en réduire les effets secondaires grâce à l'IA. C'est une piste très intéressante et pleine d'espoirs à l'heure où l'on découvre de nouveaux virus très contagieux et où la résistance de maladies aux antibiotiques constitue une réelle menace sanitaire à l'échelle mondiale.

4. L'IA au service de l'imagerie médicale

Les personnes qui ont été chez un dentiste implantologue ont peut être constaté que certains utilisent un ordinateur et un logiciel d'aide à la décision pour déterminer sur base d'une radiographie et d'un modèle d'IA, la meilleure façon de placer un implant et de quelle taille compte tenu de la forme et de la densité osseuse de la mâchoire du patient.

A l'hôpital de Zhongnan à Wuhan, en Chine, premier foyer de la pandémie de Covid-19, les médecins disposent d'un nouvel outil puissant pour les aider à diagnostiquer rapidement les patients potentiellement infectés par le Covid-19. Appelé InferVISION, ce logiciel basé sur l'IA peut mettre en évidence signes cliniques potentiels bien plus rapidement qu'un diagnostic réalisé par un médecin. Voici une autre image.

L'IA est également utilisée chez les ophtalmologues pour dresser un diagnostic des défauts oculaires et la manière idéale de les corriger. Là où jadis, un examen oculaire durait 15 minutes, aujourd'hui l'IA le réalise en 2-3 minutes.

Dans le domaine de l'imagerie médicale appliquée au Covid-19, dans une étude publiée dans la revue "Nature" en 2020, Yang Yang de l'Ecole de Médecine Icahn du Mont Sinai de l'état de New York et ses collègues ont montré l'avantage d'utiliser des algorithmes d'IA pour intégrer les résultats des tomographies thoraciques aux symptômes cliniques, aux antécédents d'exposition et aux tests de laboratoire afin de diagnostiquer rapidement les patients positifs au coronavirus.

Parmi un total de 905 patients testés par PCR en temps réel et PCR de séquençage de nouvelle génération, 419 d'entre eux soit 46.3% ont été testés positifs au Covid-19. Par comparaison, dans un ensemble de 279 patients testés, le système d'IA atteignit une probabilité positive de 92% et avait une sensibilité équivalente à celle réalisée par un radiologue senior.

Le système d'IA a également amélioré la détection des patients qui étaient positifs au Covid-19 au test PCR qui présentaient des tomodensitogrammes normaux, identifiant correctement 17 des 25 patients (68%) alors que les radiologues avaient classé tous ces patients comme négatifs au Covid-19.

Les chercheurs concluent que "lorsque des tomodensitogrammes et les antécédents cliniques associés sont disponibles, le système d'IA peut grandement aider à diagnostiquer rapidement les patients Covid".

5. Des données décentralisées

Dans une recommandation publiée en 2019, l'Europe facilite l'accès des patients à leurs données médicales. Ouf !

En parallèle, une bonne quinzaine de projets centrés sur la blockchain concernent le secteur médical et la santé. Plusieurs entreprises privées dont MedicalChain (GB) et Coral Health (USA) envisagent de stocker toutes les données de santé des patients sur ce type de support décentralisé où seul le propriétaire pourrait autoriser l'accès à des tiers.

L'intelligence artificielle s'en mêle en offrant la possibilité au patient de conserver la propriété de toutes ses données médicales et même d'en commercialiser lui-même l'accès pour des recherches scientifiques. L'entreprise EncrypGen (USA) propose un tel service où les patients pourraient eux-mêmes gérer, sécuriser et commercialiser leurs données génétiques.

Mais s'agissant de données à caractère personnel et donc confidentielles (cf. RGPD), qu'en est-il du risque de cyberpiratage ou de fuite de ces données ? On y reviendra.

6. La virtualisation

Plusieurs sociétés s'intéressent aux solutions globales de télémédecine comme H4D en France qui propose une "cabine de télémédecine" pour faciliter l'accès aux soins de santé. La télécabine abrite divers instruments de mesure (tensiomètre, oxymètre, électrocardiogramme, otoscope, stéthoscope, etc) permettant la prise en charge complète d'un patient à distance par un médecin, qui apparaît en visioconférence comme l'explique la vidéo ci-dessous.

A voir : Eramet inaugure la télémédecine avec H4D

A gauche, la spectrométrie de masse permet aujourd'hui d'établir une passerelle entre la protéogénomique (l'identification génétique des protéines) et la médecine personnalisée. A droite, la réalité virtuelle est de plus en plus utilisée dans les secteurs de la santé et de l'ingénierie. Documents iStock et Gorodenkoff/Shutterstock.

7. L'holoportation

L'holoportation est utilisée depuis au moins 2016 par Microsoft à travers sa technologie Hololens (cf. la caméra Hololens Kinect) mais les progrès restent anecdotiques et le public n'en a globalement pas connaissance à part quelques amateurs fans de "VR" et autre "AR", ces jeux et simulateurs ainsi que quelques documentaires interactifs exploitant la réalité virtuelle et/ou augmentée. Toutefois quelques utilisations professionnelles concrètes très remarquées ont déjà été réalisées.

À Perth en Australie, Silver Chain a développé un système médical mixte de réalité augmentée (Enhanced Medical Mixed Reality) qui utilise le système holographique HoloLens de Microsoft. En pratique, lorsqu'un patient souhaite une consultation à distance, une infirmière se présente à son domicile où elle reçoit toutes ses données médicales sur un tableau de bord virtuel "flottant". Un docteur situé à distance peut alors intervenir à tout moment, en voyant exactement ce que voit l'infirmière. Nec plus ultra, le médecin peut même apparaître chez le patient sous forme d'hologramme, faisant dire à l'entreprise que "les médecins pourront bientôt "s'holoporter" chez leurs patients."

Dans le cadre des missions spatiales habitées, la NASA et l'ESA s'intéressent également de près à l'holoportation. Pendant la pandémie de Covid-19, les contraintes liées au confinement et à la quarantaine ont forcé beaucoup de personnes à utiliser la télémédecine, c'est-à-dire de consulter un médecin par téléphone ou par Internet, et de nouvelles façons de travailler et de dialoguer à distance se sont développées.

En octobre 2021, le Dr Josef Schmid, chirurgien de vol de la NASA, et Fernando De La Pena Llaca, CEO d'AEXA Aerospace, et leurs équipes furent les premiers humains "holoportés" vers l'espace, dans la station spatiale ISS.

À l'aide de la caméra Hololens Kinect de Microsoft et d'un ordinateur personnel équipé du logiciel de réalité virtuelle mixte développé par AEXA, l'astronaute Thomas Pesquet de l'ESA eut une conversation avec des images virtuelles 3D de Schmid, De La Pena et leurs équipes affichées au milieu de la station ISS comme on le voit ci-dessous. C'est la première fois qu'on utilise l'holoportation dans un environnement aussi extrême et distant que l'espace.

A voir : The Microsoft Hololens Augmented Reality Glasses Review

Silver Chain Australia: New holographic doctor service

Holoportation: virtual 3D teleportation in real-time (Microsoft Research)

PORTL CEO David Nussbaum live HoloPortation demonstration, Proto Inc

Le chirurgien de vol de la NASA, le Dr Josef Schmid, holoporté dans la station ISS le 8 octobre 2021 (gauche) avec les membres d'AEXA Aerospace (à droite, de gauche à droite, Andrew Madrid, le Dr Fernando De La Pena Llaca, Rihab Sadik, le Dr Joe Schmid, Kevin Bryant, Mackenzie Hoffman et Wes Tarkington). Documents NASA/ESA/Thomas Pesquet.

Lorsque l'holoportation est combinée à des écrans de réalité mixte tels que l'HoloLens, elle permet aux utilisateurs de voir, d'entendre et d'interagir en 3D avec des personnes distantes comme s'elles étaient réellement présentes dans le même espace physique.

Selon Schmid, "Il s'agit d'un tout nouveau mode de communication humaine sur de grandes distances. De plus, c'est une toute nouvelle façon d'exploration humaine, où notre entité humaine est capable de voyager hors de la planète. Notre corps physique n'est pas là, mais notre entité humaine est absolument là. Peu importe que la station spatiale se déplace à 28000 km/h et soit en mouvement constant en orbite à 400 km au-dessus de la Terre, l'astronaute peut revenir trois minutes ou trois semaines plus tard et avec le système en marche, nous serons là à cet endroit, en direct dans la station spatiale".

Après cette démonstration bluffante, la NASA envisage d'utiliser cette technologie pour établir des communications bidirectionnelles entre des habitants de la Terre et les astronautes qui seront holoportés sur Terre. Selon Schmid, "Nous l'utiliserons pour nos conférences médicales privées, nos conférences psychiatriques privées, nos conférences familiales privées et pour amener des VIP sur la station spatiale pour rendre visite à des astronautes".

Après cela, la prochaine étape sera de combiner l'holoportation avec la réalité augmentée, pour vraiment permettre le télé-mentorat. Selon Schmid, "Imaginez que vous puissiez amener le meilleur instructeur ou le véritable concepteur d'une technologie particulièrement complexe à vos côtés, quel que soit l'endroit où vous travaillez. De plus, nous combinerons la réalité augmentée avec l'haptique. Vous pouvez travailler ensemble sur l'appareil, un peu comme deux des meilleurs chirurgiens travaillant pendant une opération. Cela rassurerait tout le monde en sachant que la meilleure équipe travaille ensemble sur un élément matériel critique".

Selon la NASA, "l'holoportation et des outils comme celui-ci pourraient avoir de grandes implications sur l'avenir des voyages dans l'espace lointain". En effet, au fur et à mesure que les plans se dessinent pour les missions vers Mars, un obstacle à surmonter sera le délai entre les communications qui se produiront pendant le voyage vers et depuis Mars. Ce délai qui approche des 21 minutes à 2.52 UA de la Terre est un défi pour les communications, que ce soit par de simples transmissions radio, des flux vidéo ou de nouvelles méthodes comme l'holoportation. La communication est essentielle, que ce soit pour des raisons médicales ou de soutien à la mission, ou pour rester en contact avec les membres de la famille. L'équipage devra être connecté à la Terre et au contrôle de mission, peu importe l'endroit que les humains explorent.

Il existe également des applications directes sur Terre. Que ce soit dans d'autres environnements extrêmes tels que l'Antarctique, les plates-formes pétrolières offshore ou les théâtres d'opérations militaires, ce type de technologie peut aider les personnes dans de telles situations à communiquer, rassemblant les gens, peu importe la distance ou les défis environnementaux.

Quant à utiliser l'holoportation à des fins de diagnostic médical, ce sera pour plus tard. L'holoportation ne téléporte rien physiquement, ni le médecin ni aucun instrument médical auprès du patient. Il existe bien des solutions consistant à utiliser des objets médicaux connectés dont les données protégées seraient accessibles à distance au médecin mais à ce jour on ne peut pas réaliser une auscultation ni une analyse de sang à distance (il n'existe pas encore de stéthoscope Wifi, pas de brassard Wifi pour la tension artérielle ni de seringue Wifi !). Comme expliqué plus haut à propos du projet de H4D, on peut juste placer des instruments médicaux de base près du patient et lui demander de les utiliser - en s'assurant qu'il le fasse correctement - et qu'il transmette oralement les résultats au médecin virtuel. Même si la procédure est discutable, ce serait l'un des rares écarts à la déontologie de la profession qu'autoriserait l'holoportation.

Vos objets connectés exploités à votre insu

Si dans certains pays, souvent pour des raisons sécuritaires mais également parfois politiques comme en Chine, les autorités trouvent normal d'espionner et tracer l'activité des citoyens jusque dans leur vie privée, aucun gouvernement démocratique ne tolère un usage abusif au point que de grands fabricants américains ont décidé de ne plus exporter d'appareils à reconnaissance faciale en Chine.

Si les objets connectés nous offrent bien des services, étant par définition reliés au monde extérieur, des fabricants peu scrupuleux de certains de ces appareils ainsi que des cyberpirates ont déjà trouvé le moyen d'exploiter ces données à notre insu.

Les entreprises impliquées dans le blockchain par exemple ne se prononcent pas sur le cyberpiratage des données privées ou leur utilisation par des personnes malveillantes, un risque qui est pourtant loin d'être nul comme chacun peut le constater en lisant la presse spécialisée. Si les avocats n'ont jamais accepté de sauvegarder les dossiers de leurs clients sur Internet, on peut se demander pourquoi le ferait-on avec des données encore plus sensibles que sont nos données médicales...

Qu'il s'agisse d'un capteur du rythme cardiaque, d'un pèse-personne, d'une nanosonde, d'une webcam ou d'un téléviseur, dès le moment où il est connecté à Internet par Wi-Fi sans sécurité (sans encryption), une personne extérieure peut consulter les données qu'il contient et les exploiter comme bon lui semble... La presse a déjà relaté plusieurs violations de ce genre.

Vous ne le savez peut-être pas car le fabricant de votre appareil connecté ne vous l'as pas dit ! En revanche, son directeur en a probablement venté les performances à des sociétés de marketing direct voire tenté de revendre les données privées qu'il a pu récolter à des société de services ou des entreprises publiques.

Car il faut savoir que dans le monde du Big Data toute donnée personnelle représente de l'argent. Ainsi votre statut familial, votre poids, la taille de vos chaussures se monnaient environ 0.15 €, votre adresse postale ou votre numéro de téléphone se vend 0.70 €, etc. Au total, l'ensemble de vos données personnelles valent environ 3 €, sans parler du numéro de votre carte de crédit ! Quant à votre dossier médical, il faut de l'or puisque selon votre état de santé, contrairement à toute éthique certaines entreprises n'hésiteraient pas à vous interdire certains droits ou l'accès à certaines activités voire à certains métiers... Ce n'est pas pour rien que le législateur a dû renforcer la protection de ce type de données et criminaliser leur exploitation malveillante.

Tout objet connecté non sécurisé peut-être exploité à votre insu par son fabricant (à l'instar des cookies). Si a priori pirater des données physiologiques n'a pas d'aucune conséquence que de fausser vos résultats, le fabricant peut facilement récupérer toutes les mesures stockées dans votre appareil, smartband et autres pèse-personne et les transmettre à des tiers sans votre accord, y compris à des sociétés d'assurances. Si ce genre de pratique est interdite en Europe, cela n'empêche pas les fabricants de stocker vos données sur leurs serveurs en dehors de la juridiction européenne.

Pire, les conséquences peuvent même être ruineuses si un pirate informatique accède à votre système domotique par exemple pour planifier un cambriolage ou s'il intercepte les données émises par votre smartphone quand vous effectuez un paiment sur Internet ou échangez des données médicales avec un médecin...

Y avez-vous pensé en utilisant vos objets connectés ? Nous reviendrons sur ce problème dans l'article consacré à la prévention du piratage informatique.

En guise de conclusion

Grâce aux progrès réalisés en électronique et en nanotechnologie notamment, le personnel des services de santé comme les patients sont en train de vivre une révolution numérique. La technologie sans fil va permettre, du moins c'est l'espoir, de faire converger la biologie, la génomique, la physiologie et d'autres disciplines vers un outil médical holistique et une pratique simplifiée grâce à la médecine mobile.

La liste des applications médicales sans fil ne cesse de s'allonger. Aujourd'hui, rien qu'aux Etats-Unis une centaine d'entreprises développent des applications liées à la santé mobile ou "M-Health", plus de 500 autres travaillant sur des appareils sans fil, le nombre de start-up se lançant dans ce secteur augmentant chaque année, y compris en Europe et en Asie.

Face à l'expansion rapide de ce secteur, aux Etats-Unis, le Scripps Institute a ouvert le West Wireless Health Institute, un centre éducatif bénévole fondé en 2009 par Gary et Mary West, dans le but d'informer le corps médical et les enseignants notamment de l'existence de ces innovations. En parallèle, ses chercheurs développent et valident des tests cliniques afin de préparer la profession à ces changements des pratiques médicales et leurs conséquences sur les plans politique et économique.

L'Europe leur emboîte le pas à travers ses programmes Eureka et Horizon 2020 dont les budgets importants doient insiter les entreprises à investir dans des secteurs technologiques innovants.

A l'avenir, l'impact de ces innovations sur les ressources cliniques des services de santé sera profond et durable. L'impact sur les maladies est également impressionnant quand on sait tout ce que ces technologies permettront de diagnostiquer des déréglements des décennies avant que les maladies tuent. Cela porte la médecine au niveau personnel et la rendra cette fois réellement accessible à tous, y compris aux pauvres, d'ici quelques générations.

Mais revers de la médaille, les objets connectés offrent aussi aux pirates informatiques un nouveau moyen d'accéder à vos données personnelles et aux commerçants d'augmenter leurs ventes grâce au marketing direct et l'optimisation du profil des clients.

Pour plus d'informations

Futuremag, Arte Future, ArteTV

Future Technology, SpaceRef

BBC Future

Wired (Danger Room)

Wearable technologies

Wareable

Emerj Artificial Intelligence Research (section Healtcare)

Windows Central.

 

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