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Ciel bleu et rayon vert

Les Alpes autrichiennes à Mortschach en direction du nord en juillet.

La couleur du ciel (I)

Il est étonnant de constater combien des notions a priori simples sont méconnues du public. Tout le monde connaît la couleur du ciel et les phénomènes de réfraction et de diffusion de la lumière solaire mais très peu de personnes sont capables d'expliquer scientifiquement pourquoi le ciel présente cette couleur et pourquoi celle-ci varie avec l'altitude ou en fonction du temps ou de la saison.

Quand on parle de la couleur du ciel cela concerne plusieurs phénomènes liant les propriétés de la lumière à celle de l'atmosphère. Sans entrer dans les détails de la composition de l'atmosphère qui sont développés dans le dossier consacré à la météorologie, rappelons que l'air est constitué d'un mélange de gaz et de différents éléments solides (scorie, pollen, sable, sel, poussière météoritique, ...) auxquels s'ajoutent les éléments polluants. L'atmosphère se compose de 78% d'azote et de 21% d'oxygène. L'argon et l'eau (vapeur, pluie, glace) représentent la majorité du pourcent restant. La couche atmosphérique est plus dense dans les basses couches, dans les dix premiers kilomètres d'altitude et se raréfie graduellement jusqu'à l'exosphère ou commence théoriquement le vide.

Bien que le spectre électromagnétique s'étende des innocentes ondes radio kilométriques aux mortels rayons gamma, la lumière visible est la seule partie du spectre électromagnétique que l'oeil humain puisse détecter. Ce spectre qui semble décrire tout l'univers s'étend en réalité sur une portion très réduite d'octaves qui limite notre vision de l'univers entre grosso modo 400 et 700 nm, du rayonnement bleu profond au rouge rubis. En dessous et au-dessus de ces longueurs d'ondes s'étendent des "lumières" invisibles telles que les rayonnements ultraviolet et infrarouge dont chacun a probablement déjà subit les effets (coups de soleil).

Il existe deux manières de décomposer la lumière blanche : artificiellement en utilisant un prisme ou naturellement lorsqu'un arc-en-ciel se forme suite à la réfraction de la lumière solaire dans les gouttes d'eau. Documents Berkshire Art et T.Lombry.

Les différentes couleurs du spectre visible sont donc déterminées par la longueur d'onde (la fréquence) de l'énergie transportée par les photons. Ainsi la lumière bleue présente une fréquence plus élevée et contient plus d'énergie que la lumière rouge.

La lumière du Soleil nous paraît blanche mais en réalité elle résulte de la combinaison de plusieurs longueurs d'ondes monochromatiques ainsi que nous l'expliquerons dans l'article consacré au Soleil et dans le dossier consacré à la spectroscopie. Nous pouvons observer ces différentes couleurs en décomposant la lumière blanche à travers un prisme ou un réseau de diffraction. Le spectre de la lumière est également visible lors de la formation d'un arc-en-ciel car les gouttes d'eau agissent alors comme autant de prismes individuels.

Double arcs-en-ciel photographiés par R.George et par Daniel Bayer dans le Colorado.

En pénétrant dans l’atmosphère de la Terre, vers 50 km d'altitude la lumière rencontre des poussières et ce qu'on appelle communément des "molécules d'air", terme impropre qui définit les différents éléments légers qui constituent l'air que nous respirons. Son comportement dépend ensuite de la longueur d’onde du rayonnement et de la dimension des particules qu'elle rencontre.

Pourquoi le ciel est-il bleu ?

Les anciens Perses pensaient que la Terre reposait sur un saphir dont l'éclat bleuté se réflétait dans la couleur du ciel. Cette idée se réfère à la perception immédiate et encore ici il est difficile d'y croire quand on vit dans un lieu semi-désertique ou sur une île. L'explication est évidemment toute autre et liée aux phénomènes physiques qui accompagnent la diffusion de la lumière.

Les particules de poussière et les aérosols qui composent l'atmosphère ont une dimension des millions de fois supérieure à la longueur d’onde de la lumière visible. En rencontrant les particules les plus grandes la lumière se réfléchit sur leur surface et rebondit dans différentes directions, la lumière est diffusée. Dans ces conditions toutes les couleurs subissent les mêmes réflexions de la même manière.

En revanche les molécules d'air ont une dimension du même ordre de grandeur que la longueur d’onde de la lumière visible. Quand un photon percute une molécule ou un atome, certains photons peuvent être absorbés par les électrons qui gravitent dans le nuage électronique qui l'entoure. Pour retrouver sa stabilité l’atome réémettra cette lumière à la même fréquence mais dans des directions aléatoires.

A cette échelle atomique les différentes couleurs du spectre ne sont pas toutes affectées de la même façon. Bien que toutes les couleurs peuvent être absorbées, les fréquences les plus élevées et les plus intenses d’un point de vue énergétique (les bleues) sont plus fréquemment absorbées que les fréquences plus basses (rouges) qui par comparaison sont peu affectées par l'atmosphère. Ce phénomène est appelé la diffusion de Rayleigh, nom du physicien anglais qui décrivit ce phénomène en 1870.

La couleur bleue du ciel s’explique par l'importance de la diffusion de Rayleigh qui est inversement proportionnelle à la quatrième puissance de la longueur d'onde. La plupart des longues longueurs d’ondes, les couleurs rouge, orange et jaune en particulier traversent l’atmosphère sans être trop dérangées par ses constituants. En revanche, la lumière bleue est absorbée par les molécules d'air y compris les aérosols qui absorbent ce rayonnement ou le réémettent dans toutes les directions. La lumière bleue est ainsi diffusée à travers tout le ciel. C’est la raison qui explique pourquoi, quelle que soit l’endroit du ciel que vous observiez, le ciel paraît bleu. On peut donc en conclure que sur un astre dépourvu d'atmosphère comme la Lune, la lumière ne sera pas diffusée et tous les rayonnements se propageront en ligne droite jusqu'au sol. Le ciel de la Lune est désespérément noir, et du côté obscur il est parsemé d'étoiles comme un velours de diamants.

A gauche, la couleur naturelle de la Terre est bleue suite au phénomène de diffusion de Rayleigh dans l'atmosphère. En dehors de celle-ci le ciel est noir. A droite, schéma explicatif de la diffusion de la lumière bleue par les molécules d'air. Documents Naval Research Laboratory et T.Lombry adapté de ScienceMadeSimple/PMResearch.

La température de couleur du ciel bleu

Un ciel bleu signifie un ciel éclairé par le Soleil. Selon les normes internationales, la lumière dite du jour présente une température de couleur standard de 5000 K (illuminant D50 aux USA) ou 6500 K (illuminant D65 en Europe), proche mais pas identique (car il peut y avoir des raies spectrales) de celle d'un corps noir porté à la même température. Mais à mesure que le Soleil s'élève et que le ciel prend une totalité bleue, on entend souvent des photographes amateurs dirent que sa température de couleur atteint 10000 K à midi voire plusieurs dizaines de milliers de degrés en haute altitude.

Première remarque, cette température est nettement plus élevée que celle du Soleil et donc en toute logique, elle n'est pas compatible avec la définition de la température du corps noir. Pourtant certains amateurs et des encyclopédies gratuites en ligne établissent encore cette comparaison trompeuse.

Document T.Lombry

En fait c'est un abus de langage. En effet, cette température de 10000 K ou supérieure présente une couleur qui est plus bleue que celle du corps noir porté à une température infinie ! Cet exemple par l'absurde montre la limite de cette notion de température de couleur en dehors de son contexte. Elle n'a de sens que si on considère un corps qui rayonne approximativement comme un corps noir.

Or, le rayonnement du ciel dans le bleu n'a rien à voir avec celui d'un corps noir; il s'agit de la diffusion de Rayleigh que nous venons d'évoquer : l'atmosphère diffuse plus les photons solaires bleus que rouges, et donc les photons bleus se retrouvent dans le ciel... qui est déjà bleu, il y a donc amplification. L'extrapolation de ces notions conduit donc à des inepties : 10000 ou 100000 K pour un ciel bleu ne représente strictement rien de physique, ni même d'utile.

En conclusion, "température" n'est donc pas un terme qui s'applique au ciel bleu car l'atmosphère de la Terre est en équilibre thermodynamique (heureusement pour nous !). On ne peut parler de température de couleur du ciel qu'à condition de se baser sur la distribution spectrale du ciel bleu corrigée pour la diffusion Rayleigh et la rapporter à un corps noir. Ainsi, quand le Soleil est au zénith, on constate que la distribution spectrale du ciel présente une valeur qui s'accorde avec la température effective du Soleil, soit celle d'un corps noir porté à environ 5770K. Toute valeur supérieure n'a aucun sens.

Deuxième partie

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