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L'eau, l'or bleu

L'eau du robinet : de l'eau traitée certes, mais pas de qualité minérale.

L'eau potable (II)

Le traitement des eaux

Quand l'homme détruit la nature, il faut bien qu'il invente des systèmes pour réparer ce qu'il a détruit au risque de transformer sa planète en un désert stérile et malodorant. Ayant pollué l'eau, il a donc construit des stations d'épuration. Comment fonctionnent-elles ?

Il existe deux méthodes d'épuration des eaux selon qu'il s'agit d'eaux usées ou d'eaux destinées à la production d'eau potable. Dans les deux cas, les eaux sont traitées dans des stations d'épuration où elles subissent un traitement mécanique et biochimique afin de les rendre aussi pures que possible en fonction de leur destination.

Si l'eau traitée est non potable mais propre, elle est rejetée dans les fleuves et convient parfaitement aux organismes vivant dans l'eau douce. Mais contenant des germes patogènes, il est recommandé de ne pas la boire ni même de s'y baigner. Si l'eau est rendue potable, elle est distribuée aux consommateurs. Après usage, elle est recueillie pour être conduite vers les usines de dépollution des eaux usées, avant d'être enfin rendue à la nature.

Le cycle de l'eau de consommation nécessite d'énormes infrastructures. Pour alimenter en eau un million d'habitants répartis dans une région mixte industrielle et rurale, il faut environ 1000 stations de captages, 10000 km de canalisations et plus de 100 usines de production d'eau potable. 

A ceci il faut ajouter les installations de collecte et de dépollution des eaux usées. Vu la densité de population en Europe, en 2005 la Commission Européenne imposa la mise en service d'une station d'épuration pour 2000 habitants. Chacune d'elle doit être capable de traiter 350 m3 d'eau par jour, ce qui représente un débit journalier de 350000 litres d'eau traitée. Ajouter à cela une infrastructure de milliers de kilomètres de canalisation. Multipliez le tout par autant de millions d'habitants et vous apprécierez l'ampleur du projet dans un pays comme l'Allemagne, la France ou la Belgique dont plus de 50 % de la superficie est occupée par des zones rurales.

Au vu de ces chiffres, il est évident que seuls les pays riches peuvent se doter de telles infrastructures qui font cruellement défaut dans les pays pauvres.

A chaque étape de ce cycle, la qualité de l'eau est contrôlée par les traiteurs d'eau et les pouvoirs publics : l'eau brute prélevée et celle effectivement fournie aux usagers après traitement doivent toutes deux être conformes aux normes nationales et européennes en vigueur. Tout dépassement des normes se paye par une amende.

En Europe, la fréquence des contrôles est réglementée par les pouvoirs publics de chaque pays. De manière générale, les contrôles sont d'autant plus fréquents que les volumes d'eau distribués sont grands ou que le pays présente une petite superficie. Ainsi dans les grandes agglomérations les eaux sont contrôlées plusieurs fois quotidiennement alors que dans certains petits villages il arrive que les contrôles ne soient effectués que tous les trimestres pour d'évidentes raisons de coût. La qualité de l'eau est donc a priori plus fiable dans les grandes villes que dans les campagnes, ces dernières étant également plus régulièrement polluées par des boues.

Le traitement d'une eau brute dépend de sa qualité, laquelle est fonction de son origine et peut varier dans le temps. L'eau à traiter doit donc être en permanence analysée car il est primordial d'ajuster le traitement d'une eau à sa composition et, si nécessaire, de le moduler dans le temps en fonction de la variation observée de ses divers composants. Il peut cependant arriver qu'une pollution subite ou trop importante (suite à un accident industriel ou une inondation par exemple) oblige l'usine à s'arrêter momentanément.

Fonctionnement d'une station d'épuration

Comment fonctionne une station d'épuration ? Puisées dans les égoûts, les lacs de retenue ou dans les fleuves, les eaux impropres à la consommation sont délestées de leurs substances en suspension dans des bassins de déssablement et de dégrillage puis dans d'immenses cuves de décantation ou de sédimentation qui permettent d'extraire jusqu'à 60 % des matières solides en suspension.

La méthode de sédimentation peut être avantageusement remplacée par la flottation, un traitement par lequel des bulles d'air injectées dans les eaux usées entraînent les solides en suspension vers la surface où ils sont extraits. Ce processus permet de filtrer 75 % des matières solides en suspension. La coagulation et la floculation sont des procédés chimiques qui permettent d'éliminer plus de 80 % des particules en suspension.

Fonctionnement d'une station d'épuration. Document Aquawal adapté par l'auteur.

Les eaux usées subissent ensuite un traitement biologique de digestion qui permet de transformer la boue organique en méthane, dioxyde de carbone et en une variété d'humus non toxique. Les réactions chimiques sont assurées par des enzymes anaérobies (se développant en l'absence d'oxygène) puis par des bactéries acidifiantes. Au terme du processus les boues sont réduites de 40 à 60 %.

Les boues sont finalement séchées par percolation : elles sont déshydratées à l'air ou sous serre puis conditionnées selon leur destination.

Ainsi, une goutte d'eau usée puisée dans un fleuve ou les égouts subit cinq ou six traitements spécifiques qui vont durer au total entre 13 et 30 heures.

Après cette dernière étape de déshydratation, les boues contiennent surtout de l'azote et du phosphore et peuvent servir de nutriments aux bactéries. On les utilise donc comme engrais (engrais NP). Cet épandage représente 60 % de leur utilisation.

Bien entendu l'épandage des boues sur les champs doit respecter un minimum de précautions. Dans les faits, et malgré les réglementations, ces boues peuvent occasionnellement contenir des métaux lourds et les opposants soutiennent que leur traçabilité n'est pas assurée. Les eaux souterraines peuvent également être contaminées par des nitrates (engrais azotés) et affecter la santé des nourrissons.

S'il reste encore des matières organiques, les eaux usées subissent un traitement secondaire. On injecte des bactéries aérobies qui transforment la matière organique en dioxyde de carbone, eau, nitrates et phosphates.

Enfin, la clarification permet de séparer les bactéries ayant servit à extraire les boues de l'eau claire qui sera ensuite rejetée dans le fleuve. Généralement ces procédés permettent de purifier 90 % des eaux usées.

Si l'eau est destinée à la consommation humaine, des contrôles sanitaires sont effectués en aval de la chaîne pour contrôler la qualité et les paramètres chimiques de l'eau avant qu'elle ne soit distribuée. Au final, d'une eau au départ trouble et brune à vous donner la dysenterie, vous obtenez de l'eau limpide comme du cristal et potable.

Jusqu'en 2001, la plus grande station d'épuration se trouvait près de Chicago, aux Etats-Unis (Premcor Blue Island Refinery) mais elle fut contrainte de fermer ses portes suite à de sérieux problèmes de contamination de l'environnement. Ainsi que le rapporte le journal "The Star", fin 2005 Premcor fut condamnée à payer plus de 120 millions de dollars de dédommagements à 6000 résidents de l'Illinois.

A voir : Du robinet à la station d'épuration, AIVE

Le traitement de l'eau, Deoditoo

Les stations d'épuration de Douai (gauche) et de Clermont (droite) reconnaissables à leurs grandes cuves de décantation. Documents Douai et Clermont Communauté.

Aujourd'hui la plus grande station d'épuration d'Amérique se trouve à Montréal et traite 7.6 millions de m3/j (7.6 milliards de litres). En Europe, l'une des plus grandes station se trouve à Archère, en banlieue parisienne (Yvelines, F). Sa construction a coûté 21 millions d'euros. Mais ici aussi, les agriculteurs et les citoyens ont constaté que parfois les boues ou les eaux rejetées dans la nature étaient encore polluées et présentaient un risque potentiel pour la santé des animaux et indirectement pour l'homme (pH trop élevé, présence de graisse, huiles, métaux, etc).

Une petite station d'épuration comme celle de Douai en France présente une capacité de traitement de 165000 équivalents-habitants et offre un débit moyen journalier de 29700 m3/j (29.7 millions de litres). Elle extrait quotidiennement 8.9 tonnes de matière organique, 14.8 tonnes de matières en suspension et près 2 tonnes d'azote. Comme dans beaucoup de stations, cette eau traitée mais non potable est rejetée dans la nature.

Quelques stations importantes, comme par exemple celle de Profondeville en Belgique (Usine de Taiffer, 260000 m3/j), rejette l'eau traitée dans la Meuse mais alimente également Namur et Bruxelles en eau potable.

Ceci est du moins l'image plus ou moins flatteuse que nous donnent les intercommunales et les agences assurant l'épuration des eaux. Même si l'eau du robinet est potable (et souvent un peu trop calcareuse et chlorée), les autorités oublient souvent de dire qu'elles n'assurent qu'un contrôlé partiel de sa teneur en antibiotiques car un certain nombre d'entre eux passent les contrôles incognito. D'où viennent ces antibiotiques, quels risques présentent-ils et pourquoi ne sont-ils pas éliminés ?

Des antibiotiques dans l'eau du robinet

Depuis les travaux de Fleming en 1945, certaines bactéries sont devenues résistantes à plus de 200 antibiotiques ! Document AAFP.

Ah ! Un bon verre d'eau fraîche du robinet. Stop ! Je vous arrête. Etes-vous certain que l'eau que vous allez boire est inoffencive pour votre santé ? Pressez plutôt une orange... L'eau du robinet pose en effet un problème de santé.

Aujourd'hui, la population occidentale à tendance à surconsommer les médicaments. Les antibiotiques sont dans le collimateur du Ministère de la Santé car certaines personnes les considèrent comme des remèdes universels pouvant tout aussi bien guérir le rhume que l'otite ou même la pneumonie, confondant les facultés des bactéries avec celles des virus. 

Rappelons que par nature les antibiotiques sont incapables d'agir contre les virus puisque ces derniers ne sont pas vivants en tant que tels et ont besoin des cellules pour devenir actif et infecter l'organisme. Or les antibiotiques sont incapables de tuer les cellules : ils agissent contre des microbes spécifiques qui se propagent dans le sang et ailleurs. Indirectement bien sûr, ils peuvent affecter le comportement des cellules et même abîmer des muqueuses, notamment.

En prenant des antiobiotiques pour combattre des infections virales, non seulement vous n'allez pas guérir mais vous risquez de présenter les effets secondaires des antiobiotiques. Mais, plus grave à long terme, vous effectuez une pression de sélection pour les bactéries résistantes à cet antibiotique.

Et comme les bactéries sont capables de transmettre une information génétique, sous certaines conditions il peut arriver qu'elle "accumulent" ainsi une résistance aux antibiotiques, elles deviennent multirésistantes. Donc, éviter l'automédication et en particulier les antibiotiques pour combattre des infections virales. Un bon conseil, consultez plutôt un médecin.

Les différentes stratégies de résistance des antibiotiques. Extrait de La Recherche, 314.

Cette pléthore de remèdes que nous avons souvent en stock à domicile finissent un jour ou l'autre par lasser le consommateur, soit que sa maladie est guérie soit que le médicament est périmé. Certains les jettent aux toilettes ou à l'égout. Mais biodégradable ne signifie pas inoffensif pour l'environnement. Cela signifie simplement que la structure biologique est décomposée par le fait de la nature et disparaît sans laisser de traces. Ou presque.

En jetant les antibiotiques avec les eaux usées, à l'autre bout de la chaîne vous avez toutes les chances de les retrouver... dans votre verre d'eau ! En effet, bien que les eaux usées soient filtrées dans les stations d'épuration, il existe quelque 3000 antibiotiques sur le marché (sur quelques centaines de milliers catalogués). Les dispositifs visant à les éliminer ne peuvent en identifier que quelques centaines tout au plus. La majorité échappent donc au contrôle sanitaire et se retrouvent à nouveau dans la chaîne alimentaire où ils vont s'accumuler.

Des études récentes ont démontré que les antibiotiques agissaient bien en deçà de leur seuil d'activation théorique. Cela signifie concrètement que des médicaments présents à l'état de trace dans le corps et jugés inoffensifs, conservent malgré tout une activité biologique. Etant donné la faiblesse des défenses immunitaires des bébés que portent les femmes enceintes ainsi que des enfants, ces populations encourent des risques qu'il est difficile d'estimer mais qu'il est prudent de tenir compte et d'éviter.

Vous me direz que cela n'est pas très grave puisque ces antibiotiques participent à la défense de notre organisme. Détrompez-vous ! Ce constat est alarmant.

Incidieusement, en buvant cette "eau-médicament", chaque jour vous renforcez un peu plus la résistance bactérienne. Comment ? A l'inverse de l'homme, une bactérie ne dispose pas de système de contrôle au cours de la mitose (reproduction). Au cours de ce cycle, trois cas de figures se présentent : la cellule fille est viable, elle meurt ou elle subit une mutation aléatoire puisqu'il n'y a pas de contrôle du résultat. C'est cette dernière solution qui nous pose le plus de problèmes car le médicament ne la reconnaîtra plus et ne sera plus efficace. Les chercheurs devront donc créer un nouveau médicament et c'est l'escalade.

A lire sur les antibiotiques:

Antibiotiques - PNIA - Fondation Recherche Médicale

Les enfants sont très sensibles aux maladies. De nos jours, les médecins constatent que de plus en plus de personnes présentent une résistance à la pénicilline par exemple. Or elle entre dans la composition d'environ 30 % des antibiotiques. Il arrivera un jour que notre corps sera tellement résistant à l'emprise des antibiotiques que plus aucun médicament ne sera efficace. C'est une caricature très exagérée, mais c'est le risque que nous encourrons si nous ne sommes pas plus prévoyants à la fois en matière de santé et de contrôle des eaux.

Sachant cela, je ne ne peux que vous conseiller, ainsi qu'aux femmes enceintes et aux enfants, d'éviter de boire trop souvent de l'eau du robinet tant que les contrôles sanitaires ne sont pas à même de supprimer tous les antibiotiques présents dans l'eau.

Troisième partie

La qualité de l'eau potable

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