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Quelle est la meilleure optique astronomique ?

La lunette apochromatique d'Astro-Physics Starfire de 130mm f6 EDFS fixée sur une monture équatoriale 600GTO et équipée d'un renvoi en diagonal de 50 mm. Document Constructeur.

écrit en collaboration avec Ed Ting de Scopereviews

Le choix gordien : la lunette, le réflecteur ou le catadioptrique ? (I)

Devant la panoplie de matériel astronomique accessible à l'amateur et après lecture des revues faites par des observateurs avertis, une question nous vient naturellement à l'esprit : "Quelle est la meilleure optique du marché ?" Mais aussitôt formulée, on peut se demander s'il est seulement possible de répondre à une telle question... Car en réfléchissant au problème, assis devant une table couverte de catalogues et de rapports d'évaluation on comprend vite que la réponse est difficile à formuler du fait qu'il existe au moins trois manières de concevoir une optique astronomique : la lunette, le télescope et le catadioptrique.

On se dit alors que la réponse est beaucoup plus difficile à formuler que prévu car les trois conceptions n'ont pas grand chose en commun; comment voulez-vous comparer une lentille avec un miroir ou une lame de fermeture... ? En fait tous les instruments d'astronomie ont un point en commun, leur principe de base : recueillir la lumière pour la concentrer vers le système d'observation. Sous cette définition générique on peut bien sûr trouver les optiques électroniques voire radioastronomique (IR) mais vu leur domaine d'application nous les excluerons de notre évaluation.

Ayant trouvé le point d'articulation entre la lunette, le réflecteur et le catadioptrique nous pouvons comparer leurs performances et répondre à notre principale question.

Etablir un plan de test

Ce test ayant pour but de mesurer les performances absolues de trois instruments de conception différentes, il va de soi que l'essentiel du jugement sera porté sur l'optique sur laquelle les observateurs doivent être les plus pointilleux et les plus objectifs possible, car rien ne sert de disposer de la monture du télescope Keck d'Hawaï si s'est pour y installer un télescope présentant des aberrations optiques. Vous conviendrez comme moi que l'optique est plus importante que n'importe quel accessoire, y compris la monture, bien qu'elle reste un facteur décisif pour l'amateur pratiquant l'astrophotographie, domaine qui n'entre pas ici en ligne de compte. En complément il est évident que le prix et la disponibilité d'un instrument sont des facteurs très importants à considérer mais dans l'absolu il serait malheureux de leur donner une importance supérieure à la qualité optique. Mais en pratique nous savons tous combien d'argent il nous reste dans notre porte-feuille et c'est souvent ce facteur qui détermine notre choix. Nous en toucherons donc quelques mots.

Pratiquement ce banc-test se divise en quatre étapes ou phases :

- La présélection, consistant à choisir parmi les maître-choix présélectionnés la meilleure optique dans chaque catégorie d'instrument. Ceci doit déjà faire l'objet d'une analyse préalable et souvent de longue halène en tenant compte de l'inévitable facteur météo et des disponibilités de chacun; une étape théorique dans laquelle il faut définir les paramètres à analyser et leur donner un poids en fonction de l'ensemble;

- La phase protocolaire ou de préparation durant laquelle il faut définir un protocole de tests afin de ne pas juger arbitrairement une optique en observant n'importe quel objet dans n'importe quelle condition. Les cotations attribuées doivent également être pondérées en fonction de l'importance que l'on accorde à tel ou tel paramètre mis à l'épreuve. Il serait par exemple insensé d'insister sur la qualité de l'oculaire et de lui donner un poids supérieur à celui de l'objectif primaire. Si vous observez avec un miroir principal mal taillé, il y a peu de chances que votre oculaire puisse corriger sa courbure; le résultat sera biaisé et les conclusions tout à fait fausses. Par contre un correcteur de champ ou un chromacor inséré avant l'oculaire pourra corriger certaines aberrations. Il faut donc évaluer avec précision tous les paramètres et leur poids et c'est déjà ici que bien des erreurs peuvent être commises. Cette seconde phase protocolaire est donc tout aussi importante que la présélection des trois maîtres-choix.

- Le test à proprement sur le terrain effectué par des amateurs ayant une longue expérience de l'observation et connaissant bien les caractéristiques instrumentales et les effets des conditions d'observation (turbulence, humidité, pollution lumineuse, etc) sur la qualité des images télescopiques. Pour porter un jugement de valeur il faut en effet être capable de "lire une image", de reconnaître par exemple une aberration optique d'un effet de la turbulence atmosphérique ou d'un reflet induit par l'oeil de l'observateur. Il faut être capable de mesurer la résolution instrumentale en connaissant les propriétés de la lumière et sa dépendance des facteurs instrumentaux, etc. Cette phase de test in situ exige donc un certain savoir-faire et une expertise qui n'est pas donnée à tout le monde. Pour ce test le travail a entièrement été confié à Ed Ting et une équipe d'observateurs américains pour la simple raison qu'ils disposaient d'un bon site d'observation au ciel clair et à l'atmosphère peu turbulente et du matériel prêté par des amis.

- Le dépouillement des résultats enfin et la rédaction du rapport final, ce dernier précisant notamment le but de l'exercice, les conditions de travail, les moyens mis en oeuvre, les contraintes ou les problèmes éventuellement apparus et les conclusions.

Revues de matériels à consulter

Scopereviews - Cloudy Nights - Sky & Telescope

Consulter également mes 1001 liens (lettre M)

Les observateurs

Cinq amateurs ont participé au test : Chase M., Dan S., Ed T., John P. et Mike T. Tous peuvent prétendre avoir une expérience de terrain d'au moins 20 ans. Patients et méticuleux ils ont chacun leur spécialité : les tests de magnitude limite, l'observation planétaire à haute résolution et les étoiles doubles, l'astrophotographie, les tests d'instruments, voire l'observation "coûte-que-coûte" quelles que soient les conditions d'observation ou encore la présidence d'un club d'astronomie alliée à l'observation planétaire et des étoiles doubles.

Après avoir testé individuellement chaque instrument et effectué des tests comparatifs, chaque observateur a pu utiliser l'instrument durant quelque temps pour se forger une impression subjective.

A partir du moment où le test a démarré et jusqu'à la remise des conclusions aucune discussion n'a été autorisée à propos des insruments. Les commentaires étaient notés de manière strictement privée et confidentielle. On peut dire que le sujet était tabou durant ces quelques semaines jusqu'à ce que chacun ait remis ses conclusions et que les données soient dépouillées. Une équipe d'auditeurs n'aurait pas fait mieux !

Les instruments sélectionnés

A partir des maîtres-choix déterminés au cours des analyses antérieures, nous avons sélectionné les trois optiques suivantes :

- La lunette apochromatique Astro-Physics de 130 mm f/8 EDT sur une monture équatoriale Losmandy GM-8 (5500 euros)

- Le télescope dobsonien Starmaster de 178 mm f/5.6 Oak Classic (coté 1900 euros sur le marché d'occasion)

- Le télescope Maksutov-Newton Intes MN61 de 150 mm f/6 sur monture équatoriale Losmandy G11 (>1400 euros selon la monture).

Les trois modèles mis à l'épreuve. Document E.Ting

La lunette 130 EDT de 130 mm f/8 d'Astro-Physique fabriquée par Roland Christen est certainement l'une des meilleures optiques du marché mais à $3650 aux Etats-Unis pour le tube optique seul, il s'agit aussi de la lunette la plus chère dans l'absolu, dont le prix équivaut à celui des deux autres optiques combinées ! Vaut-elle son prix exorbitant ?... Difficile de l'évaluer sans la tester mais il s'agit en tous cas de l'instrument le plus petit parmi nos trois candidats. Si sa réputation l'a précédée avec raison on peut s'attendre à ce qu'elle passe tous les tests avec succès. Sur les bancs tests cet instrument ne présente en effet aucune aberration chromatique ni de sphéricité et on peut la pousser à des grossissements inimaginables lorsque les conditions météorologiques sont propices. Toute la question est de savoir combien de points cet instrument va perdre par rapport à ses concurrents et pour quelles raisons. Il est aussi certain que vu la réputation de l'optique un test en aveugle serait préférable pour éviter de biaiser les résultats. Mais il est très difficile de tromper un amateur averti quand il approche des marques aussi renommées. Même si dans la nuit tous les chats sont gris, une Astro-Physics - tout comme une Tele Vue, une Takahahsi ou une Lichtenknecker - se voit de loin et se reconnaît au toucher. Le résultat va certainement tous nous étonner. Je vous invite à consulter le lien suivant pour en savoir plus sur l'histoire des optiques Astro-Physics.

Le télescope dobsonien de 178 mm f/5.6 de Starmaster n'est plus commercialisé aujourd'hui par Rick Singmaster mais ce petit modèle a par contre hérité d'un véritable culte depuis quelques années. Bien qu'il ait été seulement construit à environ 150 exemplaires, les derniers modèles furent équipés d'un miroir taillé par Zambuto à λ/74 (RMS) équivalent à une erreur P-V du front d'onde de λ/29.6 et ils présentaient un rapport de Strehl de 0.993. Autrement dit ils n'étaient pas très loin de la courbure théorique. Si ces chiffres laissent rêveur pour une optique amateur, ce l'est encore plus quand on sait que ce télescope coûtait à l'époque moins de 1000 dollars ! Aujoud'hui il se monnaie déjà à plus de $1400 et près de 2000 euros !

En pratique pour ce test toute la question consiste à déterminer si ce petit télescope bien innocent mais déjà capable de quasiment résoudre la composante B de g Andromède (0.45" !) serait capable de battre un concurrent haut de gamme à 5000 dollars l'unité et de surplus la plus prisée des apo... Un test très intéressant en perspective !

Le télescope Maksutov-Newton Intes MN61 de 150 mm f/6 a déjà une longue histoire et est vendu un peu partout sous le couvert de différentes marques. On le trouve en France chez Optique Unterlinden par exemple sous son nom d'origine, mais pour ne citer que les Etats-Unis il a été rebaptisé là-bas Argonaute chez Orion Telescope Center qui le propose sur une monture équatoriale Vixen GP-DX équipée d'un système Goto pour moins de $2000. Comme tous les Maksutov cette optique bénéficie d'une faible obstruction centrale limitée à 18 % de la surface. Le miroir secondaire incliné à 45° étant solidaire du ménisque, cela évite d'utiliser des bras de support source de réflexions internes, ce qui donne de suite une impression de qualité à cet instrument et son poids accentue ce caractère. Monté sur une monture allemande Losmandy G11 pour les besoins de ce test, ce télescope hybride Maksutov-Newton ne détrompera certainement pas son concepteur.

Toutefois pour les puristes le combat est perdu d'avance et ce M.Maksutov aurait peu de chance de tenir tête à ses compétiteurs que sont MM.Christen et Zambuto. Quoi qu'il en soit le concept en a fait sa renommée et il serait surprenant qu'il ne résiste pas aux critiques.

Les conditions et les sujets d'observations

Les tests ont été effectués durant des nuits froides d'hiver par des températures négatives, au milieu d'un parc à l'écart de toute lumière artificielle, dans des conditions jugées "bonnes", pas exceptionnelles mais suffisantes pour la précision recherchée et obtenir des résultats reproductibles. Les optiques ont au besoin été collimatées et acclimatées afin qu'elles soient en température pour les observations.

Les oculaires furent utilisés sans accessoire ni filtre (ni Chromacor, ni Barlow ou Powermate, réducteur, etc) et choisis dans la gamme de Tele Vue : 6 et 8 mm Radian, 7 mm Nagler, 19 et 27 Panoptics, la moitié d'entre eux étant également des maîtres-choix forts appréciés par les amateurs.

Les sujets ayant fait l'objet des observations furent Jupiter, Saturne et leurs satellites ainsi que les nébuleuses bnillantes mais également les plus pâles comme M1, M42, M46, NGC 2392, les galaxies M74, M81, M82, les amas ouverts M44, M45, M67, NGC 1778 ainsi que le compagnon de Rigel et de nombreux autres objets de comparaison.

Prochain chapitre

Les résultats du test

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