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En quête d'un petit télescope portable et polyvalent

Le doublet ED TS Photoline de 60 mm f/5.5 à porte-oculaire de 50.8 mm (2") dont l'objectif est fabriqué par Ohara. L'OTA est proposé chez Teleskop-Express à partir de 620 €. Un test fut publié dans Astronomy Now en mai 2016.

Les limites des petits instruments de 60 à 90 mm (III)

Hormis la conception optique qui reste évidemment le facteur clé, dans une même gamme d'instruments astronomiques on ne peut pas dire d'emblée qu'un modèle est meilleur qu'un autre car, ainsi que nous l'avons expliqué, tout dépend des instruments de comparaison, de ce que vous observez et à quel grossissement.

Il est évident qu'une lunette achromatique, même utilisant des verres ED ou SD présente toujours quelques aberrations chromatiques résiduelles, surtout visibles lorsqu'on observe des objets très brillants à fort grossissement (étoiles, Vénus, limbe de la Lune, etc.); un télescope catadioptrique présente toujours une obstruction centrale comprise entre 31-55% du diamètre, autant de défauts qui nuisent à la qualité optique et ont tendance à accroître le diamètre du disque d'Airy et donc de réduire la résolution. Si ces optiques ne satisferont pas les purites, entre les mains d'un amateur expérimenté, elles permettent de réaliser des photographies en haute résolution d'excellente qualité, car l'essentiel ici est le savoir-faire de l'amateur, en particulier le contrôle des aberrations au moyen de filtres ou d'accessoires optiques complémentaires et de sa maîtrise des techniques de calibration et de traitement d'image (cf. l'article sur les CCD).

Optiquement parlant, les lunettes achromatiques ou même les doublets ED ont des limites liées à leur conception perfectible. L'aberration chromatique par exemple sera d'autant plus apparente que le rapport d'ouverture sera court, l'objectif et les oculaires de mauvaise qualité. La multiplication de ces trois facteurs explique la médiocre qualité optique des lunettes vendues en grande surface où il est déjà arrivé de trouver des lentilles en plastique (polycarbonate).

Dans une autre gamme de prix légèrement supérieure au modèle ED80 d'Orion, nous avons le doublet TS Photoline de 60 mm f/5.5 ED (620 € sans monture ni accessoires) de Teleskop-Express et le triplet Megrez 80 mm f/7 II ED de William-Optics (890 € sans monture ni accessoires).

Astrographe Borg 89 ED f/4.3 (2900 €).

Ces deux  doublets à verre ED parfois qualifiés d'apochromates soutiennent de forts grossissement ou inversement un réducteur de focal mais en sacrifiant la qualité d'image. En effet, au-delà d'un grossissement de respectivement 1.2x et 1.5x le diamètre exprimé en millimètres (82x pour la TS Photoline avec un oculaire de 4 mm et 125x pour la Megrez avec un oculaire de 4 mm) elles présentent du chromatisme et de la coma en bordure de champ, la Megrez présentant en plus un manque de contraste.

Dans ces conditions, comparées à des optiques encore plus chères (1000-2000 € pour l'OTA), sans correcteur chromatique ni redresseur-correcteur de champ, elles ne peuvent pas rivaliser avec la qualité de l'image d'apochromates comme les Borg 60 ED (Mini Borg 60 mm ED f/5.8) et la série Borg 80 (71 FL f/5.6, 77 ED II f/4.3, 89 ED f/4.3, 89 ED f/6.7), les doublets Tele Vue 76 (76 mm f/6.3) ou Tele Vue 85 (85 mm f/7) et autre Takahashi. Toutefois, certains amateurs avertis utilisent malgré tout un correcteur de champ avec ces modèles, preuve que les corrections ne sont jamais parfaites sur aucun modèle.

Connaissant les limites de ces petits instruments, en particulier les aberrations résiduelles en bordure de champ (coma), leur aberration de sphéricité, leur chromatisme, etc., si vous ne les poussez pas au maximum ou dans des conditions de "stress" (fort contrastes de lumière par exemple entre deux étoiles en bordure de champ ou lors d'une occultation par la Lune observée à fort grossissement) il est même possible que vous n'aperceviez pas ces défauts. Si vous n'utilisez que des oculaires de faible à moyenne puissance (grossissements de 40 à 100x), les aberrations seront presque invisibles. Avec une bonne monture équatoriale et de bons oculaires elles seront même indiscernables sur les photographies de vastes champs stellaires s'étendant sur plusieurs degrés comme en témoignent les photographies présentées ci-dessous.

Si vous voulez malgré tout les pousser au maximum de leurs capacités, vous serez déçus de ne pas disposer d'une meilleure optique. Mais il existe des parades, bien qu'elles soient toutes onéreuses. Mentionnons (pour mémoire) le renvoi à 90° revêtu d'une protection dorée tel le Brandon de 50 mm (Vernonscope, 385$) qui permet de réduire les reflets bleus-violets; le Chromacor (Aries Instruments, 960 €) que nous verrons un peu plus loin permettant de réduire l'aberration chromatique dans des lunettes offrant un rapport focal voisin de f/8; le SAFIX (Aries Instruments, 500$) permettant de corriger l'aberration de sphéricité; enfin le redresseur-correcteur de champ TRF-2008 de Tele Vue (310 €) fait également des miracles en corrigeant la coma sur les petites lunettes ST-80.

Parmi les solutions plus économiques, nous verrons à propos des accessoires utiles que plusieurs filtres oculaires permettant de réduire l'aberration chromatique : le filtre Skyglow (35 € au diamètre de 31.75 mm), le filtre de contraste Baader (49 €) et surtout le "Fringe Killer" de Baader (65 €) qui ne transmet que la lumière entre 480-680 nm , rendant l'image plus nette.

A gauche et au centre, deux photographies RGB de la région de M42 et M20 réalisées avec une lunette achromatique William Optics Megrez de 80 mm f/5 SD équipée d'un boîtier réflex. Ce modèle qui n'est plus fabriqué depuis 2004 au profit de la Megrez 80 II ED présente, comme tous les achromates, une aberration chromatique, une coma et quelques réflexions internes. Documents Telescope SA. A droite, la galaxie M104 photographiée par Bob Runyan avec une lunette ST-80 ED f/6.25 équipée d'une caméra CCD. Empilement RGB et temps d'intégration total de 3x 40 minutes. Malgré les défauts de ces petites lunettes, mises entre les mains d'amateurs expérimentés, elles donnent d'excellents résultats à condition de connaîtres leurs limites.

Le prix de la qualité

Vous ne pouvez pas transformer à n'importe quel prix une lunette achromatique en apochromatique moyennant quelques accessoires optiques. Certains amateurs ont envisagé d'acheter une bonne lunette achromatique en verre ED ou SD ouverte à f/8 et de lui ajouter par exemple un Chromacor. Mais pour le prix de votre achromate et du Chromacor, soit environ 1850 €, vous pouvez acheter l'apochromate de 80 mm f/6 de Megrez (1500 € pour le tube optique) pratiquement installée sur une monture équatoriale légère Sky-Watcher EQ5 par exemple (420 € chez Vixen, 650 € en version motorisée). Ceci dit une bonne monture équatoriale en aluminium capable de supporter une lunette pesant plusieurs kilos et ses accessoires coûte au minimum 400 € pour un modèle manuel comme la Vixen GP et environ 1000 € pour un modèle GoTo comme la Celestron AVX GoTo, et c'est un minimum.

Cela dit en raison des aberrations résiduelles que présentent les achromates, fatigués d'avoir des photographies dont les sujets sont flous et polychromes plutôt que nets et sans aberration (en exagérant), certains amateurs n'hésitent pas à acquérir une lunette apochromatique, les doublets proposés par Synta, Orion ou Megrez (env. 890 € complète) étant des modèles d'entrée de gamme. Ici vous entrez dans un budget d'au moins 1500 € pour l'optique, 1200 € pour la monture et quelques centaines d'euros encore pour les oculaires et les accessoires, soit un budget global de 3000 € minimum, sans compter l'APN ou la caméra CCD et l'ordinateur portable.

Voici la qualité des images que fournissent deux lunettes apochromatiques, à gauche un doublet Borg de 100 mm f/4 ED (3000 €), à droite une Astro-Physics de 155 mm f/7 Starfire EDF à 5 lentilles (8800$), toutes deux équipées d'un aplanisseur de champ (renforcé par les deux lentilles arrières dans le cas de l'AP de 155 mm). Dans les deux cas il s'agit d'une pose de 20 minutes de l'étoile Véga au moyen d'un boîtier Pentax 6x7 équipé d'un film Kodak 200. Documents réalisés par David Kodama en mai et février 2000.

Si vous envisagez un investissement à long terme, sachez que la plupart des amateurs avertis ayant acheté une achromate de 60 ou 80 mm, l'ont revendue quelque temps plus tard au profit d'une lunette de plus grand diamètre souvent apochromatique ou du moins équipée de lentilles ED ou en fluorite. Dans ce cadre les deux images de Véga présentées ci-dessus sont assez révélatrices des performances d'une apochromate Borg de 100 mm f/4 ED comparées à celles d'une Astro-Physics de 155 mm f/7 EDF (dont l'objectif comprend 5 lentilles en deux groupes (3+2), dont un triplet apochromatique constitué d'un élément en verre ED et de deux Crown). Le but n'est pas de les comparer, car elles sont incomparables, et c'est justement cela qui fait tout l'intérêt des grands diamètres.

En voyant le piqué de l'image prise avec l'AP de 155 mm, on comprend la raison pour laquelle certains amateurs passent au  diamètre supérieur ! Mais cette fois on ne joue plus dans la même cour... Pour y rester, sachez qu'Orion a commercialisé une 120 mm ED. Aujourd'hui la Tele Vue 102 doit bien se tenir ! On reviendra plus loin sur les modèles de 100 à 130 mm de diamètre.

Les limites d'une lunette Orion ED80 (80 mm f/7.5)

Sujet

Observation

Aberrations et réflexions internes (chromatisme, contraste, disque d'Airy, etc), comparées à une Tele Vue apochromatique TV-102 masquée à 80 mm d'ouverture

En faisant attention on note de légers reflets jaunes sur le bord de la pleine Lune à 100x comparé à une TV-102 (80) à 98x. Sinon pratiquement la même image, et même contraste. Aucun reflet pourpre ni bleu ni rouge.

Aucune aberration et même image que la TV-102 (80) sur Mars (14 août 2003, dia.24.4")

Même figure de diffraction que la TV-102 (80) sur Epsilon Lyrae ou Véga.

Transit des satellites galiléens devant Jupiter

Visibles à 120-150x lorsqu'ils sont près du limbe

Quelques détails dans les bandes sombres et visibilité de la Grande tache rouge

Discernables à 120-150x. Perte de détails (contraste) à 200x

Division de Cassini sur Saturne

Discernable à 54.5x et bien visible à 200x

Anneau C intérieur de l'anneau de Saturne

Discernable à 200x dans de bonnes conditions

Satellites de Saturne

Titan (8.4), Rhéa (9.7), Dioné (10.4), Téthys (10.2) et Japet (10.3) sont visibles dans de bonnes conditions (turbulence et clarté du ciel au moins 6/10) en zone suburbaine

Etoiles doubles

Mizard-Alcor est facile à résoudre; Delta Cygni (2.5", Mv. 2.9/6.3) se résout dans de bonnes conditions à 54.5 ou 100x; La double-double d'Epsilon de la Lyre est déjà visible à 54.5x sans ambiguïté, Lyrae 2 (Sép.2.3", Mv. 5.2/5.5) se résout facilement à 100x

Amas ouverts et globulaires

M13 est diffus mais certaines étoiles en périphérie sont résolues; M22 est résolu à 80x; M44 est éblouissant à 15x. A ce grossissement M45 tient dans le champ de l'oculaire Panoptic de 41 mm (4°38')

Nébuleuses et galaxies brillantes

M27, M31, M42, M51, M65, M81... sont visibles en toute clarté à 25, 30 ou 54.5x; M4 est plus difficile.

Sur M42, distinction d'une 5eme étoile dans le Trapèze d'Orion et apparition des premières couleurs bleues-grises à 30x

Les galaxies M32 et M110, satellites de M31, sont visibles à 30x.

Grossissement maximum théorique et pratique

Orion suggère 165x. Avec de bons oculaires un grossissement de 200x est une limite au-delà de laquelle l'image se dégrade. Certains débutants vont jusqu'à 250x sans constater de dégradation.

300x (6 mm + Barlow 2x) est le grossissement maximum tolérable dans de très bonnes conditions d'observation (pollution lumineuse suburbaine).

Manquements techniques et conseils

Pas de vis de collimation de l'objectif

Acheter uniquement des oculaires grand champ (champ apparent de 65° et supérieur), éventuellement un renvoi à 90° de 50 mm de très bonne qualité et une Powermate 2x ou 2.5x de Tele Vue.

Acheter un viseur Red Dot ou autre Telrad plutôt qu'un viseur traditionnel.

Acheter une monture de qualité et robuste soit azimutale ou un trépied photographique (par ex. Induro) équipé d'une rotule soit une monture équatoriale genre Vixen GP, GP-D, Sky-Watcher ou encore Orion SkyView Pro.

Modèles concurrents

Borg 76 ED, Brandon 80 f/5.6, Pentax 75 EDHF, Sky-Watcher 80ED, Takahashi FS 78 mm f/5-f/8, Tele Vue 76 et 85, TMB 80 mm f/7.5, TS-Optics 80 mm f/7 ED, Vixen ED80sf f/7.5, William Optics Megrez II 80 mm f/6...

Oculaires utilisés : Tele Vue 41 mm Panoptic (14.6x), 24 mm Panoptic (25x), 11 mm Nagler (54.5x), 7 mm Nagler (85.7x), zoom 8-24 mm (25-75x), zoom 3-6 mm (100-200x), Barlow 2x, Powermate 1.8x, 2x et 2.5x. Différents oculaires Plössl, Radian, Takahashi LE (40, 30, 7.5, 6 mm...).

D'autres facteurs peuvent toutefois vous incliner à choisir une lunette ED80 plutôt qu'une optique de plus grand diamètre. Parmi ceux-ci le rapport focal est certainement l'un des principaux.

Prochain chapitre

Les spécifications optiques des instruments de 60 à 90 mm

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