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En quête d'un petit télescope portable et polyvalent

Objectif à 4 lentilles dont deux FPL-53 ED de la lunette apochromatique Williams Optics de 71 mm f/4.9 (958$).

Les spécifications optiques des instruments de 60 à 90 mm (IV)

1. Le rapport focal

A l'époque où la lunette fut inventée, les astronomes observaient les astres au moyen de lunettes astronomiques équipées d'un tout petit objectif mais de longueur focale gigantesque. Vers 1665 par exemple, Christian Huygens qui découvrit la véritable structure des anneaux de Saturne utilisait une lunette dont l'objectif était constitué d'une seule lentille plan-convexe mesurant seulement 57 mm de diamètre mais de 3.36 m de focale soit un rapport focal de f/59. Par la suite, Huygens fabriqua une dizaine de lunettes qu'on appelait alors des "télescopes képlériens" dont la plus grande mesurait 230 mm de diamètre pour 65 m de focale, offrant un rapport focal de f/283 ! Johannes Hévelius fabriqua même un modèle d'environ 110 mm de diamètre et de 46 m de longueur (cf. cette illustration) dont le rapport focal dépassait f/410 ! De telles configurations offraient un champ excessivement étroit et des images très sombres.

C'est en effet uniquement le rapport focal qui détermine la luminosité de l'image qui ne dépend donc pas du diamètre de l'objectif, celui-ci n'affectant que la résolution (cf. ce formulaire) et donc la finesse des détails. C'est un facteur essentiel qu'il faut vérifier quand on achète une optique astronomique ou même un objectif photographique.

Nous avons vu que si un petit rapport focal offre un grand champ et procure une plus grande pupille de sortie oculaire, c'est au détriment du grossissement et des performances des petites lunettes à faire de la haute résolution. Aussi, tous les amateurs qui ont choisi d'acheter une ST-80 ou un quadruplet ED comme la Williams Optics de 71 mm f/4.9 présentée ci-dessus ne l'ont certainement pas fait dans le but d'observer Saturne en haute résolution mais plutôt les grandes nébuleuses brillantes perdues dans la Voie Lactée ou pour suivre l'évolution des taches solaires, du croissant de la Lune, des comètes et éventuellement le ballet des satellites de Jupiter, c'est-à-dire pour englober de grands champs. Car quand on porte son dévolu sur ce genre de lunette, c'est bien avant tout pour sa portabilité et ses images "panoramiques", surtout si vous pouvez vous offrir des oculaires offrant un grand champ (au moins 68°) avec lesquels le spectacle est digne d'une projection IMAX (mais attention tout de même aux aberrations en bordure de champ sur les optiques les plus rapides) !

Une optique présentant un grand rapport focal offre plusieurs avantages. Plus le rapport focal augmente, plus l'aberration chromatique est faible. Les maîtres-opticiens ont donc moins de contraintes pour la corriger et peuvent tailler le verre plus facilement. Le spectre secondaire résiduel sera donc moins apparent dans une lunette ouverte à f/8 que dans un modèle ouvert à f/5, raison pour laquelle il existe un marché pour les grandes lunettes achromatiques de 120 et 150 mm d'ouverture offrant un rapport focal de f/8 à f/12. Une lentille de longue focale se décentre également moins facilement qu'une lentille offrant un rayon de courbure très prononcé. Ainsi vous avez plus de risque de décentrer un objectif ouvert à f/5 qu'une objectif ouvert à f/8. C'est pourquoi la lentille en fluorite est souvent placée à l'arrière où elle est moins sensible au désalignement.

Quel rapport focal ? Telle est la question que plus d'un client s'est sans doute posée en achetant un télescope. De manière générale en astronomie l'avantage revient aux optiques offrant un petit rapport focal. Pour un prix équivalent vous pouvez par exemple choisir entre d'une part un Meade ETX de 90 mm f/13.9 (à gauche, 700 €) ou une lunette achromatique Celestron NexStar de 80 mm f/5 GT (à droite, 900 €), tous deux équipés d'un système de guidage GoTo. Les deux instruments n'offrent toutefois pas les mêmes performances. Une longue focale est intéressante pour observer les planètes, le Soleil ou la Lune. Mais ce type d'instrument est inadapté pour observer de vastes champs stellaires ou des galaxies pâles alors qu'il est facile de placer une lentille de Barlow pour doubler la longueur focale d'une lunette dite "rapide". Du reste les optiques catadioptriques en version non GoTo sont proposées à un prix très attractif qui en fait leur succès. Cela dit, les Maksutov de Synta et autre Orion semblent présenter une qualité optique plus variable que les modèles vendus par Meade ou Lomo.

Toutefois, si une longue focale peut être intéressante pour observer les objets brillants (Lune, planètes, étoiles doubles, etc) une lunette ayant un rapport focal élevé, f/12 par exemple, devient un objet très encombrant qui peut dépasser 1 m de longueur. C'est un critère très important à considérer quand l'instrument n'est pas fixé à demeure et qu'il faut chaque fois le prendre avec soi vers le lieu d'observation.

Les longues focales de faible diamètre ont également comme désavantage d'avoir une image très sombre à forts grossissements, là ou une optique rapide conserve sa luminosité.

Enfin, si on parle de qualité d'image, des instruments de longue focale comme les longues lunettes-guides, le petit Maksutov ETX 90 de Meade présenté ci-dessus (90 mm f/13.9) et sur lequel nous reviendrons ou le petit Lomo Astele de 70 mm f/12.7 sont littéralement soufflés par les optiques à tube court en raison de leur grande ouverture.

C'est pourquoi considérant les avantages et les désavantages des différents rapports focaux, la majorité des utilisateurs recommandent d'utiliser une lunette ayant un rapport focal voisin de f/7 à f/8 qui les met également à l'abri d'une aberration chromatique trop prononcée sur les achromates très courts (f/5). Les modèles de bonnes factures supportent également les trains optiques assez conséquents. Ils conviennent très bien à l'astrophotographie, s'accomodant autant d'un réducteur focal que d'une lentille de Barlow ou d'une Powermate 2x ou plus puissante voire d'un tube d'extension en plus de la caméra CCD ou de l'APN (mais la question du train optique et la possibilité de faire la mise au point dans toutes les configurations possibles est un sujet qu'il convient tout de même d'aborder et de tester avant achat avec le vendeur).

2. Le grossissement

A grossissement équivalent les images d'un ETX 90 et d'une lunette ED80 f/5 sont presque identiques bien que toujours en faveur de la petite lunette car elle ne présente pas d'obstruction centrale. Pour atteindre un grossissement de 120x par exemple, l'ETX doit utiliser un oculaire de 9.7 mm alors que la ED80 doit utiliser une Barlow et un oculaire de 6 mm. Cela porte son rapport focal à f/10, proche des f/13.8 ou f/13.9 du Maksutov. A ce grossissement le champ couvert par l'ETX 90 et la lunette ED80 est pratiquement identique, 25' contre 27', mais le diamètre de la pupille oculaire est déjà sensiblement différent, 0.76 contre 0.60 mm.

La doublet achromatique Megrez II 80 mm f/6.25 ED est une amélioration sensible du modèle 80 SD commercialisé jusqu'en 2004. Mais elle se place encore loin derrière l'Orion ST-80 ED, la Williams Optics de 71 mm f/4.9 ou la TeleVue Pronto ED de 70 mm.

A rapport focal presque identique, la luminosité du champ oculaire de l'un et de l'autre est donc presque équivalente mais le piqué est inférieur dans le Maksutov en raison de ses 40% d'obstruction du diamètre. Et n'ayez pas la mauvaise idée d'adjoindre un doubleur de focal à l'ETX pour des observations visuelles, car à 240x l'image deviendra si sombre qu'il sera inutilisable et gâchera tout le plaisir de faire de l'astronomie. Cette solution sera uniquement envisageable pour l'astrophotographie à longues poses complétée par un important travail de traitement d'image.

Les plus petits Maksutov (70 à 90 mm) vendus sur trépied avec un redresseur sont plus adaptés à l'observation terrestre et peuvent occasionnellement servir de téléobjectif catadioptrique, bien qu'ils soient assez sombres et jamais couplés électriquement aux boîtiers réflex. Pour un photographe, ils ne remplaceront jamais un véritable télé "cata" conçu dans ce but et ils offriront un usage limité au naturaliste qui a également besoin d'une optique lumineuse (genre "spotting scope"), et au besoin à vision nocturne (photoamplificateur ou infrarouge).

C'est ici que la lunette ED80 générique trouve à nouveau tout son intérêt. En utilisant un oculaire Erfle de 25 mm par exemple (champ apparent de 65° grossissant 16x, pupille de sortie de 5 mm, elle affiche un champ de 4° qui est tout à fait adapté pour observer certains types d'objets comme les comètes ou les amas ouverts de la Voie Lactée à basse résolution. Pour l'observateur débutant le grand champ de cette lunette lui permettra de trouver plus facilement les objets célestes et d'encadrer sans difficulté les objets étendus.

Avec un oculaire Erfle de 16 mm (champ apparent de 65° grossissant 25x, pupille de sortie de 3.2 mm) cette lunette offre un champ de 2° et fait briller des objets qui sont ternes dans de plus grands télescopes : le double amas de Persée, les Pléiades, la région du Sagittaire vous éblouissent à 25x et perdent de leur éclat à 40x. Les objets du ciel profond (nébuleuses et galaxies) sont tout petits mais ils demeurent visibles en raison du court rapport focal de cette lunette. M27, la nébuleuse Dumbbell, est brillante et présente déjà quelques détails. Même des couples de galaxies comme M81 et M82, M65 et M66 ou la galaxie naine du Sculpteur peuvent être observés dans des régions relativement envahies par la pollution lumineuse (30-60%) ce qui devient très difficile avec un petit Maksutov.

Deux versions de la lunette achromatique Bresser de 80 mm f/5. Dans la catégorie des petits instruments, présentée ici en version astronomique avec un oculaire de focale fixe et dans sa version longue-vue terrestre avec un zoom 20-60x, c'est l'un des produits offrant le meilleur rapport qualité/prix. Son prix oscille entre 350-400 €.

A de plus forts grossissements, des télescopes de longues focales comme les petits Maksutov de Celestron, meade ou Synta deviennent intéressants si vous désirez observer les objets brillants en haute résolution : la Lune, Jupiter ou Saturne. Mais les détails que vous verrez à leur surface seront limités en raison de l'ouverture réduite de ce type de télescope.

Ici aussi, avec son pouvoir séparateur théorique de 1.5", une lunette de 80 mm d'ouverture équipée ou non d'un doubleur de focale vous permettra de rivaliser avec un Maksutov de diamètre équivalent et de résoudre des étoiles doubles difficiles comme epsilon de la Lyre (écart de 2.6" et 2.3" en 2001) ou delta Cygni.

L'avantage d'une lunette ED80 sur un Maksutov de 90 mm par exemple réside aussi dans sa réaction au changement de température. La lunette utilisant des optiques moins épaisses et plus petites, sa mise en température est plus rapide. Si vous observez après minuit, vous aurez même la chance d'éviter toute la turbulence engendrée par la chaleur des bâtiments et celle dégagée par le sol et présente dans les basses couches de l'atmosphère.

Enfin, comme nous l'avons dit, un autre avantage de ce type de lunette à tube court est sa versatilité : posée sur un trépied elle devient une longue-vue terrestre très appréciée pour sa luminosité et ses grossissements variables.

Pour des grossissements usuels de 13 à 40x en vision terrestre, la ED80 générique se place en tête d'une gamme que ne peuvent atteindre les petits télescopes catadioptriques. En effet, si à 40x la pupille de sortie de l'oculaire d'un ETX 90 présente un diamètre raisonnable de 2.3 mm, à 90x elle devient si étroite (1 mm) qu'il doit virtuellement laisser la place à des télescopes plus rapides. Et là où c'est surprenant, à 90x même si l'image que donne la petite lunette de 80 mm est plus pâle, elle reste étonnamment exploitable. Même sans filtre coloré, elle permet de distinguer la Grande tache rouge de Jupiter et le transit des quatre satellites galiléens.

3. Doublets ED et triplets apochromatiques

Avant d'acheter une lunette astronomique et tout instrument d'optique de manière générale, lisez d'abord les caractéristiques techniques de l'instrument (spécifications) et le relevé des aberrations optiques secondaires résiduelles avant de lire les arguments marketing et la qualité du commerçant. Des lentilles qui ne sont pas traitées multicouches ou une lunette qui est qualifiée de "semi-apochromatique" est déjà suspecte.

Ainsi que nous le verrons à propos de la dispersion, pour un maître-opticien un objectif présente ou non des aberrations chromatiques (parmi d'autres); il s'agit d'un achromate ou d'un apochromate mais il n'y a pas de troisième choix ou cela cache en réalité un problème optique résiduel qu'il n'a pas été capable de corriger pour le prix proposé.

Sachant cela, si vous voulez acquérir une lunette ED80 il existe deux cas de figure. Si vous observez peu le ciel et que vous achetez un modèle achromatique, il est probable que vous ne la revendrez jamais. En revanche, si vous observez régulièrement le ciel et faites éventuellement de l'astrophotographie, il est fort probable que le modèle achromatique de 80 mm ne vous satisfera plus d'ici quelques années en raison de ses aberrations résiduelles et de son faible diamètre et vous ferez peut-être l'acquisition d'un modèle apochromatique de plus grand diamètre dont l'objectif est constitué d'un triplet de lentilles ou d'une combinaison plus complexe. L'alternative est le télescope.

Revues des lunettes astronomiques

60 à 78 mm - 80 à 90 mm - 100 à 110 mm - 120 à 130 mm - 140 mm et sup.

(Cloudy Nights Telescope Reviews)

A gauche, la lunette achromatique Altair Starwave de 70 mm f/6 ED (doublet) équipée d'un porte-oculaire Crayford de 50.8/31.75 mm, d'un renvoi à 90° diélectrique de 31.75 mm et d'un viseur "high tech" RDF à réticule "Point rouge" multiple et luminosité variable. Mesurant 30 cm et pesant 2 kg, cette lunette est proposée sans monture au prix de 524 € (ou 399£ plus taxe d'importation) avec un oculaire de 17 mm. Elle existe également en 80 et 110 mm de diamètre. A droite, la correction du chromatisme sur les lunettes Megrez achromatiques (doublets) et apochromatiques (triplets).

Selon différents tests effectués en observant les mêmes objets et en consignant l'avis de plusieurs amateurs expérimentés, les meilleurs doublets sont l'Orion ED80, la Tele Vue 85 et la TMB 80 mm f/6. Toutes trois sont souvent considérées comme des lunettes apochromatiques. Toutefois, comme nous l'avons montré précédemment, si nous comparons leurs images à celles obtenues par des apochromatiques renommées mais également beaucoup plus chers, comme on dit "y a pas photo". Mais nous verrons page suivante qu'une variation de qualité similaire se manifeste aussi entre les lunettes apochromatiques.

4. Maksutov contre lunette achromatique

Il est toujours délicat de comparer une lunette avec un télescope tant les deux optiques sont différentes. Mais à diamètre égal, on peut malgré tout établir certains comparaisons très instructives. Nous allons prendre comme exemple les deux modèles de Maksutov les plus connus, le Celestron C90 et le Meade ETX 90 PE et la petite lunette Tele Vue Pronto de 70 mm f/6.9 ED. Notons que nous aurions pu prendre comme exemple le Questar de 3.5" (90 mm) commercialisé en 1954 mais il n'est plus en production et son prix était de toute façon très élevé, de l'ordre de 5000$ neuf et 1800$ d'occasion (à toute fin utile voici la revue du Questar 3.5" en anglais).

A. Le Celestron C90

Le premier modèle de télescope Maksutov plébiscité par le public est le fameux Celestron C90 de 90 mm f/13.9 dont le premier modèle présentant une carrosserie orange fut commercialisé en 1979. Il était proposé avec un monobras et une base altazimutale et une table équatoriale (wedge). Le nouveau modèle, le C90 MAK est devenu noir en 2009 et a été décliné en différentes versions : avec une queue d'aronde, avec ou sans redresseur terrestre et sous forme de "spotting scope" muni ou non d'une carrosserie antichoc et équipé d'un miroir basculant (flip mirror). Hors tout, le tube optique mesure 40.6 cm de longueur pour une largeur maximale de 25.4 cm. En raison de son ménisque frontal relativement épais, il est assez massif, l'OTA affichant un poids de 2.3 kg.

En Europe comme ailleurs dans le monde, le C90 MAK est livré sans monture ni trépied ce qui peut chagriner certains clients qui doivent encore faire la démarche de lui trouver un support. On y reviendra dans un instant. Le tube optique est proposé dans une sacoche de transport avec un excellent oculaire Plössl de 32 mm à 4 lentilles (lumineux) offrant un champ apparent de 52° et un grossissement de 38x, un renvoi coudé et redresseur à 45° (et non à 90°) et un chercheur de 8x21 mm pour un prix d'environ 280 € ttc (2017).

Avant de pouvoir observer quoi que ce soit, le C90 doit donc être équipé en complément d'un trépied ou d'une monture. Le choix est vaste et donc complexe pour un débutant. Voici donc quelques exemples de configurations.

D'abord, il faut tenir compte du poids éventuel d'un APN réflex (~700 g sans son objectif s'il est placé au foyer ou muni de son objectif qui peut atteindre 1.4 kg pour un Nikon de 300 mm f/4 s'il est placé en parallèle sur le tube), de la caméra CCD ou de la webcam, de l'oculaire et des accessoires (des éléments pesant individuellement généralement entre 100-500 g), ce qui peut représenter au total 1 à 2 kg supplémentaires. Il doit donc être supporté par un trépied ou une monture supportant au moins 5 kg en s'accordant une marge de sécurité pour plus de stabilité.

Complété par un trépied robuste (100 €), le C90 revient au total à moins de 400 € ttc. Pour l'astronomie, complété par exemple par une petite monture équatoriale allemande manuelle Sky-Watcher EQ-2 de 1.5 kg (159 €) ou M42 Optic EQ4 v2 de 3 kg (215 €) supportant une charge de 6 kg, l'ensemble revient entre 439-495 € ttc, soit la moitié du prix du C90 de 1979, la qualité en plus. En revanche, une petite monture équatoriale GoTo avec son encombrant trépied et son contre-poids revient à environ 600 € (Sky-Watcher NEQ-3 Pro GoTo de 5.6 kg ou iOptron SmartEQ Pro GoTo de 5.4 kg), portant le prix du C90 équatorial GoTo à environ 900 € ttc, soit 23% plus cher que l'ETX 90 PE pour un encombrement et un poids similaires.

Comme l'ETX de 90 mm, le C90 remplit parfaitement son rôle tout en présentant autant les avantages que les inconvénients de la conception Maksutov-Cassegrain.

En quelques mots, parmi ses atouts, c'est une optique offrant de belles images nettes, claires et lumineuses tant qu'on se limite à de faibles grossissements (par exemple 30 à 60x). Car dès qu'on utilise des oculaires de moyennes et courtes focales, même la surface de la Lune réputée pour sa brillance devient rapidement sombre et l'observation perd tout son charme du fait de la petite ouverture de ce télescope (il en est de même sur tous les télescopes de cette conception offrant le même rapport focal). Toutefois la résolution progresse correctement jusqu'à atteindre un pouvoir séparateur d'environ 1.33" et les images sont exemptes d'aberration chromatique à l'exception parfois de celle introduite par une mauvaise lentille de Barlow ou un oculaire mal corrigé.

Avec l'oculaire Plössl de 32 mm, le champ réel est de 1.4° soit pratiquement 3 fois le diamètre de la Lune ou du Soleil. En photographie au foyer, le capteur d'un Canon EOS 7D par exemple englobe la totalité de la Lune ce qui procure de belles images, y compris pendant les éclipses de Lune ou les conjonctions.

Le C90 donne également de belles images stellaires, en particulier à faibles et moyens grossissements (30-100x) sur les amas d'étoiles comme M45 ou les Nuages de Magellan qui remplissent totalement le champ oculaire. Les nébuleuses brillantes comme M42 et M78 et les grandes galaxies comme M31, M51 et M81 s'accomodent également très bien des faibles grossissements surtout avec des oculaires grands champs qui révèlent toute leur étendue avec beaucoup de clarté. Par ciel très limpide et noir on peut même parfois discerner les bandes de matière obscure, notamment dans la galaxie irrégulière M82 et dans certaines nébuleuses brillantes dans l'hémipshère sud.

En revanche, comparé au champ d'une lunette astronomique de même diamètre, celui du C90 est plus étroit et en raison du grand rapport focal, le fond du ciel est également plus sombre et donc moins contrasté avec des étoiles plus larges que dans une lunette astronomique dont le rapport focal est au moins deux fois plus court (f/5 à f/8). En fait, en raison de son champ apparent plus étendu, on éprouve plus de plaisir à observer le ciel avec une lunette astronomique de même diamètre, ce qui explique le succès des petites lunettes de 60 à 130 mm d'ouverture tant pour l'observation visuelle qu'en astrophotographie.

Enfin, dernier atout et non des moindres, son faible poids et sa compacité en font un excellent petit télescope portatif qui n'a pas grand chose à envier au C5 de 127 mm (voir plus loin).

Parmi ses défauts, l'obstruction centrale du C90 atteint 40% du diamètre et affecte la qualité de l'image car 16% de la lumière tombant théoriquement dans le disque d'Airy est perdue au profit des anneaux de diffraction secondaires. Dans ces conditions il n'arrive pas à la netteté ni au contraste de l'image d'une lunette astronomique de même diamètre mais plutôt d'une lunette de 60 à 65 mm de diamètre tout en ayant le pouvoir séparateur d'une 90 mm. Toutefois, on peut améliorer sensiblement son contraste en démontant le télescope et en noircissant toutes les surfaces intérieures claires dont le côté du miroir primaire et certaines parties des baffles situés sur la plaque collimatrice qui soutient le miroir et en procédant ensuite à une collimation (cf. ce message posté sur le forum de Cloudy Nights en 2013).

Le revêtement antireflet est un simple couche (fully coated) qui ne corrige donc pas les réflexions secondaires parasites aussi bien qu'un revêtement multicouche. Notons également que lors de l'observation d'un sujet très contrasté en dehors de l'axe optique, on peut observer des reflets en bordure de champ.

Contrairement à ce qu'on lit parfois, la mise en équilibre thermique du C90 n'est pas plus lente qu'un autre télescope de même diamètre (mais il est vrai que le ménisque s'équilibre plus lentement sur un plus grand télescope Maksutov-Cassegrain). Toutefois, comme la plupart des lames de fermeture, vu sa surface relative grande, le ménisque peut se couvrir de buée voire de givre après une longue exposition sous un ciel humide. Dans ces conditions, une résistance chauffante est la bienvenue.

Comme dans les Schmidt-Cassegrain, la mise au point à l'aide d'un bouton moleté situé à l'arrière du barillet de l'objectif est toujours délicate et il n'existe pas de modèle électrique.

Enfin, le C90 est avant tout une optique astronomique et non une longue-vue destinée à l'observation terrestre quoiqu'en disent les publicités. Nous verrons plus bas que son usage est en effet limité sur le terrain des naturalistes et plus encore en photographie terrestre où il ne remplacera jamais un supertéléobjectif traditionnel. Voici néamoins quelques-unes des plus belles vidéos réalisées avec le C90.

A voir : Le ciel à travers un C90 - La Lune - Jupiter

Martin-pêcheur au C90

Un dernier conseil : si vous le prenez souvent avec vous, comme Celestron le proposait en 1979, achetez une valise en aluminium et placez le dans des gabarits en mousse pour le stocker et le déplacer dans de bonnes conditions. Complétez ses accessoires par un vrai renvoi à 90° de qualité, deux ou trois oculaires grand champ (68° et supérieur) et offrant un relief oculaire confortable de 10 à 20 mm (par exemple des oculaires de 32, 20 et 8 mm de focale voire 7 mm si le site d'observation bénéficie de très bonnes conditions météos et permet d'atteindre un grossissement de 171x), un filtre solaire objectif, éventuellement une résistance chauffante (et la batterie qui l'accompagne) et si vous l'installez sur une monture robuste, ne vous privez pas de l'équiper pour l'astrophotographie (APN ou CCD, bague T2, lentille de Barlow 2x ou Powermate de Tele Vue, etc.).

En résumé, bien que perfectible et affichant clairement ses limites, par ses dimensions ultra compactes, sa robustesse et ses performances en observation planétaire alliées à un prix compétitif, le C90 est séduisant et les amateurs auraient tord de se priver du plaisir d'utiliser ce petit télescope, ne fut-ce que pour des observations occasionnelles ou pendant les vacances sous des cieux étoilés.

B. Le Meade ETX 90 PE

Le second petit modèle de télescope Maksutov est le Meade ETX 90 PE dont le modèle original fut commercialisé en 1996 (700 € ttc en 2017). Egalement très compact, il offre une excellente qualité optique pour son prix et grâce à la console Autostar et une base de données de 30223 objets célestes, il dispose de toutes les fonctions GoTo de recherche et de suivi des objets célestes auxquelles aspire un amateur, ce qui explique son prix plus élevé que le C90.

A l'inverse du C90, comme on le voit à droite l'ETX 90 PE f/13.8 est livré complet, avec sa monture azimutale à fourche (en plastique ABS) et sa base équatoriale, un trépied en acier, le système Autostar, un oculaire Plössl SP de 26 mm de la série Meade 4000 et un viseur à point rouge. L'ensemble pèse 8.5 kg.

Ses performances en astronomie sont boostées par l'Autostar et sont raisonnables en astrophotographie étant donné sa conception. Comme le C90, il est plus performant dans l'observation planétaire que du ciel profond où il est également pénalisé par son rapport focal bien trop grand.

Parmi ses défauts, l'ETX 90 PE est d'une qualité cosmétique et mécanique inférieure au C90. Il présente un rapport focal de f/13.8 qui assombrit sensiblement les images à moyens et forts grossissements et son obstruction centrale est de 41%. Comme le C90, la combinaison de ces deux facteurs n'est vraiment pas idéale pour observer les objets à faible contraste et étendus (comètes, nébuleuses, grandes galaxies, Voie Lactée) où nous avons au contraire besoin d'un rapport focal assez court pour recueillir un maximum de lumière pour observer ces objets très pâles ainsi qu'en astrophotographie afin d'éviter des temps d'expositions excessivements longs. En revanche, il convient bien à la photographie planétaire bien que sa monture ne soit pas très robuste ni très stable mais les astres du système solaire s'accomodent très bien de prises de vues instantanées.

En fait l'ETX 90 PE (comme l'ETX 105 PE) est plus adapté à l'observation des astres brillants : des planètes, des étoiles multiples et des amas globulaires bien que la quantité de détails observables soit limitée. Si vous désirez l'acheter, n'hésitez pas à investir quelques euros de plus dans un revêtement UHTC antireflet, cela permettra d'améliorer le contraste de quelque 10% (en principe appliqué d'usine depuis quelques années, mais à confirmer).

Enfin, précisons également que pour le prix de l'ETX 90 PE, on peut acheter un télescope dobsonien de 200 mm de diamètre, ce qui peut faire réfléchir les plus passionnés. Ceci dit, voici quelques très belles vidéos prises avec un ETX 90.

A voir : La Lune à travers un ETX 90 - Jupiter - Saturne

Ce que dit et ne dit pas le marketing

Si les optiques catadioptriques sont à la mode depuis quelques décennies, il faut les avoir testées pour comprendre réellement leurs performances et leurs limites car la réalité est très différente de la réputation qu'on veut bien leur donner.

Le service marketing de Celestron comme de Meade veulent nous faire croire que leur Maksutov constitue une alternative bon marché et plus pratique que les gros téléobjectifs photographiques de très longues focales, lourds et encombrants. En nous montrant par exemple des photos d'oiseaux présentant un superbe flou de l'arrière-plan (cf. le bokeh), ces optiques sont censées séduire les photographes animaliers ou de la nature. En revanche, leurs publicités ne disent pas qu'ils sont peu lumineux et ne disposent d'aucun automatisme (ces télescopes ne disposent pas de processeur permettant de communiquer avec un APN pour assurer la mise au point automatique ou contrôler la vitesse d'obturation, encore moins l'ouverture du diaphragme qui est bloquée sur pratiquement f/14.

Enfin, ils n'offrent pas le piqué des images obtenues par les supertéléobjectifs traditionnels destinées aux APN, certes parfois vendus 10 à 30 fois plus chers. Pour preuve, en 2005 sur le forum de Photo.net, un photographe qui avait essayé de réaliser quelques photos terrestres avec un C90 le qualifia de "horrible, affichant une image douce, un faible contraste et un hot spot brillant...". Autrement dit, la mauvaise qualité des images prises au C90 le disqualifie vis-à-vis des téléobjectifs traditionnels. Mais même en utilisant une optique traditionnelle, cet amateur éclairé conseilla de ne pas dépasser la longueur focale de 700 mm au-delà de laquelle la prise en main devenait très difficile eu égard au poids et l'étroit champ visuel du téléobjectif.

Mais à part les anciens téléobjectifs catadioptriques Zeiss et autre Nikkor des années 1960-1980 d'excellente facture, les supertéléobjectifs catadioptriques actuels destinés aux APN ne sont pas mieux lotis que le C90 ou l'ETX 90 PE. S'ils sont compacts et légers, leur obstruction centrale atteint 53% du diamètre dans le cas du Samyang de 500 mm f/6.3. Ce modèle comme les produits "blancs" concurrents sont tous à commande manuelle et sont des modèles bas de gamme qui reviennent à moins de 200 € ttc comprenant parfois un doubleur de focale. A ce prix, leur qualité est forcément très douteuse. On reviendra sur les téléobjectifs et les catadioptriques dans l'article consacré aux objectifs des APN.

Celestron a donc profité de cette niche quasiment abandonnée par les fabricants d'objectifs photos pour essayer de placer son C90. Mais vus ses limites comme celles de l'ETX 90, quoique disent leur fabricant, ces deux petits télescopes sont avant tout destinés à l'astronomie et aucun photographe amateur ne remplacerait son supertélé par l'un de ces petits télescopes, encore moins les photographes animaliers professionnels. Comme on dit, chaque outil a sa fonction.

C. La lunette achromatique Tele Vue Ranger 70 mm f/6.9 ED

Enfin, parmi les petites lunettes achromatiques, la Tele Vue Ranger, un doublet ED de 70 mm f/6.9 commercialisé en 1993 supporte la comparaison avec l'ETX 90 PE. La Ranger 70 est la version économique de la fameuse Tele Vue Pronto (70.4 mm f/6.4 ED), une lunette apochromatique mise sur le marché la même année. Bien que la Ranger ne soit plus commercialisée, on la trouve parfois d'occasion entre 350-600$ (plus taxes et frais s'élevant à environ 33% de la valeur déclarée) ou environ 650 € bien que son prix tend à diminuer vu qu'il existe aujourd'hui de très bons produits concurrents.

La Tele Vue Ranger de 70 mm f/6.9 ED (1993).

Mis à l'épreuve côte-à-côte sur les mêmes objets, on peut dire que la TV Ranger 70 et l'ETX 90, malgré leur conception et leur diamètre différents, offrent des performances équivalentes à moyens et forts grossissements. Sur les objets forts contrastés soutenant des grossissements élevés, les deux optiques sont à égalité. Si la lunette achromatique ne présentait pas d'aberration chromatique, elle gagnerait même dans cette catégorie !

En fait le petit ETX perd ses 20 mm de capacité supplémentaire en raison de l'obstruction centrale qu'entraînent le miroir secondaire et les baffles antireflets entourant l'ouverture du miroir primaire. Maintenant si vous ne voyez pas ces aberrations - si vous n'y êtes pas sensible ou si elles ne vous dérangent pas - plus d'un amateur considère alors que la Ranger est meilleure que n'importe quel Maksutov-Cassegrain de 90 mm d'ouverture.

A grossissements moyens, l'observation du ciel profond tend à favoriser le petit ETX en raison de ses 20 mm d'ouverture supplémentaire qui captent 65% de lumière supplémentaire que la Ranger, mais il en perd 41% en raison de son obstruction centrale. Comme nous le disions plus haut, à faible puissance, l'ETX ne peut pas rivaliser avec la Ranger (ni avec aucune lunette astronomique de 70-90 mm de diamètre). Malgré sa plus petite taille, le champ qu'offre la Ranger est aussi beau car un peu plus contrasté et un peu plus net que celui d'une Orion ED80 et certainement meilleur comparé à celui d'une Megrez 80 II ED.

Le seul inconvénient de la Ranger était l'estampie Tele Vue qui augmentait sensiblement son prix comparé aux produits asiatiques. C'est la raison pour laquelle bon nombre d'amateurs écartent les produits des marques de prestige ou haut de gamme jugés trop chers et se rabattent sur des modèles standards améliorés. Ainsi, on peut par exemple choisir une lunette achromatique de 80 mm f/5 ED fabriquée à Taiwan (Synta) et équiper les oculaires d'un filtre "Fringe Killer" bloquant le rayonnement UV et IR. Cela a pour effet de réduire l'aberration chromatique et d'augmenter la netteté des images. C'est une solution très efficace et économique sachant qu'un filtre oculaire "Fringe Killer" de 31.75 mm revient à 65 € chez Baader (20% moins cher que chez un revendeur) et comptez 99 € pour le modèle de 2". On peut évidemment aussi se reporter sur des lunettes apochromatiques de bien meilleure facture mais bien plus chères aussi fabriquées par de célèbres constructeurs japonais, américain ou européen. Que l'on choisisse l'une ou l'autre solution, nous verrons dans les liens repris en fin de dernière page qu'en ce domaine la concurrence fait rage et l'amateur a l'embarras du choix.

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Les lunettes à tube court de 100 à 130 mm

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