CHAPITRE 13

LES CONSÉQUENCES TERRESTRES

 

La Terre primitive façonnée par les impacts

La Terre, depuis 4,6 milliards d'années a subi une évolution continue d'une grande complexité, qu'il est donc difficile de reconstituer avec précision. L'impactisme a tenu une place de choix dans cette évolution, surtout pendant les deux premiers milliards d'années, quand une multitude de planètes vagabondes (les planétésimales) circulaient entre les grosses planètes qui ont réussi à s'assurer une place définitive dans le Système solaire. Ces planétésimales ont largement contribué à l'augmentation du volume et de la masse des planètes, par suite de collisions très nombreuses, puisque le rythme de celles-ci était au moins 10 000 supérieur au rythme actuel durant les 500 premiers MA, puis encore 100 fois supérieur durant le milliard d'années suivant.

On sait, grâce à la superposition de couches de plus en plus denses à l'intérieur de la Terre, qu'il s'est produit une différenciation par gravité. Les matériaux cosmiques les plus denses se sont progressivement enfoncés dans un océan de roches et de minéraux en fusion, pour contribuer à former ou à renforcer le noyau terrestre qui a, aujourd'hui, un diamètre voisin de 6900 km et une densité variant de 9 à 13,6 g/cm3.

Les géologues actuels pensent que la Terre primitive a fini, au bout de 600 MA, par être enveloppée d'une croûte silicatée qui recouvrait toute la surface du globe. Cette croûte primitive fut probablement fissurée et déchirée par des causes à la fois terrestres et astronomiques. Des cratères de plusieurs centaines de kilomètres de diamètre, qui ont obligatoirement existé, ont pu contribuer à déterminer le tracé des premières fissures, ou même être à l'origine des dépressions océaniques originelles. Certains géophysiciens pensent que l'océan Pacifique primordial pourrait avoir été creusé à l'origine par un astéroïde géant et qu'il aurait été à l'origine un astroblème gigantesque de 6000 km de diamètre. L'énergie libérée a pu être voisine de 1028 joules. La Terre entière a subi ce choc épouvantable, mais sans danger cependant pour son intégrité en tant que planète. Il faudrait, en effet, un impact libérant une énergie de 1031 joules, soit mille fois supérieure, pour que la Terre soit brisée et pour que ses constituants se dispersent dans l'espace.

On sait que les deux premiers milliards d'années du Système solaire ont consisté en une partie de billard cosmique impitoyable. Toutes les planètes, et parmi elles la Terre, ont été enfantées dans la douleur. Si, par la suite, la vitesse de cratérisation sur les planètes et satellites à surface solide (et donc le rythme de l'impactisme planétaire en général) a diminué d'un facteur 100, tous ces corps célestes ont continué de subir, plus épisodiquement, des impacts plus ou moins violents. La Terre, on le sait par l'étude des impacts tardifs qui ont creusé les astroblèmes, a elle aussi subi ce bombardement céleste qui a contribué, pour une part non négligeable, à façonner la géographie de notre planète, telle que nous la connaissons aujourd'hui.

L'origine de la Lune

L'histoire de la formation de la Lune a toujours intrigué les astronomes. Ils croyaient enfin avoir découvert la bonne solution dans le courant des années 1970, quand un nouveau venu imprévu est venu brouiller le schéma savamment construit et amélioré par plusieurs générations de chercheurs. Ce nouveau venu, d'une importance incroyablement sous-estimée au départ, c'est le chaos.

On sait que l’impact a eu lieu moins de 50 MA après la formation des deux planètes, durant la fameuse guerre des mondes dont nous avons parlé, mais qu’elles étaient déjà toutes les deux différenciées. Aujourd'hui, près de 4,6 milliards d’années après leur association forcée et brutale, ces deux astres forment une même famille cosmique, étonnamment soudée.

Pendant plusieurs décennies, trois hypothèses se sont partagées les faveurs des astronomes, qui n'étaient pas sans savoir cependant qu'aucune d'entre elles était vraiment satisfaisante, car toutes présentaient des faiblesses plus ou moins criardes.

1. La Lune sœur de la Terre. Dans cette hypothèse, les deux objets se sont formés séparément dans la même région de l'espace. C'est la théorie de l'accrétion simultanée, mais elle n'explique pas le déficit de fer dans notre satellite.

2. La Lune fille de la Terre. Dans cette hypothèse, la Lune se serait séparée de la Terre par effet centrifuge. C'est la théorie de la fission qui a le gros défaut de ne pas expliquer le problème du moment angulaire.

3. La Lune cousine de la Terre. Dans cette hypothèse, la Lune formée ailleurs dans le Système solaire aurait été capturée par la Terre à l'occasion d'une forte approche exceptionnelle. C'est la théorie de la capture qui ne résout pas le problème de la raréfaction du fer dans notre satellite et qui n'explique pas non plus l'origine du freinage pour expliquer la capture.

L'exploration de la Lune, à partir de 1969, et l'étude des échantillons lunaires ramassés par les astronautes américains ont clairement montré que les trois hypothèses anciennes sur l'origine de la Lune ne tenaient pas sur le plan scientifique, et qu'il convenait donc d'en imaginer une autre qui corresponde mieux aux données d'observation. On doit à William Hartmann et Donald Davis (en 1975), Alastair Cameron et William Ward (en 1976) la nouvelle théorie de l'impact rasant (figure).

Pour ces auteurs, et depuis pour de nombreux autres astronomes qui se sont ralliés à leur scénario probable, les choses se sont passées de la manière suivante. Il existait encore plusieurs protoplanètes rescapées dans le Système solaire intérieur après quelques dizaines de millions d'années. L'une d'entre elles, de masse 0,10 à 0,15 masse terrestre (c'est-à-dire une masse voisine de celle de Mars) circulait dans la zone terrestre (1,0 ± 0,1 UA) sur une orbite quasi circulaire comme celle de la Terre. L'objet, suite à des perturbations planétaires, a fini par se rapprocher de la Terre, à faible vitesse, et l'a percutée avec un angle presque rasant, de telle manière que la collision n'a détaché qu'une partie du manteau terrestre et n'a pas atteint le noyau de fer déjà formé. La chaleur colossale engendrée par l'impact a vaporisé toute la matière volatile et concentré les matières réfractaires du matériau lunaire.

Suite à cet impact entre deux corps célestes de masse importante, plus d'une masse lunaire de matière a été satellisée autour de la Terre sur une orbite extérieure à la limite de Roche. Ainsi, la matière n'a pas pu former un anneau permanent (ce qui aurait pu être le cas, tout au moins temporairement, dans le cas d'une orbite interne à la limite de Roche), mais bien un disque d'accrétion qui s'est progressivement regroupé autour du fragment principal pour former un nouvel objet recomposé, la Lune actuelle, formé en fait de l'ancienne proto-Lune et d'une partie de l'ancienne enveloppe externe et du manteau terrestres.

La Terre, la Lune et le chaos

Ce sont les spécialistes de la mécanique céleste qui ont levé le lièvre : la Lune est indispensable à la stabilité même de la Terre. Seuls des calculs sur le très long terme, prenant en compte le chaos, ont permis d'obtenir des résultats très importants et assez imprévus sur la stabilité du Système solaire et de ses différents membres. Dès 1988, on a appris que Pluton avait un mouvement très chaotique à l'échelle de 10 MA seulement et qu'il n'était pas une vraie planète, ce qui a été confirmé depuis par la découverte du disque de Kuiper. Et surtout, des travaux ultérieurs concernant toutes les planètes ont prouvé que le mouvement orbital des quatre planètes intérieures (Mercure, Vénus, la Terre et Mars) était lui aussi chaotique. L'astronome français Jacques Laskar a disséqué le mouvement extrêmement complexe du système Terre-Lune.

Pour bien comprendre l'importance de notre satellite sur la dynamique de la Terre, il a simulé ce que serait l'évolution des divers éléments orbitaux et caractéristiques physiques sans la Lune. En 1 MA seulement, ce qui est très peu à l'échelle astronomique, les variations d'obliquité de la Terre seraient de l'ordre de 15 degrés entre 15 et 30° en gros, ce qui entraînerait des variations de près de 20 % de l'insolation reçue à 65° de latitude nord. Sur de plus grandes périodes de temps, l'obliquité de la Terre pourrait aller de 0 à 85°. Comme l'explique Laskar :

« En l'absence de la Lune, la Terre présenterait donc des variations d'obliquité telles que le climat à sa surface serait terriblement modifié. Il faut en effet souligner que, avec une obliquité de 85 degrés, la Terre se retrouve pratiquement couchée sur son orbite, comme l'est Uranus. La quasi-totalité de la Terre subirait alors, comme c'est le cas actuellement pour les zones polaires, des jours et des nuits de plusieurs mois. Au pôle, le Soleil resterait longtemps très haut dans le ciel, et il est fort probable que de telles conditions d'insolation entraîneraient des modifications importantes de l'atmosphère de la Terre. » 1

La question cruciale que sous-entend le résultat de Laskar est celle-ci : « La Lune a-t-elle été déterminante dans l'apparition de la vie et surtout dans sa montée inexorable vers la complexité ? ». Car il ne paraît pas évident qu'une vie sophistiquée comme la nôtre soit capable de résister à de très importants changements climatiques quasi permanents à l'échelle astronomique.

On voit avec cette histoire de l'existence de la Lune actuelle, issue d'une collision majeure entre une proto-Lune et la Terre primitive, comment un cataclysme d'envergure peut déboucher à terme sur une vie telle que la nôtre, grâce à la présence d'un gros satellite stabilisateur. C'est une nouvelle preuve de cette réalité fondamentale que le cataclysme est source de création. Sans Lune, pas de vie telle que la nôtre, pas d'Homo sapiens.

Pour les théoriciens du chaos dans le Système solaire, la nature chaotique des planètes intérieures provient de la présence de résonances entre les lents mouvements de précession des orbites de la Terre et de Mars d'une part, et entre celles de Mercure, Vénus et Jupiter d'autre part. La planète géante fait le ménage jusque dans la proche banlieue solaire. De ce fait, on ne peut prévoir l'avenir des planètes proches à très long terme. Jacques Laskar a calculé que les orbites de Vénus et de Mercure pourraient se couper dans un lointain futur et que Mercure pourrait être expulsé du Système solaire. Il suggère une autre solution possible : la collision entre Mercure et Vénus. Ainsi une des huit planètes rescapées de la guerre des mondes, après un très long sursis, pourrait disparaître. Comme quoi, à cause de l'imprévisible chaos, l'impactisme planétaire n'est pas encore fini.

Les conséquences astronomiques de l'impactisme

Elles ont dû être importantes les deux premiers milliards d'années du Système solaire, durant la période très agitée dont nous venons de parler, quand de nombreux planétoïdes géants, et pas seulement la Lune, circulaient encore entre les planètes que nous connaissons de nos jours.

Les éléments orbitaux de la Terre ont subi des modifications par rapport aux valeurs originelles. L'importance de l'altération du demi-grand axe (a) et de l'excentricité (e) n'est pas connue, et ne le sera jamais. Par contre, l'inclinaison (i) est passée d'environ 0°, valeur probable lors de la formation des protoplanètes, à 23°, ce qui est considérable. Nous avons vu qu'en l'absence d'un satellite massif comme la Lune, capable de stabiliser le système Terre-Lune à l'intérieur de valeurs ne sortant pas d'une fourchette assez étroite, le phénomène du chaos aurait pu entraîner encore des modifications d'une tout autre ampleur.

Aujourd'hui, il n'y a plus de risque de changements majeurs pour ces trois éléments, dits éléments caractéristiques, du fait de la masse insignifiante des astéroïdes et des comètes qui frôlent la Terre par rapport à celle-ci. N'oublions pas cependant que les divers éléments orbitaux de la Terre (et des autres planètes) subissent des perturbations à long terme qui n'ont rien à voir avec l'impactisme. Ces perturbations sont dues à l'interaction des planètes les unes sur les autres, et font osciller les éléments moyens entre deux extrêmes, variables selon chaque planète.

Les impacts d’astéroïdes et de comètes ont probablement eu également une incidence sur la période de rotation de la Terre, qui était bien différente dans le passé de ce qu'elle est actuellement. Ces variations, sans doute minimes, ont pu être en plus ou en moins selon la géométrie de l'impact : accélération de la rotation quand la vitesse de l'impact s'additionnait à celle de la Terre et, au contraire, ralentissement quand les vitesses étaient de sens contraire. Ces variations ne doivent pas être confondues avec le ralentissement connu de la rotation terrestre, en relation avec l'éloignement séculaire de la Lune.

Enfin, il est probable que la majorité des collisions d'envergure d'objets cosmiques avec la Terre ont provoqué d'importantes transformations ou perturbations dans le champ magnétique de notre planète et dans la magnétosphère. Nous aurons à revenir sur les conséquences de ces perturbations qui présentent une fréquence et un danger considérés comme inquiétants, à l'échelle astronomique, pour la stabilité des espèces terrestres.

Les conséquences géographiques de l'impactisme

Elles ont dû être variables selon l'énergie libérée par les impacts. Dans le cas de petits objets, c'est-à-dire la très grande majorité, les dégâts causés n'ont pas dépassé l'importance de dégâts locaux et tout à fait secondaires, insignifiants à l'échelle de la planète. Mais il est certain que les gros impacts du passé et que les rares EGA de bonne taille (plusieurs kilomètres de diamètre) existant encore, ont pu, peuvent et pourront, à moyen et long terme, causer des cataclysmes ayant des répercussions à l'échelle régionale ou même planétaire pour les plus gros d'entre eux.

Les petits impacts créent des cratères météoritiques de forme sensiblement circulaire qui deviennent ensuite des astroblèmes. Ceux-ci peuvent servir de cuvettes lacustres (lacs et mers) dans les régions humides. On s'est rendu compte, depuis une cinquantaine d'années, que de très nombreux lacs se sont formés dans des cratères météoritiques (cas de Sithylemenkat notamment), ce qui ne simplifie pas leur détection.

Des impacts plus importants peuvent entraîner la transformation de zones côtières par suite de l'enfoncement de la croûte terrestre. D'autre part, il peut se produire des bouleversements géographiques consécutifs à des réactions isostatiques et des mouvements tectoniques, eux-mêmes dus à des impacts de bonne taille.

Des bouleversements au niveau de la cryosphère (ensemble des glaces terrestres et marines) peuvent se produire si l'impact a lieu dans une région polaire. Une déglaciation totale ou partielle entraîne à moyen terme une transgression marine (montée du niveau des eaux). Celle-ci affecte sérieusement le tracé des côtes et défigure l'image classique des continents, tels que nous les connaissons au XXsiècle. La géographie de la Terre est essentiellement changeante et varie régulièrement au cours des siècles.

Les conséquences atmosphériques de l'impactisme

Nous avons déjà eu l'occasion d'en parler dans certains chapitres et nous les retrouverons encore dans des chapitres ultérieurs. Aussi nous allons juste, dans cette section, les rappeler très sommairement à titre d'inventaire. Elles vont souvent de pair avec d'autres, avec des intensités et donc des conséquences inégales selon la nature et aussi l'énergie de l'impact responsable.

Effet de serre. Il s'agit du processus d'échauffement des couches basses de l'atmosphère dû à l'absorption de certains gaz, notamment le dioxyde de carbone (CO2) et la vapeur d'eau (H2O). Mais des gaz émis par les activités humaines jouent également un rôle, comme les chlorofluorocarbures (CFC), les hydrochlorofluorocarbures (HCFC) et les hydrofluorocarbures (HFC). Un impact sérieux en libérant une formidable quantité de poussières de nature diverse est en mesure de participer à l'augmentation de l'effet de serre, souvent en association avec un hiver d'impact. (figure)

Couche d'ozone. On sait qu'elle est menacée à la fois par les agressions cosmiques et les activités humaines. Les radiations solaires énergétiques modifient d'une manière significative sa composition, mais elle se recompose en permanence dans le cadre de processus photochimiques liés à l'atmosphère. Les ultraviolets dissocient l'oxygène moléculaire (O2) en deux atomes d'oxygène qui se recombinent chacun avec une molécule d'oxygène pour faire de l'ozone (O3). Une diminution de 5 % de la couche d'ozone entraîne une augmentation de 10 % des UV b, biologiquement actifs. Donc, à forte dose, les UV provoquent des dégâts au niveau des cellules pouvant entraîner des cancers de la peau et des cataractes.

Pluies acides. Sous ce terme générique, on regroupe divers agents acidifiant les milieux naturels (notamment des brouillards, gaz, aérosols et dépôts secs lessivés par des précipitations) qui contaminent ou même empoisonnent plus ou moins les sols, la végétation et les eaux de surface et souterraines. Cette grave perturbation atmosphérique provoque un dépérissement de la végétation et un bouleversement des conditions de vie, aussi bien pour les animaux que pour les humains (maladies respiratoires, affections aux yeux notamment). Les pluies acides seraient une conséquence quasi obligée d'un hiver d'impact et compliqueraient sérieusement la survie post-impact des rescapés du cataclysme lui-même.

Perturbations atmosphériques. Elles sont inévitables évidemment après un impact, même relativement modeste. Dans un premier temps, on se trouve en présence d'un effet de souffle qui peut être impressionnant et qui dérègle le mécanisme normal de l'atmosphère. Des vents de grande intensité et des tornades très violentes (atteignant l'échelle F4, 340-410 km/heure, et même F5, 420-510 km/heure) sont probables. Les courants-jets ordinaires de l'atmosphère subissent des perturbations et des précipitations exceptionnelles inondent certaines régions. Ces perturbations post-impact sont nombreuses et variées, mais elles ne sont jamais irréversibles, l'atmosphère reprend après une période plus ou moins longue ses caractéristiques et son activité normales.

Pollution atmosphérique. C'est la modification de l'état physico-chimique de l'atmosphère, notamment au niveau de la composition de ses éléments mineurs. On sait que les cataclysmes terrestres (notamment volcaniques) et l'activité humaine depuis l'époque industrielle sont responsables d'une pollution atmosphérique pratiquement ininterrompue de nos jours, avec des conséquences diverses : réchauffement de la planète, corrosion chimique accélérée, altération des tissus et des cellules. Bien entendu, un impact, même d'envergure locale (comme celui de la Toungouska), engendre une pollution atmosphérique proportionnelle à l'énergie dégagée (figure). Les incendies géants qui peuvent suivre un impact doivent participer aussi activement à la pollution atmosphérique et à la non-viabilité provisoire des régions dévastées.

Hiver d'impact. C'est la période post-catastrophe qui regroupe tous les effets nocifs engendrés par l'impact. L'opacification de l'atmosphère par les poussières et les suies en suspension, associée à une période de grand froid pouvant aller jusqu'à la glaciation, peut entraîner une décimation de certaines espèces et même dans certains cas l'extinction pure et simple. Dans un deuxième temps, l'hiver peut laisser la place, suite à l'effet de serre, à un réchauffement comme cela s'est produit il y a 65 MA (voir le chapitre 12 sur l'extinction des dinosaures).

Périodes glaciaires et variations climatiques

Depuis le début des années 1970, les spécialistes des climats ont clairement démontré le pourquoi et le comment de la paléoclimatologie, qui occupe une place privilégiée dans les sciences de la Terre. L'un d'eux, le belge Étienne Bernard, a conclu à la « prodigieuse connivence entre les causes cosmologiques, astronomiques, astrophysiques, géophysiques et géologiques pour réaliser et maintenir les conditions climatiques propices à l'éclosion de la vie et à son évolution. » 2

Dès 1940, le savant yougoslave Milutin Milankovic (1879-1958) avait montré que les alternances climatiques de grande ampleur obéissent à trois cycles principaux de durée variable. Ces trois cycles sont ceux de l'inclinaison de l'axe terrestre ou de l'obliquité de l'écliptique (moyenne : 41 000 ans, fourchette : 37 000 à 44 000 ans), de l'excentricité de l'orbite terrestre (moyenne : 95 400 ans, fourchette : 81 000 à 106 000 ans) et de la révolution du périhélie de la Terre (moyenne : 21 550 ans, fourchette : 15 600 à 27 700 ans). La combinaison de deux, et à plus forte raison des trois cycles, peut entraîner l'arrivée ou la disparition d'une période glaciaire, selon que cette combinaison est favorable ou défavorable. (figure)

Mais à ce maintien dans des limites connues et relativement étroites des conditions climatiques terrestres, maintien qui semble être la règle et qui dure depuis plusieurs centaines de millions d'années, il est certain que viennent se greffer de temps à autre des accidents de parcours dus aux impacts d'EGA ou de comètes. Ces accidents mettent à bas, pour un temps plus ou moins long, le bel ensemble des grands cycles climatiques naturels, tels qu'ils découlent principalement des lois de la mécanique céleste. On sait que certaines grandes divisions géologiques (ères et périodes) sont effectivement les conséquences de ces accidents cosmiques. Rappelons les trois plus connues :

— la séparation Crétacé-Éocène, il y a 65 MA ;

— la séparation Éocène-Oligocène, il y a 35 MA ;

— la séparation entre le Paléolithique inférieur et le Paléolithique moyen, il y a 700 000 ans.

Mais des impacts beaucoup moins importants peuvent produire les mêmes effets dans certains cas. D'autres, sans vraiment causer des périodes glaciaires, peuvent entraîner de sérieux refroidissements sur l'ensemble de la planète.

La raison principale de ces importants changements climatiques d'origine cosmique est probablement due à la diffusion d'un énorme volume de poussières et de particules microscopiques (de 1 à 0,01 micromètre) dans la haute atmosphère. L'intérêt du phénomène est qu'il peut être causé par les trois catégories d'impacts : impacts sur les terres émergées, impacts océaniques et explosion dans l'atmosphère d'EGA cométaires ou de comètes, même s'il s'agit d'objets relativement modestes. Quand l'énergie libérée atteint ou dépasse 1018 joules, c'est-à-dire pour des objets à partir de 200 mètres, il y a obligatoirement production intense de poussières et de particules microscopiques qui sont éjectées dans la haute atmosphère. Cet aérosol entraîne une diminution substantielle de l'insolation de la Terre, et, par conséquence, des variations climatiques pouvant dépasser plusieurs degrés et conduire dans certains cas à des périodes glaciaires.

Mais dans ce domaine des variations climatiques, il ne faut pas perdre de vue que parfois des événements terrestres, en l'occurrence ici des éruptions volcaniques, peuvent conduire aux mêmes conséquences. Il serait donc exagéré d'attribuer aux gros impacts la paternité de toutes les grandes variations soudaines dans le domaine climatique. On a l'exemple assez récent de l'éruption cataclysmique du Tambora, dans l'île de Sumbawa en Indonésie, en 1815, connue pour être la plus énergétique des temps historiques avec son énergie totale libérée égale à 1020 joules. Au cours de cette éruption, le Tambora perdit 1250 mètres de sa hauteur et éjecta près de 150 km3 de débris divers, notamment sous forme de fines poussières et de cendres. C'est une fantastique quantité de particules qui atteignit les hautes couches atmosphériques et qui fut entraînée vers d'autres latitudes au gré des courants aériens. En 1816, l'aérosol existait encore en si grande quantité que l'ensoleillement fut très déficitaire, et que cette année-là fut appelée l'année sans été. Elle fut la plus froide que l'on ait connue, avec d'innombrables conséquences humaines et économiques.

On voit avec cet exemple terrestre, les conséquences qu'a pu (et que pourrait encore) entraîner une diminution sensible de l'insolation sur Terre causée par un impact d'envergure. Un refroidissement rapide et important de notre planète (et quelle qu'en soit la cause : astronomique ou purement terrestre) peut conduire irréversiblement à une époque glaciaire du fait des effets cumulatifs des phénomènes d'accompagnement, notamment la persistance d'un sol gelé sur des régions entières et l'augmentation du volume des glaciers. Car il ne faut pas oublier que la neige a un albédo (pouvoir réflecteur) particulièrement élevé (0,84 en moyenne), ce qui débouche sur une réflectivité accrue de la surface terrestre enneigée. En clair, cela veut dire que le sol enneigé renvoie dans l'espace la plus grande partie de l'apport calorifique solaire au lieu de l'absorber, et qu'il accélère ainsi lui-même l'emprise des glaces à ses dépens. Passé un certain seuil critique d'accumulation de neige et de glace, une glaciation peut devenir autoperpétuante (figure).

Les conséquences des impacts océaniques

Les impacts océaniques ne participent pas à la cratérisation apparente, et certains de leurs effets sont assez différents de ceux causés par des impacts sur les terres émergées ou même ceux qui peuvent avoir lieu en mer peu profonde, sur les talus continentaux, par exemple, et qui sont régis pratiquement par les mêmes règles.

Un petit EGA de quelques dizaines de mètres provoque juste un tremblement de terre proportionnel à l'énergie libérée et un important tsunami. Cela arrive fréquemment, mais de tels impacts sont des catastrophes très secondaires sur le plan énergétique qui n'ont aucune conséquence sérieuse à l'échelle planétaire. Sur le plan humain, c’est une autre affaire comme nous allons le voir.

Il n'en est pas de même si l'EGA dépasse deux kilomètres de diamètre. On peut alors envisager une fissuration de la croûte océanique avec des conséquences autrement cataclysmiques. On sait que cette croûte océanique est beaucoup moins épaisse, et donc plus fragile, que la croûte continentale. On sait aussi que les volcans sous-marins sont fréquents, et qu'en de multiples endroits le magma affleure la surface terrestre, sous les océans comme sous les terres émergées.

Si une fissuration de la croûte océanique est effective après un impact sérieux, le magma sous-jacent est libéré et devient capable de faire localement bouillir la mer. Une fantastique quantité d'eau de mer, dépendant évidemment de la surface de la fissure et des températures dégagées, peut se transformer en vapeur. Cette vapeur d'eau se mélange ensuite avec les débris des roches basaltiques pulvérisées par l'impact et avec toutes sortes de gaz, de poussières, de laves et de cendres éjectées à la fois par le magma fissural et par les autres volcans immergés et émergés de la région choquée. Toute cette matière hétéroclite s'agglutine pour former de formidables nuages opaques, qui doivent se répartir ensuite tout autour de la Terre en quelques jours. Ces nuages se comportent comme une véritable carapace dans la troposphère et la stratosphère, capable là encore d'obscurcir le Soleil pendant plusieurs mois, voire même pendant plusieurs années. Une conséquence presque certaine est un déluge mondial colossal et éventuellement une période glaciaire, du fait de l'ensoleillement très déficitaire. On parle de nos jours d'hiver d'impact.

Le danger des tsunamis d’origine cosmique

L’autre conséquence importante d'un gros impact océanique est la formation d'un tsunami, véritablement fantastique celui-là (et sans commune mesure avec les tsunamis courants rappelés plus haut), puisque pouvant atteindre plusieurs kilomètres de hauteur. La force de pénétration d'une telle vague doit être prodigieuse, quand on connaît déjà celle des tsunamis purement terrestres qui peuvent dépasser trente mètres et pénétrer à 500 km à l'intérieur des côtes. Certains tsunamis d'origine cosmique doivent tout balayer sur leur passage sur plusieurs milliers de kilomètres à l'intérieur des côtes et peut-être, dans certains cas, faire le tour de la Terre. Inutile de parler des destructions qui en découlent, chacun de ces extraordinaires tsunamis étant capable de rayer du monde vivant de nombreuses espèces.

Les simulations modernes montrent bien que ce problème des tsunamis d’origine cosmique a été terriblement sous-estimé jusqu’alors. Il s’agit d’un problème assez délicat car ces simulations donnent des valeurs parfois différentes selon les paramètres utilisés (qui ne peuvent être que des approximations), mais des ordres de grandeur se dégagent qu’il est nécessaire de connaître. Le tableau 13-1 donne quelques chiffres à ce sujet, des chiffres assez inquiétants, tant en ce qui concerne la hauteur des vagues engendrées que la fréquence de cette catégorie de cataclysme.

Il apparaît qu’un impact océanique d’un EGA de type S de 50 mètres seulement peut engendrer un tsunami de 30 mètres à 1000 km de distance et une sidérite de même diamètre un tsunami de près de 80 mètres qui serait tout à fait catastrophique pour les régions côtières inondées. Mais il y a vite inflation. Un petit EGA de 300 mètres, avec une vitesse d’impact de 20 km/s peut générer un tsunami de près de 1 km de hauteur, ce qui paraît presque incroyable et surtout terriblement dévastateur. Gare au prochain, car il s’agit d’un événement qui reste possible à l’échelle du millénaire. Si l’on monte dans la gamme des impacts océaniques kilométriques, les tsunamis générés atteignent plusieurs kilomètres et peuvent dans certains cas faire quasiment le tour de la Terre. Et il ne faut jamais oublier qu’à l’échelle astronomique ce phénomène est courant.

Outre le tableau 13-1, le lecteur peut consulter le tableau 6-5 qui donne d’autres chiffres significatifs qu’il faut connaître. Il rappelle que les collisions océaniques sont à la fois fréquentes et donc fort dangereuses pour la Terre, ou tout au moins pour sa couche externe. C'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles le plancher océanique est partout récent (moins de 200 MA) et se renouvelle constamment. Les cicatrices océaniques ont à peine le temps de se refermer, que déjà de nouveaux corps célestes les rouvrent. La Terre a toujours été, et reste encore plus de 4 milliards d'années après sa formation, une planète perpétuellement meurtrie. La vie, comme nous allons le voir dans le chapitre suivant, n'en a eu que plus de mérite pour prendre racine, subsister et se développer sans cesse au sein d'un monde planétaire somme toute relativement hostile.

Les petits impacts sont des pichenettes à l’échelle terrestre, mais quand on descend à l’échelle humaine, il en va bien sûr tout autrement. Ces tsunamis d’origine cosmique pourraient faire des millions de victimes et des dégâts sur le plan économique impossibles à chiffrer.

Un impact océanique il y a 2,15 millions d’années

La détection des impacts océaniques du passé est difficile, et jusqu’à présent on n’a pu repérer que très peu d’astroblèmes sous-marins incontestables, la sédimentation jouant rapidement un rôle primordial, comme on l’a vu avec l’astroblème de Chicxulub, pourtant très important et relativement récent. Des anomalies gravimétriques sont parfois mises en évidence, mais la corrélation avec un impact n’est jamais apportée avec certitude.

C’est tout l’intérêt de la découverte d’un impact possible dans les années 1960 par l’équipage du navire de recherche américain l’Eltanin, qui étudiait principalement l’ancienne activité glacière dans le sud de l’océan Pacifique, où il effectuait des carottages en eau profonde. Certains échantillons remontés en surface semblaient concerner des débris d’astéroïde.

En 1981, le géochimiste américain Frank Kyte mit en évidence dans certaines de ces carottes océaniques, datées précisément de 2,15 MA, la présence d’iridium, quasiment signature d’un impact cosmique d’importance, et postula donc logiquement pour une collision d’astéroïde dans la mer de Bellingshausen, près des côtes antarctiques, à environ 1400 km à l’ouest de la pointe de l’Amérique du Sud. On donna même à cet astéroïde fantôme le nom d’Eltanin, en souvenir du rôle essentiel joué par le navire de recherche américain.

En 1997, des recherches multidisciplinaires ont confirmé l’impact. Un impact important puisque le diamètre de l’objet (probablement un vrai astéroïde) a été évalué entre 1 et 4 km et l’énergie libérée de l’ordre de 100 000 MT de TNT. L’impact dans l’océan a soulevé une colonne d’eau haute de près de 5 km et le tsunami associé a atteint l’Amérique du Sud et l’Antarctique. Un torrent de poussières, de vapeur et d’autres débris salés furent dispersés à plusieurs milliers de kilomètres, tant et si bien que les chercheurs ont retrouvé la présence de fossiles contemporains du cataclysme au sommet des montagnes proches du pôle sud.

Kyte et ses associés pensent maintenant que l’impact d’Eltanin a été la cause d’une importante période de glaciation située tout de suite après la collision, glaciation consécutive à un très important refroidissement, probablement dû à un effondrement (plusieurs degrés au moins) de la chaleur reçue au niveau du sol. C’est donc un nouvel exemple, après Chicxulub, d’un important hiver d’impact dû à un impact océanique. Il sera très intéressant d’étudier plus précisément toutes ses conséquences, à la fois sur le climat, mais aussi sur la vie de nos malheureux ancêtres, obligatoirement traumatisés devant un tel cataclysme, surtout par la disparition du Soleil pendant quelques semaines au moins et par la dégringolade de la température.

Inversions du champ magnétique liées aux impacts ?

Nous avons parlé au chapitre 8 de la magnétosphère, notre bouclier naturel ultra-performant en période normale, et des inversions géomagnétiques qui se produisent en moyenne deux fois par million d'années mais dont les conséquences sont désastreuses pour la biosphère et ses habitants, surtout les plus fragiles. Nous revenons ici sur le sujet sous l'aspect "conséquences".

Les inversions du champ magnétique terrestre consécutives à des impacts de comètes ou d'astéroïdes sont une quasi-certitude, acquise dans le courant des années 1960. Il y a donc lieu de les étudier avec soin. Le point d'interrogation au titre de section signifie qu'il y a quand même un doute, contrairement à ce que l'on a cru longtemps. Il pourrait s'agir, selon certains chercheurs, d'une simple coïncidence de dates très proches à l'échelle astronomique, entre celles des inversions proprement dites et celles des cataclysmes supposés responsables associés. Il est difficile, en effet, à quelques milliers d'années près, d'affirmer avec certitude qu'il y a corrélation. L'avenir pourra probablement trancher ce dilemme d'une importance fondamentale.

Les scientifiques croient que le champ magnétique terrestre résulte de ce qu'on appelle l'effet dynamo, qui serait dû principalement à une légère différence de vitesse de rotation entre le noyau métallique et le manteau basaltique enveloppant. La conductivité électrique différente engendrerait l'aimentation observée.

Dans les années 1960, les physiciens et géophysiciens ont commencé à étudier dans le détail le problème de la magnétisation fossile des roches (le paléomagnétisme) pour tenter de retracer l'histoire passée du champ magnétique de notre planète. Ils se sont rendu compte que les fonds océaniques avaient fossilisé de très nombreuses inversions magnétiques. En effet, les roches ont successivement une polarité normale (c'est-à-dire dont la direction de magnétisme rémanent est orientée comme le champ magnétique actuel) et une polarité inversée. Ce phénomène est valable pour l'ensemble de la planète.

Cette très importante découverte a permis aux spécialistes de préciser le calendrier magnétique de la Terre des 200 derniers MA. Ce calendrier est découpé en périodes directes et inverses d'une durée moyenne de 500 000 ans à 1 MA, et en événements, inversions de très courtes durées (moins de 50 000 et même de 10 000 ans parfois) d'importance secondaire à l'intérieur des périodes principales. Certains de ces événements récents de faible ampleur n'ont eu qu'une incidence locale ou régionale.

Plusieurs causes peuvent être retenues pour ces inversions géomagnétiques : certaines sont purement terrestres et d'autres sont astronomiques. La dernière inversion du champ magnétique de la Terre, dite inversion Brunhes/Matuyama, date de 700 000 ans. Depuis cette époque, nous sommes dans une période de polarité directe, appelée période de Brunhes, du nom du physicien français qui le premier, dès 1906, a découvert que le magnétisme fossile des roches présente des inversions de polarité. On sait également que cette date de 700 000 ans est celle du très gros impact d'EGA qui a créé l'astroblème fantôme de Wilkes Land et les australasites, les tectites qui lui sont associées.

En 1967, deux chercheurs américains, Bill Glass et Bruce Heezen (1924-1977) ont émis l'idée originale que la formation de ces tectites d'Australasie et l'inversion géomagnétique devaient avoir une cause commune, la coïncidence des dates étant trop troublante. Par extension, ils prédirent également qu'au moins une partie des nombreuses inversions constatées sont causées par des collisions (astéroïdes ou comètes).

Cette idée a été confirmée depuis, puisque les quatre grandes familles de tectites correspondent toutes à une inversion du champ magnétique terrestre. Les tectites de Côte-d'Ivoire (les ivoirites) sont associées avec le début de l'événement de Jaramillo qui date de 0,97 MA. Celles d'Europe centrale (les moldavites) et celles d'Amérique du Nord (les bédiasites) sont associées avec d'autres inversions datées respectivement de 15 MA et de 35 MA, âges qui correspondent à ceux des tectites. Il faut dire que pour les 35 derniers MA, on a mis en évidence 105 inversions (soit une moyenne de trois par million d'années), ce qui montre bien le caractère hautement instable du champ magnétique terrestre, et le fait que toutes ces inversions ne peuvent avoir une cause astronomique.

Il ne faut surtout pas mésestimer l'importance de ces inversions géomagnétiques, qui privent la Terre de son importante et efficace carapace naturelle qu'est la magnétosphère. Car tous les spécialistes savent bien que durant les périodes d'annulation du champ magnétique, qui se produisent à l'occasion des inversions, d'importantes averses de rayons X, gamma et cosmiques atteignent la surface terrestre et les êtres vivants qui y vivent.

 

1. J. Laskar, La Lune et l'origine de l'homme dans Le chaos (Pour la Science, HS 6, 1995), p. 52.

2. E. Bernard, Les bases énergétiques de la paléoclimatologie théorique et l’évolution des climats, Ciel et Terre, 91, 1975, p. 215.

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