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Les bases de la photographie argentique

L'exploitation des photographies (IV)

La synthèse des couleurs

Une photographie est le résultat du travail de la lumière et du savoir-faire du photographe sur un support sensible. Que la lumière change de couleur ou que le photographe se trompe de papier sensible, c'est tout le travail en amont qui peut être gâché. Il convient donc de bien connaître les propriétés de la lumière, les principes de la gestion des couleurs et les caractéristiques des différents papiers pour garantir un résultat conforme à ses espérances.

La couleur blanche que nous observons dans la nature résulte de la synthèse additive de trois couleurs (lumière) fondamentales ou primaires : rouge, vert et bleu.

Le phénomène inverse (les couleurs complémentaires des trois précédentes) ou synthèse soustractive des couleurs est la technique utilisée en imprimerie et en photographie lors de l'impression ou du tirage des photographies. Elle part de la lumière blanche ou colorée pour obtenir une synthèse noire, comme l'illustre les diagrammes présentés ci-dessous. C'est la densité des filtres utilisés (ou des encres) qui permet d'obtenir toute la gamme des colorations (teinte et saturation). En imprimerie, c'est le noir qui apporte le contraste à l'image (la luminance).

A lire : La gestion des couleurs sur ordinateur

La synthèse des couleurs

Additive

Soustractive

Notions de sensitométrie

Le traitement du matériel photographique (négatif, inversible ou papier) est soumis à l'influence de certains facteurs tels que la température, le temps, l'agitation et la composition du révélateur.

S'il est ainsi facile de contrôler avec suffisamment de précision la composition, la température et le temps de développement, il est par contre assez difficile de fixer les conditions d'agitation et de séchage. Ces deux paramètres bien innocents peuvent cependant entraîner des écarts notables dans les résultats si certaines précautions ne sont pas prises en cours de développement.. Pour expliquer cela nous devons définir quelques termes qui nous aideront à comprendre l'interaction entre ces facteurs.

Un sensitogramme est une échelle de gris (ou gamme de gris) la plus étendue possible entre le blanc et le noir pur qui, une fois photographié sur le support à analyser sera étudié au densitomètre, instrument qui enregistre les variations de densité ou de transparence. En posant les différentes valeurs trouvées dans un graphique (densité - lumination) cela nous permet de connaître l'échelle de gris reproductible compte tenu des facteurs précités.

La courbe caractéristique est la représentation graphique de l'émulsion traitée tenant compte des facteurs précités. Ce graphique prend en théorie l'aspect d'une droite inclinée à 45° vers la droite mais en pratique elle forme une courbe en S. L'épaule de cette courbe représente la zone de surexposition (tous les détails photographiés ne seront pas sur le négatif). Le point le plus haut de l'épaule est le "noir maximum utile". Le noir le plus pur s'obtient en utilisant l'épaule de la courbe. L'obtention du blanc le plus pur nécessite l'utilisation de la partie de sous-exposition, c'est-à-dire le pied de la courbe.

Sensitométrie

A gauche, la courbe caractéristique (la diagonale) d'une image couleur avec en surimpression (blanc) la courbe de brillance. A droite, un sensitogramme de 256 gris. Si votre écran est correctement réglé, vous devriez observer un dégradé continu

L'intervalle de pose correcte est la partie rectiligne de la courbe caractéristique étant donné que le rendu du pied et de l'épaule est incorrect. Seul cet intervalle assure un rendu correct des densités du négatifs. Toute différence existant sur le négatif sera reproduite sur le papier approprié offrant la même courbe caractéristique. C'est pour cette raison qu'un bon support positif (papier, diapositive) doit avoir un pied très court et une épaule aussi faible que possible.

Cet intervalle de luminosité est défini en logarithme et doit être égal à la différence entre les densités extrêmes du négatif.

A titre d'exemple, un papier de gradation utile de 1.6 signifie qu'il pourra enregistrer totalement un négatif dont la différence des densités extrêmes sera de 1.6. Ce papier aura donc un contraste de 40 (101.6).

Le gamma est la pente de la courbe caractéristique. A un contraste de 40 correspond un gamma de 1.6 (log 40). Nous voyons de suite que les matériaux offrant le plus de contraste présenteront de la même façon un gamma très élevé. 

Les films lithographiques peuvent approcher un gamma de 4. En astronomie, le film Kodak Technical Pan TP 2415 développé dans le Microdol-X peut atteindre un gamma de 2.9. La gamme de gris est fortement réduite vis-à-vis d'un T-Max par exemple.

Au plus un film est rapide, au moins son gamma sera élevé. Le T-Max 400 ou le Plus-X par exemple présentent un gamma de 0.7. Un film rapide enregistrera une échelle de gris très étendue mais à la limite rien ne pourra être reproduit si le gamma est trop faible (la courbe est fortement inclinée vers la droite). A l'opposé, un film très contrasté ne pourra enregistrer qu'une très petite gamme de gris. Mais celle-ci sera reproduite par des contrastes violents, blancs et noirs seront presque purs. Cette technique est utilisée pour étudier des zones dites brûlées des émulsions (fortement exposées et blanches) ce qui permet de délimiter dans un cliché de comète par exemple, les composantes de la tête, du noyau, le halo et d'autres structures qui ne paraissent pas sur un cliché classique. C'est le principe du film Agfacontour et plus généralement des techniques dites isophotes.

Le gamma infini. Si on soumet plusieurs sensitogrammes, exposés dans les mêmes conditions, à un développement identique mais de durée variable s'échelonnant de 2 minutes à 1 heure et plus, nous obtiendrons une série d'échelles d'opacité variable dont la position sur l'axe des luminations ira en augmentant vers la gauche proportionnellement au temps de développement. Cet accroissement n'est pas infini et nous constatons qu'après une certaine durée, aux environs d'une heure de développement, l'accroissement du temps de développement n'apportera plus une augmentation du contraste mais un déplacement parallèle de la courbe caractéristique vers la gauche, c'est-à-dire une augmentation de sensibilité, s'accompagnant en général par une lente augmentation du voile (le pied est plus haut). Cette dégradation limite s'appelle le gamma infini.

En pratique l'amateur ne travaille pas de la sorte mais choisit le mode de développement logique qui mènera à un gamma donné, par exemple en suivant le temps donné par le fabricant en fonction de l'utilisation habituelle du négatif, c'est-à-dire le tirage positif ou le développement inversible pour les diapositives.

La notion de contraste. Par contraste on entend le rapport de luminance, c'est-à-dire la différence entre les hautes et les basses lumières.

Mire de calibration d'un écran ou d'un film comprenant une gamme de gris pour évaluer le contraste et des plages colorées pour caractériser les dominantes éventuelles à corriger.

Certains appellent cela la dynamique d'une image, mais c'est un terme que les photographes n'utilisent pas et qui est emprunté à l'électronique (et qui a déteint sur l'infographie et malheureusement dans le langage courant).

Sur les bancs d'école de photographie, on apprend également que ce contraste se rapporte exclusivement au résultat du sujet photographié, c'est à dire au contraste restitué par un négatif ou un film transparent mais jamais à la manière dont il enregistre cette différence de luminosité; en bref il n'y a qu'un type de contraste, celui de l'épreuve, du résultat.

Si on cherche toutefois à comprendre les effets de la courbe caractéristique sur une émulsion ou un tirage papier, on constate que le rapport de luminance que peut enregistrer une pellicule est différent de celui qu'elle peut restituer car il dépend du gamma du support.

Ainsi un négatif noir et blanc classique peut encaisser un grand écart de luminance à l'exposition mais présente un écart de densité relativement faible : le support est loin d'être très transparent, la densité minimale est assez élevée et la densité maximale est plutôt faible (et souvent rarement exploitée pour les hautes lumières). Le gamma sera faible. Un film négatif, noir et blanc ou couleur, présentera donc toujours un contraste inférieur à celui d'un transparent (c'est le contraste restitué ou la dynamique de l'épreuve).

Les négatifs noir et blanc et couleur ont un gamma voisin de 0.6 soit une courbe caractéristique plutôt "plate" :  un grand écart d'exposition donne un plus faible écart de densité, donc il restitue un faible contraste.

Comme le négatif n'est qu'une étape intermédiaire avant le tirage sur papier, les fabricants ont opté pour un contraste plus faible qui permet d'enregistrer un écart d'exposition plus important, que ce soit dû au contraste naturel de la scène ou aux erreurs du photographe lors de la mesure de l'exposition.

A l'inverse, une diapositive présente un support mince et très clair, donc une densité minimale très faible et une densité maximale très élevée (ce qui permet de l'exploiter dans les noirs). L'écart de densité ou de luminance qu'elle restitue est donc plus étendu, son contraste est plus élevé.

Une diapositive présente un gamma entre 1.5 et 2.0. Le même écart d'exposition donnera une variation de densité plus importante. Cela vient du fait que la vocation première d'une diapositive est d'être projetée; pour que la projection soit visuellement correcte, le contraste doit être plus élevé. Le corollaire est que la mesure d'exposition est bien plus délicate avec une diapositive.

Aussi, quand on dit qu'un film négatif couleur présente une dynamique d'environ 200:1 (gamma de 2.3), à moins de commettre une erreur d'approximation, il faut préciser qu'il s'agit d'un contraste à l'exposition. Ce contraste enregistré est de 30 à 100:1 (gamma < 2) pour une diapositive couleur et tombe à environ 4:1 (gamma de 0.6) pour un négatif noir et blanc. Dans le cas des contacts pour arts graphiques, le contraste peut atteindre 316:1, un gamma de 2.5 (développés 3 minutes dans du Dektol).

Toutefois, pour être logique avec ce que nous avons décrit plus haut, le contraste restitué par une diapositive est toujours plus élevé que celui d'un négatif ou même d'un tirage sur papier. Tous ces termes de contraste, gamma et luminance ne sont pas absolument des synonymes mais sont liés et il faut être précis dans leur description au risque de semer la confusion dans l'esprit du lecteur.

Le papier

Le choix d'un papier sensible sera guidé par sa "gradation utile" en fonction du contraste du négatif à imprimer. Il est donc indispensable de connaître ces deux valeurs, que vous apprendrez à apprécier au fil de l'expérience.

A titre indicatif, la gradation utile du papier ultra-dur se situe aux environs de 0.45 et le papier ultra-doux à 2, les papiers normaux ayant une gradation utile comprise entre 1 et 1.2.

Le contraste du papier

De gauche à droite, simulation numérique d'un papier de gradation 0.5, 2.2 et 10.0.

Quant aux dénominations commerciales dur, normal, extra-douce, elles sont purement empiriques et n'ont pas de significations relatives entre elles. De plus ces dénominations ne sont pas standardisées, l'expression "normale" d'une marque peut correspondre à la gradation "douce" d'une firme concurrente.

Si le papier utilisé est trop doux, les tirages ne montreront qu'un cliché pâle, sans véritables densités opaques et certainement sans densité noir pure. Le négatif a été imprimé en utilisant le pied de la courbe caractéristique du papier.

A l'inverse, un papier trop dur n'accusera que les hautes lumières et le noir du ciel, la région du terminateur par exemple, ou les étoiles les plus brillantes du négatif. Même la technique du masque ne pourra mettre en évidence les régions blanches en augmentant l'exposition dans ces zones. Le négatif a cette fois été imprimé sur l'épaule de la courbe caractéristique du papier.

Il faudra donc trouver cet intervalle correct qui vous permettra de reproduire tous les détails de votre négatif.

Si le cliché a été pris dans de bonnes conditions, un papier dit "normal" devrait convenir, offrant une gamme de gris assez vaste. Sa gradation sera égale au contraste du négatif. Toutefois, l'échelle reproductible d'un négatif sera toujours supérieure à celle d'un papier.

Pour obtenir des zones noires et blanches pures, le contraste du négatif doit être légèrement supérieur à celui du papier. De la sorte les gris extrêmes seront inscrits sur le pied et l'épaule de la courbe caractéristique, dans l'intervalle de sous et sur-exposition, offrant peu ou pas du tout de détails. Certaines zones seront blanches et noires pures, d'où la dénomination par certains amateurs de papier "noir cosmos", spécialement chez Agfa.

Précisons aussi que, outre le contraste du papier, le temps d'exposition influence le résultat. Si le temps de pose n'est pas suffisamment long, le cliché sera gris, pâle. Un temps de pose trop long sur un papier ad-hoc donnera toujours une image sombre.

Trucs de laboratoire

Si la densité d'un négatif N/B ne vous paraît pas suffisante, si celui-ci semble trop doux, développez les prochains films dans le D-19 puis tirez-les sur du papier de haute gradation ou mieux, réaliser un contact de ce négatif sur un film à haut contraste tel le Kodak 5069 ou le Recordak (panchromatiques) ou même sur du Kodalith (orthochromatique) puis effectuer une seconde copie de ce film devenu positif.

L'utilisation du papier KPP-5 après le premier contact vous donnera avec la projection d'une image négative un cliché négatif sur papier, un positif avec la projection d'une image positive. Ce papier présente l'avantage d'avoir un contraste élevé et peut-être manipulé sous une lumière ambre. Ce papier sera développé de préférence dans le révélateur Dektol de Kodak dilué 1:1 durant 1 à 2 minutes à 20°C.

Ce traitement permet par exemple de réaliser des atlas célestes en négatif afin de faire ressortir les faibles détails.

Pour augmenter le contraste d'un cliché couleur, on peut également le copier sur film inversible en ayant soin d'utiliser des filtres compensateurs de couleur (filtres CC de Kodak) pour éviter de perdre les faibles tonalités, surtout dans les bleus et les rouges.

Toujours en inversible, la désagréable teinte verte dominante dans les régions non exposées du fond du ciel peut être neutralisée en interposant un filtre de la couleur complémentaire au vert, le magenta plus ou moins dense, au niveau de la boîte de diffusion de votre agrandisseur ou dans un sandwich avec votre diapositive pour la projection. Un filtre CC20M pourra équilibrer l'ensemble et produire une coloration du fond du ciel proche du violet foncé, teinte que l'on obtient normalement avec les films Ektachrome 200 non hypersensibilisés. Comme ce filtre supplémentaire entraîne une légère perte de luminosité, il faudra ouvrir le diaphragme d'un tiers de division.

En négatif couleur, toute ces corrections s'effectuent directement avec la tête de couleur de l'agrandisseur laquelle peut modifier la densité de l'image par unité (CC01M, etc). Cette correction est parfois nécessaire lorsqu'on utilise du Kodacolor pour de longues poses nocturnes car ce film tire lentement sur le rouge ou le magenta. 

Il va sans dire que tout ce travail exige un certain entraînement à acquérir. Mais pour les perfectionnistes tout est possible en chambre noire. Un amateur qui dispose du matériel et de temps s'en sortira facilement en moins d'une année d'expérience.

PS. Avec l'avènement de l'informatique, la chambre noire traditionnelle a subit une étrange mutation, l'appareil photo devenant APN et l'agrandisseur ainsi que la chambre noire proprement dite devenant respectivement ordinateur et logiciel de traitement d'image tel que Photoshop pour n'en citer qu'un. Mais ceci est un autre histoire. Nous en reparlerons dans d'autres articles.

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Le guide photo : Numérique et argentique, Bob Martin et al., National Geographic, 2007/2010/2013

Noir & Blanc: De la prise de vue au tirage, P.Bachelier, Eyrolles, 1996/2005/2013

De la chambre noire au numérique, E.Ephraum, Compagnie du livre, 2005

Je développe mes photos, A.Desilets, Les éditions de l'Homme, 1973

Les collections Atlas, Alpha, Time-Life sur la photographie.

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