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La Bible face à la critique historique

"Le Jugement Dernier" peint par Pierre Paul Rubens en 1616. Huile sur toile  de 606x460 cm exposée à l'Ancienne Pinacothèque de Munich.

La vie éternelle ou l'Enfer (I)

Le mensonge de l'Église

Depuis près de deux mille ans, l'Église n'a de cesse de répéter que seuls les chrétiens pratiquants auront une chance d'être "sauvés" et d'accéder au royaume de Dieu annoncé par le Christ. Cela signifie surtout que les centaines de milliards de personnes qui vécurent avant et après l'époque de Jésus ont eu la malchance de naître dans une culture où l'on ne prêchait pas la Bonne Nouvelle annoncée dans le Nouveau Testament. Même les plus dévots d'entre les juifs, les musulmans, les bouddhistes ou les indous parmi d'autres confessions n'ont aucune chance d'accéder à la vie éternelle et de connaître le Paradis; ils sont perdus à jamais sans rémission possible de leur "péché" qui fut de ne pas croire dans la parole de Jésus. Même ceux qui n'ont jamais mordu dans la pomme et qui sont agnostiques, laïques, athées ou animistes subiront le même funeste sort diabolique : ils mourront dans les affres et le feu éternel de l'Enfer !

La décision est unilatérale et sans appel. Il n'y a pas de débat possible. Seule exception à la volonté divine, par l'intermédiaire de Jésus, à son époque les croyants et autres Gentils pouvaient "venir au Père" et bénéfier de la vie éternelle. Mais ce n'est plus possible. Si nous relisons les Actes des Apôtres, on ne peut trouver le salut qu'à travers Jésus-Christ et personne d'autre (Actes 4:1) car lui seul est capable de combler l'écart entre Dieu et les hommes.

Paul, Pierre et quelques autres rédacteurs du Nouveau Testament (mais pas tous) ont prétendu que "croire au Fils" était la seule manière d'accéder à la vie éternelle. Ainsi Jean écrivit : "il faut de même que le Fils de l'homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle" (Jean 3:14-15) et c'est toujours la position officielle de la grande majorité des Églises chrétiennes depuis près de vingt siècles.

Même au nom de Dieu ou de la Justice, en invoquant la pitié, la compassion, le mérite ou l'équité, les centaines de milliards de personnes non chrétiennes pratiquantes ayant vécu et qui vivront dans les siècles à venir n'ont pas la moindre "chance" de connaître le Christ, elles ne bénéficieront jamais de la bonté divine et n'accéderont jamais à la vie éternelle, que les choses soient claires !

La plupart sinon tous les enseignants chrétiens y compris protestants enseignent dans les écoles, séminaires et autres universités que Jésus est le seul moyen d'accéder à Dieu. Autrement dit, le christianisme est une religion exclusive dont les hauts représentants et bien évidemment les adeptes sont convaincus que seule leur religion est vraie et que tous ceux qui s'y opposent se trompent et sont dans l'erreur. Face à une telle intolérance, ce n'est pas pour rien qu'ils ont déclenché des guerres de religion.

En fait, tout au long de son histoire l'Église a resserré les rangs et exclut de plus en plus de communautés y compris chrétiennes au point que les Anglo-saxons ont des doutes quant au salut d'Églises réformées sinon "dissidentes" comme les Baptistes ou les Méthodistes. C'est une curieuse vision oecuménique très éloignée du message de Jésus.

A voir : L'Inferno di Dante illustrato da Sandro Botticelli

Illustration de la damnation dans la littérature chrétienne. A gauche, Lucifer dans la "Divine comédie" de Dante dessiné par Francesco Scaramuzza vers 1836 (planche XXXIV). Au centre, une carte illustrant les différents niveaux de l'Enfer extraite d'un manuscrit de la première partie du même poème de Dante intitulée "L'Enfer" (Inferno) enluminé vers 1420-1430. La miniature serait attribuée à Bartolomeo Di Fruosino qui s'est inspiré de la fresque de la chapelle de Strozzi située dans l'église Santa Maria Novella à Florence. A droite, un détail du "Jugement Dernier" peint par Giovanni Canavesio en 1492 sur les murs de la chapelle Notre Dame de la Fontaine située près de La Brigue dans le sud de la France.

Les enseignants chrétiens vont jusqu'à s'appuyer sur l'argument falacieux que la Bible étant le livre le plus vendu du monde, Jésus a plus de partisans dans le monde que n'importe quel autre personnage religieux. De plus les idées de Jésus ont été admirées par des personnes illustres, y compris non-chrétiennes, depuis de nombreuses années. Enfin, c'est le seul chef religieux mort et ressuscité, un miracle qui le rend supérieur à d'autres grands chefs religieux. Bref, si on croit en Jésus, alors il représente le seul moyen d'accéder au royaume de Dieu car tel est l'enseignement transmis par les apôtres et tous les serviteurs de Dieu.

Bien que l'Église romaine ait décrété ne jamais se tromper, que dire alors du pluralisme des religions où chacune prétend détenir la Vérité ? Pour les chrétiens ce pluralisme n'existe tout simplement pas et serait même démenti par la logique - disons plutôt leurs idées dogmatiques - ne laissant la place qu'à une confession de foi exclusive : selon les chrétiens, Jésus s'est sacrifié et est mort afin que celui qui croit en lui soit sauvé.

Quant à la morale, un chrétien ne peut évidemment pas admettre que sa religion est exclusive et injuste voire sectaire (il est toujours difficile d'avouer que l'on s'est trompé). Ils rejettent donc l'accusation en disant que la Révélation se dévoile par nature et en conscience, chacun sachant intimement que sa vérité est moralement juste. Si cela n'est pas un point de vue subjectif et ad hoc, que Zeus en personne me foudroie !

Mais est-ce bien ainsi qu'il faut comprendre le Nouveau Testament et les paroles de Jésus ? Honnêtement, vu le côté partisan des arguments évoqués par les chrétiens, on peut en douter. En effet, plusieurs textes bibliques viennent contredire la vision chrétienne.

Nous allons donc décrire ces deux concepts clés au coeur du christianisme, l'Enfer et la vie éternelle et analyser de quelle manière l'Église se les a appropriés et ce qu'il faut réellement en penser.

De la Géhenne à l'Enfer

Que dit exactement Jésus à propos de la grâce de Dieu et de l'Enfer ? Jésus protège tous ceux qui défendent ses idées même s'ils n'appartiennent pas à sa communauté : "Qui n'est pas contre nous est pour nous." (Marc 9:40). Jésus évoque aussi les sacrifices païens comme les immolations interdites par la Loi depuis l'époque dynastique : "Si ton oeil est pour toi une occasion de chute, arrache-le; mieux vaut pour toi entrer dans le royaume de Dieu n'ayant qu'un oeil, que d'avoir deux yeux et d'être jeté dans la géhenne, où leur ver ne meurt point, et où le feu ne s'éteint point." (Marc 9:47-48).

Jésus fait également allusion à l'Enfer à propos du Jugement Dernier : "Ensuite il dira à ceux qui seront à sa gauche : Retirez-vous de moi, maudits; allez dans le feu éternel qui a été préparé pour le diable et pour ses anges. [les maudits] iront au châtiment éternel, mais les justes à la vie éternelle." (Matthieu 25: 41,46).

A priori, les paroles de Jésus semblent valider l'existence de l'Enfer. Mais connaissant la personnalité de Jésus, nous savons qu'il n'avait jamais eu l’intention de contredire les textes sacrés et en particulier la Parole de Dieu, qui affirme clairement : "Les vivants, en effet, savent qu'ils mourront; mais les morts ne savent rien". (Ecclésiaste 9:5).

A voir : Carte de vallée de Hinnom (la Géhenne), Google Maps

La vallée de Gaï ben Hinnom (des fils de Hinnom ou la Géhenne en français) qui s'étend au sud et au sud-ouest de la vieille ville de Jérusalem et qui est aujourd'hui devenue le parc de Zurich. Documents  Qu4ttroPhoto et Rob Mat Canterbury.

Comme nous l'avons expliqué à propos des origine et du sens du terme "Enfer", Jésus appelle ce lieu la "Géhenne" qui vient du nom hébraïque "Gaï ben Hinnom" signifiant la "vallée des fils de Hinnom" que l'on voit ci-dessus mais qu'on appelait généralement "Gaï Hinnom". Cette forme raccourcie fut translitéralisée en grec par le mot "ge henna" (ou géenna) qui donna en français la "Géhenne".

La vallée de Hinnom s'étend juste au sud du mont Sion, au sud et au sud-ouest de la vieille ville de Jérusalem et correspond aujourd'hui au Wadi Rababi qui est devenu un bel espace vert appelé le parc de Zurich. A l'époque dynastique, cette vallée délimitait la limite entre les territoires des fils de Juda et de Benjamin (cf. Josué 15:8).

Depuis l'époque du roi Salomon, cette vallée servit successivement de lieu de sacrifice païen y compris d'infanticide, de dépotoir, de décharge pour les cadavres des criminels et de lieu de réclusion pour les lépreux notamment. Un feu y était constamment entretenu pour détruire les ordures et éviter la prolifération des germes. Au fil du temps, les juifs ont associé la vallée de Hinnom avec le lieu de passage et de purification des âmes. Ce sont ensuite les penseurs grecs puis les chrétiens qui en firent le symbole de l'Enfer.

Quand Jésus évoque la Géhenne, il fait donc allusion au traitement des cadavres qui ne méritaient pas d'être enterrés et donc au symbole de la mort sans espoir de résurrection. De plus, quand il dit que Dieu "peut faire périr l'âme et le corps dans la Géhenne" (Matthieu 10:28), la Géhenne symbolise bien la mort éternelle et non les souffrances d'une torture éternelle comme le sous-entendra plus tard l'Église.

A ce propos, en 1995 les protestants se sont encore démarqués un peu plus des catholiques lorsque la Commission de la doctrine de l'Église d'Angleterre (DCCE) déclara que "L'enfer, ce n'est pas les tourments éternels, mais le choix ultime et irrévocable de ce qui s'oppose si entièrement et si absolument à Dieu que la seule issue en est la non-existence totale." (cf. "Mystery of Salvation", DCCE, 1995). Ceci dit, il fallut tout de même près de 2000 ans pour en arriver là.

Quant au "feu éternel" dont parle Jésus, c'est un symbole comme la référence aux "brebis" et aux "chèvres" qu'il évoque quelques versets plus haut (Matthieu 25:32-33), symbolisant respectivement les justes et les "égarés" définitivement perdus. Ces derniers qui représentent les personnes non repenties brûlent complètement mais au sens figuré. Autrement dit, elles subissent un "châtiment éternel" (Matthieu 25:46) dans le sens où elles sont à jamais retranchées de la vie.

On comprendra qu'une lecture au premier degré et une interprétation un peu trop rapide voire dictée par des intentions moins louables permit à l'Église de faire croire aux chrétiens que Jésus évoquait réellement l'Enfer où les âmes impures souffraient éternellement pour leur(s) péchés(s).

D'un autre côté, Jésus n'a jamais prétendu que l'homme avait une âme immortelle. En revanche, il enseigna que les morts peuvent ressusciter (Luc 14:13-14 ou Jean 5-25-29). On peut alors en déduire que Jésus ne croit pas que les âmes sont mortelles. Jésus croit donc en l'existence d'une vie éternelle, certe pas une vie terrestre puisque le corps du défunt s'est décomposé mais bien d'une vie dans le royaume de Dieu. Et nous allons voir que cette possibilité, Jésus l'offre à tous. Reste qu'il ne s'est jamais expliqué sur la manière concrète dont cela se réaliserait le jour du Jugement Dernier, ce qui encore aujourd'hui reste un mystère pour tous les chrétiens qui en sont réduits à croire Jésus sur parole, une bien maigre consolation pour les agnostiques.

Venons-en à présent au deuxième concept, celui de la vie éternelle qui a pour ainsi dire eut la vie dure.

Deuxième partie

La justice de Dieu et la vie éternelle

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