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Définition des reliefs lunaires

écrit en collaboration avec la Dr Winifred S.Cameron, NASA-GSFC

Les autres morphologies de cratères (III)

A côté des cratères de plus ou moins grandes dimensions, il existe toute une série d'autres espèces de cratères, classés en fonction de leur morphologie.

Les cratères envahis de lave

Tels Endymion, Humboldt, Petavius, Platon, Archimède, Mersenius, Wargentin dont le plancher a été envahi de lave il y a plus de 3.2 milliards d'années suite à un impact.

Le cratère Endymon (Ø 125 km) envahi de lave sous deux éclairages et librations différents. Documents Pepe Cuéllar via Astronomy et Pete Lawrence.

Les cratères à fond clair

Egalement appelés "cratère-plaine" ils sont représentés par Ptolémée, Alponse et Flammarion (3°, 9°), Hipparchus et Albategnius (357°), Fra Mauro, Guericke, Parry et Bonpland (24°), Maginus (183°), Clavius (24°), Schiller (48°) et Schickard. Ce dernier est particulièrement intéressant car il est pour moitié comblé de lave, l'autre moitié étant couverte de matériau issu des plaines.

Lorsqu'ils sont fortement éclairés le plancher (la plaine) de ces cratères clairs est difficile à distinguer de leurs remparts. Certains géologues lunaires pensent que certaines de ces plaines claires auraient une origine volcanique mais d'autres considèrent qu'il s'agit de dépôts d'éjecta. Ce matériau, quelle que soit son origine remonte à l'époque de la formation de Mare Imbrium, entre 3.2 et 3.8 milliards d'années d'ici.

Certains de ces cratères à fond clair sont particulièrement nombreux dans la région nord de Mare Frigoris où l'on trouve successivement Anaximène, Barrow, Meton (148°), Kane, Arnold, Neison, Baillaud et Byrd (357°), dont le fond est particulièrement lisse, soutenant l'interprétation qu'ils été recouverts par les éjecta de Mare Imbrium, voire même de Mare Orientalis. D'autres cratères, tels South, J.Herschel, Birmingham et W.Bond (174°) ont une forme de mammelon et sont associés à la formation de Fra Mauro, un épais dépôt de matériau éjecté du bassin de Mare Imbrium. Certains ont une forme allongée ou hexagonale suggérant l'existence de mouvements tectoniques depuis leur formation. Le complexe de Meton est particulièrement intéressant car sa ligne d'horizon crêtelée résulte de la fusion d'au moins 5 cratères individuels. Etant donné qu'aucune théorie ne peut clairement expliquer comment des éjecta auraient pu effacer les remparts d'un groupe de cratères, il est possible qu'une activité volcanique ait été combinée aux mouvements tectoniques lors des impacts primaire et secondaire qui ont formé ce paysage.

Gassendi (Ø 110.4 km). Document Starfield Obs.

Les cratères au sol fracturé

Certains cratères présentent un plancher fracturé suite à des mouvements tectoniques, au volcanisme ou aux deux phénomènes. On les trouve principalement au large des mers (par exemple sur le limbe à l'ouest de Mare Procellarum) auprès de cratères, tels que Vitello, Repsold et Galvani. Leur plancher contient souvent des crêtes, des fractures ou des escarpements qui sont à peu près concentriques par rapport aux remparts du cratère. Quelquefois le fond est constitué d'un complexe réseau de failles. Certains géologues lunaires pensent qu'il s'agirait d'extrusions volcaniques concentriques. D'autres y voient les traces de dômes et d'une expansion de l'écorce lunaire provoquées par l'intrusion de matière igneuse sous le cratère d'impact. On trouve de très beaux exemples de telles formations dans le cratère Humboldt (99°), Gassendi (48°) et Posidonius (343°).

Les cratères-trous

Il s'agit de simples perforations dans l'écorce lunaire ne présentant ni rebord extérieur ni éjecta.

Ces impacts auraient une origine endogène (formé par collision impliquant des processus ou des corps originaires de la Lune). Etant donné que tout impact donne naissance à un cratère dont les parois sont surélevées par rapport au niveau moyen, ces dépressions erairent formées suite à l'effondrement de la surface. On les trouve assez souvent le long ou aux extrémités des vallées, dont l'origine est également liée à un effondrement. Un exemple est la "Tête de Cobra" située à l'extrémité sud-est de la vallée de Schröter (55°, 225°) . Le cratère-trou le plus connu est Hyginus, situé juste au-dessus de faille de Rima Hyginus. Il mesure 9.7 km de diamètre et 780 m de profondeur, mais il ne présente aucune parois visible au-dessus de la surface. Hyginus semble se trouver au sommet d'un léger monticule, et la plupart des cratères-trous se trouvent justement au sommet de dômes.

Les cratères de sommet

Il s'agit vraisemblablement de quelques rares caldera volcaniques, tels Wolf (191°) dans Mare Nubium, Daniell (343°) dans Mare Serenitatis, Kopff (93°, limbe Ouest) près de Mare Orientalis ainsi que le minuscule Ina de 3 km de diamètre situé dans Lacus Felicitatis, en forme de D.

Les cratères secondaires

 Ces types de cratères sont issus de la matière éjectée de l'excavation lors des grands impacts et qui parcourt plusieurs kilomètres avant de percuter la surface lunaire à des vitesses de plusieurs centaines de mètres par seconde. Leur forme est souvent allongée, ils sont superficiels et présentent des parois peu élevées. Les débris étant souvent éjectés en masse, les cratères secondaires sont souvent juxtaposés, formant des amas, des chaînes rectilignes ou incurvées ou forment des V caractéristiques dits "en arrête de hareng". La chaîne de cratères secondaires de Copernic (18°, 191°), située dans la zone de Stadius représente le mieux ce phénomène.

Les cratères doubles

Ils ont probablement été formés suite à l'impact simultané de deux corps associés, tel Messier-Messier A (119°) ou Sabine et Ritter (343°). Le premier couple présente un système de rayons asymétriques du fait que le premier impact a empêché les débris du second de se disperser dans toutes les directions.

Les cratères ovales ou allongés

Ils ont probalement été formés suite à un impact sous une faible incidence (en oblique) tels Schiller (40°) ou, à une plus grande échelle, comme Mare Crisium.

Quelques cratères remarquables

Cratère

Diam. km

Profond. (m)

Colong. (°)

Cratère

Diam. km

Profond. (m)

Colong. (°)

Bailly

Clavius

Maginus

Ptolémée

Langrenus

Boussigault

Pythagore

Alphonse

Moretus

Demonax

Gassendi

Blancanus

Théophile

283.8

225.3

162.6

153.2

132.0

131.1

128.1

118.5

114.4

113.8

110.4

105.3

100.0

4130

4900

5050

2400

4500

5640

5250

2730

5240

5000

1420

5970

4100

65, 233

9, 174

3, 161

3, 174

303, 99

315, 99

67, 213

3, 174

3, 161

323, 99

36, 205

24, 183

334, 135

Scott

Catharina

Amundsen

Copernic

Pontécoulant

Tycho

Archimède

Fabricius

Newton

Berosus

Jansky

Bullialdus

Aristarche

97.8

97.5

95.2

93.0

91.0

84.7

82.6

78.1

75.2

74.2

71.8

58.9

45.3

5570

3130

5870

3800

5600

4600

1600

5020

5540

4500

6180

3510

3150

323, 99

343, 148

323, 99

18, 191

303, 99

9, 179

3, 174

323, 131

24, 167

291, 99

90

24, 191

48, 213

Nous devons nous arrêter ici car certains cratères mériteraient tout un chapitre à eux seuls tant leur étude est intéressante. Cela dit Ptolémée, Tycho, Clavius, Copernic, Platon, Théophile, Aristarche sont parmi les cratères les plus observées par les amateurs.

Les bassins

Quelques cratères sont encore plus étendus que Bailly (55°, 213°) dont le diamètre, supérieur à quelque 300 km, commence à présenter des motifs concentriques autour du rempart principal; il s'agit de bassins à anneaux multiples dont la dimension varie entre le "minuscule" Bailly et le gigantesque bassin d'Aitkin situé juste au Pôle Sud mesurant 2500 km de diamètre ! Ils sont tellement larges que pour être observés dans leur entiereté en lumière rasante il faut les observer plusieurs nuits de suite.

Formés par l'impact d'astéroïdes voici 3.2 à 4.5 milliards d'années, ces bassins sont en fait d'immenses cratères comblés qui ont donné naissance au visage familier de la Lune : Mare Humboldtianum, Mare Imbrium, Mare Serenitatis, Mare Crisium, Mare Tranquillitatis, Mare Fecunditatis, Mare Smythii, Mare Nectaris, Mare Orientalis, Mare Humorum, Mare Nubium, Mare Australe, complétées par quelques bassins tels que Grimaldi, Mendel-Rydberg, Schiller-Zucchias, Bailly, Aitkin.

Leurs éjecta s'étendent bien au-delà des limites de leur bassin, parfois jusqu'à plusieurs milliers de kilomètres, recouvrant ou engloutissant localement des formations plus anciennes. A côté de leurs dimensions impressionnantes, ces bassins se caractérisent par des anneaux concentriques dont l'origine demeure controversée. 

Trois théories ont été proposées pour expliquer la formation de ces anneaux : 

- suite à l'impact, l'effondrement de petits cratères périphériques aurait formé des "mégaterrasses"

- l'énergie de l'impact aurait fluidifié l'écorce lunaire et permit la formation d'ondes

- les anneaux seraient les traces d'excavations de basalte qui se seraient déplacées selon leur résistance structurelle.

A gauche, le bassin de Mare Nectaris et le cratère Théophile reconnaissable à son double pic central. Au centre, le bassin de Schrödinger de ~320 km de diamètre photographié par la sonde spatiale LRO. Voici le cratère en perspective photographié par LRO et la même image en haute définition (.JPG de 2.8 MB). Notons que Schrödinger présente une morphologie similaire au cratère d'impact terrestre de Chicxulub. A droite, le bassin de Mare Orientalis de ~930 km de diamètre photographié par LRO. Document NASA/LRO/NASA/GSFC Scientific Visualisation Studio.

Si nous prenons l'exemple du bassin de Mare Humorum (43°, 210°), on observe au centre une large zone d'impact circulaire de 440 km de diamètre comblée de lave délimitée sur son pourtour par de nombreuses crêtes s'étirant irrégulièrement à travers la partie est et de grandes failles qui courent tout le long de la région ouest et nord-ouest. Le premier anneau s'étend sur environ 200 km et est délimité par les escarpements de Rupes Kelvin au sud-est, Rupes Liebig à l'ouest et par les cratères Vitello au sud et Gassendi au nord. Le deuxième anneau s'étend également sur environ 200 km. Il est délimité par des crêtes plutôt que par des zones montagneuses et plusieurs zones de failles telles que Rimae Herigonius, Agatharchides, Hippalus, Doppelmayer et Mersenius. Un troisième anneau s'étendrait au nord jusqu'en bordure sud du cratère Lettrone et côté sud jusqu'au-delà de Lacus Excellentiae. Sa trace est toutefois partiellement effacée suite aux éjecta probablement rejetés par Mare Imbrium et Mare Orientalis ainsi que les flots de lave issus d'Oceanus Procellarum et de Mare Nubium déversés à l'époque de la formation de Mare Imbrium (~3.8 millions d'années) et d'Eratosthène (1.1-3.1 millions d'années).

Une autre catégorie de bassins d'impact reprend Mare Orientalis ou Mare Imbrium. Ces bassins ont rejeté des éjecta sur leur périphérie donnant parfois naissance à des vallées radiales que l'on observe également dans les bassins de Mare Crisium et Mare Nectaris.

Mais ce sont les bassins de Mare Imbrium et de Mare Crisium qui ont le plus été envahi par la lave au point que dans Mare Imbrium (179-201°) seuls émergent encore de la lave quelques montagnes et pics isolés (Piton, Pico, Montes Teneriffe, Montes Spitzbergen, Mons La Hire, etc) qui semblent tracer les limites intérieures du cratère d'impact.

Une dernière catégorie de bassins d'impacts rassemble les impacts ayant eu lieu dans les zones montagneuses. Leur présence n'est pas identifiée par des flots de lave mais plutôt par l'existence de reliefs souvent assez sombres et contrastant avec les zones à forte densité de cratères. Les bassins de Bailly, Schiller-Zucchias, Mendel-Rydberg et Aitkin tombent dans cette catégorie. D'autres zones sombres pourraient également être incorporées dans cette catégorie : les bassins de Mare Procellarum (15°O, 26°N, 3200 km), Mutus-Vlacq (21°E, 51°S, 690 km), Marginis (84°E, 20°N, 580 km), Flamsteed-Billy (45°O, 7°S, 570 km), Balmer (70°E, 15°S, 500 km), Werner-Airy (12°E, 24°S, 500 km), Amundsen-Ganswindt (120°E, 81°S, 335 km), Lorentz (97°O, 34°N, 365 km), Sikorsky-Rittenhouse (111°E, 68°S, 310 km) et Pingré-Hausen (82°O, 56°S, 300 km)..

Les cratelets

Souvent associés aux dômes, ils mesurent moins de quelques dizaines de kilomètres seulement. Ils ont une parois extérieure et sont quelquefois alignés pour former des fractures (Hyginus, 354°). Ils sont quelquefois très profond, celui de Newton (18°) s'enfonçant à 7250 m dont 5540 m sous le niveau moyen. Comme les grands cratères, ils sont très brillants en plein Soleil pouvant former des systèmes de rayons brillants (axes de Tycho, 30°).

A gauche, Copernic et sa chaîne de cratelets. A droite, Clavius. Documents T.Legault.

Exceptionnellement certains cratères tels Beer et Feuillé situés tout près de Timocharis dans Mare Imbrium deviennent très brillants à midi locale et s'entourent d'une sorte de nébulosité ou d'un anneau blanc brillant. Ce phénomène est vraisemblablement lié à un effet d'optique suite à la réflexion de la lumière solaire sur leurs remparts. Il ne s'agit en aucun cas d'un phénomène lunaire transitoire (LTP).

Les cratelets groupés et autres catenae sont d'origine météoritique tandis que les cratelets isolés sont peut-être des dômes explosés.

D'autres cratelets intéressants : Deslandres (5°), Pitatus (13°), près du Mur droit (8°), Lexell (5°), Stadius (13°), Copernic (20°), Clavius (30°), dans les Apennins (5°), les Alpes (0°) et les monts Caucases (161°).

Prochain chapitre

Les vallées

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