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Les rayons cosmiques Effets des rayons cosmiques sur la biosphère (II) Etant donné leur énergie, les rayons cosmiques peuvent-ils affecter la vie sur Terre et de quelles manières ? Au cours de leur brève existence, non seulement les rayons cosmiques peuvent parcourir plusieurs dizaines de kilomètres dans l'atmosphère mais ils peuvent également briser tout ce qu'ils touchent au sens propre. La plupart des rayons cosmiques sont bloqués par l'atmosphère à l'exception des muons qui atteignent le sol. Un muon de 1 GeV parcourt 6.9 km dans l'air (en tenant compte de l'effet de la relativité) et cette distance croît proportionnellement à son énergie pour atteindre 63 km pour un muon de 10 GeV. Malgré la densité de l'eau, les muons d'au moins 10 GeV peuvent pénétrer jusqu'à une dizaine de mètres sous la mer (la colonne d'air correspondant à ~10 m d'eau) où ils conservent tout leur pouvoir destructeur. On estime que les rayons cosmiques représentent en moyenne 15% de la radioactivité naturelle soit une dose de ~0.38 mSv en Europe (contre ~0.25 mSv/an pour la radioactivité naturelle du corps humain). C'est donc très inférieur aux doses reçues lors d'un examen médical (dose efficace de 0.10 à 6 mSv et même 8.8 mSv pour une tomographie par scanner). Les rayons cosmiques sont moins "durs" et pénétrants que les rayons gamma mais tout aussi destructeurs. Parfois lourds, souvent rapides et transportant beaucoup d'énergie, à forte dose ou exposition, en raison des réactions chimiques qu'ils provoquent dans l'atmosphère et des dommages qu'ils occasionnent dans la structure du génome, les rayons cosmiques sont capables de modifier durablement la chimie de l'atmosphère avec des impacts directs sur le climat, de provoquer des mutations génétiques et de rendre stérile. Si la dose absorbée par l'organisme est importante et continue pendant plusieurs années, ils sont donc capables de détruire toute vie sur leur passage en quelques générations. Décrivons à présent la principale source de rayons cosmiques que nous pourrions redouter, l'explosion d'une supernova à proximité du Soleil. Les effets d'une supernova Une supernova est une étoile massive parvenue au stade ultime de son évolution et qui explose en libérant toute sa matière dans l'espace. Son coeur mis à nu peut soit se transformer en étoile compacte (étoile naine, étoile à neutrons ou pulsar) soit en trou noir. Parfois l'explosion est tellement violente que le coeur métallique est totalement pulvérisé et toute la région sur quelques années-lumière est vidée de toute matière, les rares planètes ou le compagnon stellaire proche étant éjecté de son orbite et devient un astre errant. Si l'explosion est moins violente, tous les corps existant à proximité sont irradiés et brûlés jusqu'à la cendre, leur éventuelle atmosphère est arrachée par le souffle de l'explosion ou le vent stellaire (supervent) et ils se transforment en astres rocheux désertiques et stériles. Si le coeur stellaire existe encore, ces astres continueront inlassablement leur révolution autour d'une étoile morte d'un point de vue astrophysique. Si la vie s'était développée sur l'un de ces astres, elle fut irradiée et n'existe plus. Notons qu'une hypernova, une kilonova ou la fusion de deux étoiles à neutrons produirait le même effet. En explosant, une supernova émet un intense flot de particules dont des rayons cosmiques. Si par malheur le système solaire croise ce faisceau de particules à courte distance, la Terre et tout ce qui y vit seront irradiés pendant des mois voire des années avec des conséquences fatales. C'est pour cette raison qu'il faut prendre très au sérieux et redouter l'explosion d'une supernova à proximité du Soleil car il s'agirait d'une véritable catastrophe pour l'humanité et toutes les espèces vivantes, y compris les micro-organismes supportant certaines doses de rayonnements ionisants. Mais à l'impossible nul n'est tenu. Une possible extinction de masse Dans un article publié dans la revue "Astrobiology" en 2017 (en PDF sur arXiv), le physicien Adrian L. Melott de l'Université du Kansas et ses collègues ont voulu comprendre quelle était l'origine et les conséquences de la présence de fer-60 découvert un peu partout sur la Terre remontant entre 2.5 et 10 millions d'années avec un pic marqué il y a ~2.5-2.6 millions d'années. On sait que cet isotope fut créé lors de l'explosion d'une supernova. Par conséquent, les auteurs suggèrent qu'une supernova explosa à environ 150 années-lumière et changea le cours de l'histoire. Selon Melott et ses collègues, le flot de rayonnements émis par cette supernova en direction du système solaire est probablement à l'origine de l'extinction de masse du début du Pléistocène qui vit la disparition de 36% des espèces de la mégafaune marine dont celle du Mégalodon (un requin géant). On y reviendra. Mais quelques mois après cette publication, et pour ainsi dire en guise de réponse, en 2018 Brian C. Thomas précité publia un article plus nuancé dans la même revue "Astrobiology" qui fut repris sur le site de la NASA qui finança l'étude. Thomas suggère que deux supernovae situées entre 163 et 326 années-lumière de la Terre auraient explosé entre 2.5 et 8 millions d'années.
L'auteur a constaté qu'en Afrique, à la limite du Pliocène-Pléistocène (2.5-2.6 millions d'années) les enregistrements fossiles montrent que le continent originellement forestier est devenu plus herbeux. Durant la même période géologique, la concentration globale de fer-60 augmenta. Il observa également un changement dans la diversité des espèces et leur population durant cette même période. Précisons pour être complet que c'est aussi l'époque des Australopithèques africanus tardifs et des Homo habilis. Elle fut également marquée par le début d'un nouvel Âge glaciaire (qui se poursuit toujours mais en s'atténuant) et une inversion du champ magnétique terrestre. Faut-il y voir des liens de cause à effet ? Rien ne le prouve. Thomas souligne que l'explosion d'une supernova ne réduit pas tout en cendre sur son passage comme on l'imagine souvent. Si c'est valable à proximité immédiate de l'explosion où le souffle de l'onde de choc et le nuage de plasma incandescent peuvent déjà tout pulvériser sur leur passage dans un rayon de plusieurs millions de kilomètres et stériliser une planète à la distance de la Terre (~150 millions de km ou 1 UA), l'effet est beaucoup moins sensible à grandes distances, ce qui ne veut pas dire qu'il ne soit pas durable et très dangereux. Selon Thomas, "la pluie de fer-60 radioactif s'étendit sur des centaines de milliers d'années", confirmant l'estimation de Melott. Pour rappel, l'onde de choc d'une supernova se propage entre environ 30000 et 46000 km/s, parcourant jusqu'à 1 année-lumière en 6.5 ans, mais ses rayons cosmiques sont 3 à 6 fois plus rapides. En admettant que la supernova se situe à 200 années-lumière, la première vague de rayonnements ionisants se déplaçant pratiquement à la vitesse de la lumière, elle serait arrivée sur Terre environ 250 ans plus tard. Cet intense flux de rayons cosmiques de haute énergie aurait traversé la stratosphère et déposé son énergie sous la couche d'ozone, brisant les molécules et l'amincissant significativement. Les particules plus lourdes ou plus énergétiques arrivèrent sur Terre sur une période de 750 à 1000 ans, déversant leur surplus d'énergie dans la stratosphère, contribuant à réduire davantage la densité de la couche d'ozone. L'effet de ce rayonnement aurait provoqué une réduction d'environ 22% de la densité de la couche d'ozone en 100 ans, de 26% en 300 ans et de 17% en 1000 ans. Notons que dans notre exemple, les particules relativistes les plus rapides subissent une dilatation du temps très importante. Celles qui se déplacent à 299778 km/s soit 0.9999518c, subissent un facteur γ = 100 par rapport à la Terre. Dans leur référentiel, elles ont parcouru les 200 années-lumière en seulement 2.5 ans. Après avoir étudié les résultats d'une augmentation du rayonnement UV et notamment les UV-B sur les organismes, Thomas conclut que la pénétration de rayonnements UV nocifs jusqu'au sol aurait provoqué des dommages biologiques (cancers, cataractes, mutations génétiques) sur les animaux terrestres et aériens et compromit la photosynthèse du phytoplancton. Cette action délétère aurait aussi contribué à la disparition de nombreuses espèces de plantes, le phénomène s'accentuant aux latitudes élevées comme le montrent les enregistrements fossiles. Mais l'effet n'aurait pas été également réparti parmi les espèces. Le plancton qui produit 50% des émissions d'oxygène aurait proportionnellement été peu affecté. Les résultats d'une irradiation aux UV suggèrent également que l'explosion n'aurait augmenté que faiblement le risque de cancer parmi les populations d'homininés. En résumé, selon Thomas il est difficile d'affirmer que l'explosion d'une supernova à plus de 100 années-lumière impacte lourdement ou non une région ou une espèce ou quels organismes s'en tireront mieux que d'autres. Certaines plantes ont augmenté leur rendement, comme le soja et le blé, tandis que d'autres ont montré une productivité réduite, se référant aux changements observés dans les enregistrements fossiles. De possibles mutations génétiques chez les virus il y a 2-3 millions d'années En analaysant la Bulle Locale au centre de laquelle se trouve le Nuage Local et le Soleil, des chercheurs ont découvert que la supernova qui explosa il y a 2-3 millions d'années entre 250 et 500 années-lumière du système solaire laissa des traces éphémères sur le spectre des rayons cosmiques et des empreintes indélébiles sur la vie.
L'équipe de la doctorante en astrophysique Caitlyn Nojiri du Département d'astronomie et d'astrophysique de l'Université de Californie à Santa Cruz (UCSC), en Californie, montra que cette supernova responsable de la synthèse des dépôts du pic de fer-60 à cette époque est la seule source "PeVatron" proche pouvant expliquer le spectre des rayons cosmiques et l'anisotropie à grande échelle entre 100 TeV et 100 PeV (cf. C.Nojiri et al., 2025). Nojiri et ses collègues ont également pu estimer l'évolution des niveaux de rayonnement cosmique ionisant terrestre et leurs implications dans le développement de la vie primitive sur Terre, notamment la façon dont ils auraient influencé le taux de mutation et éventuellement l'évolution d'organismes complexes. Nojiri et ses collègues ont simulé le rayonnement de la supernova et découvrirent que la Terre fut bombardée de rayons cosmiques pendant 100000 ans après l'explosion. Le modèle explique également parfaitement le pic de rayonnement enregistré sur la Terre il y a 2.6 millions d'années qui intrigua les astronomes depuis des années. Leur simulation souleva d'autres questions sachant que ces rayons cosmiques ont probablement bombardé la Terre avec suffisamment d'intensité pour endommager l'ADN. Selon Nojiri, "Cela pourrait être un accélérateur de changements évolutifs ou de mutations dans les cellules." Entre-temps, les auteurs eurent connaissance d'une étude sur la diversité des virus dans le lac Tanganyika, un lac d'eau douce long de plus de 640 km situé en Afrique, le long de la vallée du Rift. Il y a deux à trois millions d'années, on assista à une explosion du nombre d'espèces de virus infectant les poissons du lac Tanganyika. Pour quelle raison des virus se mettraient-ils spontanément à créer de nouvelles espèces ? Nous savons que par nature, les virus subissent de nombreuses mutations spontanées en raison des faiblesses de leur système de réplication, avec un taux de mutation variant entre 20 et 50 mutations par an selon les espèces (cf. le SARS-CoV-2 vecteur de la Covid-19). Pour que le nombre d'espèces explose, il y eut forcément un facteur extérieur. Le premier auquel on pense est l'effet perturbateur d'une source de stress qui força les virus à s'adapter à de nouvelles conditions telle qu'une substance toxique ou un rayonnement ionisant. Si on peut pas identifier les traces de substances toxiques, en revanche, nous avons des traces de rayons cosmiques. Les chercheurs affirment que cette supernova était suffisamment puissante pour altérer l'ADN et provoquer des mutations chez les virus du lac Tanganyika. Cette prolifération de virus a peut être été déclenchée par cette supernova. Selon Nojiri, "Nous ne pouvons pas dire qu'ils sont liés, mais ils ont une chronologie similaire." Coïncidence ou pas, les chercheurs considèrent qu'il est intéressant de noter qu'à l'époque de cette supernova on observa une diversification accrue des virus sur la Terre. A
voir : Explosion
d'une kilonova,
HubbleCast La signature du béryllium-10 La datation des nucléides cosmogéniques repose sur la constance de la production et de l'incorporation de radionucléides dans les archives géologiques. Les écarts anormaux par rapport à la constance au cours de l'Holocène ou du Pléistocène sont fréquemment utilisés comme repères globaux pour harmoniser différents ensembles de données. Jusqu'à présent, il n'existait pas de signature similaire à l'échelle du million d'années. C'est à présent chose faite.
L'équipe de Dominik Koll du centre de recherche AMSIR (Accelerator Mass Spectrometry and Isotope Research) Helmholtz de Dresden-Rossendorf, en Allemagne, a découvert une anomalie cosmogénique du radionucléide béryllium-10 - un isotope du béryllium-4 d'une demi-vie de 1.39 million d'année - au cours du Miocène tardif, il y a 9 à 11.5 millions d'années et culminant il y a 10.1 millions d'années. Cette signature peut être utilisée comme marqueur temporel indépendant pour les archives marines (cf. D.Koll et al., 2025). Ce radioisotope qui est un sous-produit des rayons cosmiques et également produit par spallation et fusion, peut aider les scientifiques à comprendre certains évènements géologiques, climatiques, solaires et astrophysiques. Selon Koll et ses collègues la présente de béryllium-10 sur Terre fournit des preuves potentielles que le système solaire traversa un nuage interstellaire qui laissa une marque durable sur Terre. les chercheurs ont découvert une augmentation inhabituelle de 70% de la production de l'isotope béryllium-10 dans les croûtes de ferromanganèse des eaux profondes de l'océan Pacifique central et nord. Cette surabondance suggère que la Terre a sans doute subi une augmentation extrême du rayonnement cosmique. Quelles sont les sources à l'origine du béryllium-10 ? Il y a bien sûr les supernovae et les sursauts gamma qui sont les principales sources connues de rayons cosmiques de haute énergie. Mais leurs schémas ne correspondent pas à la période prolongée d'augmentation des niveaux de béryllium-10. Les chercheurs suggèrent qu'un nuage interstellaire massif pourrait avoir temporairement comprimé l'héliosphère, permettant à davantage de rayons cosmiques d'atteindre la Terre.
Selon les données recueillies, les scientifiques estiment que le nuage interstellaire présumé s'étendait sur environ 50 années-lumière et contenait plusieurs centaines de milliers de masses solaires. Lorsque la Terre fut irradiée, ce nuage faiblement radioactif devait se situer à environ 400 années-lumière. Ces caractéristiques sont étonnamment similaires à celles des nuages moléculaires géants qui président à la formation des étoiles. Le physicien théoricien Abraham "Avi" Loeb, spécialisé en astrophysique et cosmologie au CfA de l'Université d'Harvard, ainsi que les chercheurs Merav Opher et Josh Peek, ont déjà exploré la possibilité que le système solaire ait traversé un nuage interstellaire plus petit il y a seulement 2 à 3 millions d'années (cf. M.Opher et al., 2024) et d'autres chercheurs ont étudié l'origine de la Bulle Locale. Cependant, cette nouvelle découverte suggère que l'évènement survenu il y a environ 10 millions d'années aurait été beaucoup plus important. Étant donné que les nuages moléculaires ont une durée de vie courte et se dispersent souvent en raison des vents stellaires et des explosions de supernovae, le nuage responsable de cet évènement pourrait ne plus exister. En revanche, son impact a très bien pu être préservé dans les archives géochimiques de la Terre. Se pose alors la même question que celle évoquée précédemment : l'augmentation des rayons cosmiques a-t-elle déclenché des changements climatiques ou même influencé l'évolution biologique sur Terre ? La question reste ouverte. De futures études sur les sédiments des fonds marins et d'autres archives géologiques pourraient fournir davantage d'indices sur la façon dont ces évènements cosmiques ont façonné notre planète. A terme, les chercheurs espèrent découvrir davantage de chapitres cachés de l'histoire de la Terre et de son voyage dans l'espace interstellaire, écrits non pas à l'encre mais grâce aux rayons cosmiques qui ont façonné notre planète durant des milliards d'années. Depuis ces travaux, de nouvelles données sur les effets des rayons X viennent compléter les études de Melott, Thomas, Nojiri et consorts et rendent le danger d'irradiation tout à fait concret, sans pour autant nous concerner de nos jours. Dans un article publié dans "The Astrophysical Journal" en 2023, l'astronome Ian R. Brunton de l'Université d'Illinois à Urbana et ses collègues ont utilisé les satellites à rayons X Chandra, Swift et NuSTAR de la NASA ainsi que XMM-Newton de l'ESA notamment pour étudier les risques que peut présenter une supernova pour les planètes alentour. Avant cette étude, la plupart des recherches sur les effets des supernovae s'était concentrée sur les dangers durant deux périodes : le rayonnement intense produit par une supernova dans les jours et les mois suivant l'explosion, et les particules énergétiques qui arrivent des centaines à des milliers d'années plus tard. Cependant, même si ces dangers peuvent être très menaçants, ils ne représentent pas tous les dangers potentiels que représente une étoile qui explose. Les chercheurs ont découvert qu'entre ces deux dangers connus, se cache un autre. Les supernovae produisant toujours des rayons X, si l'onde de choc de l'explosion frappe le gaz dense du milieu circumstellaire (CSM) environnant, elle peut engendrer une dose particulièrement importante de rayons X qui arrivera sur la planète des mois ou des années après l'explosion et peut durer des décennies.
Sur base de l'analyse des données rayons X de 31 supernovae et de leurs impacts, les chercheurs ont montré que l'interaction des supernovae avec leur environnement peut avoir des conséquences mortelles pour des planètes situées jusqu'à environ 50 pc ou ~160 années-lumière. Selon Brunton, "Si un flux de rayons X balayait une planète voisine, le rayonnement modifierait gravement la chimie atmosphérique de la planète. Pour une planète semblable à la Terre, ce processus pourrait anéantir une partie importante de l'ozone qui protège finalement la vie du dangereux rayonnement ultraviolet de son étoile hôte." Si une planète ayant la biologie de la Terre était irradiée par le rayonnement soutenu de haute énergie d'une supernova proche interagissant fortement avec son environnement, cela pourrait entraîner la disparition d'un large éventail d'organismes, en particulier les organismes marins à la base de la chaîne alimentaire. Ces effets peuvent être suffisamment importants pour déclencher une extinction de masse. Toutefois, Connor O'Mahoney, coauteur de cet article, nous rassure : "La Terre ne doit plus craindre un évènement comme celui-ci car il n'y a pas de supernova potentielle dans la zone de danger des rayons X. Cependant, il se peut que de tels évènements aient joué un rôle dans le passé de la Terre." Comme nous l'avons expliqué, nous avons des preuves que des supernovae ont explosé près de la Terre il y a environ deux à neuf millions d'années. Ces étoiles se trouvaient entre environ 65 et 500 années-lumière de la Terre, donc dans la zone à risque. De même, la Bulle locale de gaz chaud de faible densité et légèrement radioactif toujours en expansion qui entoure le Soleil sur environ 1000 années-lumière suggère qu'elle s'est formée à partir d'une quinzaine de supernovae qui sont à l'origine des nurseries stellaires situées près du centre de la bulle qui explosèrent il y a environ 14 millions d'années. Les jeunes étoiles massives responsables des supernovae étaient alors beaucoup plus proches de la Terre que ces étoiles ne le sont de nos jours, ce qui exposa notre planète à un risque beaucoup plus élevé d'irradiation dans le passé. Bien que cette preuve ne lie pas les supernovae à un évènement d'extinction de masse particulier sur Terre, elle suggère que des explosions cosmiques ont affecté notre planète au cours de son histoire.
Bien que la Terre et le système solaire se trouvent actuellement dans un espace sûr en termes d'explosions potentielles de supernovae, de nombreuses exoplanètes de la Voie Lactée sont exposées à ce risque. Ces évènements de haute énergie réduiraient efficacement les zones habitables de la Voie Lactée, où les conditions seraient propices à la vie telle que nous la connaissons. Du fait que les observations aux rayons X des supernovae sont rares, en particulier de la variété qui interagit fortement avec leur environnement, les auteurs soutiennent que des observations de suivi des telles supernovae pendant des mois et des années après l'explosion seraient précieuses. Selon Brian Fields, coauteur de cet article, "Des recherches plus approfondies sur les rayons X des supernovae sont utiles non seulement pour comprendre le cycle de vie des étoiles mais ont également des implications dans des domaines comme l'exobiologie, la paléontologie et la planétologie." Dans le flot de rayonnements émis par une supernova, un GRB ou le jet d'un trou noir actif, il y a également des rayons gamma. S'ils sont relativement rares, en raison de leurs très hautes énergies et leur faisceau très focalisé, leur effet sur la biosphère serait aussi délétère que celui des muons ou des rayons X. Effets des rayons gamma En moyenne, les astrophysiciens détectent un sursaut gamma par jour. Ils proviennent de sources galactiques comme extragalactiques. La quasi totalité se situe au-delà de la zone de sécurité sous laquelle leur rayonnement serait préjudiciable à la vie sur Terre. Certains sursauts gamma des GRB présentent une énergie supérieure à 1 TeV et proviennent d'astres situés à plus de 10 milliards d'années-lumière. Lors d'un sursaut gamma, certains GRB (probablement une étoile massive se transformant en trou noir) libèrent en quelques secondes autant d'énergie que le Soleil en produit durant toute sa vie soit ~10 milliards d'années ! Heureusement, à cette distance l'atmosphère terrestre absorbe l'essentiel de l'énergie résiduelle et leur rayonnement n'a aucun effet sur la chaîne du vivant. Mais quelles seraient les conséquences d'une exposition de la Terre à un flot intense de rayons gamma ? Non pas ceux émis par une éruption solaire qui restent relativement modestes et sans impacts importants mais ceux provenant des supernovae et autres GRB ? C'est à cette question qu'ont répondu plusieurs équipes de chercheurs. Dans un article publié en préimpression sur "arXiv" en 2009 par l'astrophysicien Brian C. Thomas précité de l'Université Washburn et dans celui publié en 2010 dans la revue "Astrophysics and Space Science" par l'écologiste Marin Rolando Cardenas du CRCE de Cuba, les chercheurs ont montré grâce à des simulations qu'une source gamma située entre 5000 et 8000 années-lumière pourrait avoir un effet délétère sur la Terre.
Selon les chercheurs, on observerait d'abord une réduction de la couche d'ozone, une augmentation des UV-B et une perte de clarté en raison des oxydes d'azote en suspension dans la stratosphère créant un smog photochimique. Les conséquences seraient des changements climatiques, des mutations génétiques (16 fois plus d'ADN endommagé que la normale) et des stérilités plus fréquentes dans la population. En dire plus est spéculatif et personne n'a envie de servir de cobaye pour le savoir. Les astronomes estiment que les sursauts gamma se produisent environ tous les quelques centaines de milliers d'années dans une galaxie comme la Voie Lactée. Et bien qu'ils puissent être dévastateurs, il y a peu de risques que nous soyons un jour touché par ce genre de rayonnement. On a calculé que tous les 5 millions d'années environ, un sursaut gamma se produit suffisamment près du système solaire pour affecter la vie sur Terre. En d'autres termes, depuis 500 millions d'années le monde vivant fut exposé à ~100 sursauts gamma délétères. Mais si les probabilités d'un sursaut gamma à proximité du Soleil ne sont pas nulles, elles sont suffisamment faibles pour que ne pas nous inquiéter, à moins de vous faire cryogéniser et de vous réveiller dans 5 millions d'années à vos risques et périls. Il existe peut être des preuves d'un récent sursaut gamma qui aurait frappé la Terre au début du Moyen-Âge. En effet, dans un article publié dans la revue "Nature" en 2012, Fusa Miyake de l'Université de Nagoya et ses collègues ont annoncé avoir découvert dans les cernes d'un cèdre du Japon datant de l'an 774-775 environ 20 fois plus de carbone-14 soit une augmentation de 1.2% supérieure à la concentration normale. Dans une autre étude publiée dans la revue "Astronomy & Astrophysics" en 2013, l'équipe de Ilya G. Usoskin de l'Université de Oulu en Finlande annonça également la découverte d'une augmentation de la concentration du béryllium-10 dans de la glace extraite d'Antarctique et du carbone-14 dans du charbon prélevé en Allemagne. Pour expliquer ces concentrations d'éléments radioactifs, un flot de rayons gamma aurait été émis par une étoile située à moins de 13000 années-lumière du Soleil et aurait frappé la Terre il y a 1200 ans, générant ce carbone-14. Mais selon l'équipe de Usoskin, une éruption solaire majeure (une succession d'éruptions) d'une énergie > 30 MeV (classe M) suffirait à expliquer ces taux. De plus, selon les auteurs cette hypothèse est soutenue par une augmentation de l'activité des aurores consignée dans les chroniques. Voilà en résumé à quoi ressemble l'univers des hautes énergies au sens propre et les risques potentiels que nous encourrons sans même en avoir conscience. Espérons que cet insouciance nous porte chance. Pour plus d'informations Les extinctions de masse (sur ce site) L'univers des particules élémentaires (sur ce site) Effet d'une supernova à proximité de la Terre (à propos des supernovae) L'environnement terrestre, les rayonnements cosmiques et leurs interactions, Vincent Lafon 29. Cosmic Rays, Particle Data Group (PDF), 2018.
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