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Les effets des rayons cosmiques sur la biosphère

M1, la nébuleuse du Crabe située dans la constellation du Taureau à ~6500 années-lumière est un SNR, le rémanent d'une supernova qui explosa en 1054. Près de 1000 ans plus tard, c'est toujours une source de rayons cosmiques. Voici la vue générale. Le reste stellaire s'est transformé en pulsar. Document ESO/MPG.

A la recherche des rayons cosmiques

Introduction

Il existe dans l'univers tout un éventail de rayonnements et de particules nucléaires qui traversent l'espace à des vitesses dites relativistes (> 40000 km/s). Certaines de ces particules transportent une énergie pouvant atteindre 100 millions de fois celle produite dans les accélérateurs de particules comme celui du CERN ou du Fermilab. Lorsqu'elles arrivent sur Terre, elles percutent les molécules présentes dans l'atmosphère et se décomposent en gerbes de particules moins massives et de moindre énergie. On y reviendra.

Ces particules d'intense énergie sont les fameux rayons cosmiques. Ils furent décrits pour la première fois en 1912 par le physicien Victor Hess mais furent seulement découverts en 1963. Depuis, ils ont fait l'objet de nombreuses études en astrophysique visant à mieux comprendre leur origine, leur accélération et leur propagation dans l'espace, supportées par des données satellitaires ou d'autres méthodes expérimentales.

Les rayons cosmiques sont des particules souvent chargées électriquement composées à 88% de protons et 9% d'hélions, le reste se partageant entre les électrons, les muons, les neutrinos et leurs antiparticules. Leur énergie de repos varie entre 0.511 MeV pour les électrons, ~3 GeV pour les particules alpha (hélions), ~15 GeV pour les électrons très énergétiques (particules bêta) pour atteindre en théorie plus de 107 TeV pour des noyaux de fer.

En 2019, Michihiro Amenomori de l'Université d'Hirosaki et ses collègues annoncèrent dans les "Physical Review Letters" (en PDF sur arXiv) avoir détecté grâce à l'observatoire ASgamma installé au Tibet, 24 rayons cosmiques de plus de 100 TeV dont un rayon cosmique de 450 TeV (4.5x1012 eV), un record. Ces particules provenaient de la nébuleuse du Crabe, M1, alias Taurus A ou Taurus X-1 située à ~6500 années-lumière. Le précédent record était de 75 TeV (expérience HEGRA en 2004).

Notons que les rayons cosmiques d'une énergie ultra élevée et extrême sont respectivement appelés UHECR (Ultra-High-Energy Cosmic Ray, E > 106 TeV) et EECR (Extreme-Energy Cosmic Ray, E > 5x107 TeV).

Les astronomes et les physiciens ont longtemps ignoré d'où provenaient les rayons cosmiques et quel processus gargantuesque pouvait produire de telles énergies et la question n'est pas encore totalement résolue. Car si le Soleil émet également des rayons cosmiques (protons), leur énergie dépasse rarement 100 MeV/nucléon (cf. les classes d'éruptions solaires et les défaillances des satellites), à peine ce que développe l'impact d'un petit caillou tombé d'une table. De toute évidence ce n'est pas un processus astrophysique comme la nucléosynthèse qui peut générer des énergies de l'ordre du TeV.

A voir : The Mystery of High-Energy Cosmic Ray, NASA

Highest energy gamma rays discovered by Tibet ASgamma Experiment, New China TV, 2019

A gauche, illustration d'un flot de rayons cosmiques pénétrant en gerbes dans l'atmosphère terrestre. A droite, décomposition (partielle) de la cascade de particules secondaires produites par les rayons cosmiques pénétrant dans l'atmosphère. Il y a des pions, des muons, des électrons, des neutrinos et leur antiparticule ainsi que des cascades d'hadrons (protons et neutrons). Seuls les neutrinos et les muons atteignent le sol, ces derniers pouvant altérer l'ADN de tout ce qui vit sur Terre jusqu'à ~10 m sous les eaux. Voici une version simplifiée de ce schéma. Documents Observatoire Pierre Auger et CERN adapté par l'auteur.

En fonction de leur masse de repos et compte tenu de l'existence du rayonnement cosmologique à 2.7 K qui baigne tout l'univers, on savait déjà estimer à quelle distance maximale se situait la source d'émission, c'est la limite GZK (GZK cutoff) qui est d'environ 50 Mpc soit 163 millions d'années-lumière pour une particule de ~1020 eV. Cela signifie que des particules ionisantes plus légères peuvent donc pratiquement provenir des confins de l'univers. Cela laisse un vaste choix de candidats mais seuls ceux manifestant une activité explosive ou des jets de plasma nous intéressent.

Identification des sources

La première source est évidemment le Soleil à travers ses éruptions chromosphériques et les éjections de masses coronales (CME) mais dont les rayonnements restent par définition locaux et d'une intensité relativement faible (entre quelques dizaines de keV à quelques GeV) par rapport à d'autres sources cosmiques. Nous verrons que le cycle solaire module le flux de rayons cosmiques galactiques et les CME peuvent même bloquer temporairement les rayons cosmiques (cf. l'effet Forbush).

Parmi les autres candidats ayant une portée bien plus considérable et donc bien plus puissants, il y a les étoiles AGB situées sur la branche asymptotique des géantes. Elles émettent un vent stellaire très énergétique et très puissant, riche en éléments lourds, y compris en radionucléides à courte vie. Elle sont presque aussi dangereuses que les supernovae.

Les autres candidats sont les supernovae, les GRB (Gamma-Ray Bursts), les quasars et autres AGN ainsi que les trous noirs.

Nous savons que les supernovae libèrent des rayons cosmiques d'une énergie 10 millions de fois plus intense que ceux du Soleil (1000 TeV) et un milliard de fois plus intense dans le cas des pulsars (105 TeV). Or les physiciens ont détecté des rayons cosmiques d'une énergie 10 à 1000 milliards de fois plus intense (106 à 108 TeV) que ceux émis par le Soleil ! Seules des galaxies à noyau actif (des AGN comme les quasars dont le noyau présente une activité élecromagnétique particulièrement intense), les sources GRB ou des astres très compacts comme les trous noirs actifs peuvent générer de telles énergies parfois focalisées dans un faisceau étroit mais il fallait le prouver en découvrant l'astre à l'origine de cette intense émission.

Niveaux d'énergie des différentes composantes des rayons cosmiques et les instruments au sol capables de les détecter. Document IceCube.

Dans une étude publiée dans la revue "Science" en 2007, une équipe constituée de 370 chercheurs et ingénieurs de 17 pays rassemblés dans la "Collaboration Pierre Auger" déclara qu'elle avait trouvé la réponse à cette énigme : il s'agit des trous noirs supermassifs actifs qui se développent dans le coeur des galaxies, disloquant et avalant des étoiles entières et rejettant des jets de rayonnements (UV, X, gamma, etc.) et des particules nucléaires (protons, nucléi, etc.) dans l'espace intergalactique (cf. ce schéma).

Grâce au détecteur de rayons cosmiques de l'Observatoire Pierre Auger situé près de Malargüe, dans la Pampa Argentine, les chercheurs ont tracé quelques rayons cosmiques jusqu'au voisinage de leur source d'émission et ont découvert... des AGN ! Chacun des rayons cosmiques étudié présentait une énergie dépassant 5.7 x 106 TeV, l'équivalent de l'énergie libérée par l'impact d'une balle de tennis bien frappée. Par comparaison, le collisionneur LHC du CERN atteint à peine 14 TeV dans le centre de masse (et 1150 TeV par collision).

De telles énergies sont si extrêmes qu'elles peuvent seulement se manifester dans les endroits les plus violents de l'univers. Du fait que ces AGN tracent la distribution générale de la matière dans l'univers local (moins de 10 millions d'années-lumière environ soit 100 fois le diamètre de la Voie Lactée), même si les rayons cosmiques peuvent provenir d'autres objets, les trous noirs sont les premiers suspects en raison de leur propention pour la violence. En effet, ces astres effondrés présentent un comportement chaotique extrême à tout point de vue, tant dans l'intensité et les variations du rayonnement électromagnétique que dans les effets gravitométriques.

C'est la première fois que des chercheurs montrèrent que ce rayonnement de haute énergie ne provenait pas uniformément de toutes les directions du ciel (ce qui avait déjà été noté en 2006). Jusqu'à présent, les rayons cosmiques de faible ou moyenne énergie semblent provenir de toutes les directions. Plusieurs causes sont à l'origine de cette dispersion apparente. Il y a d'une part les champs magnétiques solaire et terrestres qui incurvent les trajectoires des particules chargées émises par le Soleil ou par les supernovae. D'autre part, elles se déplacent également sous l'influence des champs magnétiques galactiques et intergalactiques avant de frapper l'atmosphère terrestre. Ensemble, ces déviations effacent la direction d'origine des rayons cosmiques qui semblent provenir de n'importe où.

Mais les rayons cosmiques les plus intenses portent tellement d'énergie qu'ils sont presque insensibles aux champs magnétiques. La galaxie qui les abrite ne peut pas les retenir ou les dévier. Par conséquent, quand ils frappent la Terre, à quelques degrés près, comme une balle fusil, ils indiquent directement leur point d'origine et donc la source du rayonnement.

Jusqu'à présent, l'étude des rayons cosmiques était gênée par le fait qu'ils sont très rares; on estime qu'à peine une "pluie" par siècle tombe sur chaque km2 de la Terre. L'Observatoire Pierre Augier commença à collecter ses données en 2004 et enregistra un million de rayons cosmiques en 3 ans, y compris 80 UHECR (ultra haute énergie). Depuis, l'étude s'est étendue à l'hémisphère nord grâce à la construction d'un détecteur similaire dans le Colorado. Aujourd'hui l'Observatoire Pierre Augier dispose de 5 détecteurs de rayons cosmiques.

A consulter : Detect cosmic rays with your iPhone

Décroissance des rayons cosmiques

Comme interagissent les rayons cosmiques arrivant sur Terre ? Les rayons cosmiques étant constitués de particules instables ayant une masse parfois très importante, leur vie est éphémère et se désintègrent en d'autres particules plus stables et plus légères. Cette réaction est facilité par les collisions qu'ils subissent. Lorsque les rayons cosmiques dits primaires entrent dans l'atmosphère terrestre, ils réagissent avec les particules contenues dans l'air (avec les molécules d'azote, d'oxygène, etc.) et se brisent sous le choc dans une cascade de réactions formant ce qu'on appelle les rayons cosmiques secondaires. Ces réactions transforment les pions contenus dans les noyaux (ils assurent la cohésion des nucléons) en muons qui sont similaires aux électrons mais ~200 fois plus énergétiques et plus lourds (105 MeV contre 0.511 MeV), devenant de véritables rayons mortels invisibles. Des neutrinos sont également produits au cours de cette réaction.

Selon les propriétés électriques du milieu et des particules incidentes, certaines réactions sont privilégiées (collision nucléaire ou Bremsstrahlung). Comme on le voit sur le schéma ci-dessus, à partir d'un proton se forment des pions et des muons qui décroissent en différentes particules comprenant des électrons, des neutrinos et leur antiparticules. D'autres muons et pions sont créés s'ils entrent en collisions avec des nucléi. Le Bremsstrahlung (radiation de freinage) produit des rayons gamma mous qui vont créer des paires d'électron-positron dans une réaction appelée l'averse électromagnétique. Les protons produisent également des antiprotons, des antineutrons, des neutrons, des kaons (mésons lourds, K) et des hypérions (Y). La plupart sont absorbés par l'atmosphère ou se désintègrent avant d'arriver sol. Au total, si on prend un cas d'école, on peut dire qu'un seul proton produit 21 réactions en cascade qui produisent finalement 59 particules mais elles peuvent être beaucoup plus nombreuses si l'ion ou le nucléi initial est plus lourd. C'est une véritable gerbe de particules qui est ainsi produite, terme qui fut retenu par les physiciens pour qualifier ce phénomène

Composition des éléments primaires des rayons cosmiques

Dans un article publié dans les "Physical Review Letters" en 2023, les membres de la Collaboration Alpha Magnetic Spectrometer (AMS), un grand groupe de recherche analysant les données recueillies par un spectromètre magnétique placé à bord de la station spatiale ISS, annoncèrent qu'ils avaient recueilli de nouvelles informations sur les propriétés et la composition de rayons cosmiques spécifiques : le carbone primaire, le néon et le magnésium, ainsi que la composition et les propriétés du soufre des rayons cosmiques.

L'AMS a mesuré la charge Z de tous les noyaux des rayons cosmiques jusqu'au nickel. Document Collaboration AMS.

Selon Samuel Ting, porte-parole de la Collaboration AMS, "Les expériences pionnières étudiant les rayons cosmiques ont généralement une marge d'erreur de 30 à 50% et principalement aux énergies cinétiques inférieures à 50 GeV par nucléon. Ces marges d'erreurs fournissent des informations importantes qui concordent avec de nombreux modèles théoriques. L'expérience AMS fournit des mesures précises des proportions des particules élémentaires (électrons, positrons, protons et antiprotons) et de tous les éléments du tableau périodique jusqu'à une énergie cinétique dépassant 1 TeV."

Certaines des mesures récentes recueillies par le détecteur AMS ont été difficiles à expliquer à l'aide des modèles de physique théorique existants. Par exemple, en mesurant la rigidité (c'est-à-dire la quantité de mouvement/charge) de toutes les particules chargées dans les rayons cosmiques, le détecteur AMS a recueilli des données apportant un nouvel éclairage sur les propriétés de deux types différents de rayons cosmiques chargés surnommés les rayons primaires et secondaires.

Ting nous rappelle que "Les rayons cosmiques primaires (par exemple He, C, O, Ne, Mg, Si, S, Fe, ...) sont synthétisés dans les étoiles et accélérés par des sources astrophysiques comme les supernovae, tandis que les rayons cosmiques secondaires (par exemple Li, Be, B , F, ...) sont produits dans les interactions des rayons cosmiques primaires avec le milieu interstellaire."

Précédemment, la Collaboration AMS avait montré que les flux de rayons cosmiques primaires contenant du Ne, Mg et Si avaient une dépendance à la rigidité identique au-dessus de 86.5 GeV, ce qui différait considérablement de la dépendance à la rigidité des rayons cosmiques primaires contenant He, C, O et des noyaux de fer. Cela suggère que les rayons cosmiques primaires peuvent être divisés en au moins deux sous-classes, que l'équipe dénomma Ne-Mg-Si et He-C-O-Fe.

Selon Ting, "Jusqu'à présent, on sait peu de choses sur les propriétés des rayons cosmiques soufrés. Des études précises axées sur les propriétés du soufre cosmique, telles que nos nouveaux travaux, pourraient fournir de nouvelles informations sur les rayons cosmiques primaires, nous aidant à dévoiler le nombre de classes de rayons cosmiques primaires existantes."

Dans un autre travail antérieur, Ting et ses collaborateurs ont trouvé des preuves suggérant que les rayons cosmiques N, Na et Al sont des combinaisons de rayons cosmiques primaires et secondaires. Ils ont ensuite mesuré avec précision les flux de ces rayons cosmiques sur une large plage de rigidité (c'est-à-dire de quelques GeV à quelques TeV) et analysé leurs propriétés spectrales, afin de déterminer leurs composants primaires et secondaires spécifiques. Selon Ting,"Par exemple, les rapports d'abondance Na/Si et Al/Si à la source ont été mesurés directement à 0.036 ±0.003 et 0.103 ±0.004, respectivement. Ces mesures sont indépendantes des modèles de rayons cosmiques. Dans notre publication actuelle, nous avons étendu cette méthode pour mesurer les compositions primaires et secondaires de C, Ne, Mg et S, qui sont traditionnellement supposée être des rayons cosmiques primaires. De manière inattendue, nous avons constaté que ces éléments ont tous des contributions secondaires importantes provenant de la collision de rayons cosmiques plus lourds avec le milieu interstellaire."

Tableau illustrant les résultats de la mesure directe des rapports d'abondance à la source de sept éléments des rayons cosmiques. Document Collaboration AMS.

L'analyse des données reposa sur 10 années de mesures de 200 milliards de rayons cosmiques ayant traversé les six détecteurs diférents de l'AMS, une tâche longue et ardue. Finalement l'exactitude des données fut vérifiée et recoupée par quatre équipes de recherche indépendantes situées en Italie, en Suisse, en Chine et aux États-Unis.

Selon Ting, "Nous avons également constaté que les rayons cosmiques primaires traditionnels S, Ne, Mg et C ont tous des composants secondaires importants. Le soufre, ainsi que les noyaux cosmiques C, Ne et Mg peuvent tous être présentés comme une somme de composants primaires (avant leur propagation dans la Voie Lactée) et composante secondaire (pendant et après la propagation)." Le rapport d'abondance à la source de rayons cosmiques étudiés est indiqué à gauche.

La Collaboration AMS fut la première à mesurer avec précision le flux du soufre dans l'univers entre quelques GeV et TeV. Leurs découvertes contribuent grandement à la compréhension des rayons cosmiques, de leur composition et de leurs caractéristiques.

Les analyses réalisées par la Collaboration AMS suggèrent que les contributions primaire et secondaire des flux primaires de S, C, Ne et Mg de rayons cosmiques sont nettement différentes de celles des flux de N, Na et Al. Leurs découvertes, dont aucune n'a été prédite par les modèles de rayons cosmiques existants, pourraient collectivement aider à mieux comprendre la nucléosynthèse dans les étoiles ainsi que l'origine et la propagation des rayons cosmiques.

D'ici 2030, l'AMS va poursuivre l'étude des rayons cosmiques en explorant notamment les propriétés des autres éléments lourds des rayons cosmique et améliorer sensiblement la précision des détecteurs. Selon Ting, "Cela percera les mystères des rayons cosmiques, tels que où et comment ils sont créés ou comment ils nous parviennent. Dans nos prochains travaux, nous envisageons d'étudier l'origine de la matière sombre par des mesures de précision des électrons, des positrons, des antiprotons et des antideutérons. D'ici 2030, notre étude des spectres des positons, des électrons, des antiprotons et des antideutons ainsi que l'étude de l'anisotropie des positrons, fourniront une explication des résultats non encore élucidés obtenus par l'AMS."

Notons que lors de l'analyse des données, Ting et ses collaborateurs ont également observé plusieurs particules qui pourraient être des candidates viables à l'antimatière lourde, y compris l'antihélium. Ils prévoient donc de poursuivre également la recherche d'un plus grand nombre de ces particules, en particulier l'anticarbone et l'antioxygène. Parallèlement, ils analysent les variations quotidiennes du flux de tous les rayons cosmiques dans l'héliosphère sur des cycles solaires de 11 et 22 ans, ce qui pourrait donner lieu à d'autres découvertes intéressantes.

Effets des rayons cosmiques sur la biosphère

Etant donné leur énergie, les rayons cosmiques peuvent-ils affecter la vie sur Terre et de quelles manières ? Au cours de leur brève existence, non seulement les rayons cosmiques peuvent parcourir plusieurs dizaines de kilomètres dans l'atmosphère mais ils peuvent également briser tout ce qu'ils touchent au sens propre.

La plupart des rayons cosmiques sont bloqués par l'atmosphère à l'exception des muons et des neutrinos qui atteignent le sol. Un muon de 1 GeV parcourt 6.9 km dans l'air (en tenant compte de l'effet de la relativité) et cette distance croît proportionnellement à son énergie pour atteindre 63 km pour un muon de 10 GeV. Malgré la densité de l'eau, les muons d'au moins 10 GeV peuvent pénétrer jusqu'à une dizaine de mètres sous la mer (la colonne d'air correspondant à ~10 m d'eau) où ils conservent tout leur pouvoir destructeur.

On estime que les rayons cosmiques représentent en moyenne 15% de la radioactivité naturelle soit une dose de ~0.38 mSv en Europe (contre ~0.25 mSv/an pour la radioactivité naturelle du corps humain). C'est donc très inférieur aux doses reçues lors d'un examen médical (dose efficace de 0.10 à 6 mSv et même 8.8 mSv pour une tomographie par scanner).

Les rayons cosmiques sont moins "durs" et pénétrants que les rayons gamma mais tout aussi destructeurs. Parfois lourds, souvent rapides et transportant beaucoup d'énergie, à forte dose ou exposition, en raison des réactions chimiques qu'ils provoquent dans l'atmosphère et des dommages qu'ils occasionnent dans la structure du génome, les rayons cosmiques sont capables de modifier durablement la chimie de l'atmosphère avec des impacts directs sur le climat, de provoquer des mutations génétiques et de rendre stérile. Si la dose absorbée par l'organisme est importante et continue pendant plusieurs années, ils sont donc capables de détruire toute vie sur leur passage en quelques générations.

Décrivons à présent la principale source de rayons cosmiques que nous pourrions redouter, l'explosion d'une supernova à proximité du Soleil.

Les effets d'une supernova

Illustration de l'explosion d'une supernova à l'instant où elle implose et souffle son atmosphère dans l'espace. On estime qu'en dessous de 100 à 200 années-lumière de distance, cela pourrait avoir des effets délétères sur Terre. Document T.Lombry.

Une supernova est une étoile massive parvenue au stade ultime de son évolution et qui explose en libérant toute sa matière dans l'espace. Son coeur mis à nu peut soit se transformer en étoile compacte (étoile naine, étoile à neutrons ou pulsar) soit en trou noir. Parfois l'explosion est tellement violente que le coeur métallique est totalement pulvérisé et toute la région sur quelques années-lumière est vidée de toute matière, les rares planètes ou le compagnon stellaire proche étant éjecté de son orbite et devient un astre errant. Si l'explosion est moins violente, tous les corps existant à proximité sont irradiés et brûlés jusqu'à la cendre, leur éventuelle atmosphère est arrachée par le souffle de l'explosion ou le vent stellaire (supervent) et ils se transforment en astres rocheux désertiques et stériles. Si le coeur stellaire existe encore, ces astres continueront inlassablement leur révolution autour d'une étoile morte d'un point de vue astrophysique. Si la vie s'était développée sur l'un de ces astres, elle fut irradiée et n'existe plus.

Notons qu'une hypernova, une kilonova ou la fusion de deux étoiles à neutrons produirait le même effet.

En explosant, une supernova émet un intense flot de particules dont des rayons cosmiques. Si par malheur le système solaire croise ce faisceau de particules à courte distance, la Terre et tout ce qui y vit seront irradiés pendant des mois voire des années avec des conséquences fatales. C'est pour cette raison qu'il faut prendre très au sérieux et redouter l'explosion d'une supernova à proximité du Soleil car il s'agirait d'une véritable catastrophe pour l'humanité et toutes les espèces vivantes, y compris les micro-organismes supportant certaines doses de rayonnements ionisants. Mais à l'impossible nul n'est tenu.

Une possible extinction de masse

Dans un article publié dans la revue "Astrobiology" en 2017 (en PDF sur arXiv), le physicien Adrian L. Melott de l'Université du Kansas et ses collègues ont voulu comprendre quelle était l'origine et les conséquences de la présence de fer-60 découvert un peu partout sur la Terre remontant entre 2.5 et 10 millions d'années avec un pic marqué il y a ~2.5 millions d'années. On sait que cet isotope fut créé lors de l'explosion d'une supernova. Par conséquent, les auteurs suggèrent qu'une supernova explosa à environ 150 années-lumière et changea le cours de l'histoire.

Selon Melott et ses collègues, le flot de rayonnements émis par cette supernova en direction du système solaire est probablement à l'origine de l'extinction de masse du début du Pléistocène qui vit la disparition de 36% des espèces de la mégafaune marine dont celle du Mégalodon (un requin géant). On y reviendra.

Mais quelques mois après cette publication, et pour ainsi dire en guise de réponse, en 2018 Brian C. Thomas précité publia un article plus nuancé dans la même revue "Astrobiology" qui fut repris sur le site de la NASA qui finança l'étude. Thomas suggère que deux supernovae situées entre 163 et 326 années-lumière de la Terre auraient explosé entre 2.5 et 8 millions d'années.

Illustration de l'explosion d'une supernova. Il faut imaginer que tout cela est dynamique et que les éjecta sont projetés jusqu'à 30000 km/s précédés par des ondes de choc portées à plus de 10000 K détruisant tout sur leur passage, que ce soit une étoile proche ou une planète. Document T.Lombry.

L'auteur a constaté qu'en Afrique, à la limite du Pliocène-Pléistocène (2.5 millions d'années) les enregistrements fossiles montrent que le continent originellement forestier est devenu plus herbeux. Durant la même période géologique, la concentration globale de fer-60 augmenta. Il observa également un changement dans la diversité des espèces et leur population durant cette même période. 

Précisons pour être complet que c'est aussi l'époque des Australopithèques africanus tardifs et des Homo habilis. Elle fut également marquée par le début d'un nouvel Âge glaciaire (qui se poursuit toujours mais en s'atténuant) et une inversion du champ magnétique terrestre. Faut-il y voir des liens de cause à effet ? Rien ne le prouve.

Thomas souligne que l'explosion d'une supernova ne réduit pas tout en cendre sur son passage comme on l'imagine souvent. Si c'est valable à proximité immédiate de l'explosion où le souffle de l'onde de choc et le nuage de plasma incandescent peuvent déjà tout pulvériser sur leur passage dans un rayon de plusieurs millions de kilomètres et stériliser une planète à la distance de la Terre (~150 millions de km ou 1 UA), l'effet est beaucoup moins sensible à grandes distances, ce qui ne veut pas dire qu'il ne soit pas durable et très dangereux. Selon Thomas, "la pluie de fer-60 radioactif s'étendit sur des centaines de milliers d'années", confirmant l'estimation de Melott.

L'arrivée d'un intense flux de rayons cosmiques de haute énergie au cours du siècle qui suivit l'explosion de la supernova aurait traversé la stratosphère et déposé son énergie sous la couche d'ozone, l'amincissant significativement, tandis que les particules moins énergétiques arrivèrent sur Terre sur une période de 300 ans, déversant plus d'énergie dans la stratosphère, contribuant à réduire davantage la densité de la couche d'ozone. L'effet de ce rayonnement aurait provoqué une réduction d'environ 22% de la densité de la couche d'ozone en 100 ans, de 26% en 300 ans et de 17% en 1000 ans.

Après avoir étudié les résultats d'une augmentation du rayonnement UV et notamment les UV-B sur les organismes, Thomas conclut que la pénétration de rayonnements UV nocifs jusqu'au sol aurait provoqué des dommages biologiques (cancers, cataractes, mutations génétiques) sur les animaux terrestres et aériens et compromit la photosynthèse du phytoplancton. Cette action délétère aurait aussi contribué à la disparition de nombreuses espèces de plantes, le phénomène s'accentuant aux latitudes élevées comme le montrent les enregistrements fossiles. Mais l'effet n'aurait pas été également réparti parmi les espèces. Le plancton qui produit 50% des émissions d'oxygène aurait proportionnellement été peu affecté. Les résultats d'une irradiation aux UV suggèrent également que l'explosion n'aurait augmenté que faiblement le risque de cancer parmi les populations d'homininés.

En résumé, selon Thomas il est difficile d'affirmer que l'explosion d'une supernova à plus de 100 années-lumière impacte lourdement ou non une région ou une espèce ou quels organismes s'en tireront mieux que d'autres. Certaines plantes ont augmenté leur rendement, comme le soja et le blé, tandis que d'autres ont montré une productivité réduite, se référant aux changements observés dans les enregistrements fossiles.

Depuis ces travaux, de nouvelles données sur les effets des rayons X viennent compléter les études de Melott et Thomas et rendent le danger d'irradiation tout à fait concret, sans pour autant nous concerner de nos jours.

A voir : Explosion d'une kilonova, HubbleCast

Effets des rayons X

Dans un article publié dans "The Astrophysical Journal" en 2023, l'astronome Ian R. Brunton de l'Université d'Illinois à Urbana et ses collègues ont utilisé les satellites à rayons X Chandra, Swift et NuSTAR de la NASA ainsi que XMM-Newton de l'ESA notamment pour étudier les risques que peut présenter une supernova pour les planètes alentour.

Avant cette étude, la plupart des recherches sur les effets des supernovae s'était concentrée sur les dangers durant deux périodes : le rayonnement intense produit par une supernova dans les jours et les mois suivant l'explosion, et les particules énergétiques qui arrivent des centaines à des milliers d'années plus tard.

Chronologie hypothétique de l'arrivée sur une planète

du rayonnement émis par une supernova proche lumineuse en rayons X

On considère que la supernova (SN) explosa à moins de 50 pc ou 160 a.l. Les trois phases sont, de gauche à droite :

(1) L'explosion optique est impressionnante et quelques jours ou dizaines de jours après l'apparition de la SN des rayons gamma et autres photons (vert) issus de la SN arrivent sur la planète (bleu). Mais leur énergie est généralement insuffisante pour déclencher des effets létaux associés à la destruction de la couche d'ozone.

(2) Entre 1000 et 10000 jours soit entre 3 et 30 ans après l'apparition de la SN, l'interaction de l'onde de choc avec le milieu circumstellaire dense (CSM) engendre pendant plusieurs mois à plusieurs années une émission massive de rayons X (jaune) qui pénètrent l'atmosphère de la planète, détruisent la couche d'ozone et exposent la vie aux UV solaires les plus dangereux pendant des décennies.

(3) L'arrivée des rayons cosmiques (bleu) et du SNR (rose) entre quelques centaines et plusieurs milliers d'années plus tard entraîne pendant plus de 10000 ans la destruction de la couche d'ozone, augmente la quantité d'UV solaires les plus dangereux ainsi que la dose de muons arrivant à la surface de la Terre. Document I.R. Brunton et al. (2023).

Cependant, même si ces dangers peuvent être très menaçants, ils ne représentent pas tous les dangers potentiels que représente une étoile qui explose. Les chercheurs ont découvert qu'entre ces deux dangers connus, se cache un autre. Les supernovae produisant toujours des rayons X, si l'onde de choc de l'explosion frappe le gaz dense du milieu circumstellaire (CSM) environnant, elle peut engendrer une dose particulièrement importante de rayons X qui arrivera sur la planète des mois ou des années après l'explosion et peut durer des décennies.

Sur base de l'analyse des données rayons X de 31 supernovae et de leurs impacts, les chercheurs ont montré que l'interaction des supernovae avec leur environnement peut avoir des conséquences mortelles pour des planètes situées jusqu'à environ 50 pc ou ~160 années-lumière.

Selon Brunton, "Si un flux de rayons X balayait une planète voisine, le rayonnement modifierait gravement la chimie atmosphérique de la planète. Pour une planète semblable à la Terre, ce processus pourrait anéantir une partie importante de l'ozone qui protège finalement la vie du dangereux rayonnement ultraviolet de son étoile hôte."

Si une planète ayant la biologie de la Terre était irradiée par le rayonnement soutenu de haute énergie d'une supernova proche interagissant fortement avec son environnement, cela pourrait entraîner la disparition d'un large éventail d'organismes, en particulier les organismes marins à la base de la chaîne alimentaire. Ces effets peuvent être suffisamment importants pour déclencher une extinction de masse.

Toutefois, Connor O'Mahoney, coauteur de cet article, nous rassure : "La Terre ne doit plus craindre un évènement comme celui-ci car il n'y a pas de supernova potentielle dans la zone de danger des rayons X. Cependant, il se peut que de tels évènements aient joué un rôle dans le passé de la Terre."

A gauche, profils d'atténuation du flux de rayons X dans un modèle exponentiel de l'atmosphère terrestre. Les courbes pleines montrent le rapport F(z)/Fo du flux de rayons X F(z) à l'altitude z par rapport au flux incident Fo pour les photons aux énergies indiquées. Les profils commencent à l'unité pour un z élevé, puis chutent en raison de l'absorption atmosphérique, qui dépend sensiblement de l'énergie des rayons X. La courbe gaussienne en pointillés gris est une esquisse idéalisée du profil moyen (non perturbé) de l'ozone stratosphérique. On constate que les rayons X mous avec εX < ~10 keV sont arrêtés à des altitudes bien au-dessus de la couche d'ozone, tandis que les photons de plus haute énergie pénètrent progressivement la couche d''ozone. Nous devons donc tenir compte de l'efficacité destructrice des rayons X de plus faible énergie, même si elle paraît réduite. A droite, distribution des plages d'influence pour toutes les SNe observées dont les distances létales sont d'au moins 1 pc. De gauche à droite, les symboles correspondent à la variation de la valeur de fluence critique : 400 kJ/m (carré), 200 kJ/m² (triangle) et 100 kJ/m (cercle). La ligne rouge pointillée est à 10 pc (cf. Melott & Thomas, 2011). Documents I.R. Brunton et al. (2023).

Comme nous l'avons expliqué, nous avons des preuves que des supernovae ont explosé près de la Terre il y a environ deux à huit millions d'années. Ces étoiles se trouvaient entre environ 65 et 500 années-lumière de la Terre, donc dans la zone à risque.

De même, la Bulle locale de gaz chaud de faible densité et légèrement radioactif toujours en expansion qui entoure le Soleil sur environ 1000 années-lumière suggère qu'elle s'est formée à partir d'une quinzaine de supernovae qui sont à l'origine des nurseries stellaires situées près du centre de la bulle qui explosèrent il y a environ 14 millions d'années. Les jeunes étoiles massives responsables des supernovae étaient alors beaucoup plus proches de la Terre que ces étoiles ne le sont de nos jours, ce qui exposa notre planète à un risque beaucoup plus élevé d'irradiation dans le passé.

Bien que cette preuve ne lie pas les supernovae à un évènement d'extinction de masse particulier sur Terre, elle suggère que des explosions cosmiques ont affecté notre planète au cours de son histoire.

Bien que la Terre et le système solaire se trouvent actuellement dans un espace sûr en termes d'explosions potentielles de supernovae, de nombreuses exoplanètes de la Voie Lactée sont exposées à ce risque. Ces évènements de haute énergie réduiraient efficacement les zones habitables de la Voie Lactée, où les conditions seraient propices à la vie telle que nous la connaissons.

Du fait que les observations aux rayons X des supernovae sont rares, en particulier de la variété qui interagit fortement avec leur environnement, les auteurs soutiennent que des observations de suivi des telles supernovae pendant des mois et des années après l'explosion seraient précieuses. Selon Brian Fields, coauteur de cet article, "Des recherches plus approfondies sur les rayons X des supernovae sont utiles non seulement pour comprendre le cycle de vie des étoiles mais ont également des implications dans des domaines comme l'exobiologie, la paléontologie et la planétologie."

Dans le flot de rayonnements émis par une supernova, un GRB ou le jet d'un trou noir actif, il y a également des rayons gamma. S'ils sont relativement rares, en raison de leurs très hautes énergies et leur faisceau très focalisé, leur effet sur la biosphère serait aussi délétère que celui des muons ou des rayons X.

Effets des rayons gamma

En moyenne, les astrophysiciens détectent un sursaut gamma par jour. Ils proviennent de sources galactiques comme extragalactiques. La quasi totalité se situe au-delà de la zone de sécurité sous laquelle leur rayonnement serait préjudiciable à la vie sur Terre.

Certains sursauts gamma des GRB présentent une énergie supérieure à 1 TeV et proviennent d'astres situés à plus de 10 milliards d'années-lumière. Lors d'un sursaut gamma, certains GRB (probablement une étoile massive se transformant en trou noir) libèrent en quelques secondes autant d'énergie que le Soleil en produit durant toute sa vie soit ~10 milliards d'années ! Heureusement, à cette distance l'atmosphère terrestre absorbe l'essentiel de l'énergie résiduelle et leur rayonnement n'a aucun effet sur la chaîne du vivant.

Mais quelles seraient les conséquences d'une exposition de la Terre à un flot intense de rayons gamma ? Non pas ceux émis par une éruption solaire qui restent relativement modestes et sans impacts importants mais ceux provenant des supernovae et autres GRB ? C'est à cette question qu'ont répondu plusieurs équipes de chercheurs.

Dans un article publié en préimpression sur "arXiv" en 2009 par l'astrophysicien Brian C. Thomas précité de l'Université Washburn et dans celui publié en 2010 dans la revue "Astrophysics and Space Science" par l'écologiste Marin Rolando Cardenas du CRCE de Cuba, les chercheurs ont montré grâce à des simulations qu'une source gamma située entre 5000 et 8000 années-lumière pourrait avoir un effet délétère sur la Terre.

A gauche, illustration du flux de rayonnements corpusculaires dont X et gamma émis par une source GRB située à plusieurs milliards d'années-lumière. Etant donnée la distance et bien qu'ils soient très puissants, ces rayonnements sont sans conséquence sur la vie sur Terre car l'atmosphère absorbe et nous protège efficacement contre ces rayonnements. Voir aussi cette vidéo. A droite, résumé des principaux effets de l'explosion d'une supernova entre 150 et 300 années-lumière de la Terre comme cela se produisit il y a ~2.5 millions d'années. Documents NASA/Swift et V.Altounian/Science adapté par l'auteur.

Selon les chercheurs, on observerait d'abord une réduction de la couche d'ozone, une augmentation des UV-B et une perte de clarté en raison des oxydes d'azote en suspension dans la stratosphère créant un smog photochimique. Les conséquences seraient des changements climatiques, des mutations génétiques (16 fois plus d'ADN endommagé que la normale) et des stérilités plus fréquentes dans la population. En dire plus est spéculatif et personne n'a envie de servir de cobaye pour le savoir.

Les astronomes estiment que les sursauts gamma se produisent environ tous les quelques centaines de milliers d'années dans une galaxie comme la Voie Lactée. Et bien qu'ils puissent être dévastateurs, il y a peu de risques que nous soyons un jour touché par ce genre de rayonnement.

On a calculé que tous les 5 millions d'années environ, un sursaut gamma se produit suffisamment près du système solaire pour affecter la vie sur Terre. En d'autres termes, depuis 500 millions d'années le monde vivant fut exposé à ~100 sursauts gamma délétères. Mais si les probabilités d'un sursaut gamma à proximité du Soleil ne sont pas nulles, elles sont suffisamment faibles pour que ne pas nous inquiéter, à moins de vous faire cryogéniser et de vous réveiller dans 5 millions d'années à vos risques et périls.

Il existe peut être des preuves d'un récent sursaut gamma qui aurait frappé la Terre au début du Moyen-Âge. En effet, dans un article publié dans la revue "Nature" en 2012, Fusa Miyake de l'Université de Nagoya et ses collègues ont annoncé avoir découvert dans les cernes d'un cèdre du Japon datant de l'an 774-775 environ 20 fois plus de carbone-14 soit une augmentation de 1.2% supérieure à la concentration normale. Dans une autre étude publiée dans la revue "Astronomy & Astrophysics" en 2013, l'équipe de Ilya G. Usoskin de l'Université de Oulu en Finlande annonça également la découverte d'une augmentation de la concentration du béryllium-10 dans de la glace extraite d'Antarctique et du carbone-14 dans du charbon prélevé en Allemagne.

Pour expliquer ces concentrations d'éléments radioactifs, un flot de rayons gamma aurait été émis par une étoile située à moins de 13000 années-lumière du Soleil et aurait frappé la Terre il y a 1200 ans, générant ce carbone-14. Mais selon l'équipe de Usoskin, une éruption solaire majeure (une succession d'éruptions) d'une énergie > 30 MeV (classe M) suffirait à expliquer ces taux. De plus, selon les auteurs cette hypothèse est soutenue par une augmentation de l'activité des aurores consignée dans les chroniques.

Voilà en résumé à quoi ressemble l'univers des hautes énergies au sens propre et les risques potentiels que nous encourrons sans même en avoir conscience. Espérons que cet insouciance nous porte chance.

Pour plus d'informations

Les extinctions de masse (sur ce site)

L'univers des particules élémentaires (sur ce site)

Effet d'une supernova à proximité de la Terre (à propos des supernovae)

Detect cosmic rays with your iPhone

L'environnement terrestre, les rayonnements cosmiques et leurs interactions, Vincent Lafon

29. Cosmic Rays, Particle Data Group (PDF), 2018.

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