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La vie sous toutes ses formes

COG fut la créature artificielle la plus intelligente fabriquée par Rodney Brooks au MIT.

Les machines pensantes (II)

Un théoricien en IA se demanda un jour s'il était possible de contenir le génie dans une bouteille ? Pour certains neurologues spécialisés en intelligence artificielle, et tant que la psychologie d'un robot a un sens, on ne devrait pas refuser l'expérience à une créature dotée d'intelligence artificielle.

Les paramètres qu'on lui a donné par programmation définissent les limites de sa réalité afin qu'il accomplisse une tâche déterminée. Mais sans lui donner la totale liberté de création d'un esprit libre, cette intelligence ne pourrait être efficace.

Par le passé, nous avons fait l'erreur d'étudier le développement intellectuel en prenant pour référence les êtres humains, des êtres dotés de sens et de sentiments. Nous l'avons même appliqué à nous-mêmes en interdisant aux esclaves d'apprendre à lire. Mais il est extrêmement peu probable qu'une société extraterrestre avancée prive délibérément ses descendants d'intelligence artificielle.

Randell Mills, chimiste, neurologue, ingénieur spécialiste en IA, membre de la société Phi Beta Kappa et directeur de la société BlackLight Power promouvant l'utilisation d'énergie douce comme l'hydrogène, a présenté en novembre 1999 un exposé sur l'IA à l'Institut de Simulation et d'Entraînement de Floride Centrale (STUCF) qui fonctionne à 60% sur des budgets militaires.

Le Dr Randell Mills dans son laboratoire spécialisé en haute-technologie installé près de Princeton. Document Robin Holland.

Il fit remarquer lors de cet exposé que les " machines pensantes" de Minsky pourraient voir leur géniteur (humain ou autre) comme des êtres violents plutôt que pacifiques. Mills considère que l'"un des résultats les plus sinistres de la recherche en IA est la course aux armements, non pas celle basée sur les armes nucléaires mais sur les machines intelligentes". Ce sont par exemple toutes les armes intelligentes actuellement utilisées par certaines armées ou les services d'espionnage (principalement sur les satellites espions et dans les logiciels de traitement des signaux numériques).

Sa remarque souffla un vent de panique dans l'assistance. Car enfin, pourquoi des créatures mécaniques garderaient-elles de la rancune envers leurs inventeurs voire même envers les êtres "inférieurs" que nous sommes ? Précisément répond Mills parce que les querelles semblent anodines.  Et de s'expliquer.

Toutes les espèces émergent de la compétition et de la lutte pour la survie. Elles sont inconsciemment en conflit permanent. Mais si nous descendons tous grosso-modo des poissons, cela n'implique pas que nous devions tous les tuer car ils nous servent peut-être de nourriture une fois par semaine.

Shostak partage ce point de vue. Il considère que nous devrions accepter l'évolution et considérer que "les machines pensantes deviendront très bonnes, très rapidement". Bien sûr, ainsi que nous l'avons vu à propos de la philosophie des sciences, il risque d'y avoir une discontinuité dans la civilisation humaine : "Pas nécessairement une fin dit Shostak, mais si vous aviez une machine qui présente un Q.I. de 10 à la puissance 18 par rapport aux êtres humains, ne voudriez-vous pas qu'elle gouverne ou au moins contrôle votre économie ?"

Et de conclure, "la plupart des machines voudront simplement se lever en s'en aller. Je présume qu'elles voudront aller là où il y a de l'action, dans le centre Galactique. Il y a là plus d'énergie et de matière". Et elles trouveront là-bas d'autres oasis où elles rencontreront d'autres êtres comme elles.

Devenir biologique ou cyborg

Ainsi que nous l'avons expliqué à propos de la physique des civilisations extraterrestres, le physicien Michio Kaku qui fut professeur à la Cité Universitaire de New York (CUNY) partage l'avis de Shostak et pense que la création d'intelligences artificielles semble faire partie "de l'arc du développement humain", mais que les révolutions biotechnologiques et génétiques ne vont pas laisser notre espèce longtemps statique.

Si les êtres humains cherchent à s'améliorer individuellement, on ne doit pas s'attendre à ce que d'autres espèces se contentent de la simple donne de dame Nature. Pour Kaku, "la génétique et les autres avancées de la biotechologie pourraient propulser notre espèce vers des mutations lui offrant de nouvelles capacités et une plus grande longévité, rendant par exemple les astronautes plus intelligents et plus robustes. Et il est possible que des civilisations beaucoup plus avancées que la nôtre soient capables d'éviter les risques d'un voyage spatial en créant des trous de ver pour passer dans des hyper-dimensions spatio-temporelles".

A lire : Les technologies du futur (la médecine) 

Les robots au service des hommes

Entre l'androïde Terminator célèbre pour son expression "I'll be back" (à gauche) et l'extraterrestre Jar Jar Binks (à droite), il y aurait une place dans l'évolution pour les cyborgs telle la reine Borg (au centre). Mais la plupart des chercheurs en IA pensent que si les gens accepteront facilement des implants biomécaniques, y compris dans le cerveau, ils n'accepteront jamais de confier leur conscience à un support artificiel. "L'unité carbone" a encore un bel avenir. Documents extraits de "Terminator 2: le jugement dernier", Star Trek - Premier Contact et Star Wars - Episode I.

Kaku qui est un spécialiste des théories de supercordes et des univers à onze dimensions soutient qu'une espèce biologique inimaginablement plus complexe que la nôtre (une civilisation de Kardashev de Type III) pourrait en ce moment même traverser la Galaxie en passant par ces tunnels quantiques creusés dans l'espace-temps. 

Ces trous de ver sont-ils réels ? Nul ne peut encore l'affirmer. Pure objet de spéculation pour l'instant, beaucoup de théoriciens croient cependant en leur réalité car les lois de la physique et donc les mathématiques n'interdisent pas leur existence... L'avenir sera juge.

"Les humains" dit Kaku, "pourraient également protéger leur patrimoine en téléchargeant leur conscience dans une machine. Cela permettrait par exemple aux 'êtres mous et visqueux' d'être immortels ou même de ressembler à 'superman'. Mais les gens choisiront probablement l'option biologique" en raison de leur aversion normale à communiquer avec des machines.

Mais Laurance Doyle, spécialiste en IA à l'Institut SETI pense plutôt que l'IA peut s'inspirer des systèmes biologiques et qu'il existe actuellement un certain flou entre la mécanique et le biologique. Il imagine qu"il est possible que nous ne soyons plus à l'avenir les pures systèmes biologiques que nous avons été jusqu'à présent. J'hésite à utiliser le terme de 'cyborg', mais c'est peut-être le mot à utiliser qui représente le mieux ce qui pourrait émerger".

Seuls ou isolés dans la Galaxie ?

En faisant l'hypothèse que nous sommes seuls dans l'univers, le physicien Frank Tipler de l'Université de Tulane, coauteur avec J.Barrows du principe anthropique remet en question l'idée des civilisations extraterrestres. Dans son ouvrage "The Physics of Immortality: Modern Cosmology, God and the resurrection of the Dead" il écrit : "Quelle que soit dit-il, l'intelligence supérieure qui puisse émerger de l'ingéniosité humaine, elle sera la première que portera la Voie Lactée. Nous sommes cette intelligence, mais les organismes unicellulaires existent probablement partout dans le système solaire et peut-être dans tous le bras de la Galaxie dans lequel se situe la Terre".

Tipler a calculé que "l'hospitalité de la Terre envers les formes de vie complexes est un phénomène extrêmement rare. Il existe tellement d'autres voies d'évolution. Les arbres sont merveilleusement complexes mais ils ne pourraient pas évoluer vers l'intelligence. L'intelligence est juste un outil très coûteux pour survivre".

Sur un autre monde, l'équivalent d'une australopithèque comme Lucy a très bien pu évoluée avec une mâchoire présentant des crocs plus puissants, des griffes ou des ailes, au lieu de léguer à la postérité un plus grand cerveau que ses ancêtres. Plus d'un chercheurs ont même annoncé que si les grands sauriens n'avaient pas disparus voici 65 millions d'années, le plus petit des dinosaures, le Stenonychosaurus ou Troodon (1.30 m pour 32 kg) , dont le cerveau très volumineux par rapport à sa taille témoigne de sa grande intelligence, occuperait aujourd'hui votre siège devant cet ordinateur. Le géologue et paléontologue Dale Russell nomma cette créature bipède et intelligente, le "dino-man" (dinoman) dont il fit une statue en 1982 en collaboration avec le taxidermiste Ron Seguin. Une série sur ce thème fut même été produite pour la télévision, "Dinotopia" basée sur le roman de James Burney. Rappelez-vous les fameux "Skybax" et Zippo, l'iguanodon bibliothécaire.

A gauche et au centre, l'évolution possible du Stenonychosaurus ou "Troodon", l'un des dinosaures les plus intelligents, vers une espèce dotée d'intelligence aussi développée que celle des humains imaginée par le géologue et paléontologue Dale Russell et le taxidermiste Ron Seguin en 1982. Cette statue du "Dinoman" est exposée au Canadian Museum of Nature à Ottawa, au Canada. Ce portrait d'un "dinosauroïde" est repris dans le livre de Dickinson et Schaller "Extraterrestrials: A Field Guide for Earthlings"). A droite Zippo, l'iguanodon bibliothécaire de la série "Dinotopia" créé par Hallmark Entertainment.

Pour Tipler, "notre intelligence est évidemment la première qui soit apparue non seulement parce que c'est la seule que nous ayons trouvée mais également parce qu'elle est très pauvre. Les frères Wright ont été les premiers à voler dans une machine plus lourde que l'air mais leur avion était moche", dit-il en plaisantant. "Les humains parviendront à créer une intelligence artificielle qui explorera et s'étendra jusqu'à devenir une conscience universelle qui pourrait même créer un univers virtuel pour chaque individu ayant existé".

Benjamin Zuckerman, professeur de physique et d'astronomie à l'UCLA émet également des doutes au sujet de l'intelligence extraterrestre mais préfère ne pas s'étendre sur des considérations spirituelles. En 1995, il publia un livre intitulé "Les  Extraterrestres : Où Sont-Ils ?" Le titre paraphrase le paradoxe exprimé par Enrico Fermi lors d'un déjeuner qu'il pris à Los Alamos en 1950 : "S'il y a des extraterrestres, où sont ils ?".

Bien qu'elle soit antérieure à la formule de Drake, cette question est souvent utilisée en guise de réponse. Zuckerman fait remarquer que beaucoup de gens jouent avec la formule de Drake car trop de conjectures sont impliquées. En revanche, le paradoxe de Fermi est le seul argument consistant.

Tipler et Zuckerman notent qu'on peut traverser la Galaxie à une vitesse égale à une fraction de celle de la lumière en l'espace de quelques centaines de millions d'années. Etant donné que notre système solaire est des milliards d'années plus jeune que beaucoup d'autres, nos auteurs se demandent pourquoi personne n'est encore sur le seuil de notre porte ?

"Et quand bien même dit Tipler, les extraterrestres nous ignoreraient, après autant d'années quelque chose qui ressemblerait à des sondes de Van Neumann devraient commencer à détruire les étoiles distantes et transformer les galaxies. On ne pourraient pas les manquer", dit-il. Shostak riposte en disant que "les humains contrôlent déjà leur propre taux de natalité, et même certains insectes moissonnent les blés sans décimer les champs". En d'autres termes leurs actions peuvent très bien passer inaperçues s'ils disposent de la technologie adéquate.

De MIB à Internet

Allen Tough, professeur honoraire d'éducation à l'Université de Toronto et auteur du livre "When SETI Succeeds" publié en 2000, coordonne un projet SETI qui prétend que les extraterrestres sont déjà présents dans l'orbite terrestre et surfent sur Internet pour se renseigner sur notre culture.

"Men In Black" de Barry Sonnenfeld (1997).

Proposition farfelue et naïve qui fait sourire les uns, sérieuse et digne d'intérêt pour les autres, Tough pense que les extraterrestres peuvent influencer notre avenir. Il pense que "dans 50 ans nous disposerons non seulement de robots plus intelligents mais ils seront spirituels et dotés d'émotions. D'autres cultures biologiques ont pu créer de telles entités il y a bien longtemps et elles peuvent être parmi nous aujourd'hui". C'est évident lui répondront certains en rigolant, les "Men In Black" sont là pour nous le prouver depuis des décennies !

Plus sérieusement, même si un extraterrestre nous considère comme une proie comme le pense Shostak qui nous imagine comme des poissons que l'on pêche, la plupart des astronomes pensent que nos visiteurs seront plutôt très curieux de nature et chercheront à engager la conversation, ce que pense également Tough. "Pourquoi ne pas dialoguer ?" se demande-t-il alors. "Cette page web dit-il est une invitation à la sonde à nous dire bonjour".

Mais par "sonde" Tough entend une nanosonde : "un vaisseau-mère de la taille d'un brin d'herbe parqué quelque part dans la Ceinture des astéroïdes". Ainsi que Michio Kaku l'a suggéré dans une autre page, il considère également que les progrès en IA conduiront à la fabrication de sondes d'exploration basées sur la nanotechnologie, des sondes incroyablement efficaces de la taille d'une puce plongeant dans l'atmosphère de la Terre à la recherche d'"unités carbone intelligentes" comme le dirait V-ger.

Une question de temps

Mais Ben Zuckerman ne croit pas en toutes ces histoires. Il reste sur ses positions assez négatives à propos de la vie extraterrestre : "la chose la plus sûre et la plus conservatrice à faire est de considérer ces créatures comme des personnes. Même si nous développions des machines aussi intelligentes que cela, les gens préféreront aller voir la Galaxie de leurs yeux. Si nous surmontons certains de ces obstacles, on ne pourra pas obliger les gens à rester ici. Mais l'intelligence artificielle, les sondes de Von Neumann et la nanotechnologie restent des objets qui n'existent pas encore. J'y croirai le jour ou j'en verrai."

Le jour de l'éventuel contact, serons-nous capables de comprendre leurs questions ?

Cette attitude passive n'est pas très scientifique car elle ne laisse aucun chance aux chercheurs de provoquer le hasard et de tenter quelques expériences dans le cadre de SETI. Saint Thomas n'a pas vraiment sa place en science. Il faut inventer, innover, faire des hypothèses et les tester. Ainsi, même si nous faisons fausse route, l'erreur deviendra un sous-produit instructif de la démarche scientifique. Nous progressons de cette manière car en écartant certaines pistes nous en favorisons d'autres plus probables.

Et c'est ainsi que pour différentes raisons, chaque protagoniste attend qu'un évènement se produise. Zuckerman attend que les êtres humains s'aventurent dans le royaume cosmique des possibles, Shostak attend un signal égaré par une lointaine civilisation et Tough attend un message du destin.

Certains acteurs de ce jeu cosmique sont déjà fatigués d'attendre. Arthur C. Clarke par exemple préférait ne plus entamer de discussion à ce sujet, jugeant qu'il avait déjà assez donné sur le thème des extraterrestres qu'il jugeait "ennuyeux à mort : j'ai déjà tout dit à ce sujet". Une machine immortelle aurait peut-être plus de patience.

Rappelons qu'Arthur C. Clarke écrivit plusieurs romans sur le thème des extraterrestres depuis 1960, tels que "2001" et "2010" évidemment ainsi que "Childhood's End", dans lequel il développe l'idée d'un dialogue entre une civilisation avancée et les êtres humains dans le but de transformer nos enfants en super-hommes, mais ces derniers ne partagent pas leurs idées.

Arthur C. Clarke collabora également financièrement au programme SETI auprès de partenaires comme Microsoft (Paul Allen), Intel (Gordon Moore) ou HP (David Packard et William Hewlett) dans le cadre du projet Phoenix. Il défendit la thèse extraterrestre et son manque d'intérêt n'était donc que relatif.

Pour conclure, on peut se demander si les nanosondes existent vraiment, pourquoi n'en découvre-t-on pas ? Certains auteurs estiment qu'elles nous ont observé attentivement et ont attendu trop longtemps notre signal, patientant durant des millénaires que les machines pensantes leur répondent. Mais on peut également penser qu'étant donné la lenteur de l'évolution cosmique et du gouffre spatio-temporel qui nous sépare de nos éventuels voisins, personne ne nous a encore visité. Et s'il l'ont fait il y a très longtemps, il ne fait aucun doute qu'ils reviendront constater nos progrès.

Pour plus d'informations

Sur ce site

Aliens (illustrations)

Les robots au service des hommes

Les technologies du futur

Sur Internet

Darwin's aliens, Samuel R. Levin et al., International Journal of Astrobiology, 2017

Robo sapiens, MIT (site web et livre)

Les vidéos du robot Asimo de Honda (YouTube)

Transmission of Information by Extraterrestrial Civilizations, Nikolaï S. Kardashev, 1964.

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