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Les microquasars Des systèmes binaires atypiques Les microquasars sont des objets stellaires ayant les mêmes propriétés que les quasars mais réduits à la taille d'une étoile et agencés en système binaire. Ce sont leurs similitudes avec le comportement des quasars qui sont à l'origine de leur nom. SS 433 Le premier microquasar
fut découvert en 1975. Il s'agit de SS
433 alias V1343 Aquilae situé dans la constellation de l'Aigle à environ
18000 années-lumière. Il se trouve donc bien dans la Voie Lactée. SS 433
brille comme une étoile de magnitude apparente 14.2. Il est constitué d'un
système binaire X dont l'astre primaire est vraisemblablement un trou noir
bien que l'hypothèse d'une étoile à neutrons ne soit pas écartée. Son compagnon
est une étoile de masse inférieure à celle du trou noir mais qui oscille tout
de même entre 3 et 30 M A
voir : SS 433: Binary Star Micro-Quasar,
APOD
Notons que cettte accrétion de super Eddington imposera à terme une adaptation des modèles comme tente déjà de le faire le modèle unifié des TDE proposé en 2018 adapté aux trous noirs supermassifs situés au coeur des AGNs. On pensait que SS 433 était le cas le plus exotique jusqu'à ce qu'on découvre en 1994 un second microquasar dénommé GRS 1915+105 alias V1487 Aquilae situé à environ 30000 années-lumière. GRS 1915+105 Le
microquasar GRS 1915+105 alias V1487
Aquila située à 36000 années-lumière est une nova X de classe spectrale
K III qui connut un sursaut d'éclat en 1992. Cette étoile perd son atmosphère au
profit d’un minuscule objet très massif, vraisemblablement un trou noir
de 10 à 18 M
Parmi ses particularités, ce trou noir émet un jet de particules ainsi que des bulles de matière condensée à une vitesse de l'ordre de 92% de celle de la lumière provoquant des effets relativistes sur le rayonnement. Comme on le voit ci-dessus à gauche, des bulles de matière sont éjectées à plus de 10000 UA ou 1" apparemment deux fois plus vite que la lumière ! La source est tellement massive qu'elle arrache également de la matière de l'étoile voisine. Autre particularité, ce trou noir présente un taux de rotation très élevé avec un paramètre de spin a* estimé à ~0.56 pour les rayons X mous et pouvant atteindre 0.98 pour l'ensemble du spectre (cf. J.L. Blum et al., 2009). Pour rappel, lorsque a*=1, on atteint le spin maximum (qui ne correspond pas à la vitesse de la lumière, cf. le taux de rotation et spin des trous noirs).
Si on ne peut pas convertir un nombre sans dimension comme le paramètre de spin en vitesse angulaire ou linéaire (on ne peut pas dire que 0.98% représentent une vitesse de 98% de celle de la lumière), on peut malgré tout estimer que ce trou noir effectue 950 rotations par seconde (période de 950 Hz) soit une valeur qui atteint près de 83% de la limite théorique qui est de 1150 fois par seconde au-delà de laquelle il éclaterait. Dans ces conditions, il applique en force l'effet Lense-Thirring de précession relativiste. Le microquasar
V404
alias GS 2023+338 est situé à 7800 années-lumière dans la constellation du Cygne.
C'est une binaire accrétante de faible masse ou LMXB composée d'une étoile d'environ
la moitié de la masse du Soleil gravitant autour d'un trou noir stellaire de ~12 M
Le trou noir connut des sursauts spectaculaires d'émissions X et gamma en 1989 et en 2015 où les satellites enregistrèrent de fortes émissions de rayons X et gamma entre 20 et 40 keV d'une durée inférieure à 1 heure de façon répétée mais à des intervalles irréguliers pendant ~2 semaines (cf. ESA). Le 5 juin 2015, le satellite Swift détecta le sursaut de rayons X qui forma de spectaculaires anneaux concentriques dont on voit une image ci-dessous à gauche prise le 30 juin 2015. La couleur indique l'énergie des rayons X mous (< 5 keV) : le rouge représente les plus faibles (800 à 1500 eV), le vert les moyens (1500 à 2500 eV) et le bleu - mais ils sont rares - les plus énergétiques (2500 à 5000 eV). A titre de comparaison, l'énergie transportée par la lumière visible est de l'ordre de 2 à 3 eV. Pour rappel, 1 eV correspond à l'énergie acquise par un électron au repos porté à la vitesse de 600 km/s. En 2021, le centre Chandra publia une image composite X et optique présentée ci-dessous à droite. Ces anneaux sont ce qu'on appelle des échos lumineux qui se forment de manière analogue aux vagues ou aux ondes de réverbération acoustique. Ces anneaux furent produits lorsque les rayons X émis par le trou noir ont rebondi sur des nuages de poussière situés entre V404 et la Terre. Ces échos lumineux apparaissent sous forme d'anneaux étroits plutôt que larges ou sous forme de halos (bulles) parce que le sursaut de rayons X dura relativement peu de temps et se produisit à une distance relativement grande de la Terre. Il faut imaginer que ces anneaux concentriques se déplacent et s'étendent comme des vagues à la surface de l'eau comme le montrent ces animations en time-lapse réalisées par Andrew Beardmore de l'Université de Leicester à partir des données de Swift enregistrées entre le 30 juin et le 4 juillet 2015. En quelques jours les anneaux se sont rapidement propagés dans un rayon de plus de 5' d'arc soit un tiers du rayon de la Lune. A
voir : Flaring Black Hole Accretion Disk in the Binary System V404 Cygni,
NASA
En 2015, on découvrit des anneaux concentriques similaires autour de Circinus X-1, une binaire X massive ou HMXB dont le compagnon gravite autour d'une étoile à neutrons (cf. S.Heinz et al., 2016). L'analyse de l'image X de V404 révèle qu'il y a huit anneaux concentriques distincts correspondant à différents nuages de poussière. Les anneaux apportent des renseignements non seulement sur le comportement du trou noir, mais aussi sur les caractéristiques de l'espace dans la ligne de visée de V404 Cygni. Par exemple, à partir du diamètre des anneaux en rayons X, on peut calculer la distance des nuages de poussière intermédiaires sur lesquels la lumière ricocha (si le nuage est plus proche de la Terre, l'anneau semble plus grand et vice versa). Les simulations indiquent que la poussière contient très probablement des mélanges de grains de graphite et de silicate. Parmi les découvertes dont devront tenir compte les astrophysiciens, en analysant les anneaux intérieurs avec Chandra, ils ont constaté que la densité des nuages de poussière n'est pas uniforme dans toutes les directions. Or des études antérieures avaient supposé qu'elle l'était. De plus, des analyses réalisées en 2017 par Stephen Eikenberry de l'Université de Floride et ses collègues ont montré que le champ magnétique de V404 est d'environ 461 G soit 400 fois plus faible que les estimations antérieures pour de tels systèmes. Il ne faudrait donc pas un puissant champ magnétique pour accélérer et focaliser un jet. Ces découvertes parmi d'autres ajoutent de nouvelles contraintes sur les modèles des trous noirs et des microquasars. XMMU J004243.6+412519 En 2012, grâce au télescope orbital XMM-Newton de l'ESA, on découvrit le microquasar XMMU J004243.6+412519 dans la galaxie M31. Il s'agit d'un système binaire X de faible masse (LMXB) composé d'un trou noir de masse stellaire qui accrète la matière d'une étoile de faible masse. Environ dix jours après sa découverte, le microquasar afficha un spectaculaire sursaut de rayons X, indiquant une transition vers un taux d'accrétion proche de la limite d'Eddington du trou noir voire même supérieure. Les données radio ont permis de détecter multiples éruptions sur des échelles de temps de quelques jours seulement, suggérant que l'augmentation du taux d'accrétion de masse pourrait avoir déclenché un jet "balistique", c'est-à-dire une série d'éjections consécutives de matière. Illustration du système XMMU J004243.6+412519. Document ESA. V4641 Le
microquasar V4641
situé à 1600 années-lumière dans le Sagittaire et présenté ci-dessous est
un système binaire HMXB constitué d'une étoile de classe spectrale B9 III
en orbite autour d'un trou noir de 9.6 M A lire : The Early History of Microquasar Research, I.F.Mirabel, 2012 Microquasars, Mierk Schwabe, 2004 Microquasars: Proceedings of the Third Microquasars Workshop, 2000
Le Grand Annihilateur Le "Grand Annihilateur" alias 1E 1740.7-2942 est un microquasar situé à 300 années-lumière du centre géométrique de la Voie Lactée. Banale source X du catalogue Einstein qui fit un premier recensement des sources X du ciel (remplacé par le catalogue Einstein2E en 1996), elle présente un tout autre tempérament en rayonnement gamma. Observée depuis 1990, notamment par les satellites SIGMA, CGRO et Chandra, cet objet témoigne de l'annihilation de particules et d'antiparticules en émettant des photons gamma d’une énergie de 0.511 et 1.81 MeV (cf. G.Riegler et al., 1981; W.Webber et al., 1986). Ce rayonnement caractéristique proviendrait du disque de plasma qui circulerait autour d'un trou noir de masse stellaire, au sein duquel la matière serait annihilée dans une profusion d'énergie, d’une puissance équivalent à 2x1030 W. Dans son livre "L'homme qui courait après son étoile" (Odile Jacob, 1998, p244), l’astronome Jacques Paul du CEA de Saclay a comparé son éclat gamma à une puissance "telle que chaque millimètre carré de sa surface doit déchaîner une puissance dix mille fois supérieure à celle d'une centrale nucléaire" de mille mégawatts.
Par ailleurs, grâce au réseau Karl Jansky les radioastronomes ont découvert deux jets de plasma s'échappant de l'objet central, appuyant l'idée qu'il est émis par le disque interne d'accrétion d'un trou noir. H 1743-322 Grâce aux satellites XMM-Newton et NuSTAR, on découvrit l'objet H 1743-322 qui est également un trou noir associé à une binaire accrétante et des émissions X pulsées (cf. les QPO). Cet objet présente également un effet Lense-Thirring de précession relativiste très important. On reviendra sur tous ces concepts à propos des trous noirs. Autres microquasars Le
microquasar LS 5039 de l'Ecu de Sobieski
(Scutum) est un système binaire de type LMXB constitué d'une étoile de classe spectrale
O6.5 V en orbite autour d'un objet compact et massif de 1-3 M Le
microquasar XTE J1550-564
alias V381 Normae est également un système binaire de type LMXB. Il comprend
un trou noir stellaire de 9 M Selon
Mierk Schwabe, en 2004 plus de 280 microquasars avaient été découverts
dans la Voie Lactée dont 130 sont associés à un compagnon lourd d'une
dizaine de masses solaires (HMXB) et 150 à un compagnon léger pesant entre
1-3 M Parmi
les autres microquasars HMXB citons SS 433 (~11 M Retour aux quasars et autres galaxies à noyau actif
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