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La classification des structures solaires

Patrick S. McIntosh

(1940-2016).

A. La classification des taches solaires (I)

En 1981, Patrick Siler McIntosh (1940-2016) de l'observatoire solaire de Sacramento publia un nouveau code synoptique de classification des taches solaires remplaçant celui de Brunner, dit de Zurich et appelée la classification modifiée de Zurich[1]

Selon McIntosh, "Cette classification garde une similitude de base avec celle de Brunner tout en laissant apparaître des différences dans l'intensité, la complexité et la stabilité des taches polarisées, phénomènes qui étaient masqués dans l'ancienne classification."

Dans le détail, chaque groupe de taches solaires est déterminé par trois valeurs, alors que la classification de Brunner n'exigeait qu'un seul caractère. Le nombre de possibilité distincte est de 60 dans ce nouveau système, contre 9 seulement dans la classification de Brunner.

La complexité de cette nouvelle classification n'est pas un problème en pratique car chacun des trois caractères est une progression simple de paramètres clairement décrits. Le plus grand nombre de types distincts de taches nous permet d'isoler un groupe vraiment complexe des simples groupes, qui étaient confondus dans le classement de Brunner.

Par ailleurs, nous pouvons convertir la classification McIntosh en celle de Brunner en utilisant simplement les premières lettres des trois caractères, en notant les exceptions suivantes :

- Classe G de Brunner = types McIntosh Ero, Fro, Eso, Fso, Eao, Fao, Eho, Fho, Eko, Fko

- Classe J de Brunner = types McIntosh Hrx, Hsx et Hax.

Précisons que cette nouvelle classification permet également aux astrophysiciens solaires d'améliorer les prédictions des éruptions solaires qui, dans le classement de Brunner apparaissaient plutôt comme des évènements rares. Ainsi pour un groupe de classe F de Brunner il y avait 39% de chance d'assister à une éruption importante dans les 14 jours. Dans la nouvelle classification cette probabilité s'élève à 58% dans les 7 jours. Cet exemple, bien que peu significatif en soi, prouve l'amélioration des prédictions des éruptions solaires grâce à cette nouvelle classification.

A quelle classe appartient ce magnifique groupe de taches solaires AR 9393 ? Après la lecture de cette page vous pourrez répondre à cette question. La photographie ci-dessous fut prise le 1 avril 2001 par Johannes Schedler avec une lunette apochromatique de 100 mm f/9 ED munie d'un filtre solaire Mylar ND5. Il s'agit d'un compositage de 2 images prises avec une webcam Philips ToUCam et corrigées avec un masque flou.

Réponse: il s'agit d'un groupe de classe Fkc. C'est le plus grand groupe observé lors du 23e cycle solaire. Cette région active fut associée le 2 avril 2001 à la plus forte activité depuis 1989, une éruption de classe X23 avec émission d'une CME. Consultez les sites du Spaceweather et de SOHO pour plus de détails. Le 29 avril 2001 ce groupe atteignit 14 fois le diamètre de la Terre soit 178000 km de longueur ! A droite, une règle solaire préparée par Guy Buhry de Astroblue1

Le type de taches

A:

Tache simple ou groupe de taches sans pénombre et sans structure bipolaire. A ne pas confondre avec une "tache voilée" qui est une tache solaire sans ombre.

A ne pas confondre avec les pores qui sont des aires sombres plus larges que les espaces intergranulaires normaux et qui ont une durée de vie inférieure à 15 minutes. Les vraies ombres ou taches sans pénombre persistent plusieurs jours.

B:

Groupe de tache bipolaire sans pénombre

C:

Groupe bipolaire dans lequel une des principales taches présente une pénombre.

D:

Groupe bipolaire, les deux taches ayant une pénombre, l'une d'entre elle étant structurée. Le groupe s'étend au maximum sur 10° héliocentrique (120000 km).

E:

Groupe bipolaire étendu, les taches principales sont entourées de pénombre et présente une structure complexe. De petites taches se trouvent entre les grandes taches. Le groupe s'étend sur une longueur de 10° à 15°.

F:

Groupe bipolaire très vaste ou groupe de taches complexes s'étendant sur au moins 15° (180000 km).

H:

Tache unipolaire avec une pénombre dont le diamètre est supérieur à 2.5° (30000 km). Cette tache est visible à l'oeil nu. Les taches principales sont presque toujours les taches rémanentes d'un ancien groupe bipolaire. Les groupes de la classe H sont classés D compacts lorsque la pénombre excède 5° en longitude.

La classification des taches solaires de McIntosh

Document T.Lombry

Le type de pénombre

x:

Pas de pénombre. La largeur de l'aire grise bordant la tache doit excéder 3" pour être classifiée comme pénombre. Cette largeur semble être la plus basse limite physique observée. Evitez de les confondre avec les aires de granulation grise qui apparaissent souvent parmi les groupes de petites taches et confondus avec de la pénombre.

r:

Pénombre rudimentaire entourant partiellement les plus grandes taches. Cette pénombre est incomplète, irrégulière sur les pourtours et granuleuse plutôt que filamenteuse. Elle est très étroite, de l'ordre de 3", et plus brillante que la pénombre normale, elle peut être en train de se former ou décliner. 

s:

Pénombre petite et symétrique. La plus grand tache est mature et présente une pénombre sombre et filamenteuse de forme circulaire ou elliptique avec de petites irrégularité sur le bord. L'ombre est soit unique ou forme un amas compact et proche du centre de la pénombre. Le diamètre nord-sud de la pénombre n'excède pas 2.5°. Les taches dont la pénombre est symétrique évoluent très lentement.

a:

Pénombre petite et asymétrique et quelquefois complexe, avec de fines structures filamenteuses. La pénombre des grandes taches présente un contour irrégulier ou est visiblement allongée (pas circulaire) avec deux zones d'ombres à l'intérieur. Son diamètre nord-sud est inférieur à 2.5°. Les taches asymétriques changent d'aspect de jour en jour.

h:

Pénombre grande et symétrique, même structure que "s" mais diamètre nord-sud supérieur à 2.5°

k:

Pénombre grande et asymétrique, même structure que "a" mais diamètre nord-sud supérieur à 2.5°.

Lorsque l'extension longitudinale de la pénombre est supérieur à 5°, il est presque certain que les deux polarités magnétiques sont présentes dans la pénombre et le groupe de cette classe (Dkc, etc).

Evolution d'un groupe complexe de taches solaires. On observe la formation d'un grand groupe bipolaire et de pénombres asymétriques de classe Fkc. Document AURA/NOAO/NSF/KPNO.

La pénombre de la plus grande tache

x:

Pas de pénombre (classe A ou B)

r:

La plus grande tache est partiellement entourée d'une pénombre rudimentaire, en formation ou déclinant.

s:

Pénombre petite et asymétrique, elliptique ou circulaire. Il y a soit une ombre unique ou un amas d'ombres reproduisant la symétrie de la pénombre. Le diamètre nord-sud est inférieur à 2.5°

a:

Pénombre petite et asymétrique au contour irrégulier. Le diamètre nord-sud est inférieur à 2.5°

h:

Pénombre grande et symétrique. Le diamètre nord-sud est supérieur à 2.5°.

k:

Pénombre grande et asymétrique. Le diamètre nord-sud est supérieur à 2.5°.

A gauche, cette tache solaire isolée présente une pénombre complète et symétrique aux contours réguliers. Etant donné sa taille >2.5°, elle est classée Ahx. A droite, ce grand groupe de taches solaires AR 10930 de classe Dki isolé sur le disque mesure 150000 km de longueur et fut photographié le 13 décembre 2006. Le même jour les taches sombres entrèrent en collision en produisant une éruption solaire majeure de classe X3.4 pendant la mission spatiale STS-116 de la NASA. Afin de se protéger du flux de protons d'intense énergie, dans les jours qui suivirent les astronautes ont placé l'intrados de la navette spatiale face au Soleil et se sont réfugiés dans une zone spécialement blindée de la navette spatiale. Documents Big Bear Solar Obs. (BBSO) et HINODE/BFI.

La distribution des taches

x:

Non définie pour les groupes unipolaires

o:

Ouvert. Peu ou pas de taches entre la tache de tête (leader) et la tache de queue (follower); le groupe apparaît divisé clairement en deux parties. Les taches intérieures sont de très petites dimensions.

NB. Bien que les deux aires soient de polarités magnétiques opposées, une distribution ouverte implique un gradient du champ magnétique relativement faible tout au long de la ligne de polarité inverse.

 i:

Intermédiaire. De nombreuses taches se trouvent entre la tache de tête et la tache de queue, mais aucune d'entre elle n'a de pénombre mature. 

c:

Compact. L'aire comprise entre la tache de tête et la tache de queue du groupe de taches est parsemé de grosses taches dont l'une présente une pénombre. Dans le cas extrême d'une distribution compacte, le groupe entier est enveloppé dans une pénombre continue.

NB. Une distribution compacte des taches implique un gradient du champ magnétique relativement élevé tout au long de la ligne de polarité inverse.

Remarquons qu'à mesure que le cycle des taches progresse, leur classe et leur nombre augmente. Plus on approche du maximum plus les groupes auront tendance à se diriger vers l'équateur (figure en papillon) et deviendront plus complexe.

Document T.Lombry

Classement magnétique des taches solaires

On réalise également un classement magnétique des taches solaires selon des règles établies par l'Observatoire du Mont Wilson en Californie :

α - alpha :

Un groupe de taches solaires unipolaires

β - beta :

Un groupe de taches solaires présentant les deux polarités positive et négative (bipolaire), avec une séparation simple et distincte des polarités

γ - gamma :

Une région active complexe dans laquelle les polarités positives et négatives sont distribuées irrégulièrement rendant impossible son classement comme groupe bipolaire

β-γ - beta-gamma :

Un groupe de taches solaires bipolaire mais qui est suffisamment complexe pour qu'une simple ligne continue ne puisse pas être tracée entre les taches de polarités opposées

δ - delta :

L'ombre est séparée de moins de 2° héliocentriques de l'une des pénombres de polarité opposée

β-δ - beta-delta :

Un groupe de taches solaires généralement classé beta mais contenant au moins une tache classée delta.

β-γ-δ - beta-gamma-delta :

Un groupe de taches solaires de classe beta-gamma mais contenant au moins une tache classée delta.

γ-δ - gamma-delta :

Un groupe de taches solaires de classe gamma mais contenant au moins une tache classée delta.

Groupe leader et groupe follower

Le classement en groupes de tête et groupes de queue fait référence aux groupes de taches bipolaires, ces taches qui se présentent par paire suite à des poussées de champ magnétique. Un groupe bipolaire se compose toujours à l'avant, le plus à l'ouest du groupe, d'une tache "leader" (dirigeante) et à l'autre extrémité du groupe, le plus à l'est, d'une tache "follower" (suiveuse).

D'ordinaire dans ce type de groupe la tache leader avance jusqu'à 11° de l'équateur solaire en période minimum d'activité et jusqu'à 3° seulement lors du paroxysme de l'activité solaire, sans pour autant qu'il y un lien avec le cycle des taches car ce phénomène est uniquement lié à leur position en latitude, c'est la loi de Joy.

Plus rarement la tache de tête peut présenter la mauvaise polarité. Lorsque cela se manifeste la tache leader ne descend pas jusqu'à l'équateur mais au contraire elle remonte à une latitude plus élevée que la tache de queue. Dans les groupes étendus et complexes dans lesquels les polarités sont mélangées et inversées, la loi de Joy est souvent violée.

Le nombre de Wolf

Le nombre de taches solaires est évalué quotidiennement, c'est le "Nombre Relatif International de Wolf" symbolisé par l'acronyme RI. On parle également de Nombre de Zurich pour des raisons historiques. Ce nombre est comptabilisé et géré par l'Observatoire Royal de Belgique (SIDC) en collaboration avec des observatoires internationaux. Cet indice est complété par une mesure photographique de la surface tachée et par une mesure du flux radioélectrique à 10.7 cm de longueur d'onde. Les corrélations entre ces données dépassent 97%.

A consulter : le relevé du nombre de taches solaires

Le relevé du nombre de taches solaires est un travail accessible aux amateurs. Il vous suffit d'avoir un télescope d'au moins 60 mm d'ouverture grossissant de 60 à 80x pour effectuer cette mesure qui intéresse les professionnels.

Prochain chapitre

La classification des ponts lumineux

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[1] P.S.McIntosh, Code USSPS, I.U.W.D.S., "Synoptic codes for solar and geophysical data", 1981, Sacramento Observatory Journal, in "The Physics of Sunspots", Sacramento Peak National Observatory, 1981 et correspondance privée avec l'auteur.


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