LE PHÉNOMÈNE DE LA GOUTTE NOIRE
PENDANT LE TRANSIT DE VÉNUS
DU 8 JUIN 2004


PAR MICHEL DUVAL, ANDRÉ GENDRON, GILBERT ST-ONGE ET GILLES GUIGNIER

Clubs d'astronomie amateur de Dorval (CDADFS) et de Montréal (SAM), SRAC
duvalm@ireq.ca, gendron.a@videotron.ca, gilbert@ca.inter.net, gguignier@ca.inter.ca


RÉSUMÉ. Le phénomène de la goutte noire pendant le transit de Vénus devant le Soleil a été observé et photographié par des astronomes amateurs à Montréal (Canada). On a pu ainsi expliquer la formation de la goutte noire par la disparition partielle puis totale des halos autour de Vénus et du Soleil au point de contact. La goutte noire apparaît ainsi comme étant une partie réelle du disque de Vénus et non pas une illusion de perception optique.

1. INTRODUCTION

Le transit de Vénus devant le soleil le 8 juin 2004, attendu depuis longtemps, a été observé par des milliers d'astronomes amateurs et professionnels à travers le monde. À cette occasion, un grand nombre d'entre eux ont eu la certitude d'avoir observé le phénomène de la goutte noire, alors que plusieurs autres estiment qu'il s'agit plutôt d'une illusion optique liée à la turbulence de l'air et à la qualité des instruments. D'autres encore ont attribué le phénomène à l'atmosphère de Vénus. La réalité du phénomène de la goutte noire, et l'absence de relation avec l'atmosphère de Vénus, ont pourtant été confirmées par des auteurs tels que Pasachoff, Schneider et Golub en 2004, à partir d'observations du transit de Mercure effectuées dans l'espace.

Cet article décrit les observations et les photographies prises par des membres des clubs d'astronomie amateur de Dorval et de Montréal pendant le transit de Vénus au point de contact III (le seul visible à Montréal ce jour-là), et propose une interprétation originale et détaillée du phénomène de la goutte noire.

2. INSTRUMENTS ET TRAITEMENTS D'IMAGES

Plusieurs télescopes amateurs ont été utilisés à Dorval et Montréal pour observer visuellement le transit de Vénus et prendre des photographies (3 Schmidt-Cassegrain de 5, 8 et 11 pouces de diamètre, 2 lunettes de 3 et 4 pouces et 2 Maksutov de 5 et 6 pouces).
Les photographies présentées dans cet article ont été prises par André Gendron et Gilles Guignier. Celles prises par le satellite TRACE (" Transitional Region and Coronal Explorer) de la NASA, avec un télescope de 12 pouces de diamètre et extraites du site internet de Pasachoff et coll. (http://www.transitofvenus.info), ont également été examinées pour comparaison, avec l'autorisation des auteurs

Le télescope de A.Gendron était un Schmidt-Cassegrain Celestron C11 de 11 pouces, équipé avec un filtre solaire Thousands Oaks, un système de mise au point Feather Touch, un appareil photo Vixen avec un adaptateur en T, un Varigami et une monture EQ-6 avec un système Bodoefer-Elextronix (modèle MTS-3). Les photographies ont été prises au foyer primaire avec une pellicule photographique Kodak ISO 200 de 1/8 à 1/15 de seconde.

Le télescope de G.Guignier était un Schmidt-Cassegrain Celestron C8 de 8 pouces de diamètre équipé avec un filtre solaire AstroSolar de Baader, une caméra webcam PCV680K de VestaPro et un filtre IR-Block de Astronomix. Les images ont été prises au foyer primaire f/10 et traitées avec le logiciel Iris de Christian Buil. Un traitement typique a consisté à extraire des séries de 30 à 100 images en noir et blanc à partir de vidéos AVI de 180 secondes enregistrées à 10 images par seconde. Les images ont ensuite été corrigées en soustrayant une image de référence offset, et divisées par une image de référence flat. Finalement, les images sélectionnées ont été enregistrées, accumulées et renforcées avec un masque unsharp. Les images ont alors été converties en format FIT
S ou JPEG.

La taille des disques et des halos autour de Vénus et du soleil dans les photographies a été déduite du facteur d'agrandissement du télescope et des dimensions de la pellicule photographique ou des pixels de la caméra utilisés. Pour détecter avec plus de précision les bords de Vénus et du soleil, le logiciel AIP W4 de Richard Berry, l'algorithme de Frei & Chen et le Pixel Radius Tool ont été utilisés par A.Gendron et G.St-Onge. L'incertitude sur les mesures de dimension était de ± 1 pixel, ce qui correspond à ± 1,4, ± 0,4 et ± 0,3 secondes d'arc respectivement dans les photographies de A.Gendron, G.Guignier et TRACE.

Le diamètre réel de Vénus le 8 juin 2004 (58,2 secondes d'arc) a été obtenu du Observer's Handbook de 2004.

Une cause probable des halos est le " flou " des images fournies par les télescopes, décrit par Pasachoff et Schneider (en 2004) par le " point spread function (PSF) ", ou la résolution en contraste, décrite par le " modulation transfer function (MTF) " ou le " phase transfer function (PTF) " dans d'autres publications. La coupure en fréquence des télescopes a été mesurée par A.Gendron en utilisant une " cible " mise au point par M.Koren et disponible sur internet (voir les références). Cette cible consiste en une série de traits ou de lignes parallèles et verticales noir et blanc de largeurs décroissant de façon logarithmique de 2 à 200 lignes par millimètre, et divisées en 6 zones de contrastes différents.

La cible a été imprimée par A.Gendron sur une longueur de 25,1 cm, montée sur une plaque en plastique expansé et placée à une distance de 51 fois la distance focale des télescopes de 11 et 8 pouces, soit respectivement 142,5 et 103,6 mètres. Des photographies de la cible ont été prises avec les télescopes dans des conditions semblables à celles utilisées pendant le transit de Vénus. Les détails des calculs utilisés sont disponibles sur le site internet de Dorval. En portant l'intensité des lignes en fonction de leur fréquence (en lignes/ mm), et la modulation de fréquence en fonction de la fréquence linéaire, il est possible de déterminer la perte de fréquence et la résolution angulaire, cette dernière pouvant être utilisée pour décrire de façon quantitative la résolution des télescopes en secondes d'arc. Les résultats sont indiqués au tableau 1.

TABLEAU 1
Résolution des télescopes de 11 et 8 pouces

Taille des télescopes
en pouces

Auteurs

Perte de fréquence,
en lignes/mm

Résolution angulaire,
en secondes d'arc

11

A. Gendron

9

~ 8.2

8

G. Guignier

53

~ 1.9

On a pu montrer également que la résolution du télescope de 8 pouces était limitée principalement par la taille et l'arrangement des pixels de la caméra. La faible résolution du télescope de 11 pouces était due à un problème de collimation.

Le PSF du télescope de 8 pouces a été mesuré par G.St-Onge à l'aide d'images de l'étoile " double-double " Epsilon Lyrae, prises avec le télescope, et des logiciels MIPS et PRISM. Les détails des calculs sont disponibles sur le site internet de Dorval. Le PSF a ainsi été évalué à ~ 1,75 secondes d'arc, ce qui est en bon accord avec la résolution angulaire du tableau 1.
Note : à strictement parler, le PSF et le MTF sont différents, le PSF étant relié à l'étalement des images et le MTF à la résolution en contraste. Néanmoins, comme les mesures de PSF et de résolution angulaire sont toutes les deux très voisines des tailles des halos observées, il apparaît comme très probable que les halos soient reliés au flou ou à la résolution angulaire des télescopes.

Pour détecter des différences plus faibles d'intensité lumineuse dans les photographies, le logiciel PRISM98 a été utilisé par G.St-Onge. Avec ce traitement d'images, différentes couleurs sont attribuées aux différentes densités lumineuses présentes dans les photographies.
Quand on regarde ces images traitées en fausses couleurs, il faut néanmoins ne pas oublier que :
-il s'agit de fausses couleurs arbitraires.
-les petites différences de couleurs qu'on peut faire apparaître ainsi ne sont en général pas visibles sur les photos non traitées, ou en regardant visuellement à travers les télescopes.
-on ne peut comparer les couleurs de différentes séries de photographies entre elles que si elles ont été soumises exactement au même traitement d'image et de couleurs (par exemple, dans la
figure 5 ). Les couleurs dans les photos prises à partir de différents instruments (par exemple, dans les figure 5 et figure 6 ) ou prises avec le même instrument mais traitées différemment ( par exemple, dans les figures 3 et 6), correspondent à des densités lumineuses différentes, et ne doivent pas être comparées directement.
Les photographies de G.Guignier traitées en fausses couleurs par G.St-Onge ont été séparées en 256 niveaux (8 bits) d'intensité lumineuses pour mesurer les intensités relatives à différents endroits des photographies, sur une échelle de 0 à 256 (voir tableau 3).

3. RÉSULTATS ET DISCUSSION

3.1. LES HALOS PRINCIPAUX AUTOUR DE VÉNUS ET DU SOLEIL

Les photos non traitées prises par A.Gendron et G.Guignier sont disponibles sur le site internet de Dorval. Les photos non traitées # 17, 20 et 22 de André Gendron, et # 3, 4, 6 et 9 de Gilles Guignier, sont présentées dans les figures 1 et 2. Une photographie prise de l'espace par le satellite TRACE, extraite du site internet (2004) de son auteur (Pasachoff) avec son autorisation, est présentée dans la figure 3.
Dans ces photographies, on peut observer des halos autour de Vénus et du Soleil. Ces halos ont été représentés par les dessins des figures 1-3 à côté des photos. Ces dessins sont schématiques mais reproduisent fidèlement les photographies. Les caractéristiques de ces halos sont indiquées au tableau 2 :

Tableau 2 : Les halos principaux autour de Vénus et du soleil

Auteur

Taille du télescope,
en pouces

Photo

Couleur des halos
(vraie ou fausse)

Largeur des halos autour de Venus, en secondes d'arc

A. Gendron

11

pellicule

red (true)

~ 7

G. Guignier

8

webcam

Grey (true)

~ 2

Satellite TRACE

12

CCD

blue (false)

< 1

On peut voir que la largeur des halos est très proche de la résolution des télescopes de 11 et 8 pouces, déduite des mesures de MTF et PSF indiquées au tableau 1 (respectivement ~ 8,2 et ~ 1,9 secondes d'arc). Il apparaît ainsi raisonnable de penser que les halos observés sont dus principalement à la résolution optique des télescopes, dans les conditions utilisées. Des halos encore plus petits sont observés en utilisant un télescope de haute résolution et une caméra CCD situés en dehors de l'atmosphère terrestre, donc sans effet de turbulence de l'air (TRACE).

Ces halos apparaissent à l'interface entre la lumière intense du soleil et les régions très sombres de Vénus et du ciel. Le premier point à clarifier était de savoir s'ils se situent au dessus du disque très brillant du soleil ou au dessus des régions sombres de Vénus et du ciel environnant, ou entre les deux.

La démonstration définitive de leur position a été obtenue en mesurant le diamètre de Vénus dans les photographies, avec et sans le halo, en utilisant les méthodes indiquées dans la section 2. Le diamètre intérieur du halo rouge de Vénus dans les photographies non traitées de A.Gendron (autour du disque intérieur noir) a ainsi été évalué à ~ 43 secondes d'arc, et le diamètre extérieur (disque intérieur noir + le halo rouge) à ~ 57,6 secondes d'arc.

Un calcul similaire a été effectué par G.St-Onge sur les photographies non traitées de G.Guinier. Le diamètre intérieur du halo gris de Vénus (autour du disque intérieur noir) a été évalué à ~ 55 secondes d'arc, et le diamètre extérieur (le disque intérieur noir + le halo gris) à ~ 58 secondes d'arc (100 pixels). Il a également évalué le diamètre extérieur de Vénus dans les photos prises par TRACE à ~ 58 secondes d'arc pour 121 pixels (en format 8 bits), et ~ 116 pixels (en format FITS).

Comme le diamètre réel de Vénus, le 8 juin 2004, était de 58,2 secondes d'arc, les halos de Vénus, dans les photographies non traitées, sont situés au dessus du disque réel de Vénus, et non pas à l'extérieur au dessus du disque du soleil comme on pourrait le penser. Par extension, la même conclusion s'applique très probablement aux halos autour du disque du Soleil, qui doivent se trouver au dessus du ciel noir environnant, et non pas au dessus du disque réel brillant du Soleil.

En résumé, le halo autour de Vénus dans les photographies non traitées se situe au dessus du disque réel de Vénus, et le halo du Soleil au dessus du ciel. Comme cela est indiqué dans les représentations schématiques des
figures 1 et 2, il en résulte que :
- le disque réel de Vénus dans les photos non traitées est plus grand que le disque noir apparent (intérieur) de Vénus (plus précisément, il est égal au disque apparent PLUS le halo intérieur).
- le disque réel du Soleil dans les photos non traitées est plus petit que le disque lumineux apparent du Soleil (plus précisément, il est égal au disque apparent MOINS le halo extérieur).

3.2. LES HALOS SECONDAIRES DE VÉNUS ET DU SOLEIL

Comme on l'a indiqué plus haut, dans les photos non traitées de A.Gendron, un seul halo (rouge) est visible, et est situé au dessus du disque de Vénus.. Le traitement d'image effectué par G.St-Onge (
figure 4 ) fait apparaître 3 halos de couleurs différentes (bleu, vert et jaune) autour de Vénus. Les diamètres de ces halos ont été évalué par A.Gendron. Le diamètre extérieur du halo vert est de ~ 57,6 secondes d'arc, et le diamètre intérieur du halo bleu ~ 43 secondes d'arc. Le halo bleu-vert correspond donc au halo rouge de la figure 1 dans les photographies non traitées, et est situé à l'intérieur du disque réel de Vénus. Le diamètre extérieur du halo jaune est de ~ 66 secondes d'arc et est donc un halo secondaire situé à l'extérieur du disque réel de Vénus et non visible dans les photographies non traitées. Trois halos similaires sont visibles également autour du Soleil dans la figure 4. Par analogie avec ceux autour de Vénus, le halo bleu-vert autour du soleil est situé probablement au dessus du ciel, alors que le halo jaune est un halo secondaire situé au dessus du disque du Soleil.
Sur les photos traitées # 17 et # 18 de la figure 4, au point de contact entre Vénus et le Soleil, on peut voir une légère déformation des halos bleu-vert du Soleil et de Vénus, qui semblent être " attirés " l'un par l'autre.
Dans les photos de G.Guignier traitées par G.St-Onge (figure 5), un deuxième halo de fausse couleur verte se forme également autour de Vénus, avec un diamètre extérieur de ~ 58 secondes d'arc. Les diamètres extérieurs du halo bleu et du disque noir sont respectivement de ~ 55 et ~ 50 secondes d'arc. Le disque réel de Vénus est donc situé à peu près sur l'extérieur du halo vert. Par analogie, le disque réel du soleil est probablement plus petit que le halo bleu autour du soleil, et situé dans le premier halo vert autour du soleil. Cela signifie que dans la photographie # E de la figure 5, une petite partie du disque réel de Vénus est déjà au dessus du ciel. Dans les photographies C à G, une petite déformation des halos bleus de Vénus et du soleil est visible, comme dans les photographies # 17 et # 18 de la figure 4.

Un deuxième traitement en fausses couleurs plus poussé, effectué par G.St-Onge sur les photos de G.Guignier, fait apparaitre 4 nouveaux halos autour de Vénus au lieu de 2, et 4 halos autour du soleil au lieu de 1. Les intensités lumineuses et les largeurs de ces halos supplémentaires sont indiqués au tableau 3. Les intensités lumineuses sont en unités arbitraires sur une échelle de 256 à 0 (248 au centre du soleil, 200 pour le soleil près de Vénus mais loin des halos, 50 pour le ciel loin des halos, 60 à 65 pour le disque noir intérieur de Vénus près du halo bleu). Le tableau 3 confirme la grande similarité (inverse) entre les halos autour de Vénus et du soleil.
Note : il est à noter que le nombre de halos dépend de la façon dont l'ordinateur attribue la table de couleurs et de l'étroitesse des divisions de couleurs, et n'est pas une quantité réelle.

Tableau 3
Halos supplémentaires autour de Venus et du soleil dans les photographies de G.Guignier après un second traitement en fausses couleurs plus poussé par G.St-Onge

Halos

Autour de Vénus

Autour du soleil

Fausses couleurs

Intensité

~ Largeur

Intensité

~ Largeur

Blue

70-81

1.2

63-79

1.2

Green

89-104

1.2

86-114

1.2

Yellow

123

0.6

123-138

0.6

Red

147-177

1.2

>144

1.7

Largeur en secondes d'arc

Dans les photos de TRACE traitées en fausses couleurs par G.St-Onge (figure 6A), le diamètre du disque intérieur rouge de Vénus est de 121 pixels ou ~ 58 secondes d'arc, et correspond par conséquent au disque réel de Vénus. Le diamètre extérieur du halo jaune/vert dans la figure 6A (autour du disque rouge de Vénus) est de 122,5 pixels ou ~ 59 secondes d'arc, et se situe par conséquent à l'extérieur du disque réel de Vénus. Son intensité est entre 59 et 179 (sur une échelle de 200 pour le soleil et 0 pour le ciel).
Dans la photographie traitée pour détecter le bord de Vénus (figure 6B), les diamètres extérieurs et intérieurs du cercle blanc sont respectivement de 124 et 122 pixels, ce qui veut dire que le cercle blanc est à l'extérieur du halo jaune de Vénus de la figure 6A.

3.3. LA FORMATION DE LA GOUTTE NOIRE

La formation d'une " goutte noire " est très évidente sur les photos non traitées (
figures 1 - 2 ) et traitées ( figures 4 - 5 ) de A.Gendron et G.Guignier. En tenant compte de la position réelle des halos dans les figures 1-2 et 4-5, il apparaît que la goutte noire commence à se former juste après le contact du disque réel de Vénus avec le disque réel du Soleil, qui correspond au " vrai " contact III (voir les dessins schématique des figures 1-2).

Note : dans les photos traitées en fausses couleurs # 17 et 18 de A.Gendron à la figure 4, on observe une déformation des halos bleus-verts autour du vrai contact III. Une déformation similaire des halos bleus apparaît également dans les photos traitées # C à G de G.Guignier à la figure 5.
Un examen plus précis des photographies de la figure 5 indique que le vrai contact III se produit à peu près à la photographie # C, et que les déformations des halos commencent à se produire juste après le vrai contact III. Ceci est confirmé par les déformations des isophotes mesurées par G.St-Onge dans ces photographies.
Un faible " pont " plus sombre, qu'on peut assimiler à un effet de goutte noire, se produit dès que le vrai contact III a été atteint et que les déformations des halos commencent à se produire. Visuellement, l'effet de goutte noire ne devient bien visible qu'un peu plus tard (20 à 30 secondes plus tard), dans les photographies et dans les télescopes.

La goutte noire est plus évidente et facile à observer dans toutes les photographies quand le disque réel de Vénus arrive en contact avec le disque apparent du Soleil, ou le dépasse (le disque apparent du soleil est le disque brillant + le halo principal en contact avec le ciel " noir "). Mais il s'agit là de " faux " contacts III, le vrai contact ayant déjà été dépassé et le phénomène de la goutte noire ayant déjà commencé. La goutte noire étant plus facile à observer à ces faux contacts III, ceci peut expliquer pourquoi il est souvent mentionné à tort que la goutte noire se forme AVANT le contact III (apparent). En réalité, elle commence à se former APRÈS le vrai contact III.

La goutte noire est également plus facile à observer quand les halos sont plus larges (par exemple, dans la figure 1 que dans la figure 2). Avec des instruments de très haute résolution et faible diffraction, comme ceux à bord du satellite TRACE (figures 3A et 6A, un noircissement (indiqué en fausses couleurs bleu ou jaune), ou un pont dans la région entre Vénus et la soleil peut être observé et assimilé à un faible effet de goutte noire. Il apparaît que ce noircissement est relié à l'interaction entre les halos plus sombres autour de Vénus et du soleil.


3.4. EXPLICATION PROPOSÉE POUR LE PHÉNOMÈNE DE LA GOUTTE NOIRE

À partir de ces observations, l'explication suivante peut être proposée pour le phénomène de la goutte noire, observé visuellement ou dans les photographies non traitées :

Quand le disque réel de Vénus entre en contact avec le disque réel du soleil (vrai contact III), les deux halos autour de Vénus et du soleil viennent également en contact. À ce moment, il se produit une perte de contraste entre les deux halos, qui ne peuvent plus être distingués l'un de l'autre. Il en résulte la formation d'un pont apparaissant plus sombre entre Vénus et le soleil. La perte de luminosité du bord du soleil participe probablement à cet effet de pont, particulièrement dans les images à très haute résolution.
Puis, quand le disque réel de Vénus traverse le disque réel du soleil, le halo extérieur du soleil et le halo intérieur de Vénus autour du point de contact sont partiellement puis totalement éliminés.
Le halo extérieur du Soleil disparaît parce le disque réel du Soleil n'est plus en contact direct (en interface) avec le ciel. Et le halo intérieur de Vénus disparaît parce que cette partie du disque réel de Vénus n'est plus au dessus du disque réel du Soleil mais au dessus du ciel.
Ces parties des halos de Vénus et du Soleil ayant disparu autour du point de contact, la partie du disque réel de Vénus qui se trouve en dessous redevient sombre, donnant l'impression de goutte noire.
.
4. CONCLUSIONS

Plusieurs observateurs à Montréal ont pu voir visuellement le phénomène de la goutte noire pendant le transit de Vénus. Les photographies confirment ces observations, et indiquent que la " goutte noire " résulte du contact puis de la disparition des halos autour de Vénus et du soleil. Par conséquent, la goutte noire n'est pas une illusion de perception optique mais essentiellement une partie du disque réel de Vénus (identifié par son diamètre réel de 58 secondes d'arc dans les photographies).

RÉFÉRENCES

Club d'astronomie de Dorval, astrosurf.com//stog/saisons_ciel/.
Dantowitz R., Sky and Telescope, Octobre 2004, 141.
Koren, M., normannkore.com/Tutorials/MTF5,html.
Observer's Handbook pour l'année 2004.
Pasachoff J., G.Schneider, nicmosis.as.arizona.edu:8000/eclipse_ web/ transit_04/trace/tov_trace.html.
Paschoff, J.M., La Recherche, 385 (avril 2005), 42-43.
Royal Swedish Academy of Sciences, vt-2004.kva.astro.su.se/
Schneider,G., J.M. Pasachoff, and L.Golub 2004, "Space Observations of the 15 November 1999 Transit of Mercury and the Black Drop Effect for the 2004 Transit of Venus," Icarus 168 (Avril), 249-256.
Seip S., antwerp.gsfc.nasa.gov/apod/ap040611.html
Westfall,J., Sky and Telescope, November 2004, 78.


REMERCIEMENTS

M.J.M. Pasachoff est remercié pour ses commentaires et suggestions pour améliorer cet article.

ANNEXE A


Les phénomènes suivants, qui auraient pu interférer avec l'interprétation des halos principaux et de la goutte noire, ont été examinés et éliminés :

A1 : LA PERTE DE LUMINOSITÉ SUR LES BORDS DU SOLEIL :
Dans les figures 1, 2 et 5, on peut voir que la partie extérieure du disque du Soleil devient progressivement plus sombre vers le bord du soleil, un effet appelé " perte de luminosité sur les bords ". Cette perte de luminosité est due à la température plus basse des gaz dans les couches supérieures de la photosphère du Soleil (T~ 4500°) par rapport à celle des couches inférieures (T~ 5800°).

Partant de 10 000 au centre du soleil, la perte de luminosité est progressive (de 9000 à 3000 en intensité relative) et très étendue (sur au moins 1,5 fois le diamètre de Vénus ou 100 secondes d'arc dans les figures 1,2,5). Par comparaison, les halos autour du soleil sont situés sur le bord extérieur extrême du soleil, ils sont très étroits (de 0.5 à 7 secondes d'arc), correspondant à la résolution des télescopes, et sont de luminosité plus uniforme. Par conséquent, il semble peu probable que les halos autour du soleil dans les figures 1, 2 et 5 soient dus uniquement à la perte de luminosité sur les bords du soleil. Il est plus probable qu'ils soient reliés à la résolution optique des télescopes amateurs utilisés dans cet article, comme cela a été indiqué à la section 3.1. La perte de luminosité sur les bords du soleil probablement contribue néanmoins aux halos avec les télescopes de très haute résolution, comme cela est indiqué par Pasachoff et Golub, qui ont montré dans les images de TRACE que la perte est si rapide qu'elle contribue en fait au phénomène de la goutte noire.

A2 : L'ATMOSPHÈRE DE VÉNUS

Des photos à haute résolution prises en 2004 par le Swedish Solar Telescope l'Académie des Sciences de Suède à La Palma, Iles Canaries, Espagne, montrent l'atmosphère de Vénus quand la planète sort du disque solaire. À partir de ces photos, la dimension de l'atmosphère peut être calculée comme étant 0,4 seconde d'arc, ce qui est consistant avec les dimensions indiquées pour l'atmosphère de Vénus (Westfall 2004), soit ~ 60 km, ce qui correspond à ~ 0,3 seconde d'arc. L'atmosphère de Vénus est donc plus petite que les halos autour de Vénus, et ne peut interférer dans l'interprétation des halos de Vénus (ceci a également été éliminé par Schneider, Pasachoff et Golub dans les images de TRACE).

A3 : LA CHROMOSPHÈRE DU SOLEIL

Des photos prises avec un filtre en hydrogène alpha (à 653,3 nm, donc en lumière visible) pendant le transit de Vénus sont disponibles (Dantowitz 2004, et S.Seip). On ne voit pas de halos dans ces photos, alors que la chromosphère du soleil est clairement visible, permettant de calculer son épaisseur à 4 à 8 secondes d'arc. Dans les photos de G.Guignier et de TRACE, la chromosphère est donc plus large que les halos (~1 à ~ 2 secondes d'arc), mais comme on ne l'observe pas du tout dans ces photos en lumière visible, il est peu probable qu'elle puisse interférer dans l'interprétation des halos principaux et de la goutte noire (Note : la perte de luminosité sur les bords du soleil est différente et la différence de luminosité est beaucoup plus faible en hydrogène alpha).

FIGURE 1 : Photographies non traitées # 17, 20 et 22 de A.Gendron (utilisant un Schmidt-Cassegrain de 11 pouces et une pellicule photographique Kodak), et représentation schématique par M.Duval des halos autour de Vénus et du Soleil


FIGURE 2 : Photographies non traitées # 3, 4, 6 et 9 de G.Guignier (utilisant un Schmidt-Cassegrain et une caméra webcam), et représentation schématique par M.Duval des halos autour de Vénus et du Soleil


Figure 3A

Figure 3B

(Courtesy of Jay M. Pasachoff and Glenn Schneider)
FIGURE 3 : Photographie prise du satellite Trace, traitée en fausses couleurs et en détection de bord par G.St-Onge


# 17

# 17a

# 18

#18a

# 19a

# 20a

# 21a

FIGURE 5 : Photographies de A.Gendron, traitées en fausses couleurs par G.St-Onge (# 17a, 18a, 19a, 20a et 21a). Les photographies # 17 et # 18 sont non traitées (vraies couleurs).

FIGURE 5 : Photographies # A, C, E, G, I et L de G.Guignier, traitées en fausses couleurs par G.St-Onge

Figure 6A

Figure 6B

(Courtesy of Jay M. Pasachoff and Glenn Schneider)

FIGURE 6 : Photgraphies prises par le satellite TRACE, traitée par G.St-Onge

For the complete work on :

The transit of Venus against the Sun on June 8, 2004

by members of the CDADFS astronomy club,
mostly G.St Onge, M.Duval and A.Gendron and G. Guignier

# 1ère partie : Le transit de Vénus devant le Soleil le matin du 8 juin 2004

#
2e partie : Des images

#
3e partie : " Les observations de l'effet de la goutte noire. "

#
4e partie : Des animations /
l' explication du phénomène
goutte noire / Un questionnaire

#
5e partie : Une
explication proposée (la goutte noire) /Une animation

# 6e partie :Notre section qui traite des images du satellite TRACE (Transition Region and Coronal Explorer)

# Part 6 : Images from satellite TRACE
(Transition Region and Coronal Explorer) Anglais

#
7e partie A (1 de 2) : Nous avons tenté de reproduire par logiciel la goutte noire !!!

# 7e partie B ...(2 de 2) : Les effets détectables de la goutte noire (
Isophotes et ...)

# 8e partie : Détermination de la fréquence de coupure et de la fonction de transfert de modulation, et du Point spread function (PSF), des télescopes mentionnés dans ce document.

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