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La Bible face à la critique historique

Enluminures d'un Livre d'heures réalisé entre 1470-1480 par le miniaturiste florentin Francesco d’Antonio del Chierico. Il fut réalisé pour le mariage d'un membre de la famille Serristori. Ce type de livre permettait aux catholiques laïques de suivre la liturgie des Heures (les prières quotidiennes). Doc UCH.

L'histoire du Crédo (I)

Le Crédo qui signifie "je crois" en latin, c'est-à-dire la profession de foi des chrétiens est apparu très tôt dans l'histoire du christianisme. Nous verrons à propos de l'évolution du texte du Crédo des chrétiens que dans les années 60, dans ses Épîtres Paul évoque déjà les prémices d'une profession de foi. Il devint ainsi un signe de reconnaissance entre fidèles et d'alliance avec Jésus-Christ.

Le Crédo est avant tout un symbole comme la croix ou l'Eucharistie attestant de liens spirituels entre ses membres et entre les générations. Il permet également de distinguer la communauté des chrétiens des autres mouvements religieux, s'opposant ainsi aux cultes païens. Le Crédo est également à l'origine du dogme en ce sens que c'est à partir de la compréhension de la foi que les Églises ont élaboré les textes théologiques à la base du code de Droit canonique.

Le Crédo actuel tel que le proclament le concile et tous les chrétiens pratiquants au cours de la liturgie peut sembler à première vue sans intérêt pour lire le Nouveau Testament ou critiquer ses sources. C'est à la fois vrai et faux. Vrai dans le sens où les textes néotestamentaires n'y font pas référence puisqu'ils sont antérieurs au Crédo mais faux car il fut défini à partir des paroles de Jésus ou plus exactement de l'interprétation des visions de Paul et s'est conrétisé dans la formulation qu'en fit l'Église primitive (avant Constantin Ier) puis la Grande Église qui se sont appropriées le Nouveau Testament.

C'est le philosophe grec Celse, auteur du "Discours véritable" qui inventa l'expression "Grande Église" vers 178 pour différencier l'Église romaine et les autres communautés prêchant des doctrines similaires des autres mouvements doctrinaux comprenant notamment des sectes païennes et gnostiques.

Rappelons que malgré cette bonne initiative, Celse est l'auteur de "l'hypothèse Pantera" (cf. la conception de Jésus) et d'autres théories sulfureuses contre lesquelles Origène s'opposera. On y reviendra.

Dès le IIe siècle, sous l'action de quelques théologiens et exégètes courageux (car plus d'un sont morts en martyre) d'origine juive ou païenne (cf. la constitution du canon et la querelle paulienne), la communauté proto-chrétienne évolua de secte marginale à celle d'une communauté dominante qui va imposer sa religion au monde païen. Le christianisme devient une institution à partir du IIIe siècle qui était même dominante à cette époque dans le sud de l'Europe, en Asie Mineure et en Égypte. Après les atrocités dont les persécutions commises sous les empereurs romains Septime Sévère (145-211) et Dioclétien (303-311) qui décimèrent les chrétiens, le christianisme se stabilisa sous l'empereur Constantin.

A partir de cette époque, la force de la Grande Église résidait dans son organisation. Sa structure hiérarchisée autour des évêques et des prêtres facilitait la transmission de sa doctrine dans toutes les communautés jusqu'à ce que de nouvelles querelles éclatent entre les Églises autour de la question du Crédo.

La Bible "orthodoxe" dans le sens où elle reflète "l'opinion droite" (orthos doxa) de l'Église aussi épurée soit-elle des idées "hérétiques" véhiculées par les doctrines concurrentes représente ce qui convient d'appeler le canon, mais elle ne constitute pas à elle seule un outil d'évangélisation. Comme le fameux "Petit Livre Rouge" de Mao Tsé Tung qu'on lui opposa au XXe siècle, la Bible a besoin d'un cadre idéologique ou plutôt dogmatique, c'est le Crédo.

Pour ne prendre qu'un exemple avant de décrire l'histoire du Crédo, une expression comme "Croyez en Dieu, croyez aussi en moi" (Jean 14:1) a été reprise par l'Église dont le Crédo commence par ses mots " Nous croyons en un Dieu, ....". Les écrits apostoliques ont ainsi servi de socle et de ferment à l'élaboration du Crédo, mais l'Église s'en écarta ensuite pour des raisons de cohérence théologique et formula ses propres "règles".

Notons qu'on retrouve la même notion dans le serment judiciaire que prononcent les fonctionnaires de l'État et les plaidants lors d'un procès, une réminiscence religieuse de la confiance aveugle de l'assermenté dans son sens moral ou de sa foi, tout aveu de culpabilité trahisant la vérité. Autrement dit, sa seule parole assure sa probité morale ou religieuse. Il est évident que dans les constitutions laïques, aucun tribunal ne peut imposer de prêter serment sur la Bible ou à l'Église ou dans un autre lieu de culte. Mais les serviteurs de l'Église dérogent à cette règle puisqu'en principe ils sont redevables au pape sauf dans les affaires criminelles.

Le Crédo sur lequel tous les serviteurs de Dieu doivent jurer fidélité au risque d'être excommunié trouve son origine chez les Pères de l'Église Irénée de Lyon (125-202), un théologien originaire de Smyrne (actuelle Turquie) expatrié à Lugdunum, capitale de la Gaule et future Lyon, et Tertullien (fl.165-205) qui avaient tous deux prétendu qu'il existait une "règle de foi" remontant aux apôtres et acceptée par tous les chrétiens. Cette règle ou profession de foi à l'origine du Crédo affirme notamment qu'il n'existe qu'un seul Dieu et que Dieu est le Créateur (de toute chose). Jusque là, pas besoin d'être chrétien pour y souscrire.

Le Crédo dit en substance que le Christ, le Fils de Dieu, mérite autant que le Père le nom de Dieu, qu'il présente deux natures, divine et terrestre, qui demeurent lorsqu'il habite le corps de Jésus ou lorsqu'elles se rencontrent en une seule personne lors de la transfiguration et de la résurrection (voir plus bas). Une personne critique comprendra vite que cette petite phrase considérant le Christ comme un homme mais également comme Dieu est lourde de sens et qu'à une époque où l'Église se cherchait encore, pratiquement chaque mot pouvait être discuté et même disputé d'un point de vue théologique.

C'est justement sur la question du Crédo que les différents courants de l'Église se sont violemment opposés pendant plus d'un siècle au point que l'Église arienne (à ne pas confondre avec l'aryanisme raciste) et les Églises du Moyen-Orient (perse et assyrienne) ainsi que l'Église indienne de Malabar mirent en danger l'avenir de l'Église romaine.

A consulter : Coin Archives (Constantin Ier)

Pièce de monnaie romaine à l'effigie de l'empereur Constantin Ier datée d'environ 337. Il est inscrit CONSTANTINVS MAX AVG (Constantin le Grand Auguste) et SPES PVBLICA CONS (espoir du peuple). Elle commémore l'empereur recevant sa vision de la croix. L'expérience changera le cours de l'histoire de la chrétienté. Après Eusèbe de Césarée, la tradition racontre que Constantin leva les yeux vers le Soleil et vit une croix de lumière au-dessus de lui et les mots (en grec) "dans ce (signe), conquiers". Cette pièce de monnaie illustre également un labarum (un étendard surmonté d'un chrisme - Chi-Rho - adopté par Constantin) planté dans un serpent. Il symbolise la puissance du christianisme avec la mort de l'empereur romain d'Orient Licinius battu en 324 et assassiné peu après. Document CNG Coins.

Avec le recul, dans les démocraties modernes où la liberté de penser et d'expression vont de paire avec la raison (le rationnel) et le sens critique, notre génération a pris ses distances avec les textes sacrés et les doctrines - cet article en témoigne -, au grand dam de l'Église. On y reviendra. En revanche, aux premiers temps de la Grande Église, la mauvaise interprétation des mots, de ces "détails" qui peuvent nous paraître futiles et sans importance, pouvaient condamner son auteur à l'exil ou à une mort violente pour blasphème ou hérésie avec des supplices dignes de l'Enfer (brûlé vif sur le bûcher, grillé à petit feu tête en bas, coupé en morceaux à coups de hâche, écartelé, dépecé vif, etc.). A l'époque, la question du Crédo n'était donc pas une affaire à prendre à la légère et les théologiens qui s'aventuraient dans cette voie devaient être courageux pour défier la Grande Église sachant qu'ils encourraient son courroux en cas de défiance ou d'hérésie, le premier à mettre ses menaces en pratique étant l'empereur Constantin Ier (qui soit dit en passant assassina son fils et son épouse).

Le Crédo selon Arius

C'est donc en toute connaissance de cause qu'aux alentours de l'an 316, le père Arius alors âgé de 60 ans et en charge de la paroisse de Baucalis située près du port d'Alexandrie en Égypte critiqua le Crédo, un acte d'hérésie qui éveilla l'attention de l'évêque d'Alexandrie, Alexandre.

Tout commença en 312 lorsque Arius décortiqua les paroles des Évangiles et "joua" sur l'interprétation des mots car il était convaincu que la Grande Église se fourvoyait. Très intelligent, fin connaisseur des Écritures et très populaire, ses idées finirent par être appréciées par un nombre croissant de fidèles.

Le père Arius (256-336).

Arius refusa en particulier l'idée du Crédo selon laquelle Jésus est l'égal de Dieu. Pour Arius, Jésus qu'il appelle le Logos (par référence à l'idée exprimée par Origène dont il s'est inspiré) est certes de filiation divine mais ce n'est pas Dieu. Dieu est unique et non engendré alors que le Logos est un intermédiaire entre Dieu et le monde. Ce Logos, le Christ ou Fils de l'homme a été créé, engendré par Dieu et il y a donc eu un temps ou le Logos n'existait pas.

De plus quand Jean dit que "le Verbe c'est fait chair", Arius l'interprète comme l'incarnation du Fils de l'homme dans le corps d'un homme. Si la chair du Christ était habitée par le Fils alors le Christ n'était pas entièrement humain. Il ne dispose pas non plus de son libre arbitre puisque ses actes dépendent de la volonté de Dieu. Arius asssimile également les verbes "engendrer" et "créer" là où Rome fait une distinction. Enfin, Arius considère que le Fils ressemble à Dieu mais n'est pas de la même substance que Dieu, "consubstantiel" comme le définit la Grande Église.

Ces quelques mots vaudront au père Arius de comparaître devant l'aéropage des évêques d'Orient au cours du Concile d'Alexandrie en 318. Refusant de signer la profession de foi, ses propos hérétiques furent condamnés, il fut excommunié et ses écrits détruits. Qu'importe, il se réfugia en Bithynie (au nord de la Turquie actuelle) où il fonda sa propre Église arienne. Il reçut le soutien de l'évêque de Constantinople Eusèbe de Nicomédie (lui-même soutenu par l'empereur Constance II) qui lui proposa de considérer la supériorité du Père sur le Fils. Cette proposition fut jugée "acceptable" par le Concile de Nicomédie qui leva l'excommunication, mais contre laquelle s'opposa l'Église d'Occident qui le fera bientôt savoir officiellement.

Au cours du dernier Concile d'Antioche qui s'est tenu en Syrie (il y en eut quatre entre 264 et 325), l'évêque Ossius de Cordoue probablement en collaboration avec Alexandre et Athanase proposèrent une nouvelle profession de foi au synode (l'assemblée des évêques). Ce texte déclara que notre "Seigneur Jésus-Christ est fils unique engendré et non créé", "Fils unique depuis toujours", "immuable et inaltérable" et est à l'image non de la volonté mais de "l'existence réelle du Père". Naturellement, ceux qui étaient d'un autre avis étaient menacés d'excommunication. Plusieurs évêques pro-ariens se firent excusés mais trois évêques la rejetèrent : Théodore de Laodicée, Narcide de Néromais et Eusèbe de Césarée (connu pour son "Histoire ecclésiastique") qui furent excommuniés.

Puis, entre mai et juillet 325 après des décennies de tensions et de débats théologiques, l'empereur Constantin 1er convoqua une énième fois le synode et "toutes les églises de chaque pays" à Nicée en Turquie où 318 évêques allaient débattre pendant un mois des questions cruciales du dogme chrétien dans une perspective globale. Parmi ses décisions ou canons, le synode interdit à une Église locale de lever une excommunication prononcée par une autre Église, ce qui n'empêcha pas l'Église d'Orient et l'Église arienne de se réunir ultérieurement.

Nous n'entrerons pas dans les détails très techniques de cette querelle dogmatique qui sont largement documentés dans différents ouvrages retraçant l'histoire des conciles et de la chrétienté. Retenons seulement que les différents synodes et conciles ont tantôt abrogé ou approuvé les idées des évêques s'opposant à l'orthodoxie romaine qu'ils ont exilé ou réhabilité selon le cas, devenant selon les époques subitement hérétique ou frère d'arme (à l'époque les évêques portaient encore l'épée).

Voyons donc brièvement comme le Crédo fut établi et ses conséquences sur l'avenir des Églises.

Le Symbole de Nicée

Le Concile de Nicée de 325. Fresque peinte en 1590 et exposée dans la Chapelle Sixtine au Vatican.

Le fameux Concile de Nicée de 325 fut résolument anti-arien. Ce concile est resté dans les mémoires car ce fut le premier concile oecuménique (rassemblant toutes les Églises) à l'occasion duquel les évêques d'Orient et d'Occident approuvèrent la première version universelle du Crédo, un "symbole" de la profession de foi reconnu par toutes les Églises dont le contenu est assez proche de sa version moderne.

Appelé le "Symbole de Nicée", il commence par ses mots : "Nous croyons en un Dieu, le Père tout puissant, créateur du ciel et de la terre, de l'univers visible et invisible, et en un Seigneur, Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, engendré du Père, c'est-à-dire, de la substance du Père. Dieu de Dieu, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu ; engendré et non fait, consubstantiel au Père ; par qui toutes choses ont été faites au ciel et en la terre....". Dans cet extrait, chaque verbe ou qualificatif associé au nom de Dieu, du Père ou du Fils est fondamental, dogmatique, ce qui suscita de nombreuses critiques des évêques dissidents (dont Arius), notamment les termes "engendré et non fait", "substance du Père", "consubstantiel au Père" évoqués plus haut.

Si pour un non croyant ces "jeux de mots" paraissent futiles, les Pères de l'Église, leurs successeurs et tous les croyants pratiquants prennent ces mots au pied de la lettre au point qu'il est impossible de discuter objectivement de ces questions, comme il est impossible de convertir un juif à la foi catholique et vice versa.

Quelques évêques d'Orient (dont Eusèbe de Nicomédie et Théognis de Nicée) favorables aux idées d'Arius refusèrent de destituer ce dernier et d'adhérer au Symbole de Nicée. La Grande Église les excommunia et l'empereur les bannit en Gaule. Ces hérétiques se repentirent en 328 mais dans le seul but inavoué de destituer les évêques nicéens sous de faux motifs personnels, des actions qui permirent lentement aux évêques ariens d'étendre leur pouvoir en Europe de l'Est. Finalement Arius fut réhabilité lors du concile de Tyr en 335 sans que les évêques n'évoquent sa doctrine, ce qui lui permit de reprendre la tête de son Église arienne.

Alors que la direction de l'Empire romain était déjà aux mains de deux autorités différentes (tant politiquement que théologiquement parlant) et que Rome était sous la menace des invasions barbares, à partir des années 340 l'ambassadeur des Goths, Wulfila, se convertit à l'arianisme. Séduit par cette religion et multilingue, Eusèbe lui confia la mission d'évangéliser les Barbares (Goths, Germains, Lombards, Burgondes, Francs, etc.). Ces conversions massives revigorèrent l'Église d'Arius au point qu'elle devint l'Église dominante à la fin du IVe siècle.

A lire : Histoire des conciles, Salve Regina

A gauche, une icône représentant l'empereur Constantin (au centre) entouré les évêques du concile de Nicée (325), tenant le texte du "Symbole de Nicée" dans sa forme liturgique grecque. En fait le texte est celui adopté au cours du concile de Constantinople en 381. Au centre, toujours à la tâche, Jérôme de Stridon (saint Jérôme alias San Girolamo) imaginé par Caravage. Ce tableau à l'huile sur toile de 112x157 cm aurait été commandé par Scipion Borghèse en 1605. Il est exposé à la Galleria Borghese. A droite, saint Jérôme dans son étude. Tableau à l'huile d'Antonello da Messina de 45.7x36.2 cm réalisé vers 1475. Il est exposée à la National Gallery de Londres.

Si rétrospectivement l'arianisation échoua, il faut reconnaître que nous devons à Wulfila la dominance actuelle du christianisme dans toute l'Europe et au-delà (et pour certains de ses membres d'avoir nié la divinité de Jésus - le fils de Dieu). On imagine très bien que sans l'action de Wulfila, le monde serait probablement resté païen et plus certainement encore qu'il serait devenu musulman avec tous les interdits et les obligations de ce type de constitution généralement théocratique et non démocratique.

Le Symbole de Nicée-Constantinople

En 381, le deuxième concile œcuménique de Constantinople confirma les conclusions (canons) de celui de Nicée. A cette occasion les évêques d'Orient approuvèrent la divinité de l'Esprit-Saint et le fait qu'il forme la Trinité avec le Père et le Fils. Aussitôt après, une lettre dogmatique exposant la foi sur base de la Trinité et de l'Incarnation divine fut envoyée à Rome. L'Église de Constantinople fut ensuite considérée comme occupant le premier rang d'honneur après celle de Rome. 

Il faut rappeler que le concept de "Saint-Esprit" est une notion chrétienne. En hébreu, le terme "esprit" ("רוח הקודש", ruwach) revête les mêmes significations qu'en français : l'inspiration, le souffle, le don spirituel, le vent, le désir, etc. Selon les codes Strong, ce terme apparaît 7307 fois dans l'Ancien Testament. Le terme "saint" et ses dérivés (qadash, qodesh, qadowsh) apparaît presque aussi souvent. L'expression "Saint Esprit" se dit "Rouah HaKodesh" en hébreu (L'Esprit le Saint) et est très peu utilisée. On la retrouve deux fois dans le Tanakh (Isaïe 51:13 sous la forme de la "colère" et Isaïe 63:10-11 qui évoque "l'esprit saint") et une troisième fois lorsque l'Eternel est accompagné de "son esprit" (Isaïe 48:16). Ce n'est donc pas une notion juive. En revanche, dans les textes grecs originaux du Nouveau Testament, le terme "Saint Esprit" est composé à partir de la racine "pneuma" (le souffle) associé au mot "agio" (saint) que les bibles grecques traduisent par "agio pneuma" ("άγιο πνεύμα"). Mais en réalité, le texte grec original utilise plutôt l'expression "esprit saint", l'emphase sur le "Saint-Esprit" étant chrétien et catholique pour insister sur le concept de Trinité souvent représenté par la colombe. Ce concept est donc bien une invention de l'Église.

A lire : Le Crédo des chrétiens

Les représentations habituelles de la Sainte Trinité, c'est-à-dire de Dieu représentant les trois personnes, le Père, le Fils et le Saint-Esprit. A gauche, miniature de la Trinité extraite du livre des "Grandes Heures" d'Anne de Bretagne, reine de France, datée de c.1503-1508. Les évangélistes sont également représentés dans les coins par le tétramorphe de la vision d'Ezéchiel (Ez 1:1-14) repris dans l'Apocalypse de Jean (Apoc. 4:7-8). Document BnF/Gallica. A sa droite, illustration du baptême du Christ par Jean et surmonté de la Trinité. Peinture à la tempera sur vélin datant de 1485-1486 reproduite dans l'ouvrage "Les Très Riches Heures du Duc de Berry" de Raymond Cazelles et Johannes Rathofer (2001). Elle est exposée au Musée Condé à Chantilly. A droite du centre, la plus ancienne icône orthodoxe de la Trinité. Elle fut peinte par le moine russe Andreï Roublev qui vécut de c.1360 à 1428. Elle est exposée dans la Galerie Tretyakov de Moscou. A sa droite, la "main de la miséricorde" du Christ (main droite uniquement) souvent représentée dans le Christ Pantocrator. Selon le manuel d'iconographie (1845, p455), "le second doigt, restant ouvert, indique un I (iôta), et le troisième forme, par sa courbure, un C (sigma). Le pouce se place en travers du quatrième doigt ; le cinquième est aussi un peu courbé, ce qui forme l’indication du mot (xpictoc) XC ; car la réunion du pouce et du quatrième doigt forme un X (chi), et le petit doigt forme par sa courbure, un C (sigma). Ces deux lettres sont l’abrégé de Christos." A l'extrême droite, la "main de la justice" (main gauche uniquement) qu'on retrouve dans certaines confréries et lors de la prestation de serment des élus dans certains gouvernements dont en Suisse et qu'on offre également lors du sacre des souverains, les trois doigts levés symbolisant la Trinité. Celle-ci fut réalisée en 1804 pour le sacre de Napoléon Ier à Notre Dame de Paris. Elle est constituée d'ivoire, de cuivre, d'or et de camée. Elle est présentée au Louvre, dans l'Aile Richelieu.

Qu'il soit d'obédience catholique ou arienne, le christianisme devint une religion d'État en 391. Désormais tous les fonctionnaires de l'Empire d'Occident doivent jurer fidélité au Christ. Dorénavant le pape (Damase à l'époque) siège à Rome, consacré "siège apostolique".

Puis arriva le pire. En 410, Rome fut mise à sac par Alaric et ses Goths après un siège de trois jours. "Horreur ! s'écrira saint Jérôme, l'univers s'écroule...". Heureusement, déjà christianisés, les barbares préservèrent les institutions religieuses. Mais pendant plus de six siècles la culture fut anecdotique bien que l'art resta splendide, les barbares étant plus versés dans la métallurgie et le maniement des armes que dans la théologie et le maniement du verbe. Aussi, la Cité de Dieu demeura le seul reconfort d'un peuple désormais sans avenir.

Découverte de la Basilique de Nicée

Les historiens comme le clergé se sont longtemps demandés si la fameuse Église de Nicée bâtie vers 390 avait réellement existé car sa trace avait apparemment disparu du paysage. Bonne nouvelle, en 2018 des chercheurs ont annoncé la découverte d'anciennes ruines enfouies sous la surface du lac d'Iznik en Turquie dont on voit une photo ci-dessous.

Les ruines de l'ancienne Basilique de Nicée de style Roman découvertes en 2014 (mais annoncée officiellement en 2018) au fond du lac d'Iznik en Turquie. Document Université Bursa Ulkudag.

Ce n'est pas une simple découverte archéologique. Après investigation, il s'agit de l'ancienne Basilique de la ville de Nicée (aujourd'hui Iznik), l'un des plus célèbres lieux historiques de la chrétienté et l'endroit où la Grande Église établit officiellement la relation entre Jésus et Dieu.

Alors que les chercheurs de l'Université Bursa Ulkudag avaient survolé le site en 2006 sans rien apercevoir, c'est en 2014 que des photos aériennes révélèrent pour la première fois des ruines au fond du lac d'Iznik ressemblant à l'église qu'ils avaient toujours recherché. Comme on le voit sur la photo, les soubassements de l'édifice sont parfaitement conservés. Les ruines se trouvent à 3 mètres de profondeur et environ 50 mètres du rivage. Le site se situe à 160 km d'Istanbul.

La basilique de style Roman était alors située au bord du rivage, au coeur de l'Empire Romain d'Orient, à une époque où Istanbul s'appelait encore Constantinople.

Pour quelle raison cet édifice est-il aujourd'hui noyé sous les eaux ? En 740, un tremblement de terre détruisit la basilique qui par la suite fut noyée par la montée des eaux, laissant les ruines à l'abri des regards pendant plus de 1600 ans.

Aujourd'hui, Alinur Aktas du gouvernement turc souhaite que le site devienne le premier musée archéologique sous-marin. Depuis 2015, une équipe du Musée Archéologique d'Iznik dirigée par Mustafa Sahin a entrepris des travaux d'excavations sur le site qui est recouvert de sédiments et d'algues. Mais le travail des plongeurs est difficile car ces recherches se font sous une visibilité réduite à quelques centimètres.

D'ores et déjà, les archéologues ont découvert sur le site des pièces de monnaies datant du règne des empereurs Valens (364-378) et Valentinien II (375-392) qui démontrent que la basilique fut érigée après l'an 390.

Selon les chercheurs, il semble que cette église cache un autre trésor car des pièces de monnaie et une ancienne lampe à huile découvertes sur le site semblent attester qu'un temple païen fut construit avant la basilique. Il s'agirait des ruines d'un ancien temple dédié à Apollon, le dieu grec et romain du Soleil. En effet, au début de la chrétienté cette divinité fut parfois associée à Jésus. Les annales romaines relatent que l'empereur Commodus qui régna entre 180 et 192 fit construire à Nicée (Nicea) un temple à Apollon, à l'extérieur des fortifications de la cité.

Selon Sahin, si le projet de musée sous-marin est approuvé, sa construction pourrait débuter en 2018 et le site serait ouvert au public en 2019. Il comprendrait une tour de 20 m de hauteur qui permetrait de voir les ruines depuis le rivage ainsi qu'une passerelle surplombant le site submergé.

Deuxième partie

La substance du Fils de Dieu

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