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La biodiversité Faut-il donner un statut aux animaux ? (V) Une question d'éthique Telle est la question éthique que s'est posée en 2014 le biologiste Yves Christen de l'Institut Sanofi Pasteur dans son livre "L'Animal est-il une personne ?". Sa question fondamentalement politique s'est rapidement transformée en une revendication sur les réseaux sociaux par certains groupes de défense des animaux comme L214 qui vont jusqu'à considérer que l'animal est une personne sensible, les deux termes ayant un sens juridique précis (voir plus bas). Ils estiment donc qu'on ne peut pas faire souffrir les animaux, ni les mettre en cage ou les tuer et n'hésitent pas par exemple à organiser des opérations commandos pour libérer des animaux dans les abattoirs. Bien sûr, leurs actions sont en violation avec les lois existantes et compris les droits des entreprises à faire du commerce, etc. Malheureusement les arguments de ces défenseurs des animaux sont très discutables (sans parler que certains censurent toute forme d'opposition), car ils ne veulent visiblement pas considérer toutes les conséquences de leur revendication, des effets pourtant majeurs pour l'avenir de l'humanité que nous allons examiner. Etant donné que la biodiversité disparaît de la faute des hommes et qu'on maltraite encore souvent les animaux, y compris des mammifères comme les animaux de laboratoire, de ferme et domestiques, les associations de protection des animaux ont émis l'idée de donner des droits aux animaux pour mieux les protéger et poursuivre les contrevenants. Christen sait de quoi il parle et développe adroitement son argumentaire en pas moins de 538 pages. Plus récemment, en 2022 plus de 550 chercheurs en philosophie morale et politique ont publié "La Déclaration de Montréal sur l'exploitation animale" dans laquelle ils dénoncent l'exploitation animale. Ils affirment sans équivoque que l'utilisation actuelle des animaux non-humains comme ressources est moralement répréhensible et doit cesser. Mais ces points de vue sont-ils réalistes ? Défendre la cause animale est évidemment noble et nous aimerions tous mieux protéger la nature. A ce titre le rôle de Greenpeace, du WWF, de la SPA, de GAIA ou même de L214 qui soutient l'éthique animale et veut leur accorder des droits est utile pour sensibiliser les consciences et mettre les politiciens face à leurs responsabilités. Mais comme en toute chose, il faut relativiser et prendre la mesure des effets de toute règle et bien faire la distinction entre la protection et l'interdiction, le respect et l'abus. Tout excès conduit à des dangers et des risques incontrôlés. A l'heure où une grande partie du monde souffre pour survivre, il paraît difficile de considérer que la protection des animaux passe par leur attribuer des droits car les intérêts des hommes ont toujours été prioritaires sur ceux des autres espèces (sans parler que même entre hommes nous parvenons encore à nous détruire). En effet, en beaucoup d'endroits du monde les animaux sont en concurrence avec les hommes, notamment pour l'accès à l'eau quand ils ne détruisent pas les récoltes ou tuent des imprudents (des adultes allant puiser de l'eau ou chercher de la nourriture et des enfants sont encore attaqués par des tigres, des crocodiles, des requins ou même des éléphants en colère). Il serait difficile d'expliquer aux plus pauvres ou aux fermiers (mais en réalité à tout le monde) que les animaux qu'ils éloignent, veulent déplacer ou tuer ont les mêmes droits qu'eux et que pour cette raison ils crèveront de soif et de faim au bénéfice des éléphants, des grands singes et des prédateurs comme les tigres, les loups ou les ours, sans parler des poissons qui auraient alors le droit de vivre sur leurs terres ou dans leurs eaux au même titre qu'eux et donc de devoir partager les ressources, eau et nourriture, avec eux. Les plus radicaux répondent que la solution existe déjà : elle consiste à supprimer tous les aliments provenant des animaux et de se rabattre sur l'alimentation végétale ou même végane. Ce n'est pas aussi simple que le prétendent ces radicaux. On reviendra sur ces régimes alimentaires dans l'article consacré à l'obésité. Si les animaux étaient des personnes Si on considère que les animaux sont des personnes, alors ils bénéficient exactement des mêmes droits que les humains. Dans ce cas la chasse, la pêche, l'élevage, les fermes, les zoos, les réserves et l'expérimentation animale doivent être interdits car on assassine des "personnes" à poils, à plumes ou à écailles, on les met en esclavage et on les parque "comme des bêtes" avant de les tuer, on effectue des expériences sur elles contre leur volonté et sans qu'elles puissent se défendre ou on les écrase sur les chemins, sur les vitres et les pare-brises. Veut-on réellement en arriver là ? Si on voit les choses aussi radicalement, alors nous aurons rapidement du mal à assurer notre subsistance. En fait, il est peu probable que la population et d'autant plus les lobbies et les instances internationales acceptent cette idée. Si le but n'est pas d'accorder les "pleins droits" et qui sait les "pleins pouvoirs" des personnes aux animaux, peut-on envisager d'inventer une "sous-espèce" de personne pour les protéger ? Cette solution est tout aussi critiquable. En effet, cela risque vite de dériver et dégénérer vers l'eugénisme où certains gouvernements profiteront de cette législation pour se débarrasser des "indésirables" et des minorités en "déclassant" certains humains jugés "à risque". A terme, cette politique écoeurante risque de diviser l'humanité en deux classes. Défini en ces termes, le débat s'étend vers des horizons encore plus ségrégationnistes qu'aujourd'hui qu'on ne peut évidemment pas cautionner. Enfin, certains se demandent s'il faut réellement mettre sur le même pied (ou la même patte) tous les animaux : les cafards et autres nuisibles seraient-ils des personnes au même titre que les mammifères comme les grands singes ? Vu sous cet angle, le débat est loin d'être clos. En fait, le seul sujet vraiment à l'ordre du jour est la question éthique et le respect des animaux. En revanche, si nous sommes soi-disant si intelligents et supérieurs aux animaux, nous pouvons trouver les moyens de vivre en harmonie avec eux sans pour cela les condamner ou leur accorder les mêmes droits que les être humains. Des animaux sensibles Nous avons déjà constatés à quel point les animaux domestiques (chats, chiens) mais également d'élevage (vaches, poules, poussins, etc) et certains animaux sauvages (singes, lions, guépards, panthères, éléphants, loups, biche, cobayes, souris, écureils, oiseaux, dauphins, baleines, poissons, poulpes, etc) et même leurs bébés sont capables d'éprouver des émotions, y compris de ressentir la douleur et la peine, de vous reconnaître et d'apprécier votre présence et de jouer avec vous ou avec un autre animal. Les plus doués et pas nécessairement les plus évolués se reconnaissent dans un miroir, y compris certains perroquets, poissons et même des fourmis (cf. M.-C. & R. Cammaerts, 2015 et sa critique par G.G. Gallup et al., 2018). La plupart des espèces peuvent aussi être agressives à l'occasion, mordre, piquer ou griffer, défendre leur progéniture ou leur territoire voire même tuer dans le cas des prédateurs. Plus récemment, des chercheurs de l'Université de Londres ont découvert que les animaux et notamment les bourdons sont sensibles à la douleur car ils évitent de se brûler (cf. L.Chittka et al., 2022). On peut en dire autant des crabes vivants près des fumeurs noires portées à 350°C dans les abysses. Nous sommes donc tous d'accord que la sensibilité est relativement facile à reconnaître chez les animaux même si parfois nous l'interprétons sur base anthropomorphique sans savoir si l'animal concerné ressent vraiment la même chose que nous. Mais comment réellement le savoir sans être dans sa peau ? On peut juste reconnaître des changements comportementaux révélateurs d'une émotion, d'une joie, d'une douleur ou d'une agressivité par exemple qui ressemble à celle que nous ressentirions dans la même situation. Mais ce ne seront toujours que des inférences comme en proposait Artistote il y a plus de 2300 ans, des prémisses déduites d'observations mais qui ne valent jamais une théorie validée. Malgré ces limitations, il y a un consens scientifique autour du fait que la plupart des animaux terrestres, volants et marins sont dotés d'une forme d'intelligence et éprouvent des émotions qui en font des animaux sensibles, ce qu'avait déjà proposé le philosophe et écrivain Jean-Jacques Rousseau au XVIIIe siècle qui accordait une âme et une sensibilité aux animaux. Après les scandales des animaux maltraités dans les abattoirs, dans les fermes d'élevage intensif au sol, dans certains zoos, les abattages à vif à l'occasion de fêtes musulmanes et la maltraitance des animaux domestiques dans les ménageries et sur les marchés clandestins, l'Europe décida de légiférer et de durcir ses lois pour améliorer le bien-être animal. En 2012, l'Union européenne reconnut officiellement "La sensibilité animale" dans l'Article 13 du "Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne" (TFEU) obligeant les États membres à considérer moralement et à traiter les animaux avec soin et respect. C'est en 2015 que la France reconnut dans son Code civil que les animaux sont des "être sensibles" mais toujours pas dans sa Constitution. Ceci dit, si le Code civil français n'est pas constitutionnalisé, il contribue à élargir la notion de Constitution. Toutefois l'union des deux reste un sujet de réflexion depuis des décennies. En 2024, la Belgique inscrivit enfin la sensibilité animale dans sa Constitution (cf. la proposition de loi qui fut prouvée à l'unanimité moins 3 absentions). C'est le sixième pays de l'Union après l'Italie, l'Allemagne, le Luxembourg, la Slovénie et l'Autriche. La Suisse, l'Égypte, le Brésil et l'Inde l'ont également inscrit dans leur Constitution. L'Article 7 bis de la Constitution belge déclare : "Dans l'exercice de leurs compétences respectives, l’État fédéral, les Communautés et les Régions veillent à la protection et au bien-être des animaux en tant qu’êtres sensibles". Des animaux dotés de conscience Quant à la conscience, c'est un sujet vaste et très complexe. Les scientifique la divisent en deux composantes, l'éveil et la conscience proprement dite mais cela relève plus de considérations médicales. Le point de vue philosophique est plus nuancé et distingue trois types de conscience, de la plus simple à la plus complexe : la conscience d'accès, la conscience phénoménale ou émotive et la conscience de soi. Si on la comprend plus ou moins bien chez l'être humain sans pour autant savoir exactement où elle réside, ça se complique chez les animaux car la majorité d'entre eux n'a pas la même structure cérébrale que les humains. Beaucoup d'animaux semblent agir de façon innée, répondant systématiquement et toujours de la même manière à un stimulus sans action réfléchie. Mais certains animaux sont capables de réfléchir consciemment pour résoudre un problème et d'anticiper leurs actions. Leur niveau de conscience est donc très développé et font preuve d'intelligence.
Quand la nature de la conscience d'un animal nous échappe, on peut utiliser des stratégies pour étudier son comportement et ses émotions éventuelles, notamment à travers des exercices qui activent son "système de récompense". Ces méthodes peuvent même s'appliquer aux insectes (cf. K.C. Berridge et M.L. Kringelbach, 2008, C.J. Perry et A.B. Barron, 2013 et E.Sovik et al., 2015) et dans une certaine mesure aux animaux primitifs comme les slimes et les microbes. Mais le fait qu'un animal réagisse à un stimulus n'est pas un preuve de conscience phénoménale ou de soi car il peut juste s'agir d'une action réflexe de type mécanique ou chimique sans acte conscient élaboré. Le premier texte sur la conscience des animaux date de 2012 avec la "Déclaration de Cambdridge sur la Conscience" (en francais). Les auteurs réfutent notamment l'idée selon laquelle le néocortex serait un prérequis pour développer la conscience, offrant la possibilité que d'autres animaux que les mammifères puissent être dotés de conscience. Mais une petite remarque en bas de la dernière page de leur article précise que pour des raisons anatomiques (absence de structures cérébrales adéquates), les auteurs n'accordent pas de conscience aux crustacés, aux mollusques à l'exception du poulpe (car ils l'ont étudié), et aux insectes. En réalité peu d'études sur les facultés cognitives de ces autres espèces ont été réalisées, d'où une tendance vers le spécisme (l'idée de discriminer les animaux humains des animaux non-humains) et vers le déni de sentience de ces animaux. A l'inverse, il y a le risque de faire de l'anthromorphisme et de l'anti-spécisme, c'est-à-dire de voir de l'émotion et de la sentience chez tous les animaux non-humains et par conséquent de les considérer comme semblables aux humains, au point de mettre en péril l'humanisme qui accorde une place privilégée à l'être humain. Mais en général, ces points de vue philosophiques se sont pas étayés scientifiquement. Ce sont des impressions, des inférences, des interprétations non fondées et les scientifiques ont bien conscience que toutes ces dérives ne sont pas morales (cf. plus bas la Déclaration de New York). Dans un article publié en 2017 (lire le résumé en français), des membres de l'INRA en France concluaient que les animaux vertébrés sont dotés d'une certaine forme de conscience. Enfin, le 19 avril 2024 un groupe de scientifiques et de philosophes publia "La Déclaration de New York sur la Conscience Animale" qui marque une reconnaissance importante des preuves scientifiques croissantes selon lesquelles un large éventail d'animaux, y compris tous les vertébrés et de nombreux invertébrés, sont probablement conscients et capables d'expérimenter subjectivement leur environnement. Les auteurs soulignent qu'il n'est pas nécessaire d'avoir une certitude absolue de la conscience des animaux pour leur accorder une considération morale. Il existe de bonnes raisons de penser que de nombreux invertébrés sont conscients, et une possibilité réaliste de sensibilité crée une obligation d'éviter de faire des choses qui pourraient leur nuire. Cette reconnaissance scientifique de la possible sensibilité des invertébrés crée un besoin urgent de mener des études plus sérieuses pour comprendre ce qui pourrait leur nuire ou leur être utile. Ces recherches sont essentielles pour éclairer les politiques fondées sur des données probantes visant à protéger leur bien-être. Il y a donc un consensus scientifique autour du fait que les animaux sont sensibles et même qu'un certain nombre sont dotés d'une conscience assez élaborée avec des émotions et une conscience de soi. Des animaux dotés de sentience Depuis quelques années, des philosophes et des scientifiques parlent de la sentience des animaux, la capacité qu'ils ont d'avoir une forme de conscience et de sensibilité. C'est une notion plus précise que la conscience et différente de la sensibilité qui est un terme trop vague. Certains ingénieurs appliquent même abusivement ce terme aux intelligences artificielles. La sentience concerne les mammifères mais également les oiseaux, certains reptiles et mollusques, dont les pieuvres et les seiches voire même certains insectes comme les fourmis et les arthropodes comme les araignées (cf. J.Birch et al., 2021; L.Chittka et al., 2022). Quant aux végétaux, s'ils réagissent à la lumière, à une action mécanique ou chimique, la capacité de sentience n'a pas été démontrée. Ici le qualificatif péjoratif d'être "un légume" a tout son sens. A ce jour, personne ne peut affirmer qu'une abeille, un papillon ou une coquille saint-Jacques n'est pas dotée de sentience. Quand on voit comment elle s'active et réagit, on serait tenté de le croire. Une seule chose est sûre. Ces animaux analysent leur environnement, ils ressentent la présence des prédateurs et de leurs congénères et réagissent en conséquence. Est-ce des actes innés et réflexes ou conscients avec des émotions, c'est toute la question qui demandera encore beaucoup de recherches. En 2021, le gouvernement britannique amenda sa législation en intégrant les céphalopodes et les crustacés décapodes dans certains textes de protection animale tels l'Animal Welfare Bill (Sentience Bill). La sentience donne donc une conscience (d'accès, phénoménale et parfois de soi) et une sensibilité à certains animaux. Cette capacité leur donne donc plus de droits et d'autant plus sachant qu'il s'agit de créatures vulnérables. Education et mesures légales Ne nous leurrons pas, les lois n'arrêteront pas les délis et les abus sur les animaux. Seules les amendes et la prison arrêteront les auteurs de délits et mieux encore, l'éducation des plus jeunes leur inculquera dès l'enfance le respect des animaux et de la Terre qui les porte. Respecter les créatures sensibles ou dotés de sentience et leur donner des droits passe par une meilleure sensibilisation du public et ce dès l'école primaire partout dans le monde, des lois plus rigoureuses, un meilleure surveillance des espèces en voie de disparition et la création de sanctuaires et autres parcs naturels qu'il faut bien sûr surveiller.
Ceci dit, même s'il existe des lois internationales reconnaissant qu'il existe des espèces en voie de disparition qu'il faut protéger (ou d'autres interdisant la maltraitance ou la chasse sportive), beaucoup de pays refusent encore de ratifier ces accords ou ces traités sous prétexte que certains animaux figurant dans ces listes font partie de leur économie (par exemple la baleine au Japon, la tortue ou le requin en Indonésie). Ainsi, 126 pays n'ont pas encore ratifié les dispositions de la CITES dont l'Union européenne, la Russie, la France et le Japon ! Certains pêcheurs industriels se moquent également des traités internationaux et vont jusqu'à tirer leurs filets dans les réserves. Quant aux propriétaires privés ayant acheté des terres en Afrique du Sud, la législation ne leur interdit pas d'offrir aux chasseurs amateurs la possibilité de tirer un lion moyennant 50000$ ou 100000$ (cf. la mort du lion Cecil en 2015). Chacun sait que l'argent n'a pas d'odeur ! Si les mesures légales n'éviteront donc jamais le braconnage, la maltraitance et les abus, elles ont le mérite d'exister et d'avoir déjà réduit l'hécatombe. Ainsi comme le rappelle le National Geographic, suite à la mort du lion Cecil, les lois sur la chasse ont été durcies et plus de 40 sociétés de transport aérien ont interdit le transport des trophées de lion, de rhino, de léopard et du buffle du Cap. Et si ces trophées sont expédiés par bateau, ils seront également confisqués par la douane et le propriétaire pénalisé d'une amende. Mais pourquoi le gouvernement sud-africain n'interdit-il pas tout simplement la chasse des animaux à titre privé ? La réponse est simple : le pays est corrompu ! (cf. l'article sur Ubuntu et l'Afrique du Sud aujourdhui). Cela veut dire que le président Zuma s'intéresse plus à ses propre intérêts et à l'avis de la classe dirigeante blanche qui règne en maître sur l'Afrique du Sud qu'à l'avenir de la population noire et souvent pauvre laissée pour compte. S'il fait déjà peu de cas de certains êtres humains, pourquoi s'intéresserait-il au sort des animaux, d'autant moins que la chasse rapporte des devises au pays. Sans envisager le boycott de l'Afrique du Sud qui nuirait surtout aux plus pauvres, seule la pression des ONG et l'opinion du monde politique pourraient changer les mentalités. Derniers états de santé de la planète Le 29 mars 2005, dans le cadre des études sur le changement global, l'OMS publia un rapport sur l'état de santé de la planète. Le communiqué de presse résumait toute l'ampleur du problème : "Les atteintes aux écosystèmes menacent de plus en plus la santé de l'homme". Le constat était clair, annoncé tel un signe d'impuissance des autorités devant le saccage de la nature. Ce rapport de synthèse intitulé "L'évaluation des écosystèmes pour le millénaire" (EM) résume les résultats d'une enquête demandée par l'ONU qui a mobilisé, pendant quatre ans, plus de 1300 experts de 95 pays. Ce rapport établit qu'environ 60% des bienfaits que procure l'écosystème mondial pour soutenir la vie sur Terre (eau douce, air pur et climat relativement stable) sont en voie de détérioration ou utilisés de façon non viable. Selon l'OMS, les conséquences dommageables de cette détérioration pour la santé humaine ont été plus importantes depuis 1960 qu'au cours des deux siècles précédents. Ces conséquences se font déjà sentir et pourraient s'aggraver sensiblement au cours des 50 prochaines années. Ainsi, suite à la pollution de l'atmosphère, on peut prédire qu'un enfant sur sept sera asthmatique.
Le rapport EM prévoit que l'érosion des écosystèmes pourrait entraîner une augmentation des maladies existantes telles que le paludisme et le choléra, ainsi qu'un risque accru de nouvelles maladies émergentes du fait de la disparition des biotopes des virus. Kerstein Leinter, membre de l'OMS et associé au rapport EM rappela que "ce sont les écosystèmes qui entretiennent la vie sur la planète. Ils sont essentiels pour la santé et indispensables au bien-être des populations partout dans le monde. Les travaux de l'EM montrent clairement l'interdépendance entre les écosystèmes et la santé humaine - et combien il est important que les décisions liées au développement économique protègent aussi l'environnement afin de sauvegarder en définitive la santé humaine". Il existe deux manières d'éviter les maladies et les traumatismes consécutifs à la désorganisation de l'écosystème. L'une d'elle consiste à prévenir, à limiter ou à combattre la détérioration de l'environnement; l'autre est de trouver les moyens de protéger les personnes et les populations des conséquences de l'évolution défavorable de l'écosystème mondial. Les liens entre les changements environnementaux et la santé humaine sont d'autant plus complexes qu'ils sont souvents indirects, décalés dans l'espace et dans le temps, et qu'ils dépendent d'un certain nombre de facteurs. Pour Carlos Corvalan de l'OMS et qui collabora également au rapport EM, "l'une des conclusions frappantes de cette évaluation, et qui a une portée très vaste, est la nécessité fondamentale d'assurer la pérennité écologique afin de sauvegarder les écosystèmes et de protéger ainsi la santé humaine sur le long terme. Là où la mauvaise santé est due à une surconsommation des éléments fournis par l'écosystème tels que l'eau, les denrées alimentaires et l'énergie, une réduction sensible de la consommation - assortie du droit des communautés marginalisées d'accéder aux ressources essentielles - aurait des effets bénéfiques majeurs sur la santé". Le constat des experts est donc alarmant : si nous continuons à épuiser la terre à l'allure actuelle nous ne sommes pas certains qu'elle puisse supporter notre mode de vie encore 50 ans. A l'heure actuelle 60% des écosystèmes permettant la vie dans ses différents biotopes ont été, à des degrés divers, dégradés par les activités humaines. On peut rapprocher ce pourcentage du nombre d'espèces qui, estime-t-on, disparaîtront d'ici 300 ans si rien ne change : 60% de la biocénose. Restera alors sur Terre moins de 10 millions d'espèces animales et végétales. Au sommet de ces communautés se trouve l'homme. Mais sachez déjà que si notre autodestruction était éventuellement programmée, malgré toute notre science, nous ne disparaîtrions pas en dernier lieu, tel le dernier rempart face à la sixième extinction. Des créatures plus insignifiantes mais oh combien mieux adaptées et tout aussi bien organisées règneront après nous : les insectes et les microbes ! Malgré tout le respect que nous leur devons, ne laissons pas la terre aux cafards ! La biodiversité, gage de notre avenir Compte tenu du taux extrêmement rapide auquel disparaissent les espèces, si nous laissons faire les choses, en colonisant de nouvelles terres vierges et en ne protégeant pas les sites naturels, nous adoptons une attitude criminelle car nous assassinons délibérément les enfants de dame Nature ! Nous sommes en train de dépeupler la Terre pour assouvir jusqu'à sasiété et en-dehors de toute limite nos passions, notre goût de l'exotisme et du luxe ! A l'inverse du tigre de Sumatra présenté ci-dessous, un superprédateur au regard aiguisé qui connait d'instinct les règles de la survie et s'adapte aux circonstances, nous avons perdu nos instincts qui sont pour l'essentiel inconscients ou refoulés et devons réapprendre à voir le monde, à sentir le pouls de la Nature. Malheureusement, malgré toute la force, la férocité et la ruse de ce tigre, il est démuni face aux hommes et a subi leurs actions sanguinaires au point que sa population est aujourd'hui réduite à 300 ou 400 individus dans le monde : il est en Annexe I de la CITES. Quand on sait qu'un tigre ne vit qu'environ 15 ans, on comprend toute l'urgence de préserver son espèce de l'extinction. Idem pour le chimpanzé. Bien qu'il puisse vivre plus de 60 ans en captivité et 40-50 ans dans la nature, quand on croise toute la puissance de son regard, on ne peut s'empêcher de ressentir toute la responsabilité qui pèse sur nos épaules. Au début du XXe siècle, il existait 1 à 2 millions de chimpanzés. En 2021, on estimait qu'il en restait entre 170000 et 300000. Leur survie ne dépend que de nous. Alors arrêtons d'être égoïstes et pensons un peu plus aux créatures qui nous entourent avant qu'elles ne disparaissent définitivement. Que l'homme fasse attention aux blessures qu'il inflige à dame Nature car ainsi que nous l'observons déjà avec l'effet de serre lié à nos activités industrielles et la raréfaction des ressources naturelles, un jour ou l'autre c'est toute la nature qui se retournera contre nous, bien sûr de manière imperceptible et naturelle, mais de la manière la plus surnoise du fait que nous sommes dans le déni et refusons la vérité et par conséquent d'agir dans l'intérêt de tous depuis plusieurs générations : perte de biodiversité, végétation malade, érosion des terres arables, terres stériles, eaux polluées, pluies acides, virus émergeants, microbiote appauvri, maladies chroniques, cancers... Cela a déjà commencé. A consulter : Africat Foundation Organisation de protection des guépards et léopards en Namibie Adopt a Cat, The Big Cat Sanctuary Sauvez un chimpanzé grâce à l'action de l'Institut Jane Goodall
Pour clôturer cette prise de conscience, si les faits et les discours officiels ne vous ont pas encore convaincus qu'il était grand temps d'agir, voici une dernier commentaire plus percutant. Depuis que l'homme a décidé de conquérir la planète et d'utiliser toutes les ressources de la terre comme de la mer à sa guise, il a contribué à l'extinction de.... dizaines de millions d'espèces ! Pendant des millions d'années, ces espèces ont patiemment évolué en l'absence de l'homme qui dès qu'il apparut a saccagé leurs territoires et détruit leurs moyens de survie en l'espace de quelques décennies ! Comment peut-on accepter ce mépris de la nature, cet égoïsme et cette arrogance de l'homme ? De quel droit nous autorisons-nous à décider de la vie ou de la mort des animaux ou de toute chose vivant sur terre ? Le profit immédiat est-il la seule raison de notre existence ? Ignore-t-on encore qu'il n'existe qu'une seule planète Terre et qu'il faut impérativement protéger ses formes de vie ? Que fera-t-on le jour où la dernière espèce sauvage aura disparu ? Il sera trop tard pour pleurer ! Si vous avez du coeur, c'est maintenant qu'il faut pleurer en prenant conscience du triste sort que l'on réserve à toutes les créatures qui nous entourent et menacées d'extinction par notre faute. C'est maintenant qu'il faut agir pour empêcher que ce désastre ne se réalise ! Prenez les milliards d'insectes et de microbes qui peuplent nos contrées. Il serait tout de même insensé d'avoir chevauché tant de contrées par monts et par vaux, d'avoir combattu tant de hordes ennemies et protégé nos êtres chers et nos biens durant tant de millions d'années pour finalement abandonner le combat et la planète à ces êtres qui n'ont même pas conscience d'exister, ne trouvez-vous pas ? Rien qu'à ce titre et en mémoire de nos ancêtres, cela vaut la peine de nous battre pour préserver la biodiversité et consolider la branche sur laquelle nous sommes tous assis. Ce ne serait pas faire preuve d'intelligence et serions même encore plus stupides et inconscients que ces insectes ou ces microbes si nous ne comprenions pas ces cris d'alarme lancés par dame Nature. Si c'est le cas, le jour venu ils pourront bien représenter les créatures les plus intelligentes du monde. Ne leur offrons pas cette opportunité, voulez-vous. Comme vous, j'aimerais autant laisser à la postérité autre chose que... des mouches ! A
voir : Don't
Choose Extinction,
UNDP, 2021
2050, c'est demain. Les adultes qui vivront à cette époque sont déjà là. Certains de ceux qui vivront dans un siècle sont déjà nés aussi. Les actions que nous menons aujourd'hui les concernent au premier chef et ils seront encore là dans 50 ans pour nous juger. Donnons-leur bonne impression. Pour l'heure on peut avoir un mauvais pressentiment car les discours et les chiffres s'emballent sans que beaucoup de personnes se sentent concernées. Certes, en Occident chacun est conscient qu'il vaut gérer la société en tenant compte de la protection de l'environnement et chacun reconnait qu'il est indécent et inutile de tuer des animaux par plaisir. Mais rares sont les personnes qui s'engagent concrètement sur le terrain ou supportent financièrement les associations écologiques ou de protection des animaux. Certains gouvernements se sont fixés des objectifs concrets mais leur application dépend d'une législature à l'autre. Aidez-nous à protéger la Terre et vos petits-enfants vous remercieront. Nous devons agir maintenant pour ne pas avoir à pleurer demain sur le cerceuil de Gaïa et de nos semblables. Je compte sur vous pour transmettre le message et sensibiliser votre entourage à la fragilité des écosystèmes. Ce n'est plus un souhait, c'est devenu le premier commandement de la constitution d'un nouveau monde plus équilibré. Oui, cela doit devenir un enjeu politique. Tant que nous ne comprenons pas cela, la survie de la biosphère sera en sursis. La biodiversité est notre assurance-vie. Les actions écologiques vous passionnent ? Vous avez la rage et souhaitez agir dans le bien général ?
Bases de données et Big data PlantNet (app pour smartphone) Merlin Bird ID (app pour smartphone) BirdNET (app pour smartphone) Liste des champignons comestibles, Wikiless Base de données mycologique (mycodb) Picture Mushroom - Mushroom ID (app pour smartphones) Champignouf (app pour smartphones) et version web Les champignons, Mycorance Champignons, Connaître la Nature Catalogue of Life (ITIS) Encyclopedia of Life (EOL) Map of Life (MOL) Organisations francophones Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO) MediaBase de la FAO (salle de presse et photothèque) Musée National d'Histoire Naturelle (F) Europa-Recherche, les dossiers de l'Union européenne Les énergies renouvelables (CERN) One voice (F) Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable (F) Commission Interdépartementale du Développement Durable (B) Organisations anglophones Nations Unies (ONU) Les rapports de synthèse de l'ONU (ONU, WWAP) World Heritage (UNESCO) Organisation Mondiale de la Santé (OMS, Global Change) International Union for the Conservation of Nature and Natural Resources (IUCN) Red List (espèces menacées d'extinction) CITES (application de la Convention de Washington) Convention on Biological Diversity Human Activities and their Impacts (The Canadian Biodiversity Web Site) ICES (Conseil International pour l'Exploration de la Mer) Millenium Ecosystem Assessment Smithsonian Tropical Research Institute (STRI) International Geosphere and Biosphere Programme (IGBP) World Wildlife Fund (WWF) National Geographic - Earthpulse Documentaires Home, Yann Arthus-Bertrand, 2009, YouTube Planète Terre, BBC, 2007 Une vérité qui dérange, Al Gore, 2006 Publications The biomass distribution on Earth, Ron Milo et al., PNAS, 2018 Human race just 0.01% of all life but has eradicated most other living things (revue de l'article des PNAS 2018), The Guardian, 2018 New Species of Vertebrates and Plants in the Amazon 2014-2015 (PDF), WWF/Institut Mamiraua, 2017 Le volcanisme et les crises de la biodiversité (PDF de 21.7 MB), Pierre Thomas/ENS/OSU Lyon Livres La 6e Extinction, Elisabeth Kolbert, Vuibert, 2015 Biodiversité : vers une sixième extinction de masse ?, R.Billé et al., La ville brûle, 2014 Biodiversité et évolution du monde vivant, D.Garon et al., EDP Sciences, 2013 Biologie de la conservation, Richard B. Primack et al., Dunod, 2012 Biologie, Neil Campbell et al., Pearson, 2012 La sixième extinction : Évolution et catastrophes, Roger Lewin et Richard Leakey, Flammarion, 1998; Champs-Sciences, 2011 Un jour sur Terre, Mark Linfield, 2008 Précis d'écologie, Roger Dajoz, Dunod, 2006 Le monde fabuleux des plantes. Pourquoi la Terre est verte, John King, Belin/Pour la Science, 2004 La vie est belle. Les surprises de l'évolution, Stephen J. Gould, Seuil, 1998; Seuil Points Sciences, 2004 Ecocide : Une brève histoire de l'extinction en masse des espèces, Franz J. Broswimmer, Paragon, 2003 Biodiversity II, NAS et al., Henry Joseph Press, 1995. Retour à L'Ecologie et l'Environnement
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