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Les remèdes contre la Covid-19

Document adapté de Shutterstock.

Introduction

D'abord oubliez toutes les rumeurs que vous entendez ou lisez sur les réseaux sociaux sur le soi-disant effet de certaines nourritures, vitamines, produits ou régimes sur les virus. Tout ce que permet la nourriture c'est au mieux de booster votre système immunitaire mais elle n'a pas d'effet direct sur la charge virale.

Nous verrons à propos de l'élimination des virus qu'on peut en revanche les dénaturer, les neutraliser ou les détruire lorsqu'ils sont présents sur des surfaces ou des textiles au moyen de produits désinfectants, d'alcool, de rayonnement UVC ou de la chaleur.

Les cellules peuvent mourir de plusieurs façons : de mort naturelle ou en cas d'infection par nécrose ou apoptose, c'est-à-dire autodestruction (cf. la mort cellulaire). Ces deux dernières solutions sont celles de la dernière chance car si la réaction devient incontrôlable comme dans le cas d'une inflammation généralisée, elle peut conduire au décès du patient.

Ces mécanismes immunitaires ne sont donc pas des armes absolues et leur pouvoir est limité. Quand l'organisme est incapable de neutraliser une attaque virale, il ne peut que subir la loi du plus fort et succomber, c'est la mort. Ca c'était avant que l'homme fasse son apparition et invente des médicaments. Des dizaines de solutions (remèdes et vaccins) ont été développées contre le SARS-CoV-2 et la Covid-19 dont voici une revue générale.

Notons que nous distinguons le Covid-19 quand le médicament (un vaccin) s'attaque directement au virus, de la Covid-19 quand le médicament (un remède) vise à atténuer ou éviter les symptômes de la maladie. Parfois la nuance est subtile lorsque par exemple un médicament empêche le virus de se lier à la cellule hôte; la solution thérapeutique joue à la fois sur la propagation du virus et sur celle de la maladie si elle est déjà déclarée.

Recherche appliquée

Ce domaine de la recherche représente tous les moyens scientifiques (les connaissances) et technologiques (les outils) développés dans un but pratique déterminé, ici la recherche d'un moyen pour mettre fin à la pandémie de Covid-19, en particulier pour neutraliser et dénaturer la charge virale. C'est le moment de mettre en production des inventions et de commercialiser des technologies innovantes (cf. toutes les inventions sorties durant la Seconce guere mondiale) ou de produire en masse les produits en pénurie.

Document KTS Design.

Même si juridiquement la plus haute autorité du pays ne peut pas obliger les entreprises à produire quoi que ce soit, elle peut leur ordonner de fabriquer par exemple des masques de protection ou des respirateurs en masse. On n'imagine pas qu'une entreprise capable d'en produire puisse refuser. En bonne citoyenne, moralement elle ne peut pas refuser d'aider son pays en période de crise.

C'est sur cette fibre patriotique qu'ont joué notamment les chefs de gouvernement et les présidents et grâce à laquelle le gouvernement chinois est parvenu à ralentir l'épidémie (cf. la construction d'urgence de plusieurs hôpitaux et la fabrication massive de masques de protection). Il en est de même de la volonté des laboratoires de trouver rapidement un remède ou un vaccin.

On estimait courant janvier 2020 qu'il faudrait 18 mois pour mettre au point un vaccin. Si on se base sur l'épidémie du SARS survenue en 2003 liée à une infection causée par un coronavirus alors inconnu de la même famille que le SARS-CoV-2, grâce à des mesures d'isolement et de quarantaine, il fallut 4 mois pour endiguer l'épidémie. Mais ce virus avait contaminé en moyenne 3.2 personnes par jour contre plus de 370 par jour pour le Covid-19 (en 4 mois). Si tous les pays concernés prennent des mesures similaires, on pouvait donc supposer qu'il faudra au moins 4 mois pour endiguer la propagation du Covid-19. Dans les faits, le premier vaccin contre le Covid-19 fut commercialisé par Pfizer/BioNTech dès décembre 2020.

En attendant les vaccins, d'autres voies furent explorées. D'une part la recherche de solutions pour les patients hospitalisés au stade sévère ou critique et d'autre part, il faut trouver un moyen de booster le système immunitaire de toute la population mais en priorité des personnes contaminées.

Bien que les chercheurs ne connaissent pas encore tous les mécanismes d'action du virus, ils disposent de plusieurs stratégies pour neutraliser sa charge virale et donc l'expression des gènes. Les plus courantes consistent à mettre au point une molécule qui empêche le virus de s'attacher ou de pénétrer dans la cellule et de se répliquer.

La thapsigargine

La thapsigargine est une molécule connue extraite de la racine de Thapsia garganica L., une plante toxique méditerranéenne. On l'utilise en Algérie en médecine traditionnelle comme analgésique (cf. Y.Berri, 2011). C'est un puissant inhibiteur à large spectre de la pompe du réticulum sarcoplasmique/endoplasmique Ca2+-ATPase, une protéine transmembranaire (cf. ScienceDirect). Surnommée la "carotte mortelle", cette plante était connue dans la Grèce antique pour sa toxicité pour les bovins et les ovins.

L'Université de Nottingham (UoN).

De nos jours, des expériences ont montré qu'à faible dose elle a une action antivirale, et à des doses beaucoup plus élevées elle reste sans danger pour l'homme. Cette molécule est testée expérimentalement pour traiter le cancer de la prostate. Mais jusqu'à présent on ignorait son effet antiviral sur l'être humain.

Dans un article publié dans la revue "Viruses" le 3 février 2021, l'épidémiologiste Kin-Chow Chang de l'Université de Nottingham (UoN) et ses collègues ont étudié les effets de cette molécule sur le Covid-19 chez l'être humain. Ils ont montré que "la thapsigargine induit une puissante réponse antivirale immunitaire innée de l'hôte qui bloque la réplication du Covid-19 dans les cellules humaines, comme elle bloque celle du virus de la grippe A, du virus respiratoire syncytial (RSV), et du coronavirus commun du rhume OC43. Les performances antivirales de la thapsigargine étaient significativement meilleures que celles du remdesivir et de la ribavirine dans des infections séparées que dans des co-infections".

Des tests en laboratoire sur des cellules ont montré que le médicament empêchait le virus de se reproduire en seulement 30 minutes et il ne s'est pas dissipé pendant deux jours. Selon les auteurs, "avec sa capacité à inhiber les différents virus avant ou pendant l'infection active, et une durée antivirale d'au moins 48 heure après l'exposition à la thapsigargine, nous proposons que cette molécule ou ses dérivés soient également utilisés comme inhibiteur à large spectre contre le Covid-19".

Selon Chang, "Étant donné que les futures pandémies seront probablement d'origine animale, où la propagation zoonotique et zoonotique inverse a lieu, une nouvelle génération d'antiviraux, comme la thapsigargine, pourrait jouer un rôle clé dans le contrôle et le traitement des infections virales importantes chez les humains et les animaux".

L'avantage de cet antiviral est qu'il peut être pris oralement plutôt que par injection. Le médicament coûte 76 £ soit 87 € pour 1 mg et pourrait diminuer s'il est produit en masse. Il faut une dose de 200 à 800 mg s'il est utilisé comme antiviral contre la grippe. Enfin, le composé peut être fabriqué en vrac en laboratoire et stocké à température ambiante. Avec tous ses avantages, le fabricant a demandé à l'OMS de le retenir comme antiviral contre les "maladies X" émergentes.

Le ver arénicole

La société pharmaceutique Hemarina installée en Bretagne élève des vers marins arénicoles dans un but thérapeutique. Elle a testé un remède anti-inflammatoire qui permettrait de soigner les malades au stade critique, ceux qui présentent une détresse respiratoire aiguë. En effet, cette espèce d'invertébré a la particularité de pouvoir transporter 40 fois plus d'oxygène que les globules rouges humains. De plus, leur hémoglobine a l'avantage d'être compatible avec tous les groupes sérologiques humains. La méthode fut déjà utilisée pour faciliter la cicatrisation lors de greffe de visage. En revanche, lors d'essais réalisés sur des cochons en 2011, tous sont morts (cf. Ouest France). Vu l'urgence sanitaire, les chercheurs doivent réaliser d'autres tests mais ce n'est pas encore un remède efficace et loin d'être autorisé.

L'artémisia

L'Artemisia annua ou absinthe douce est une plante médicinale utilisée en Afrique sous forme de tisane (infusion) pour soigner le paludisme. En mai 2020, le président de Madagascar Andry Rajoelina déclara que le "Covid Organics", en fait une tisane d'artémisia guérissait les patients Covid (cf. Le Monde Afrique). Or les médecins n'ont même pas réalisé de tests cliniques !

Extraits d'Artémisia Annua obtenus au MPG. Document Kelly Gilmore.

L'OMS a directement réagit en soulignant que "Même lorsque des traitements sont issus de la pratique traditionnelle et de la nature, il est primordial d’établir leur efficacité et leur innocuité grâce à des essais cliniques rigoureux".

En parallèle, des chercheurs de l'Institut Max Planck (MPG) des colloïdes et des interfaces de Potsdam en collaboration avec des chercheurs de l'Université Libre de Berlin ont testé si l'Artemisia annua et ses dérivés d'artémisinine pourraient éventuellement être utilisés pour lutter contre le Covid-19. Les plants d'Artémisia furent cultivés à l'Université de Mexico et à l'Université du Kentucky.

Selon Peter Seeberger du MPG qui est co-responsable de cette étude avec le chimiste Kerry Gilmore, "Nous avons extrait des substances pures de la plante Artemisia et l'avons combiné avec le virus". Cette étude à fait l'objet d'une article mais qui n'a pas encore été validé par les pairs.

Selon Seeberger, "Depuis que je travaille avec des combinaisons d'Artemisia, je connais très bien les activités intéressantes des plantes qui peuvent agir contre différentes maladies, y compris toute une série de virus". C'est la raison pour laquelle il était logique pour lui et ses collègues d'examiner les effets possibles sur le Covid-19.

Le plasma de lama

Selon des chercheurs de l'Université de Gand et de l'Université du Texas, le plasma de lama contient des anticorps particuliers qui sont capables de neutraliser l'infection des coronavirus. On savait déjà que quatre anticorps de lamas permettaient de combattre toutes les formes d'Influenzavirus propageant la grippe (cf. N.Laursen et al., 2018).

Dans cette nouvelle expérience, le jeune animal nommé Winter qui broute l'herbe en Belgique a été immunisé après avoir reçu une perfusion contenant des protéines S du SARS, du MERS et également du Covid-19. Les chercheurs ont identifié dans le plasma de l'animal des anticorps qui se sont avérés efficaces contre deux particules virales pseudotypées, un lentivirus modifié pour exprimer les protéines de surface des coronavirus.

Ces anticorps sont une sous-classe des immoglobulines IgG spécifiques aux camélidés appelés VHH. Ils ne possèdent qu'une chaîne lourde alors que les IgG conventionnels possèdent une chaîne légère et une chaîne lourde.

Selon les chercheurs, les VHH sont stables et pourraient être administrés via un spray à inhaler, notamment pour soigner les infections respiratoires (cf. pre-print de J.S..McLellan et al., 2020).

L'extrait de plasma

S'il ne sert à rien de tester les personnes saines, il existe malgré tout une population saine potentiellement porteuse du virus, les asymptomatiques. Selon les statistiques des dépitages, en France ou en Belgique environ 7% de la population est auto-immunisée. Cette proportion s'élève à 13-15% dans certaines régions ou grandes villes. Selon une étude du CDC, 25% de la population américaine serait auto-immunisée mais la proportion est sans doute plus élevée (cf. NPR, 2020).

Si on n'effectue pas de dépistages massifs, on ne peut pas identifier les personnes à risque si l'ampleur de l'épidémie, d'où l'instauration des mesures de précaution, des gestes barrières, des quarantaines et parfois de confinement. Sachant qu'on ne peut matériellement pas tester rapidement toute la population d'un pays comptant plus d'un million d'habitants, un fraction sensible de contaminés vont se présenter spontanément dans les hôpitaux.

A gauche, composition du sang. Il comprend 90% d'eau, des globules rouges, des globules blancs, des sels et du plasma. Le plasma contient le sérum, des lipides, des hormones et des facteurs de coagulation (des protéines de fibrinogène). Documents Dreamstime adapté par l'auteur et Médical Esthétique.

La manière la plus simple de traiter les personnes contaminées consiste à utiliser une méthode centenaire pratiquée depuis la fin du XIXe siècle : l'extrait de plasma de personnes guéries de la maladie, ce qu'on appelle la thérapie PRP (plasma riche en plaquette). En effet, le plasma de convalescence de ces personnes à présent immunisées contient des anticorps spécifiques qui ont détruit le Covid-19. En théorie, ce plasma de convalescence permet également aux patients de lutter contre les formes graves de la maladie. Des transfusions de plasma de convalescence réalisées chez des patients chinois en février 2020 leur ont permis de vaincre l'infection virale (cf. XinhuaNet). Depuis ce succès, cette méthode a été retenue par d'autres pays, y compris en Europe. Ceci explique aussi pourquoi on ne procède pas toujours à un dépistage systématique de toute la population.

Conrètement, une infirmière prélève du sang d'un patient auto-immunisé dans une éprouvette (~15 cc). Le prélèvement est placé dans une centrifugeuse (5 minutes à 1500 rpm) qui sépare le plasma riche en plaquettes ou PRP (55%) du plasma pauvre en plaquettes ou PPP et des globules rouges (45%) ainsi que des granulocytes et des globules blancs (<1%). On conserve uniquement le plasma (et on retransfert le reste à son propriétaire) qui est ensuite transfusé chez un patient malade. Cela devrait renforcer ses défenses immunitaires et l'aider à combattre le virus. L'effet des anticorps se manifeste 7-8 jours après l'injection.

Le plasma (la pochette jaune) de convalescence de personnes guéries du Covid-19 contient des anticorps. Document BSIP/GettyImages.

La Chine et l'Allemagne utilisent cette méthode mais uniquement pour les formes sévères de la maladie. Toutefois, ce traitement n'a jamais été validé. Autre bémol, la procédure complète d'extraction du plasma dure plus d'une heure, c'est très long en situation d'urgence.

Dans un article publié dans la revue "Nature" le 15 septembre 2020, Nicole M. Bouvier de l'École de Médecine Icahn du Mont Sinaï à New York et ses collègues ont étudié la réponse immunitaire de 39 patients Covid gravement malades. Ils ont constaté que la perfusion par intraveineuse d'anticorps de patients qui avaient guéri de la maladie peut légèrement contribuer à leur récupération et leur guérison.

Selon les chercheurs, 18% des patients Covid ayant reçu du plasma de sérum de convalescence ont vu leur maladie s'aggraver, contre 24.3% des patients identifiés dans les dossiers médicaux (mais les chercheurs ne donnent pas leur nombre). Les taux de mortalité étaient de 12.8% chez ceux ayant reçu des anticorps, contre 24.4% chez les patients qui n'avaient pas reçu ce traitement.

Les chercheurs concluent que "La transfusion de plasma de convalescence est une option de traitement potentiellement efficace pour les patients Covid; cependant, ces données suggèrent que les patients non intubés pourraient en bénéficier davantage que ceux nécessitant une ventilation mécanique".

Mais des analyses comme celles-ci sont semées d'embûches car d'une part elle a été réalisée par des membres d'un seul hôpital, ce qui peut engendrer certains biais, et d'autre part, ne considérer que les pourcentages sans citer le nombre d'individus concerné soulève des doutes sur la représentativité de l'échantillon et au final sur la qualité de l'étude. De plus, pour avoir la certitude que le traitement fonctionne, l'étude doit être randomisée, c'est-à-dire comparée à un autre traitement, et donc validée, ce qui n'a pas été le cas. Il faudrait donc attribuer au hasard les patients qui recevront les anticorps ou le placébo.

Mais se pose alors un problème éthique comme l'a soulevé le Dr Arturo Casadevall de l'École de Médecine Johns Hopkins de Baltimore : comment trouver de nombreux patients qui accepteraient que leur traitement soit randomisé par un traitement inconnu ? Autrement dit, qui sur son lit d'hôpital voudrait jouer à la roulette russe avec sa vie ? Certes, certains patients gravement atteints seraient certainement d'accord, mais éthiquement parlant et à grande échelle les médecins ne peuvent jamais valider un telle décision.

Enfin, comme nous l'avons expliqué à propos du combat des interférons, on ne peut pas transfuser du plasma de convalescence extrait d'un porteur dont le sang contient des anticorps neutralisant l'interféron.

Expériences in vitro et ex vivo

Dans une expérience in vitro, les souches de cellules ou les tissus à tester sont isolés et séparés de l'organisme et purifiés. Cette méthode permet d'étudier et de caractériser en détails les cellules ou les molécules. Elle permet également d'amplifier le nombre de cellules par culture pour des tests ultérieurs. Cette méthode se prête également très bien à la modélisation.

Document C.Brito et al. (2020) adapté par l'auteur.

Dans un expérience ex vivo, les cellules ou tissus sont directemenrt extraits de l'organisme vivant et testés en laboratoire où les conditions reflètent autant que possible celles de l'organisme.

Ces deux méthodes sont une alternative à l'expérimentation sur l'animal.

Les antiviraux à large spectre

Il s'agit d'une molécule qui entrave le cycle de reproduction du virus afin de ralentir l'infection en réduisant drastiquement la charge virale. "Large spectre" signifie qu'il fonctionne sur plusieurs souches virales et n'est pas spécifique à un seul virus.

Remdesivir

Parmi les solutions testées contre le SARS-CoV-2, il y a le remdesivir (GS-5734) du laboratoire Gilead Sciences qui perturbe la synthèse de l'ARN viral.

Mais les résultats des essais cliniques réalisés dans le cadre de l'essai Solidarity sur 7000 patients Covid hospitalisés se sont avérés décevants.

Parmi les autres résultats et par ordre chronologique, dans une étude chinoise publiée dans "The Lancet" le 19 avril 2020, les chercheurs ont évalué l'efficacité du remdesivir chez des patients atteints d’une forme sévère de la Covid-19. En résumé, non seulement la méthodologie était discutable (les deux groupes de patients n'étaient pas parfaitement similaires) mais statistiquement parlant le délai d'amélioration clinique et la mortalité à 28 jours n'étaient pas différent entre les groupes.

Dans une étude chinoise publiée dans "JAMA" le 21 août 2020, une équipe internationale de chercheurs a réalisé un essai ouvert, randomisé et multicentrique pour évaluer l'efficacité d'un traitement par remdesivir par rapport à un traitement standard sur l'état clinique de patients hospitalisés pour un Covid-19 modéré. Les résultats montrent que les patients ayant reçu un traitement de 10 jours de remdesivir n'ont pas présenté de différence statistiquement significative de leur état clinique par rapport à ceux ayant reçu des soins standard. Les patients randomisés pour un traitement de 5 jours par le remdesivir présentaient une différence statistiquement significative par rapport aux soins standard, mais la différence était d'une importance clinique modeste. Ces résultats ne confirment donc pas l'efficacité clinique significative du remdesevir dans le traitement de la Covid-19.

Dans une étude publiée dans le "NEJM" le 2 décembre 2020, les chercheurs du consortium de l'essai Solidary concluèrent que les traitements évalués "apparaissent avoir peu ou pas d’effet sur les patients hospitalisés, que ce soit en termes de mortalité, de mise sous respirateur ou de durée d’hospitalisation". En fait, si le traitement au remdesivir donne un résultat supérieur à celui d'un placebo, il ne réduit pas la mortalité liée au Covid-19 ou le temps de récupération des patients.

A consulter : A living WHO guideline on drugs for Covid-19, BMJ, 2020

A gauche, principe de fonctionnement du remdesivir. A droite, le conditionnement du remdesivir générique en flacon de 100 mg commercialisé par la société pharmaceutique indienne Hetero Labs sous la marque Covifor. Documents AFP et GPN.

Dans un communiqué publié le 20 novembre 2020, l'OMS déclara que "rien ne prouve à ce jour que le remdesivir améliore pour ces patients les chances de survie et les autres résultats sanitaires. Les éléments de preuve ne laissent entrevoir aucun effet significatif sur la mortalité, le recours à la ventilation mécanique, l’accélération de l’amélioration de l’état clinique et d’autres résultats sanitaires importants du côté du patient".

Dans une étude américaine publiée dans le "NEJM" le 5 décembre 2020, les chercheurs ont comparé l’amélioration clinique à 14 jours de 397 patients tous atteints d'une forme sévère de la Covid-19, et répartis en deux groupes. Le premier groupe reçut un traitement par remdesivir durant 5 jours, le deuxième durant 10 jours. En résumé, les résultats ne permettent pas de conclure à une quelconque différence entre les deux groupes. De plus, en l’absence de groupe recevant du placebo, cette étude ne permet pas de conclure quant à la supériorité du remdesivir par rapport à la prise en charge habituelle.

Dans une étude publiée dans la revue "The Lancet" le 14 septembre 2021, des chercheurs de l'essai européen Discovery ont réalisé un essai ouvert, randomisé et multicentrique pour évalue l'efficacité du remdesivir par rapport aux les soins standards chez les patients présentant une forme sévère de Covid-19 nécessitant un support ventilatoire. Parmi les 857 participants, 429 ont reçu du remdesivir pendant 10 jours. Aucune différence en termes d'état clinique mesuré par le score de l'OMS (hospitalisation ou non, besoin d’oxygène ou non, assistance respiratoire et ou ECMO ou non, décès ou non) n’a été observée. Les effets indésirables entre les deux groupes n’étaient pas différents en pourcentage.

Dans une étude américaine publiée dans la revue "Clinical Infectious Disease" le 15 décembre 2021, Brian T. Garibaldi de École de Médecine de l'Université Johns Hopkins et ses collègues on prescrit du remdesivir à 42473 patients Covid d'un âge moyen de 65 ans soit 43.9% d'une cohorte de volontaires. Ils ont constaté une augmentation de la probabilité d'amélioration clinique chez les patients Covid sous oxygène à faible débit ou sans oxygène.

Enfin, dans une étude américaine publiée dans la revue "NEJM" le 22 décembre 2021, des rechercheurs ont réalisé un essai contrôlé randomisé en double aveugle chez des patients non hospitalisés atteints de Covid-19. Sur 562 patients, 279 ont été randomisé et ont reçu du remdesivir pendant 3 jours, les autres un placebo. Aucun décès n’a été rapporté. Le remdesivir a permis une réduction de 87% du risque d'hospitalisation ou de décès au 28e jour post infection par rapport au placebo.

Finalement, la FDA puis l'EMA approuvèrent le médicament pour une utilisation d'urgence chez certains patients et dans la foulée Gilead Sciences demanda une autorisation de commercialisation qu'il reçut (cf. BMJ, 2020).

Le remdesivir est commercialisé sous forme génétique sous plusieurs noms dont Covifor (cf. Hetero) et Cipremi (cf. Reuters). La version générique revient entre 4000 et 5000 roupies soit à moins de 54$ par flacon de 100 mg.

Entre-temps, le 1er juillet 2020, Gilead Sciences fixa le prix du remdesivir à 520$ par dose, ou 3120$ par patient pour un traitement complet comprenant 6 doses (pour ceux qui disposent d'une assurance privée). Le prix pour ceux qui ne sont pas couverts par une assurance privée sera de 390$ par dose. Selon Daniel O'Day, CEO de Gilead, "En temps "normal" le prix du médicament serait calculé en fonction des économies qu'il permet de réaliser. En raccourcissant le temps d'hospitalisation de 4 jours en moyenne, on économiserait 12000$ par patient". Pour justifier le prix très élevé du remdesivir, O'Day déclara que sa société s'attend à ce que son investissement dépasse 1 milliard de dollars.

Malgré son prix élevé critiqué aux Etats-Unis et les conclusions négatives, les États-Unis et l'Europe ont malgré tout acheté en masse du remdesivir mais il vient en complément d'autres traitements plus efficaces et moins chers.

Les antiviraux oraux

A l'inverse des vaccins qui sont des mesures de protection préventive contre la maladie, les antiviraux oraux administrés sous forme de pilule ou gélule sont des traitements post-infection visant à réduire ou supprimer l'infection virale. En 2022, deux remèdes antiviraux oraux ont été commercialisés contre la Covid-19, celui de Pfizer et celui de Merck.

La pilule antivirale de Pfizer (Paxlovid)

En complément de son vaccin, Pfizer a développé un antiviral oral contre la Covid-19, autrement dit une pilule anti-Covid à ingérer appelée PF-07321332 ou ritonavir. Il s'agit d'un inhibiteur de la protéase 3CLPro ou MPro qui réduit fortement le risque d'hospitalisation ou de décès lié au Covid-19. Il est donc prescrit lorsque la maladie est déclarée et convient idéalement aux personnes immunodéficientes.

Les résultats intermédiaires des essais cliniques de phase II/III furent réalisés auprès de plus de 1200 patients Covid (sur une cohorte de 3000 personnes) présentant un risque de développer une forme grave de la maladie. Dans les 3 jours suivant l'apparition des symptômes, certains ont reçu la pilule de Pfizer et d'autres un placebo. Au total, 10 personnes sont décédées parmi les patients ayant reçu le placebo contre aucun décès dans le groupe ayant reçu le traitement. Selon Pfizer, "L'analyse intermédiaire a montré une réduction de 89% du risque d'hospitalisation liée au Covid-19 et de décès de n'importe quelle cause en comparaison à un placebo chez les patients traités dans les trois jours suivant l’apparition des symptômes".

Le Paxlovid fut commercialisé en Europe en avril 2022 mais reste toujours ern phase test. IL est prescrit sur ordonnance car il présente des effets secondaires et peut devenir toxique chez les patients souffrant de problèmes hépatiques ou rénaux.

Fabrication de pilules de Paxlovid contre le Covid-19 dans le laboratoire de Pfizer à Fribourg en Allemagne, le 16 novembre 2021. Document Pfizer/AFP.

Une autre étude réalisée en Afrique du Sud - le premier pays ayant détecté Omicron - sur 78000 tests PCR obtenus entre le 15 novembre et le 7 décembre 2021 montre une efficacité de 33% contre le risque de contamination, avec un nombre élevé de recontamination, soit une baisse nette par rapport aux 80% de protection contre les contaminations liées au variant Delta.

Lors des essais cliniques, aucun décès n'a été enregistré parmi ceux ayant reçu le traitement, contre 12 décès dans le groupe ayant reçu le placebo. Les participants étaient non vaccinés et présentaient un haut risque de développer une forme grave de Covid-19.

Pfizer confirme que la pilule antivirale reste efficace à 70% contre les hospitalisations liées à Omicron (contre 93% face à Delta). Cette protection est en outre observée chez tous les groupes d'âge.

Le traitement doit être pris pendant cinq jours, toutes les 12 heures. Les effets secondaires sont généralement "modérés".

Finalement, la pilule a reçu le nom commercial de Paxlovid. Avant même que l'EMA autorise son utilisation, en raison de l'urgence sanitaire, elle était déjà disponible en France depuis fin janvier 2022 puis en Belgique et au Luxembourg.

Le Paxlovid peut être prescrit par les médecins généralistes et est réservé au traitement des adultes immunodéprimés ou des personnes risquant de développer une forme grave de la Covid-19 (une hospitalisation mais sans oxygénothérapie ou ecmo) suite à une pathologie à haut risque. Cela concerne en particulier les cancers en cours de traitement, les polypathologies, la trisomie 21 ou certaines maladies rares. Le Paxlovid est aussi destiné aux patients de plus de 65 ans présentant des comorbidités (diabète, obésité, insuffisance rénale chronique, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, insuffisance respiratoire, etc) susceptibles de développer des formes graves de la Covid-19, en particulier lorsqu'elles ne sont pas ou pas complètement, vaccinées.

La gélule antivirale de Merck (Lagevrio)

La société Merck & Co. (alias Merck Sharp & Dohme Corp.) a développé un antiviral oral contre le SARS-CoV-2 nommé molnupiravir (EIDD-2801 ou MK-4482) ou Lagevrio. Il avait initialement été développé contre la grippe (Hépatite C) au début des années 2000.

Comme la pilule de Pfizer, il s'agit d'un dérivé nucléosidique qui introduit des erreurs lors de la réplication de l'ARN du SARS-CoV-2 en ciblant la polymérase, l'enzyme qui permet de fabriquer de nouvelles molécules d'ARN à partir du brin d'ARN viral. Les ARN résultants sont incapables de fabriquer des virions fonctionnels.

Cet antiviral à large spectre se présente sous la forme d'une gélule. Les essais cliniques furent réalisés dans les laboratoires de Merck & Co. et Ridgeback Biotherapeutics. Une étude sur la sécurité sanitaire, la tolérabilité et la pharmacocinétique (l'action du médicament dans l'organisme) de ce médicament fut publiée dans la revue "American Society for Microbiology" le 19 avril 2021.

Selon un communiqué de Merck publié le 1 octobre 2021, l'antiviral permet de réduire voire de supprimer la charge virale du SARS-CoV-2 en quelques jours et de réduire de 50% les risques d'hospitalisation et de décès par rapport aux patients volontaires ayant reçu un placebo. Mais des études indépendantes doivent confirmer ces résultats.

Selon Wendy Painter, chercheuse chez Ridgeback Biotherapeutics, "Sachant qu'il y a un besoin non satisfait de traitements antiviraux contre le SARS-CoV-2, nous sommes encouragés par ces résultats préliminaires".

A gauche, les bureaux de Merck & Co., installés dans le quartier d'Upper Gwynedd, dans le comté de Montgomery, en Pennsylvanie. A droite, des gélules de molnupinavir (Lagevrio) fabriquées par Merck & Co qui lança sa production avant même de connaître la décision de la FDA. Documents MCPC/Flickr et AFP.

La phase III des essais cliniques fut terminée fin 2021 et l'entreprise demanda à la FDA et à l'EMA une autorisation de mise sur le marché sous le nom de Lagevrio.

Le Lagevrio s'administre au stade précoce de la maladie. Il réduit d'environ 30% le risque d'hospitalisation et de décès chez les personnes susceptibles de développer une forme grave de Covid-19.

En avril 2021, Merck déclara avoir conclu des "accords de licence volontaires non exclusifs avec des fabricants renommés de génériques afin d'accélérer la disponibilité du molnupiravir dans plus de 100 pays à revenu faible et intermédiaire".

En juin 2021, le gouvernement américain paya 1.2 milliard de dollars pour 1.7 million de doses de Lagevrio, portant son prix à 705$ par dose ! (cf. le tweet de Meg Tirrell). A ce prix, on peut déplorer que ce médicament ne sera accessible qu'aux plus riches et que les hôpitaux ne le choisiront pas en premier lieu pour traiter d'urgence les patients hospitalisés.

Les doses de Lagevrio étant livrées en quantité limitées (par exemple 10000 doses pour la Belgique), cet antiviral ne sera pas prescrit par les médecins généralistes ni délivrable en pharmacie (contrairement au Paxlovid), mais d'abord proposé dans des endroits stratégiques tels que les hôpitaux, à des patients à haut risque, immunodéprimés et âgés présentant des comorbidités.

En parallèle, Merck a également développé un second antiviral contre le SARS-CoV-2 appelé le MK-711. Selon le fabricant, il diminue de 50% le risque de décès ou d'insuffisance respiratoire chez les patients hospitalisés.

Enfin, pour mémoire rappelons que la société israélienne Oramed propose un vaccin antiviral oral.

Autres pilules contre le Covid-19

D'autres laboratoires pharmaceutiques développent leur propre pilule contre le Covid-19 dont la société américaine Atea Pharmaceuticals et le laboratoire suisse Roche qui développent l'AT-527.

Les cellules souches

En Belgique, l'équipe du service des maladies infectieuses du CHU Saint-Pierre à Bruxelles étudie la possibilité d'utiliser les cellules souches mésenchymateuses ou MSC (cf. C.Jorgensen et al., 2011), en particulier celles du sang du cordon ombilical des nouveaux-nés pour soigner les malades Covid-19. Mais leurs recherches sont encore au stade expérimental.

De son côté, une équipe internationale de chercheurs publia des résultats prometteurs sur l'utilisation de ces MSC pour soigner les patients Covid au stade sévère de la pneumonie virale (cf. L.Zikuna et al., 2020). Selon les chercheurs, 7 patients furent traités pendant 14 jours. Tous ont vu leur fonction pulmonaire et leurs symptômes s'améliorer significativement dans les 2 jours suivant la transplantation MSC. Deux patients à un stade commun et un patient au stade sévère ont bien récupéré et sont sortis guéris dans les 10 jours suivant le traitement.

La thérapie génique

La thérapie génique est certainement la technique thérapeutique portant le plus d'espoir tant les résultats sont étonnants. Elle permet par exemple d'exploiter un virus inoffensif pour produire une partie clé du SARS-CoV-2. En effet, fabriquer tous les sites actifs d'un virus mortel est non seulement quasi impossible sur le plan technique et peine perdue en raison de ses mutations mais aussi très risqué comme le "New York Times" le souligna, "Aucune des deux technologies n'a jamais produit un médicament sous licence ni été fabriquée à grande échelle".

Selon le biologiste moléculaire Jean Peccoud de l'Université d'État du Colorado qui publia un article sur les approches concurrentes d'un vaccin contre le Covid-19 (cf. The Conversation, 2020), la thérapie génique à vecteur viral est risquée dès qu'il faut passer à l'étape de la production de masse, et c'est valable pour tous les pathogènes mortels : "Si vous regardez qui gagne la course pour développer un vaccin, aucune des équipes de tête ne s'en approche en développant le virus à grande échelle".

En revanche, exploiter un vecteur viral exprimant par exemple l'intégralité de la protéine S du Covid-19 est une solution envisageable que plusieurs laboratoires sont en train de mettre au point. On y reviendra à propos des vaccins.

Enfin, on peut produire des anticorps monoclonaux (voir ci-dessous) à partir de cellules in vitro de rongeurs (souris, lapin, etc) modifiées génétiquement avec des fragments d'anticorps humains pour éviter une réaction immunitaire indésirable.

Rappelons qu'en thérapie génique ex vivo, les cellules sont d'abord extraites du corps du sujet et modifiées/transductées in vitro par un vecteur non viral ou viral. En revanche, la thérapie génique in vivo consiste à introduire directement le matériel génétique modifié chez le sujet à l'aide d'un système d'administration non viral ou viral.

Les anticorps monoclonaux

Les traitements à base d'anticorps monoclonaux thérapeutiques sont utilisés depuis les années 1980 pour traiter de nombreuses maladies dont certains cancers, des maladies inflammatoires et plus récemment contre le virus Ebola et le SARS-CoV-2. Ils sont utilisés soit lorsqu'il n'existe pas de vaccin contre la maladie concernée soit lorsque le patient réagit mal aux vaccins.

Si d'ordinaire les anticorps monoclonaux visent à guérir (par exemple les remèdes contre la Covid-19 de Regeneron, GlaxoSmithKline ou encore Eli Lilly), on peut aussi les utiliser à titre préventif comme le remède d'AstraZeneca (voir plus bas).

Pour rappel, les anticorps sont des agents fabriqués par le système immunitaire et viennent en renfort pour lutter contre les pathogènes. Les anticorps sont un élément clé des moyens de défense adaptatifs. Ils sont spécifiques, c'est-à-dire qu'ils ne reconnaissent qu'un seul type de déterminant antigénique ou épitope (ou domaine de liaison) sur un antigène, c'est-à-dire la molécule qui va déclencher la réponse immunitaire. Ils peuvent en effet reconnaître l'antigène et mobiliser divers processus immunitaires pour neutraliser la menace posée par l'agent pathogène. Nous verrons que des anticorps bispécifiques sont également en cours de développement.

A gauche, représentation d'un anticorps basé sur l'analyse de sa structure en rayons X. A droite, une autre représentation de la molécule. Ses deux branches en Y permettent à la protéine de s'accrocher spécifiquement sur un antigène, offrant une action ciblée sur l'organisme. Documents Shutterstock et xen32.

Les plus puissants sont les anticorps monoclonaux neutralisants. On parle d'anticorps monoclonaux (mAbs ou moAbs) quand ils sont clonés en laboratoire en plusieurs milliers d'exemplaires à partir d'une seule cellule d'anticorps. Ils peuvent donc être d'origine humaine ou être produits in vitro à partir de lignées cellulaires, en particulier des lymphocytes B modifiés. Dans le cas de la Covid-19, leur rôle consiste à diminuer la charge virale en accélérant la clairance (l'épuration) du virus chez les patients Covid ambulatoires.

A la différence du traitement par plasma de convalescence décrit plus haut, le traitement par anticorps monoclonaux peut utiliser un grand nombre d'anticorps différents afin qu'ils se lient à plusieurs parties du virus.

Grâce aux travaux réalisés dans ce domaine depuis la découverte de Emi von Behring de la thérapie par le sérum (1901), ponctués de multiples prix Nobel, nous avons beaucoup appris sur la régulation, la structure et la fonction des anticorps. Depuis, leur utilisation clinique a connu une croissance exponentielle (cf. K.Smith, 2019). Néanmoins, les efforts pour manipuler, concevoir et améliorer les anticorps restent toujours d'actualité, d'autant plus pendant la pandémie de Covid-19.

Comment fonctionne cette protection immunitaire ? Sur les plan biologique et virologique, comme expliqué ci-dessous, le domaine Fab et le domaine Fc sont les deux composants structurels des anticorps qui ont été conservés au cours de l'évolution. Le domaine Fab possède une région de liaison à l'antigène variable, qui est différente dans chaque anticorps, tandis que le domaine Fc est une structure constante qui est largement similaire dans différents anticorps.

A gauche, les interactions entre les antigènes (les contacts dorés) d'une cellule et les anticorps (les Y). A droite, comment "booster" la réponse immunitaire grâce à des vecteurs antiviraux médiés par les anticorps. Les anticorps sont constitués de domaines Fab qui se lient à des agents pathogènes tels que les virus, et d'un domaine Fc qui enrôle d'autres composants de défense. On fabrique un anticorps antiviral afin que le domaine Fc ait une capacité améliorée de se lier à la protéine réceptrice FcγRIIa. Ce récepteur se trouve sur les cellules immunitaires telles que les cellules dendritiques (qui expriment les protéines stimulant la défense CD40, CD80 et CD86). La liaison d'anticorps à FcγRIIa déclenche la signalisation qui entraîne la maturation des cellules dendritiques qui se manifeste par une augmentation de l'expression de CD40, CD80 et CD86. Le récepteur MHC sur les cellules dendritiques peut présenter un fragment viral, un antigène. Lorsque la protéine TCR d'une cellule immunitaire T CD8 reconnaît l'antigène viral, elle oblige la cellule T à tuer les cellules infectées par le virus. Si généralement, les tests fonctionnent très bien sur les souris, les résultats ne sont pas toujours aussi convaincants sur l'être humain. Mais que cela fonctionne, la protection est très efficace. Documents Anna Tanczos/SciComm Studios et Nature adapté par l'auteur.

Le domaine Fc s'engage avec d'autres éléments du système immunitaire, y compris une famille appelée les récepteurs Fc qu'on trouve sur divers cellules immunitaires et non immunitaires (cf. R.L. Schields et al., 2001). Les récepteurs Fc assurent le lien entre les cellules des défenses immunitaires adaptatives et innées. L'anticorps IgG engage une sous-famille de récepteurs Fc appelés les FcyR. Les FcyR se répartissent en deux classes principales : les FcyR activateurs (dont les protéines FcγRI, FcγRIIa et FcγRIIIa) et le seul inhibiteur FcγR appelé FcγRIIb. Selon le cas, l'engagement de FcyR stimule ou inhibe les cellules immunitaires tandis que l'équilibre entre l'activation et l'engagement inhibiteur détermine les réponses des types de cellules possédant à la fois des FcyRs2 activateurs et inhibiteurs.

L'efficacité de l'anticorps monoclonal J08

Des chercheurs du laboratoire Ward du Scripps Research américain et de l'ONG italienne Toscana Life Sciences (TLS) ont étudié le sang de 14 convalescents de la Covid-19 afin de trouver les anticorps les plus puissants contre le SARS-CoV-2. Après avoir isolé 4277 lymphocytes B mémoires spécifiques à la protéine S du SARS-CoV-2, les chercheurs ont identifié 453 anticorps neutralisants. Les anticorps neutralisants les plus puissants ont reconnu le domaine de liaison au récepteur de la protéine S, suivis en force par des anticorps qui reconnaissent le domaine S1, le trimère de la protéine S et la sous-unité S2 (cf. ce schéma et celui-ci de la protéine S). Seuls 1.4% des anticorps identifiés ont neutralisé le virus avec une concentration de 1 à 10 ng/mL.

Selon les chercheurs, "L'anticorps monoclonal le plus puissant nommé J08 a neutralisé le virus de Wuhan et les variants émergents contenant les substitutions D614G, E484K et N501Y. L'efficacité prophylactique et thérapeutique dans le modèle de hamster a été observée à respectivement 0.25 et 4 mg/kg en l'absence de récepteurs Fc". Le mAb J08 semble capable à la fois de prévenir et de traiter la Covid-19 (cf. A.Ward et al., 2021).

Les chercheurs du Scripps Research ont montré que même si le trimère de la protéine S (en gris) des variants du SARS-CoV-2 change de forme, l'anticorps monoclonal neutralisant J08 (en bleu) parvient toujours à se lier. Document A.B. Ward et al. (2022).

Depuis cette étude, le même groupe de chercheurs renforcé par des équipes de VisMederi Research en Italie et de l'institut Pasteur en France a étudié comment le mAb J08 se lie aux différents variants du SARS-CoV-2 afin de comprendre ce qui rend l'anticorps monoclonal si puissant.

Dans une deuxième étude publiée dans les "PNAS" en 2022, Ward et ses collègues ont déterminé la structure tridimensionnelle de J08 lorsqu'il se lie à la protéine S du SARS-CoV-2. Comme illustré à droite, ils ont confirmé que J08 s'attachait avec succès aux variants Alpha (B.1.1.7), Beta (B.1.351), Gamma (P.1) et Delta (B.1617.2) et neutralisa les virus, les empêchant de se répliquer. Cependant, J08 s'est attaché au variant Omicron (B.1.1.529) environ 7 fois plus lentement, puis s'est rapidement détaché. Il fallut environ 4000 fois plus de J08 pour neutraliser complètement Omicron par rapport aux autres variants.

Selon les chercheurs, "mAb J08 a une faible affinité nanomolaire contre la plupart des VoC et se lie fortement sur le domaine de liaison au récepteur (RBD), loin des nombreuses mutations des VoC".

Comme pour tous les variants, J08 se lie à une très petite région du RBD du SARS-CoV-2 qui reste généralement inchangée au cours des mutations (sauf que le seul RBD d'Omicron présente 15 mutations par rapport à la souche de Wuhan). De plus, J08 pourrait se fixer dans deux orientations complètement différentes, comme une clé qui parvient à déverrouiller une porte, qu'elle soit à l'endroit ou à l'envers.

Selon Jonathan Torres du Scripps Research et coauteur de cet article, "Cette petite empreinte flexible explique en partie pourquoi J08 est capable de résister à tant de mutations - elles n'ont pas d'impact sur la liaison des anticorps à moins qu'elles ne se trouvent dans cette très petite partie du virus".

Le variant Omicron cependant, présente notamment deux mutations, E484A et Q493H, qui ont modifié la petite région du RBD qui s'attache directement à J08. Ward et ses collègues ont découvert que même si une seule de ces mutations est présente, J08 parvient encore à se lier et à neutraliser le virus. Mais les deux mutations sont présentes sur Omicron et rendent J08 moins efficace. Suite à ces résultats, les chercheurs ont décidé de lancer en Italie les essais cliniques de phases II/III  de l'anticorps monoclonal basé sur J08.

Selon Gabriel Ozorowski, chercheur senior au laboratoire Ward, "Je pense que nous sommes assez confiants que les futurs variants n'auront pas nécessairement comme Omicron ces deux mutations critiques en même temps, ce qui nous donne l'espoir que J08 continuera d'être très efficace".

Efficaces et sans risque

Concrètement, comme les lymphocytes B mais sans les risques qu'ils présentent (ils peuvent devenir pathogènes), on peut utiliser les anticorps monoclonaux pour neutraliser l'action d'une protéine de surface d'un virus. On peut les injecter directement ou les extraire du sang d'un patient guéri de la maladie (ou d'un patient présentant une maladie provoquée par un virus du même groupe) et les injecter chez un malade pour neutraliser le virus.

Ces macromolécules peuvent persister dans l'organisme et offrir une protection pendant plusieurs semaines. On peut également greffer d'autres molécules à leur extrémité afin d'offrir des capacités thérapeutiques supplémentaires.

Les anticorps monoclonaux ne sont pas des vaccins mais des médicaments biologiques. Ils représentent un remède efficace pour lutter contre la Covid-19 (cf. Yu et Cragg, 2020; D.Corti et al., 2020; B.J. Bosch et al., 2020) parmi d'autres maladies. Les traitements aux anticorps donnent de bons résultats, équivalents ou proche de l'efficacité d'un vaccin.

Toutefois, à choisir entre un traitement à base d'anticorps monoclonaux et un vaccin, il faut toujours choisir le vaccin tant que possible car il produit un double effet. Il permet au système immunitaire de fabriquer des anticorps, mais également de développer des cellules T, responsables de la mémoire immunitaire. Ces lymphocytes permettent de reconnaître le pathogène, même lorsqu'il n'y aura plus d'anticorps. C'est un bénéfice que ne procurent pas les remèdes à base d'anticorps monoclonaux.

 Traitement par anticorps monoclonal : parlez-en à votre dentiste

Tout médecin vous dira que les anticorps monoclonaux qui agissent sur le système immunitaire exposent à un risque d'infections graves. 

Le chirurgien-dentiste (qui soigne les problèmes dentaires) ou le parodondiste (qui traite les problèmes de santé autour de la dent) par exemple qui est confronté quotidiennement à la gestion du risque infectieux doit être informé avant de prendre un patient en charge que ce dernier suit un traitement avec un anticorps monoclonal. A titre préventif, un traitement antibiotique peut être prescrit. Lors d'une extraction dentaire ou d'une dévitalisation par exemple, le dentiste en accord avec le médecin prescripteur peut décider de suspendre temporairement le traitement par anticorps monoclonal. De plus, pour éviter tout risque d'infection il doit également respecter un protocole sanitaire strict et travailler pour ainsi en chambre blanche. Enfin, le dénosumab, un médicament utilisé pour traiter l'ostéoporose et les pertes osseuses liées à certains cancers, nécessite un examen dentaire et des soins préventifs éventuels avant de débuter le traitement.

En 2021, l'EMA avait établi une liste de 17 traitements antiviraux contre le Covid-19 à base d'anticorps monoclonaux dont 4 étaient en évaluation. En parallèle, plus de 150 anticorps monoclonaux sont en développement contre le cancer.

Au total, plus de 30 anticorps monoclonaux sont homologués et commercialisés en France ou en Belgique pour le traitement de maladies inflammatoires chroniques (la maladie de Crohn, la polyarthrite rhumatoïde, la spondyloarthrite, le psoriasis, la sclérose en plaques, etc.), de cancers et du rejet de greffe.

Voici un inventaire de quelques médicaments contre le Covid-19 à base d'anticorps monoclonaux en cours de développement ou récemment mis sur le marché.

AZD7442

L'AZD7442 d'AstraZeneca utilise une combinaison de deux anticorps monoclonaux (AZD8895 et AZD1061) extrait du plasma de deux patients Covid concalescents. Ces anticorps ciblent le domaine RBD de la protéine S, celui qui permet au virus de se lier au récepteur ACE2 des cellules.

Depuis avril 2021, le médicament est en phase III des essais cliniques dans le cadre de l'essai européen Discovery avec l'objectif qu'il soit validé par l'EMA (l'Agence Européenne des Médicaments).

Avant même de connaître l'avis de la FDA, les Etats-Unis ont prévu d'acheter 700000 doses pour un montant total de 726 millions de dollars.

En mai 2021, le Royaume-Uni déclara qu'il acheterait 1 million de doses du médicament (cf. Bloomberg). La déclaration originale de l'accord indique que le Royaume-Uni se procurerait les doses si l'AZD7442 répond à des "normes de sécurité et d'efficacité robustes".

Les résultats intermédiaires indiquent que l'AZD7442 réduit le risque de Covid-19 symptomatique de 77% comparé au placébo.

Evolution schématique des réponses du système immunitaire lors des traitements antiviraux (gauche) et anti-inflammatoires (droite). Un traitement antiviral (par ex. les anticorps monoclonaux du remdesivir ou l'interféron) est une chimiothérapie qui cible l'une des protéines clés du virus ou les enzymes virales produites au cours du cycle de la réplication du virus. Un traitement anti-inflammatoire ou anti-immune (par ex. la dexaméthasone, un corticoïde) agit contre l’inflammation déclenchée par le système immunitaire suite au contact d'un pathogène. Documents The New York Times adaptés par l'auteur.

Le bamlanivimab et l'etesevimab

Le laboratoire Eli Lilly propose le bamlanivimab (LY-CoV555), un anticorps monoclonal pour traiter les adultes et les enfants de plus de 12 an présentant une forme légère ou modérée de la Covid-19. Le médicament a déjà été approuvé au Canada et en France.

Mais les avis divergent quant à son efficacité. Selon une étude clinique publiée dans le journal "JAMA" le 21 janvier 2021, le bamlanivimab ne produit pas de réduction de la charge virale des patients. Mais selon une étude publiée dans les "Clinical Infectious Diseases" le 13 avril 2021, le bamlanivimab réduirait le risque d'hospitalisation. L'usage du bamlanivimab reste donc controversé.

L'etesevimab d'Eli Lilly se lie à un épitope différent de celui du bamlanivimab mais neutralise les variants du SARS-CoV-2 ayant des mutations au niveau de l’épitope reconnu par le bamlanivimab.

Le médicament fut approuvé à titre provisoire par la FDA le 9 novembre 2020 et approuvé par l'EMA le 5 mars 2021.

Le sotrovimab

Le sotrovimab (VIR-7831) a été développé par les laboratoires pharmaceutiques Vir Biotechnology et GSK (cf. A.L. Cathcart et al., 2021). Cet anticorps monoclonal fut isolé pour la première fois en 2003 chez une patiente SARS convalescente. Chez les patients symptomatiques, le sotrovimab réduirait de 85% les risques d'hospitalisation ou de décès. L'association des anticorps VIR-7831 et VIR-7832 diminuerait de 87% le risque d’hospitalisation et de décès. Ils s'avèrent également efficace contre certains variants dont le B.1.351 sud-africain porteur des mutations N501Y et E484K.

Le sotrovimab fut approuvé par l'EMA le 21 mai 2021.

Le toculizumab

Le tocilizumab (actemra ou roactemra) est l'un des rares médicaments à base d'anticorps monoclonaux de synthèse. C'est un immunorégulateur qui bloque les récepteurs de l'interleukine-6 (IL-6) et évite l'orage de cytokines (cf. les pathologies des patients Covid).

Du fait que c'est un inhibiteur de la cytokine impliquée dans les processus inflammatoires, il est utilisé pour traiter la polyarthrite rhumatoïde (le facteur de nécrose tumorale ou TNF) chez les patients atteints de polychondrite chronique atrophiante, une maladie qui affecte les cartilages.

Il fut également testé sur des patients Covid en Italie et en France dès le mois d'avril 2020. Mais selon une étude portant sur 243 patients Covid soit infectés soit en état d'hyperinflammation et présentant au moins deux signes cliniques (fièvre (> 38°C), infiltrats pulmonaires ou besoin d'oxygène supplémentaire pour maintenir une saturation en oxygène supérieure à 92%), il n'a pas été beaucoup plus efficace qu'un placebo (cf. NEJM, 2020). Selon une autre étude portant sur 389 patients Covid qui ne recevaient pas de ventilation mécanique, le tocilizumab réduisit la probabilité de progression de la maladie y compris les décès, mais n'a pas amélioré la survie des patients (cf. NEJM, 2021).

En revanche, lors d'un essai clinique réalisé en France en mars et avril 2020, le tocilizumab fut testé sur 130 patients Covid atteints de forme modérée à sévère (hors réanimation) dans 13 hôpitaux. Ces patients hospitalisés sous traitement demandaient moins d'assistance de ventilation et présentaient un taux de décès plus bas au cours des 28 jours de suivi avec des effets secondaires qualifiés de "rares". Selon les chercheurs, "Il s'agit du premier médicament donnant un effet significatif dans le cadre d’un essai clinique" (cf. JAMA, 2020; AP-HP, 2020). En fait, le toculizumab est plus efficace sur les formes sévères de la Covid-19.

Le médicament fut validé par l'EMA le 6 décembre 2021. Seul inconvénient, une dose revient à 800 €.

Le casirivimab/imdevimab (ronapreve)

Le casirivimab/imdevimab ou REGN-COV2 est un traitement à base d'anticorps monoclonaux de synthèse développé par les sociétés pharmaceutiques américaine Regeneron et suisse Roche.

Le cocktail d'anticorps s'attaque à la protéine S et s'est montré extrêmement efficace lors des essais pour combattre le Covid-19. Selon les chercheurs, il convient aux patients ayant une charge virale très élevée et dont les anticorps spécifiques sont absents (cf. Regeneron, 2020; J.Cohen, 2020; J.D. Bloom, 2020).

Les traitements contre le Covid-19 à base d'anticorps monoclonaux utilisent des protéines immunitaires (les Y) qui ciblent le Covid-19. Document KTS Design/Science Source.

Le remède fut prescrit à titre expérimental à l'ancien président Donald Trump lorsqu'il fut déclaré positif au Covid-19 le 2 octobre 2020 (cf. NPR). Il fut traité en urgence avec une autorisation temporaire d'utilisation dans le cadre d'un "usage de compassion", une autorisation qu'on accorde généralement à des patients critiques sur lesquels les autres traitements n'ont aucun effet. Mais le cas de Trump n'était pas urgent et ne rentrait pas dans cette catégorie. Ce cas est un exemple de passe-droit.

Ce n'est que le 21 novembre 2020 que le médicament fut validé par la FDA et les autres régulateurs de la santé.

En janvier 2021, le gouvernement allemand annonça qu'il avait acheté 200000 doses du cocktail pour traiter les patients Covid. Comme aux États-Unis, l'Allemagne utilise le casirivimab/imdevimab de Regeneron (REGN-COV2) qui combine deux anticorps de synthèse mais également le bamlanivimab (LY-CoV016) de Eli Lilly qui utilise qu'un anticorps de synthèse. L'avantage d'avoir deux types d'anticorps est que si le virus mute et change de structure, un des deux anticorps pourrait encore être efficace.

Le REGN-COV2 fut approuvé par l'EMA le 26 février 2021 pour les malades risquant de développer une forme sévère de la Covid-19. En Belgique, l'Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé (AFMPS) autorisa son utilisation le 19 mai 2021.

Les résultats d'une étude clinique de phase III publiée par Roche le 12 avril 2021 indique que "Le cocktail d'anticorps casirivimab et imdevimab ont réduit de 81% le risque d'infections symptomatiques par le Covid-19". De plus, il accélère la disparition des symptômes.

Le budget consacré à ce traitement s'élève à 400 millions d'euros, ce qui représente 2000 € par dose (cf. Bild, Le Quotidien.lu). Si cette solution est 100 à 200 fois plus chère qu'un vaccin contre le Covid-19, au moins elle est disponible tout de suite. Toutefois, pour beaucoup de décideurs, vu son coût élevé, cela reste une solution alternative mais certainement pas un premier choix.

Finalement, le ronapreve de Roche fut approuvé par l'EMA le 11 novembre 2021 (voir plus bas).

Le regdanvimab (regkirona)

Le regdanvimab (CT-P59) a été développé par l'entreprise sud-coréenne Celltrion. C'est un anticorps monoclonal qui se fixe au domaine RBD de la protéine S du SARS-CoV-2 (cf. Soo-Young Lee et al., 2021).

Le regdanvimab fut approuvé pour des besoins d'urgence par l'EMA le 26 mars 2021 et sa commercialisation fut approuvée par l'EMA le 11 novembre 2021.

Notons que c'est la première fois que l'EMA autorise la mise sur le marché européen de deux traitements par anticorps monoclonaux contre le SARS-CoV-2, le ronapreve de Roche et le regkirona de Celltrion.

Selon l'EMA, "Avec des hausses des contaminations au Covid-19 dans presque tous les États membres, il est rassurant de voir de nombreux traitements prometteurs en développement dans le cadre de notre stratégie thérapeutique contre le Covid-19. Aujourd’hui, nous faisons un pas important vers notre objectif d'autoriser jusqu’à cinq nouveaux traitements dans l’UE d’ici la fin de l’année".

Les deux traitements sont autorisés aux adultes et adolescents à partir de 12 ans (et pesant au moins 40 kg). Le médicament est donné par perfusion intraveineuse.

Les anticorps monoclonaux bispécifiques

Les expériences in vitro et in vivo, ainsi que des études cliniques ont montré le rôle clé des anticorps neutralisants pour lutter contre les virus dont le SARS-CoV-2. Cependant, l'apparition de variants préoccupants plus contagieux tels que Delta et Omicron hébergeant des mutations qui peuvent diminuer l'efficacité des vaccins et des anticorps monoclonaux thérapeutiques (mAb) soulignent l'importance de développer de nouveaux remèdes basés sur des anticorps capables de neutraliser ces variants fortement transmissibles en ciblant divers sites de la protéine S.

À ce jour, les mAbs génèrent des anticorps spécifiques ciblant une seule région de la protéine S du SARS-CoV-2. Une nouvelle approche combine de puissants anticorps monoclonaux avec des spécificités non chevauchantes pour générer des anticorps bispécifiques. Ils ciblent plusieurs régions de la protéine S comme les domaines RBD (domaine de liaison au récepteur), NTD (domaine N-terminal) et la sous-unité S2 et permettent de neutraliser les variants émergents du SARS-CoV-2 (cf. P.D. Crompton et al., 2021).

Les vaccins

Parmi les centaines de thérapies contre le Covid-19, en novembre 2021 on dénombrait 272 candidats vaccins dont une dizaine étaient déjà commercialisés. Les vaccins exploitent l'activité naturelle du système immunitaire. Ils l'aident à se défendre en recherchant les antigènes de l'intrus afin de détruire le pathogène, mais sans présenter sa nocivité. Ces vaccins tirent avantage de différentes stratégies et plate-formes ou méthodes : des antiviraux, la thérapie génique, des sous-unité protéiques, un vecteur viral réplicable ou non réplicable, un virus atténué ou inactivé, l'ARNm, etc.

Le sujet étant vaste, on reviendra en détails sur les vaccins.

Les autres traitements

Le 1 novembre 2021, on dénombrait 332 traitements contre le Covid-19 et leur nombre ne variait plus depuis plusieurs mois. Selon un article publié dans la revue "Nature" le 24 juillet 2020, les chercheurs américains ont identifié 100 molécules qui inhibent la réplication virale du Covid-19, dont 21 médicaments connus qui présentent des relations dose-réponse. Parmi ceux-ci, 13 contiennent des concentrations efficaces probablement proportionnelles aux doses thérapeutiques administrées aux patients Covid. La plupart des molécules identifiées dans cette étude étaient déjà en phase II/ III des essais cliniques, si bien qu'avant la fin de l'année 2020 on put évaluer leur efficacité contre le Covid-19.

En Chine, une équipe de chercheurs était parvenue à synthétiser deux inhibiteurs, 11a et 11b. Les deux molécules présentent une excellente activité inhibitrice de Mpro, une activité anti-infectieuse contre le virus et de bonnes propriétés pharmacocinétiques (l'évolution dans le temps de la substance chimique active). Le composé 11a présente également un très faible niveau de toxicité. Des tests précliniques étaient en cours (cf. W.Dai et al., 2020).

A consulter : Statut des essais cliniques sur le Covid-19, Clinical Trials

Résumé des 100 principaux essais cliniques sur le Covid-19, P.Reddy et al., 18 aug 2020

Résumé des stratégies thérapeutiques contre le Covid-19 (le schéma de droite est basé sur les données du SARS). Documents G.M. Nitulescu et al. (2020) adapté par l'auteur et A.Slutsky et al. (2020). Lire également P.Reddy et al. (2020).

De leur côté, aux Etats-Unis, la société Novartis a déjà développé un médicament, le Camostat capable d'inihiber la TMPRSS2, la protéase qui active le récepteur ACE2 et permet l'endocytose. Ce médicament est déjà prescrit contre certains cancers, des hépatites, des pancréatites, etc. Des tests cliniques sont en cours contre le Covid-19, y compris en Europe (cf. Yale University, M.Hoffman et al., 2020, Santé Publique.lu). Pour rappel, les protéases sont des enzymes, des protéines qui catalysent (accélèrent) la protéalyse (le mécanisme qui brise les protéines en polypeptides ou acides aminés plus petits) chez les coronavirus.

D'autres médicaments ciblent l'exonucléase (cf. T.Sheahan et al., 2020) ou favorisent la production de globules rouges comme l'EPO. On reviendra sur les vaccins.

La dexaméthasone

La dexaméthasone (dectancyl) est une hormone de synthèse de la famille des corticostéroïdes qui fait partie des médicaments anti-inflammatoires stéroïdiens. Elle présente l'avantage d'avoir un effet anti-inflammatoire 25 fois supérieur à celui du cortisol. Elle est également bon marché (entre 0.13 et 6$ par dose) et largement disponible.

L'un des nombreux conditionnements de la dexaméthasone (ou dectancyl). Document Bill Oxford/iStock.

Pendant la pandémie de Covid-19, dans le cadre de l'essai clinique "Recovery" la dexaméthasone fut évaluée par des chercheurs britanniques auprès de 6425 patients au Royaume-Uni dont 2104 avaient reçu le traitement (6 mg durant 10 jours).

Les résultats publiés le 17 juillet 2020 dans la revue "NEJM" (lire aussi T.Lammers et al., 2020) montre que la dexaméthasone administrée aux patients sous ventilation mécanique (intubés) réduisit les décès d'un tiers. Chez les patients Covid sous oxygène (mais sans intubation), cela réduisit les décès d'un cinquième. En revanche, chez les patients n'ayant pas besoin d'assistance respiratoire, il n'y a pas eu de changement dans la mortalité.

Dans leurs conclusions, les chercheurs confirment que l'utilisation de la dexaméthasone peut prévenir les décès liés à des effets graves de la Covid-19. Mais le médicament ne devrait pas être administré aux patients qui sont aux stades initiaux de la maladie et n'ont pas besoin d'assistance respiratoire.

L'OMS reprit ces conclusions et confirme que la dexaméthasone "pourrait sauver la vie de patients gravement malades de la Covid-19".

L'EMA approuva son utilisation le 18 septembre 2020 chez les adultes et les adolescents à partir de 12 ans infectés par le Covid-19 et placés sous respirateur.

La dexaméthasone fut validée au Royaume-Uni dès le 16 juin 2020 pour traiter les patients Covid-19 en état critique (cf. Gov.uk). L'ancien président Trump en reçut également (cf. Daily Mail). Ce médicament est également utilisé en Belgique (cf. RTBF) et en France notamment. Dans une interview à France Inter accordée le 17 juin 2020, Karine Lacombe, cheffe du service des maladies infectieuses de l'hôpital Saint-Antoine déclara : "On a donné très tôt les corticoïdes chez des patients qui avaient le Covid-19 parce que ça diminuait l'inflammation au niveau des poumons et on sait que c'est un traitement qui marche, on l'a utilisé à grande échelle".

L'hydroxychloroquine

L'hydroxychloroquine, un dérivé moins toxique que la chloroquine, fut également testé pour traiter les patients Covid. Bien que ce médicament est utilisé de longue date pour traiter des maladies auto-immunes inflammatoires, il s'est avéré inefficace voire dangereux pour les patients Covid.

On reviendra sur l'affaire de l'hydroxychloroquine et des test cliniques peu conventionnels et aux conclusions discutables du Dr Raoult dont la presse internationale se fit l'écho.

Simulations de l'effet des thérapies

Dans un article publié dans la revue "Science" le 23 octobre 2020, Joshia T. Schiffer du Centre de Recherche Fred Hutchinson sur le Cancer de Seatlle et ses collègues ont développé des modèles mathématiques pour projeter plusieurs approches thérapeutiques.

Les chercheurs ont modélisé la dynamique virale hors traitement et la réponse immunitaire en trois phases. Leurs modèles comprennent un traitement simulé avec du remdesivir, du sélinexor, des anticorps neutralisants ou une immunothérapie cellulaire. Leurs résultats "démontrent qu'une élimination virale rapide est possible si l'activité in vivo est suffisamment élevée. Les thérapies administrées peu de temps après le pic de charge virale lorsque les symptômes se développent, peuvent réduire la durée d'excrétion et l'intensité de la réponse immunitaire, mais ont peu d'effet sur la zone virale sous la courbe (AUC), qui est due à des charges virales précoces élevées. Un traitement puissant administré avant le pic viral au cours d'une infection pré-symptomatique pourrait réduire l'AUC. Une résistance aux médicaments peut apparaître avec un agent moyennement puissant dosé avant le pic viral. Nos résultats soutiennent le traitement précoce du Covid-19 si la durée de l'excrétion et non l'AUC est la plus prédictive de la gravité clinique".

Pour plus d'informations

A living WHO guideline on drugs for covid-19, BMJ, 2020

Les vaccins contre le Covid-19

Les avantages de la vaccination

Les campagnes de vaccination contre la Covid-19

L'élimination des bactéries et virus

L'affaire de l'hydroxychloroquine.

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